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L'offre éducative primaire au Burkina Faso. Approche économique et anthropologique

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par Julie Rérolle
Université Aix - Marseille 1 - Master 2 Langues Etrangères Appliquées "Intelligence économique, culture et organisation" 2007
  

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II.4) L'école bilingue comme remède

Etant donnés les faibles performances de l'école burkinabé, de ses manquements en termes d'efficacité et d'équité et de la pénurie de places dans le privé, « il importe donc d'ouvrir des solutions alternatives et de ne pas figer l'institution dans un immobilisme néfaste sous le fallacieux prétexte d'égalité des chances »115(*). En effet, « on se rend tragiquement compte que l'Etat ne peut pas faire face à une politique de scolarisation universelle rapide par l'intermédiaire de l'école publique (...). Il faut donc imaginer un autre moyen, adopter une autre stratégie. On ne peut en trouver que dans l'organisation d'un système structuré de solidarité déconcentrée au niveau du village ou du quartier... »

D'autre part, les faibles performances et l'inadaptation de l'offre éducative à la demande on stimulé une réflexion sur la place du français et « la mise en place d'une véritable éducation bilingue (...) semblerait être la seule voie de libération des populations et d'ouverture pour qu'elles puissent participer de façon consciente au développement et à une démocratie directe. »116(*) En effet, « tous les enfants africains ont le droit inaliénable d'aller à l'école et d'apprendre dans leurs langues maternelles. Tout effort devrait être fait pour développer des langues africaines à tous les niveaux d'éducation. (...) La démocratie est essentielle pour le développement égal des langues africaines et les langues africaines sont essentielles pour le développement de la démocratie basé sur l'égalité et la justice sociale. »117(*) Une nouvelle forme d'enseignement a donc été crée : l'école bilingue.

Une expérience novatrice

Ainsi, d'après le constat que l'utilisation d'une langue « étrangère » ne facilite pas l'apprentissage, un système d'école bilingue a été imaginé en 1994, par le ministère de l'Enseignement de base et de l'Alphabétisation (MEBAM) en partenariat avec des ONG et associations (notamment l'OSEO : OEuvre Suisse d'Entraide Ouvrière). C'est donc un système mixte, mi-public, mi-privé, qui enseigne en français et en langue nationale.

La particularité de l'enseignement bilingue est l'utilisation de la langue maternelle118(*) en début de cycle et l'introduction graduelle du français. Tandis que l'école burkinabé classique enseigne le français comme langue étrangère et l'utilise aussitôt comme langue d'enseignement, dans l'école bilingue, la langue de l'élève est utilisée, la première année, dans une proportion de 90%, contre 10 % pour le français et la proportion s'inverse en dernière année (Cf. tableau 30). Ainsi, par ce système de bilinguisme « additif », le français est introduit et progressivement, et constitue, en cinquième et dernière année (CM1), la langue presque dominante des activités pédagogiques (90% contre 10 % pour la langue nationale). Le français est enseigné à l'oral dès la première année puis à l'écrit à partir de la deuxième.

D'autre part, le cycle scolaire d'une école bilingue est de cinq ans - au lieu de six pour l'école classique - et concilie « le savoir, le savoir-faire et le savoir-être » de l'enfant. Il existe aussi un cycle de préscolaire : l'Espace d'Eveil et d'Education, qui offre une initiation en langue maternelle, des écoles primaires et des collèges multi-langues, axés sur une professionnalisation.

29) Part du français et de la langue maternelle à l'école bilingue, par année d'étude. (%)

 

1e année

2e année

3e année

4e année

5e année

Pourcentage de langue maternelle

90

80

50

20

10

Pourcentage de français

10

20

50

80

90

Les programmes sont les mêmes - avec des activités pratiques et manuelles en plus - que ceux des écoles classiques mais en un an de moins : un gain de temps et de ressources qui a été rendu possible grâce à l'utilisation de la langue maternelle, qui facilite l'apprentissage et qui se traduit aussi par un meilleur niveau général.

Le projet a commencé en 1994 avec deux classes moore-français et il était initialement réservé aux enfants ayant dépassé l'âge de scolarisation. Ce système est désormais ouvert à tous et compte aujourd'hui 110 écoles.

Des objectifs qualitatifs et des résultats satisfaisants

Les objectifs de l'école bilingue sont qualitatifs et tentent de répondre directement aux dysfonctionnements de l'école classique : 1) en améliorant l'efficacité interne (taux de redoublement, d'abandon et de succès) ; 2) l'efficacité externe en ancrant l'école dans son contexte culturel, socio-économique et pour le développement local ; 3) en diminuant le coût de l'éducation (par la réduction de la durée de scolarité d'un an).

L'école bilingue n'en est qu'à ses débuts mais ce système a déjà fait ses preuves : 94% de taux de succès au certificat d'étude primaire, pour la session 2004, en 5 ans de scolarité, pour une moyenne nationale de 73%, avec 6 ans d'études. En troisième année, les élèves obtiennent le niveau de français des quatrièmes années de l'école classique et leurs résultats dans les autres matières sont également supérieurs. Ainsi, le système de l'école bilingue permet une meilleure acquisition des fondamentaux et du français.

Nous étudierons précisément l'école bilingue dans le troisième chapitre, à travers la vision de la presse burkinabé. Mais tout d'abord, nous allons adopter une approche anthropologique, afin de compléter notre analyse.

* 115 Idem, page 99

* 116 Somé Maxime Z. (2003), Politique éducative et politique linguistique en Afrique. Enseignement du français et valorisation des langues nationales : le cas du Burkina Faso. L'Harmattan, Paris, p 146

* 117 Déclaration de la Conférence d'écrivains et d'intellectuels d'Afrique : Contre Toute Attente: Langues et littératures africaines dans le 21ème siècle, Asmara, Erythrée, janvier 2000, http://www.bisharat.net/Documents/declaration.htm

* 118 La langue maternelle est définie comme la langue première, celle qui est apprise en premier par l'enfant et pas forcément la langue de la génitrice

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