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L'accord de Cotonou et la lutte contre la pauvreté

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par Yaya MORA BROUTANI
Institut d'études politiques de Toulouse - Master géopolitique et relations internationales 2006
  

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Quelle place pour les Droits de l'Homme dans la coopération au développement ?

Les droits de l'homme sont-ils un moyen au service de l'État de Droit et de la démocratie ou en sont-ils une condition préalable ? Le lien étroit qui unit ce triangle conceptuel se traduit nécessairement par l'obligation de mettre en place simultanément ces trois éléments. Cependant, la sensibilité du sujet, du fait des réticences des États ACP, a conduit la Communauté européenne à nuancer sa position, afin de trouver un compromis. En effet, selon l'expression de Michel Rocard152(*), « la question des droits de l'homme est un des chapitres les plus difficiles à négocier car les Européens ne doivent pas être les ayatollah qui imposeraient par force leurs normes en la matière ».

Les Droits de l'Homme représentent un aspect fondamental de la coopération ACP-Ce et plus largement de la politique de développement menée par la Communauté à l'égard d'États tiers. En effet, introduite progressivement dans les différentes Convention de Lomé, à partir de la fin des années 90 avec Lomé IV, cette exigence prend toute sa signification dans la Convention de Cotonou : l'article 9 pose le principe général du « [...] respect de tous les droits de l'homme et des libertés fondamentales [...] ». Cependant, l'hétérogénéité des cultures conduit à s'interroger sur la nature même de cet ensemble de droits.

Le paragraphe 2 de ce même article rappelle l'attachement des partenaires aux textes internationaux ou régionaux de protection des droits de l'homme. Le Préambule considère « [...] la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du Conseil de l'Europe, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi que la Convention américaine des droits de l'homme comme des contributions régionales positives au respect des droits de l'homme dans l'Union européenne et les États ACP. »

Dès lors, les droits de l'homme, traditionnellement considérés comme universels, doivent, dans les États ACP, être inspirés de textes internationaux généraux ou spécifiques, une « personnalisation » au regard des spécificités culturelles, des traditions ou de tout autre paramètre ,n'étant admise que de façon très restrictive. Chacune des grandes catégories de droits, reconnues au plan international, doit être effectivement garantie : aux droits économiques, sociaux et culturels, doivent s'ajouter les droits dits civils, politiques et humanitaires. Les droits de l'homme sont caractérisés par leur globalité et, selon la conception de la Commission, sont à la fois « universels, indivisibles et interdépendants ».

Les États ACP, pour la majorité en difficulté économique et, pour certains, en proie à des crises politiques graves, doivent se doter d'un arsenal juridique permettrant de concilier à la fois développement et respect de droits fondamentaux au bénéfice des ressortissants. La démarche de vouloir mettre en place un « tronc commun » de droits, devoirs et libertés s'explique par le fait que les partenaires ont voulu centrer leur coopération autour de la « [...] personne humaine, qui en est l'acteur et le bénéficiaire principal [...] ».

Respecter les droits de l'homme implique la participation des bénéficiaires aux différents secteurs et niveaux de la vie quotidienne. Au même titre que le PNUD153(*), les partenaires ACP-UE considèrent la protection de ces droits comme un principe fondamental dont doivent se doter les États.

I- La « bonne gestion des affaires publiques », élément politique central de la Convention de Cotonou

La « bonne gestion des affaires publiques » est désormais un principe directeur du volet politique de la coopération. En effet, institué dans la perspective de renfoncer la cohérence institutionnelle des États ACP, ce concept impose une lutte contre la corruption efficace.

A- Le renforcement de la cohérence institutionnelle des États ACP

Avant de mettre en évidence l'implication étroite de ce principe dans l'instauration d'une démocratie et d'un État de Droit effectifs, il convient de définir la notion de « bonne gestion des affaires publiques ».

Ce concept, apparu dans la Convention de Lomé IV révisée est défini par la Convention de Cotonou comme « [...] la gestion transparente et responsable des ressources humaines, naturelles, économiques et financières en vue du développement équitable et durable ».

En effet, dans l'exercice effectif de ses différentes missions, l'État doit respecter certains principes.

La transparence et la responsabilité sont donc les deux notions clé de la bonne gestion des affaires publiques. Elles interviennent, à la fois au niveau du processus décisionnel étatique, de la mise en application ainsi que pour la gestion et le suivi des politiques et des mesures prises.

Dès lors, il s'agit, d'une part, de donner une cohérence aux impulsions étatiques et de garantir la légalité de l'action : le droit doit alors s'imposer à l'État et à l'Administration en rendant effectives les règles juridiques par une leur application réelle par les pouvoirs publics.

D'autre part, les citoyens doivent pouvoir accéder à l'information relative aux actions de l'État : il ressort une obligation de « rendre compte » d'une bonne et saine administration publique. Cet aspect est garanti à la fois par la transparence et par la participation des ressortissants à la prise de décisions.

La rationalisation institutionnelle qui s'opère dans le cadre de la réalisation de la démocratie ne peut être effective qu'avec une réelle transparence des actions publiques. Ainsi, le « travail » réalisé sur les structures étatiques et sur les principes qui guident leurs actions doit être obligatoirement accompagné d'une lutte contre la corruption, traduisant l'opacité des affaires publiques.

La bonne gestion des affaires publiques est un élément à part entière de la démocratie. Cependant, cet aspect a dû être mis en évidence et isolé car il constitue souvent un élément oublié du processus de démocratisation. En effet, la corruption est un des fléaux les plus récurrents de la société africaine ; malgré les efforts entrepris pour démocratiser l'État, certains ACP connaissent des échecs du fait d'une gestion des affaires publiques « truquée ». Dès lors, ce principe mis en évidence dans l'Accord de Cotonou vise non seulement à éradiquer la corruption par une transparence des opérations étatiques mais surtout s'inscrit dans un processus plus large qui consiste à procéder à une démocratisation efficace. Ce dernier objectif nécessite donc de trouver un remède à la corruption.

B- La « bonne gestion des affaires publiques » : moyen efficace de lutte contre la corruption et la pauvreté.

Principal élément perturbateur de la bonne gestion des affaires publiques, la corruption est un phénomène complexe et lourd de conséquences pour les États ACP. Il convient donc successivement d'aborder la définition et les enjeux que draine la corruption avant d'envisager les moyens permettant de mettre fin à ce phénomène.

La corruption : enjeux

Le terme de corruption, bien que régulièrement employé, est difficile à définir. La complexité de la notion s'accompagne nécessairement de nombreuses conséquences qui découlent de ce phénomène.

* 152 Extraite de « L'Union européenne et la conditionnalité de l'aide au développement », RTDE juillet - septembre 2001.

* 153 « Les droit de l'homme ne sont pas la cerise sur le gâteau du développement. Bien au contraire, leur respect est fondamental sur la voie de celui-ci. Sans libertés politiques, c'est à dire sans le droit de participer à la vie civile pour tous les hommes et toutes les femmes, comment jouir des libertés économique ? », Rapport du PNUD sur le développement humain 2000

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon