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L'accès de la société civile à  la justice internationale économique

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par Farouk El-Hosseny
Université de Montréal - LLM 2010
  

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2) La soft law des acteurs non étatiques

Les acteurs non étatiques, soit la société civile et les multinationales, créent et font un usage systématique des normes de soft law. Tous deux soutiennent des initiatives et des instruments internationaux non contraignants - donc de soft law - qui sont consacrés à des préoccupations non marchandes telles que la RSE. Il existe par contre un contexte particulier qu'il faudrait traiter avant d'aborder le recours des acteurs non étatiques à la soft law.

220 S. PICCIOTTO, op. cit., note 43, p. 184.

221 Il s'agit ici d'obligations imposées aux multinationales à travers des « Long arm legislation >>, qui couvre des questions telles que la corruption d'agents publics, très peu d'États ont ce type de législation, Voir Nguyen QUOC DINH, «Droit international public>>, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 690.

Le rapprochement des acteurs non étatiques du statut de sujet de droit international, traité plus haut, évoque un changement dans la philosophie règlementaire. Une conséquence évidente qui implique que l'on ne pourrait plus s'attendre à un droit international du type <<command & control>>. L'autoréglementation est de plus en plus considérée comme étant plus productive, efficace et efficiente222. Cette réalité serait de plus renforcée par des changements au niveau national, notamment à travers les vagues de privatisation et un rejet de plus en plus évident de l'État providence223. Les membres de l'OCDE, dont la Communauté européenne et le Canada ont effectivement adopté des approches visant à l'optimisation de l'efficacité règlementaire. Il s'agit du rejet du modèle linéaire ou pyramidal de prise de décisions afin de le remplacer par un modèle circulaire. Un tel modèle serait basé, entre autres, sur une interaction et une participation pluridimensionnelle des diverses parties prenantes224. Cela implique l'établissement de procédures de consultations, de délibérations et de coopération avec les entreprises et les membres de la société civile concernés225. Ces approches sont applicables tant au niveau national qu'au niveau international226. Elles relèvent des caractéristiques de l'État post-moderne227 qui seraient transposées à l'échelle internationale afin de construire un espace public mondial où de nouvelles formes de démocratie seraient

222 Id., note 34, p.37; S. TULLY, op. cit., note 47, p. 182.

223 P. SANDS, op. cit., note 35, p. 250.

224 M. DELMAS-MARTY, op. cit., note 7, p. 72.

225 S. TULLY, op. cit., note 47, p. 12-15.

226 Id., note 47, p. 15.

227 Selon Jacques Chevallier, l'État post-moderne est : << (...) un État dont les traits restent précisément, et en tant que tel, marqués par l'incertitude, la complexité, l'in-détermination : et ces éléments doivent être considérés comme des éléments structurels, constitutifs de l'État contemporain (...) il vise à mettre en évidence, par de-là l'extrême diversité des configurations étatiques, certaines tendances lourdes d'évolution, qui travaillent peu ou prou tous les États >>. Ainsi, les États post-modernes sont des États dans lesquels la souveraineté tend à faire place à une logique nouvelle d'interdépendance et de coopération, effaçant la séparation entre affaires intérieures et étrangères, et reposant sur le rejet de la force et privilégiant le droit, la négociation et la coopération internationale. Voir Jacques CHEVALLIER, << L'État post-moderne >>, Paris, L.G.D.J., 2008, p.17- 18.

entérinées. Une démocratie qui serait représentative, participative et délibérative228. Elle permettrait la participation et l'apport des diverses parties prenantes. Une approche volontariste d'autoréglementation découlerait de cette philosophie règlementaire. Selon cette approche, le rôle et le poids des acteurs non étatiques, perçus en tant que potentiels substituts à l'État, prendraient une ampleur exponentielle229.

De plus en plus de multinationales règlementent ainsi elles-mêmes leurs activités en s'imposant des standards internationaux ou auto-règlementaires qui excèdent parfois la portée de la règlementation locale. À cette fin, les instruments de soft law sont privilégiés à la place de la hard law, soit les lois et les traités230. La pression des lobbies et des groupes corporatifs dans les pays développés a un grand rôle derrière le fait que ces pays préfèrent des initiatives internationales et surtout non contraignantes, telles que le Pacte mondial, plutôt que des traités. Ces initiatives facilitent, plutôt qu'obligent, l'adoption de meilleurs standards dans la conduite des opérations à l'étranger231.

Un exemple de ces instruments de soft law serait les « Normes sur la responsabilité en matière de droits de l'homme des sociétés transnationales et autres entreprises » (ci-après les « Normes »). Elles ont été adoptées en 2003, à la suite de la création en 1998 d'un groupe de travail spécial par la Sous-commission des droits de l'homme de l'ONU. L'objectif du groupe était d'entamer un projet traitant des responsabilités des multinationales dans le cadre du respect des droits fondamentaux.

228 Id., note 7, p. 168.

229 S. CHARNOVITZ, op. cit., note 30, p. 491; P. SANDS, op. cit., note 35, p. 542.

230 J. ZERK, op. cit., note 34, p.70; P. ROSIAK, op. cit., note 34, p. 171.

231 Id., note 34, p.303.

Leur autorité juridique découle des principes et des règles du droit international (traités et coutume) traditionnellement adressés aux États. Les Normes dirigent ainsi ces principes dans un contexte corporatif232. Ce qui est intéressant est qu'outre les droits essentiels tels que le droit à la vie ou à la sécurité, les Normes couvrent également des questions de droit telles que la santé et la sécurité en milieu de travail ainsi que la protection de l'environnement233. Les Normes ignorent ainsi toute dichotomie parfois établie par la doctrine entre droits fondamentaux (dits de << première génération ») et droits socio-économiques et environnementaux (dits de << seconde génération »).

L'ONU offre également des commentaires visant à éclaircir et approfondir les Normes. Ces commentaires ont été rédigés grâce à la contribution de la société civile dans le cadre d'un groupe de travail organisé en 2003234. Les Normes de l'ONU ont également une particularité édifiante. Selon le préambule, les Normes contribuent à la création et au développement du droit international. En adhérant aux principes de cette initiative auto-règlementaire, les acteurs non étatiques participent ultimement à un processus de création de droit international, lui-même concrétisé à travers l'ébauche des Normes235. Celles-ci reconnaissent également que les obligations reliées aux droits de l'homme des entreprises seront respectées avec une plus ample efficacité si elles sont entérinées dans la politique et la pratique de l'entreprise236. C'est ce que prévoit également l'Agenda 21 qui promeut l'autoréglementation

232 M. KRUGER et D. WEISSBRODT, op. cit., note 56, p. 211.

233 Id., note 56, p. 210; Id., note 34, p.261.

234 Commentaires sur les Normes sur la responsabilité en matière de droits de l'homme des sociétés transnationales et autres entreprises, U.N. Doc. E/CN.4/Sub.2/2003/38/Rev.2 (2003), en ligne : http://www1.umn.edu/humanrts/links/commentaryAug2003.html; M. KRUGER et D. WEISSBRODT, op. cit., note 56, p. 204.

235 Pour de plus amples détails, Voir S. TULLY, op. cit., note 47, p. 131 - Chapitre 3 : «Corporate Contributions to Customary International Law and « Soft » International Law».

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