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L'offre éducative primaire au Burkina Faso. Approche économique et anthropologique

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par Julie Rérolle
Université Aix - Marseille 1 - Master 2 Langues Etrangères Appliquées "Intelligence économique, culture et organisation" 2007
  

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II.3) La question du financement

Comme nous l'avons vu, le gouvernement burkinabé investit une part importante de son budget dans l'éducation. Il est tiraillé entre deux objectifs opposés : offrir un enseignement de masse et de qualité (ce qui coûte cher) tout en réduisant ses coûts pour faire face à la pression budgétaire. Au Burkina Faso, la majorité du budget est absorbé par le salaire des enseignants, mais le coût de l'éducation varie selon le niveau d'enseignement.

II.3.1) Des coûts unitaires élevés dans les PVD

Les coûts unitaires absolus sont plus élevés dans les pays de l'OCDE que dans les PVD mais lorsqu'on calcule les coûts en pourcentage du PNB / habitant, le fardeau est plus lourd dans les pays en développement (surtout dans secondaire et le supérieur). Le coût par habitant de l'enseignement primaire est 50% supérieur en Afrique de l'Ouest, par rapport à la moyenne des pays les plus riches du monde (tableau 29). Cela incombe en partie à un fonctionnement inefficace du système dans son ensemble et à une mauvaise utilisation des ressources, problèmes que nous avons énoncés précédemment.

28) Cout par élève en proportion du PNB/habitant et taux de scolarisation par niveau et région

Région

Primaire

Secondaire

Supérieur

Cout unitaire / PNB par habitant

Taux de scolarisation

Cout unitaire / PNB par habitant

Taux de scolarisation

Cout unitaire / PNB par habitant

Taux de scolarisation

70-72

76-79

70-72

76-79

70-72

76-79

70-72

76-79

70-72

76-79

70-72

76-79

Afrique de l'ouest

24

25

43

43

142

102

6,6

9

1405

838

0,36

0,73

Moyenne PVD

15,3

14

68

75

65,5

41

18,4

25

533

370

2,5

3,3

Moyenne OCDE

16

22

98

100

21

24

80

80

55

49

14,6

21

Source : Zymelman (82a) p.49

Il est intéressant de remarquer, grâce au tableau 28, qu'en comparant le coût d'un l'étudiant de l'université avec celui de l'élève du primaire: le premier coûte 35 fois plus que le second dans les pays en développement pour la période 1970-72, et en Afrique de l'Ouest, le coût est 58 fois plus élevé (par rapport à 3 fois dans les pays de l'OCDE). Le fait qu'il y ait moins d'étudiants à l'université en Afrique de l'Ouest (taux de scolarisation de 0,73% entre 1976 et 1979) - et dans les PVD en général - que dans les pays de l'OCDE (21%) prouve que les économies d'échelle jouent fortement et explique les coûts très élevés par habitant. En termes de coût-efficacité, l'enseignement primaire semble être plus à favoriser que supérieur, qui coûte cher. On peut penser qu'il en est de même pour le primaire, et que si la SPU (scolarisation primaire universelle) était atteinte, les coûts unitaires se tasseraient pour le primaire. Mais d'autres problèmes de gestion des ressources sont aussi à prendre en compte.

D'autre part, si les dépenses en éducation de base coûtent si peu en comparaison avec les niveaux supérieurs, c'est que ce sont surtout les familles qui les assument. « On pourrait imaginer de transférer une partie du budget affecté à l'enseignement secondaire ou supérieur, au bénéfice de l'enseignement fondamental. »110(*)

Mais qui doit supporter les coûts de l'éducation ? L'Etat ? Les familles ? Est-ce qu'un système de financement mixte ne serait pas plus adapté ?

II.3.2) Vers une révision du financement

Les systèmes d'enseignement sont principalement financés par les pouvoirs publics par principe d'équité. Le financement est possible grâce à l'impôt, c'est donc une sorte de redistribution. D'autre part, les rendements sociaux de l'éducation sont importants : c'est un investissement qui profite à la société par l'augmentation de la production et la croissance économique. Cette externalité positive justifie pour certains l'intervention de l'État sinon dans l'économie du moins dans la prise en charge du système éducatif. Cependant, la théorie économique ne recommande un financement intégral qu'en cas de bien collectif pur (non-exclusifs). Or, dans le cas de l'éducation, la demande dépasse souvent l'offre, et donc l'Etat ne devrait pas intervenir.

Récemment, la crise financière dans les pays en développement a provoqué une réflexion générale sur le financement de l'éducation. De plus en plus d'efforts sont ainsi faits pour rechercher des méthodes alternatives de financement, c'est-à-dire la « redistribution du fardeau financier de l'investissement éducatif » et en particulier par la couverture du coût par les usagers, ou par l'aide extérieure (organisations internationales, ONG, etc.).

Contrairement à la croyance répandue que la gratuité de l'enseignement est une des bases de la justice sociale, des études de la Banque Mondiale ont montré que des droits d'inscription sélectifs, une diminution des bourses et autres aides pour étudiants, ainsi que la création d'un marché du crédit spécialisé, ont un effet favorable à la fois sur l'efficacité et sur l'équité. En effet, suivant le système d'impôt, le financement public de l'éducation peut être inéquitable car un transfert s'opère des revenus des familles pauvres aux familles riches - dont les enfants restent plus longtemps dans le système. Le financement de l'éducation est ainsi de plus en plus partagé entre les gouvernements, les ONG et associations nationales ou internationales et même les élèves et leurs familles.

II.3.2.1) Participation des usagers 

Le financement privé de l'éducation (c'est-à-dire la contribution des usagers) peut se faire directement, par des droits de scolarité, ou bien par une contribution indirecte comme la participation au paiement des frais annexes (cantines, fournitures, manuels, etc.) ou encore en proposant des prêts qui permettent d'assurer un remboursement.

Débats sur les frais d'inscription

Au Burkina Faso, la scolarité est gratuite dans la majorité des établissements. Les élèves et leurs familles supportent le coût indirect du manque à gagner, et souvent les fournitures. Seules certaines écoles privées font payer des frais d'inscription. Mais la gratuité du système public entraine une augmentation de la demande de places et un rationnement s'opère (des sélections à l'entrée) qui favorise encore les plus riches. Dans certains pays en développement, le système public est payant, ce qui, selon certains, « peut améliorer à la fois l'efficacité et l'équité. »111(*) En effet, « certains pensent que les frais d'inscription sont cruciaux pour assurer la comptabilité des écoles et ne représentent que de minces barrières pour la scolarisation ; d'autres rétorquent que réduire les droits de scolarité pourrait considérablement augmenter le nombre d'inscrits.112(*) » D'un point de vue de l'efficacité, l'imposition de droits permettrait d'utiliser les ressources supplémentaires pour accroitre le nombre de places, acheter du matériel et/ou des manuels, d'améliorer la qualité de l'enseignement ; et concernant l'équité, les droits d'inscription se justifient par le fait que les enfants de familles défavorisées souffrent plus de la détérioration de la qualité.

Bourses vs prêts

« En Afrique francophone, les bourses absorbent 40% du budget de l'enseignement supérieur. (...) Au Burkina Faso, le coût de l'enseignement primaire pour les familles (droits plus manque à gagner) est de 200 000 F.CFA par an alors que les étudiants reçoivent une subvention nette égale à 372 000 F. CFA.113(*)» Petit à petit l'Etat burkinabé est en train de rajouter des critères de sélection aux bourses (revenus des parents, âge et sexe de l'enfant et ses résultats scolaires) pour les réduire et les éliminer.

Ainsi, certains économistes suggèrent de passer d'un système de bourses à des prêts afin de prévoir un retour de l'argent investit. Au cours des vingt dernières années, ce système a été développé dans de nombreux pays par l'intermédiaire d'organismes publics, ou bien de banques privées, avec des taux d'intérêt subventionnés. C'est un système très équitable dans le sens où il s'agit d'un transfert de revenu du contribuable moyen vers ceux qui auront, dans le futur des revenus élevés. C'est donc une solution équitable et efficace. Cependant, les tests empiriques ont montré que cette pratique doit être accompagnée d'une augmentation des droits de scolarité pour avoir un impact plus grand et pour réellement déplacer le fardeau financier. Mais « la question cruciale des bourses scolaires est à traiter au même titre que les questions des privilèges sociaux acquis. Leur suppression, leur diminution ou leur réduction ne peut qu'entrainer des conflits sociaux sont on ne peut pas présumer de la gravité. »114(*)

II.3.2.2) Financement par les entreprises ou les collectivités

Pour l'employeur, la distinction entre éducation générale et formation spécifique de l'individu est très importante car cette dernière augmente la productivité de l'individu seulement dans son travail. L'employeur récupère donc le fruit de l'investissement de la formation. Il parait donc normal qu'il contribue au financement de l'investissement éducatif ou qu'il se charge lui-même en partie de la formation. Un système de prélèvement pour les formations et de taxes sur les salaires peut donc être envisagé auprès des entrepreneurs, et aussi des diplômés.

En cas d'échec des systèmes scolaires centralisés, certains experts préconisent la participation des communautés et la décentralisation. En effet, la gestion des établissements pourrait être faite par les communes, qui connaissent mieux les besoins des enfants et du contexte local, ce qui serait certainement une économie de temps et d'argent pour les ministères. Le financement de l'éducation peut aussi être partagé avec les collectivités qui peuvent fournir un appui financier ou des prestations en nature : par des ventes ou la participation des habitants à la construction d'une école par exemple.

Ainsi, les modes de financement pratiqués demandent à être réétudiés et la répartition financement public/financement privé modifiée. Le fardeau financier de l'éducation peut être déplacé vers les étudiants et leurs familles (frais de scolarité, participation financière aux services comme la cantine, système de prêts), vers les employeurs (taxes sur les salaires, impôts, plus de formation par l'employeur) ou vers les collectivités (participation à la création d'école) de sorte que la pression budgétaire qui pèse sur les gouvernements des pays en développement s'allège et que l'école soit enfin de qualité. Il faut aussi penser à améliorer l'efficacité de l'éducation pour réduire les coûts et à développer l'enseignement privé.

* 110 Antonioli Albert, (1993) Le droit d'apprendre. Une école pour tous en Afrique. L'Harmattan, Paris, page 96

* 111 Psacharopoulos, G. et Woodhall, M., (1988) L'éducation pour le développement. Une analyse des choix d'investissements. Economica, Paris, page 160

* 112 Glewwe Paul (2006) « Schools, teachers, and education outcomes in developping countries », Handbooks in Economics 26 - Handbook of the Economics of Education - Volume 2, page 959

* 113 Psacharopoulos, G. et Woodhall, M., (1988) L'éducation pour le développement. Une analyse des choix d'investissements. Economica, Paris, page 163

* 114 Antonioli Albert, (1993) Le droit d'apprendre. Une école pour tous en Afrique. L'Harmattan, Paris, page 98

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius