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La puissance quasi-illimitée du parlement et la fragilité de la suprématie de la constitution de 1987

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par Destin JEAN
Université d'Etat d'Haà¯ti (Faculté de droit et des sciences économiques de Port-au-Prince).  - Licence 2009
  

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B. L'ABSENCE DE CONTREPOIDS CONSTITUTIONNELS EFFICACES

Dans le régime constitutionnel de 1987, le système institutionnel retenu se caractérise par la prééminence du Parlement. A la vérité, il arrive que les Constitutions accordent une certaine prépondérance à l'un ou l'autre des organes qu'elles instituent. Néanmoins, dans les régimes démocratiques dits de Séparation des Pouvoirs, les compétences accordées aux

Pouvoirs institués sont limitées voire même contrebalancées. Or, dans la Constitution de 1987, le Parlement détient des pouvoirs très étendus, voire illimités, qu'il exerce, pourtant, sans un contrôle efficace.

En fait, il n'y-a pas de drame à accorder des pouvoirs considérables au Parlement au détriment du Pouvoir Exécutif, comme moyen de contourner les éventuelles tentatives de dérive dictatoriale. C'est qu'il est plus facile à un seul homme, doté d'un pouvoir politique fort, d'instituer le despotisme annihilant ainsi les libertés fondamentales. Cependant, à trop vouloir coincer le Pouvoir Exécutif, particulièrement le Président de la République, les constituants de 1987 donnent l'impression d'avoir oublié, entre autres, les méfaits du phénomène de l'obstruction parlementaire, de celui de la paralysie parlementaire ou de celui de la dictature parlementaire.

Le problème réel résulte du fait qu'en dépit de l'immensité des pouvoirs accordés au Parlement, les bornes de ces derniers ne sont pas bien connues. De plus, ils ne sont ni efficacement contrôlés ni contrebalancés comme le veut la théorie de la Séparation des Pouvoirs qui postule l'équilibre des Pouvoirs134, alors que le principe de la Séparation des Pouvoirs est consacré solennellement par la Constitution. Comment alors contrebalancer l'influence du Parlement en cas de dérive ? Peut-on se contenter d'une « vertu » présumée des élus du Peuple ou doit-on se confier uniquement à la morale politique ? Dans ces conditions, l'institutionnalisation du pouvoir politique en Haïti ne perd-t-elle pas de son sens ?

En effet, les pouvoirs les plus importants et redoutables du Parlement n'ont pas de contrepartie et ne sont pas rationalisés. Nous pensons tout de suite au droit de censure des Assemblées parlementaires, aux prérogatives de législation illimitées du Parlement, à son pouvoir d'enquête, à la procédure de mise en accusation du Président de la République ou de tout autre membre du Pouvoir Exécutif, au pouvoir de contrôle sur nombre de nominations faites par le Président de la République, etc.

Pour l'essentiel, au droit de censure ne correspond pas le droit de dissolution dans le système institutionnel retenu. De plus, en matière de législation, le Parlement est incontournable. Pourtant, le Pouvoir Exécutif, quoique ne disposant pas de la compétence pour adopter des règlements autonomes, ne contrôle pas la procédure législative.

134 Selon le professeur émérite Pierre PACTET, il devait résulter de la théorie de la séparation des pouvoirs un équilibre institutionnel qui constituait le fond même de la théorie et sa raison d'être. Voir, PACTET 2000, op. cit., page 114.

Par esprit de synthèse, nous avançons qu'au regard de la Constitution de 1987, le Parlement peut être considéré comme l'organe central du pouvoir politique dans le système constitutionnel haïtien, sinon l'épicentre du régime. Cependant, en dépit de cette place dominante qu'il occupe dans l'organisation institutionnelle du nouveau régime, il souffre d'un déficit à peine voilé d'encadrement juridique.

SECTION II.- LA NATURE ET LA « PRATIQUE » DU RÉGIME : CONTROVERSES ET DICHOTOMIE

A la lumière des typologies classiques des différents régimes contemporains, nous faisons des considérations d'ordre théorique sur la nature du régime politique institué par la Constitution de 1987 pour essayer de le situer dans les courants théoriques connus. De plus, dans le cadre de la « pratique » du régime, nous abordons le problème de la discontinuité institutionnelle qui, fondamentalement, est la conséquence de l'instabilité politique et de la faiblesse des institutions de l'Etat. D'ailleurs, cette absence de continuité institutionnelle empêche de dire gros sur la « pratique » du régime en termes de ses apports au cadre constitutionnel proprement dit. Toutefois, nous avons jugé intéressant d'en parler quand même, dans la mesure où l'on pourrait se demander si cette discontinuité institutionnelle ne serait pas aussi une conséquence d'une éventuelle inadaptabilité ou d'une éventuelle inapplicabilité du régime.

Pour ce qui concerne la nature du régime, il demeure entendu que l'on doit se garder de se fermer dans des carcans théoriques schématisant un idéal type modélisé à partir de la forme de gouvernement pratiquée en Grande-Bretagne et un idéal type modélisé à partir du système constitutionnel américain, puisqu'en effet chaque régime politique paraît unique135. Toutefois, pour bien poser les logiques institutionnelles du régime constitutionnel de 1987, nous avons jugé opportun de faire des considérations académiques pour pouvoir asseoir notre réflexion sur des bases théoriques et ainsi la structurer.

Dans cette perspective, nous tâcherons de faire des considérations d'ordre théorique sur la nature du régime (§ 1) et nous effleurerons la « pratique » du régime à travers le problème de la discontinuité institutionnelle (§ 2).

135 Voir HAMON, TROPER 2003, op. cit., pages 112 à 116, puis ARDANT 2002, page 593.

§ 1.- LA NATURE DU RÉGIME : AMBIGUÏTÉS ET CONTROVERSES

Parmi les techniques d'organisation des pouvoirs, on distingue sommairement les régimes de concentration des pouvoirs d'inspiration totalitariste et les régimes de séparation des pouvoirs d'inspiration démocratique. La Constitution de 1987, pour sa part, consacre solennellement le principe de la Séparation des Pouvoirs en son article 59. Donc, cette disposition constitutionnelle, prise au pied de la lettre, nous porte à considérer que les constituants de 1987 ont opté pour un régime démocratique dit de Séparation des Pouvoirs.

En effet, dans les régimes démocratiques, on distingue classiquement et à titre principal le régime parlementaire avec ses diverses modalités ou variantes et le régime présidentiel. En ce qui a trait au régime constitutionnel de 1987, force est de constater qu'il s'apparente à un cocktail ayant cumulé des emprunts au régime présidentiel et au régime parlementaire. Donc, le nouveau régime de 1987, n'échappe-t-il pas à la typologie classique des différents régimes démocratiques ?

Il va sans dire que le régime de 1987 tire une certaine originalité du fait de son caractère hybride. Pour faire ressortir cette originalité, nous allons présenter ses principales particularités (A). De plus, des controverses relevées dans la doctrine et dans la documentation relative à cet objet d'étude auront permis de faire la preuve de cette originalité (B).

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