UNIVERSITE CATHOLIQUE DE BUKAVU
U.C.B.
B.P. 285/BUKAVU
FACULTE DE DROIT
LE CONSEIL DE SECURITE DES NATIONS UNIES ET LA COUR
PENALE INTERNATIONALE :
Dépendance ou
Indépendance ?
Par Charles KAKULE KINOMBE
Mémoire présenté en vue de l'obtention du
diplôme de licence en Droit.
Option : Droit Public
Directeur : Prof. Moïse CIFENDE
Rapporteur : C.T. Adolphe
KILOMBA
ANNEE ACADEMIQUE: 2011-2012
A tous ceux qui oeuvrent pour
la protection des droits de l'homme ;
A tous ceux qui sont épris du monde secret et
sacré du savoir ;
A tous les miens.
Je dédie ce travail.
Charles Kinombe.
REMERCIEMENTS
Au seuil de ce travail, fruit de dur labeur, il est pour
nous une nécessité de nous acquitter d'un devoir
impérieux, mais aussi agréable, celui d'exprimer notre gratitude
à tous ceux qui ont apporté leur contribution à sa
réalisation.
De prime abord, qu'il nous soit permis d'exprimer notre
reconnaissance au Professeur Moïse CIFENDE, Directeur de ce
mémoire, homme de science et d'esprit dont les précieux
enseignements ont nourri notre réflexion et qui n'a eu de cesse de nous
prodiguer des conseils et encouragements constants tout au long de cette
recherche. C'est avant tout, grâce à son impulsion que celle-ci a
été initiée et menée à son terme.
C'est également avec un plaisir tout particulier
que nous tenons à remercier sincèrement le C.T. Adolphe KILOMBA
pour son apport inestimable à l'élaboration de ce travail.
Nos sincères remerciements s'adressent à
tout le personnel de la faculté de Droit de l'UCB.
Nous exprimons aussi notre gratitude, à nos
parents et amis pour leurs participations tant morales que matérielles
à la réalisation de ce travail.
D'une manière particulière, nous remercions
les Révérends Pères Jean Claude KINOMBE, Elie,
Thaddée CIRIMWAMI. Nos remerciements s'adressent également
à Monsieur François Xavier BISIMWA, Madame FURAHA, Monsieur
Bertin CINYABUGUMA, Monsieur Bienvenu MULINDWA, Monsieur Jean Paul
MUSHAGALUSA.
Enfin, à tous ceux qui, de loin ou de près
ont contribué tant moralement que matériellement à
l'accomplissement de ce travail, nous leur exprimons ici notre sincère
reconnaissance.
EPIGRAPHE
« Une paix réelle repose et se
construit par une justice effective et affranchie de toute tutelle
politique ».
Patrick BAUDOUIN
« Il ne peut y avoir de paix sans justice, ni
de justice sans loi, ni de loi digne de ce nom sans un Tribunal chargé
de décider ce qui est juste et légal dans des circonstances
données ».
Benjamin FERENCZ, ancien Procureur du
Tribunal de Nuremberg.
SIGLES ET ABREVIATIONS
Art. : Article
C/ : Contre
CIJ : Cour Internationale de Justice
CPI : Cour Pénale Internationale
CDI : Commission de Droit international
DIH : Droit International Humanitaire
Ed. : Edition
EUA : Etats Unis d'Amérique
Fac. : Faculté
LGDJ : Librairie Générale de
Droit et de Jurisprudence
NU : Nations Unies
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
Op.cit. : Opus citatum
P. : Page
PP. : Pages
PUF : Presses Universitaires de France
RDC : République Démocratique du
Congo
RGDIP : Revue Générale de Droit International
Public
TPIR : Tribunal Pénal International pour le Rwanda
TPIY : Tribunal Pénal International pour
l'Ex-Yougoslavie
UA : Union Africaine
UCB : Université Catholique de Bukavu
INTRODUCTION GENERALE
I. PROBLEMATIQUE
« Réprimer les violations graves des
droits de l'homme et du droit international humanitaire et empêcher
qu'elles ne se reproduisent, traduire en justice les responsables, afin de
contribuer ainsi à la restauration de la paix internationale, sont des
questions qui occupent une grande partie de l'actualité diplomatique et
juridique » (1(*)).
Ainsi pour répondre à ces questions, il fut
organisé du 15 Juin au 17 Juillet 1998, la conférence
diplomatique de plénipotentiaires des Nations Unies sur la
création de la CPI (2(*)).
Dès le lendemain de l'adoption de la convention de Rome
(3(*)), les remarques ont
fusé de toutes parts au sujet du rôle du Conseil de
Sécurité dans la procédure devant la CPI. Elles ne sont
pas sans rappeler, dans une certaine mesure, les critiques (4(*)) dirigées contre les
tribunaux ad hoc d'Arusha (5(*)) et de la Haye (6(*)) établis par le Conseil de
Sécurité (7(*)).
Philippe WECKEL n'y va pas de main morte. Il discerne au
Traité de Rome la volonté de ses auteurs de
« surveiller » l'activité de la Cour (8(*)).
Luigi CONDORELLI se fait l'écho d'une boutade selon
laquelle « en substance, le Statut de Rome ne fait que mettre
à la disposition du Conseil de Sécurité un tribunal
international ad hoc permanent (9(*)).
Observant les limitations prescrites par la Convention de Rome
à l'action du Conseil de Sécurité, Serge SUR estime qu'il
« est même loisible au Conseil de Sécurité s'il
le juge opportun, de créer un tribunal spécial qui
préempterait la compétence de la Cour (10(*))
La création de la CPI par le Conseil de
Sécurité, si elle a été envisagée au cours
des travaux préparatoires, a rapidement été rejetée
au profit de l'élaboration d'un traité multilatéral
(11(*)). Cela nous
amène donc à considérer le rôle du Conseil de
Sécurité dans la procédure devant une institution
n'émanant pas de lui.
Le Conseil de Sécurité et la CPI se situent dans
une logique différente : comme indiqué dans le
préambule du Statut de Rome, le but poursuivi par la CPI est la
promotion de la justice internationale, tandis que le Conseil de
Sécurité a lui la responsabilité principale en
matière de maintien de la paix et de la sécurité
internationales (12(*)).
Ces deux objectifs peuvent certes se rejoindre, et par
là se servir mutuellement, mais peuvent également être
contradictoires.
En poursuivant les auteurs de crimes internationaux, la CPI
concourt au rétablissement de la paix comme le disait déjà
Patrick BAUDOIN : « une paix réelle repose et se
construit par une justice effective (....) (13(*)). Benjamin FERENCZ, renchérit en
disant : « il ne peut y avoir de paix sans justice
(.....) »(14(*))
Le lien entre le Conseil de Sécurité et la CPI
découle de la compétence ratione materiae de celle-ci.
Les crimes dont elle connait, en l'occurrence le crime de génocide, le
crime contre l'humanité, les crimes de guerre et le crime d'agression
sont (15(*)) sont
très vraisemblablement commis dans le cadre de situations que traite le
Conseil de Sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies.
En tenant compte des dispositions de la Charte des Nations
Unies particulièrement en son Chapitre VII et celles du Statut de Rome,
les objectifs poursuivis par le Conseil de Sécurité et ceux de la
CPI suscitent un débat houleux. Si le Statut de Rome vise à
rétablir la paix et la sécurité à travers la
justice internationale, le Conseil de Sécurité peut
également concourir à cette paix en paralysant l'action de la
précédente.
Lors de la conférence diplomatique des Nations Unies
sur la création de la CPI, le débat sur les rôles de ces
deux organes a non seulement été à l'ordre du jour mais
aussi a polarisé les controverses. C'est dans ce sens qu'il sera
également question dans ce travail, du rôle controversé du
Conseil de Sécurité dans le fonctionnement de la CPI.
La place réservée au Conseil de
Sécurité dans la compétence de la CPI représente
l'une des questions les plus délicates. Cela à l'exception de la
possibilité pour cet organe de soumettre à la Cour les
crimes en liaison avec une situation relevant du Chapitre VII dont il a la
charge (16(*)). Cependant,
la suspension de l'activité de la Cour (17(*)) et la subordination de la compétence de
celle-ci à l'égard du crime d'agression au constat
préalable de l'acte d'agression par le Conseil de sécurité
(18(*)) font l'objet de
profondes divergences. D'où la nécessité de
réfléchir, dans le cadre de ce travail, sur l'indépendance
de la CPI au regard des prérogatives énormes confiées au
Conseil de Sécurité des Nations Unies.
A s'en tenir à une interprétation stricte de la
Charte des Nations Unies, il ne ressort d'aucune de ses dispositions que les
Nations Unies ont doté le Conseil de Sécurité de pouvoir
judiciaire en vue de la recherche, la poursuite et le jugement des auteurs des
crimes relevant de la compétence du juge pénal
international19(*). La
question qui saute aux yeux est celle de savoir ce que vient faire le Conseil
de Sécurité des Nations Unies dans l'administration de la justice
pénale internationale ? La question posée semble pertinente,
car l'intervention d'un organe éminemment politique dans la
sphère judiciaire remet en cause les missions de chacun des organes
(20(*)).
Le Statut de Rome, même si déterminé de
« créer une Cour pénale permanente et
indépendante » (21(*)) a, en même temps donné au Conseil de
sécurité une place fondamentale dans les mécanismes de
fonctionnement de celle-ci. (22(*)).
Eu égard au développement qui
précède, les questions suivantes méritent d'être
posées :
- Quel est le rôle du Conseil de Sécurité
des Nations Unies dans le fonctionnement de la CPI ?
- Quel est le degré d'indépendance de la Cour vu
le rôle important du Conseil de Sécurité dans son
fonctionnement ?
- Quelle serait l'opportunité d'une éventuelle
révision du Statut de Rome dans ce sens ?
Voila autant des questions auxquelles nous tenterons
d'apporter des réponses tout au long de ce travail.
II. HYPOTHESES
Au regard des questions posées ci-dessus, nous
formulons les hypothèses suivantes :
- L'intervention du Conseil de Sécurité dans le
fonctionnement de la CPI permettrait d'imposer la compétence de celle-ci
aux Etats non parties au Statut de Rome et surtout d'obtenir la
coopération des Etats sur base de la Charte des Nations Unies
particulièrement en ses articles 25 et 103.
- Cependant cette intervention ne rassure pas pleinement sur
l'indépendance de cette dernière dès lors que l'article 15
bis, 6 du Statut de Rome subordonne la compétence de la CPI au constat
préalable de l'acte d'agression par le Conseil de Sécurité
et l'article 16 permet à ce dernier de geler l'activité de la
Cour pendant un an renouvelable.
- Il ne serait pas réaliste de dissocier le Conseil de
Sécurité de la CPI car les Etats parties à l'O.N.U.
seraient dans l'obligation de privilégier leurs obligations au regard de
la Charte des Nations Unies par rapport à celles découlant du
Statut de Rome en cas de conflit (23(*)). Dissocier ces deux organes serait à la base
de l'impunité des crimes survenus sur le territoire d'un Etat non partie
au Statut de Rome ou commis par les ressortissants d'un tel Etat. Bien plus,
les crimes relavant de la compétence de la CPI sont commis dans le cadre
de situations dont traite le Conseil de sécurité au titre du
chapitre VII de la Charte précitée.
Le choix de ce sujet fut motivé par
l'intérêt que voici :
III. CHOIX ET INTERET DU
SUJET
Le choix porté sur « le Conseil de
Sécurité des Nations Unies et la Cour Pénale
Internationale : Dépendance ou
Indépendance ? » n'est pas le fruit du hasard. Il est
justifié par l'importance que l'actualité internationale accorde
à la problématique de la relation entre la paix et la justice
internationales.
Ce sujet revêt un intérêt indéniable
sur le plan scientifique, social et pédagogique.
Sur le plan scientifique, l'intérêt ici suppose
l'apport de cette étude dans le monde de la science, en ce qui concerne
la problématique de l'indépendance de la CPI. Elle pourra
contribuer tant soit peu à l'enrichissement de la science juridique
s'agissant des pouvoirs reconnus au Conseil de sécurité dans le
Statut de Rome et leur impact sur l'indépendance de la CPI.
Sur le plan social, le but poursuivi par cette recherche est
de porter à la connaissance de la société tant nationale
qu'internationale l'importance pour chaque Etat de coopérer avec la CPI
afin de lutter contre l'impunité des auteurs de crimes internationaux.
Ce sujet poursuit en outre, l'objectif de proposer certaines suggestions aux
Etats pour qu'ils puissent en tenir compte lors de la prochaine session de
l'Assemblée des Etats Parties afin de résoudre la délicate
question de la relation entre la paix et la justice internationales.
Sur le plan pédagogique, il complète et
approfondit des notions apprises tout au long de notre formation
académique. Ces notions font référence au Droit
international pénal, Droit pénal international, Droit
international public, Droit des organisations internationales et droit
international humanitaire.
Pour réaliser ce travail, nous allons recourir aussi
bien aux méthodes qu'aux techniques de recherche appropriées.
IV. METHODES ET TECHNIQUES
DE RECHERCHE
Pour mener à bien notre étude, nous allons nous
inspirer de la méthode exégétique qui sera soutenue par la
technique documentaire.
La méthode exégétique nous permettra
d'interpréter les dispositions pertinentes des instruments juridiques
notamment le Statut de Rome, la Charte des Nations Unies, les
Résolutions du Conseil de sécurité, ... en vue de
comprendre le rôle du Conseil de Sécurité dans le
fonctionnement de la CPI.
La technique documentaire, quant à elle, nous servira
dans la collecte et la consultation des ouvrages, articles, sites internet et
autres documents relatifs à notre thématique de recherche.
Vu la complexité de ce sujet, une délimitation
s'avère impérieuse.
V. DELIMITATION DU SUJET
Conscient du fait que le domaine du Droit international
pénal dans lequel s'inscrit la présente étude est un vaste
boulevard juridique (24(*)) non susceptible d'appréhension en si peu de
pages, nous nous proposons de le circonscrire.
A ce sujet, parlant de la délimitation G. BALLEYGUIER
affirme que « tout chercheur est forcément
limité » (25(*)). C'est en réponse à cette exigence que
nous avons jugé bon de circonscrire notre travail tel que l'indique son
intitulé. Ainsi, cette étude focalisera son contenu sur un double
point, à savoir : les pouvoirs reconnus au Conseil de
sécurité dans le Statut de Rome et l'indépendance de la
CPI.
Vu la complexité de ce sujet, nous n'allons pas aborder
la description générale de la CPI, ni celle du Conseil de
sécurité. Nous irons juste aux points saillants de notre
thématique de recherche.
Il sied de mentionner qu'au plan temporaire nous partirons de
la date d'entrée en vigueur du Statut de Rome, c'est-à-dire le 1
Juillet 2002 jusqu'à nos jours.
Pour notre étude, le cadre spatial est le Soudan et la
Libye, Etas non partie au Statut de Rome dont leurs situations furent
transmises à la CPI par le Conseil de Sécurité agissant en
vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Cela ne nous empêchera guère de faire
référence à d'autres instruments juridiques, aux
jurisprudences et précédents connus par d'autres juridictions
internationales, en l'occurrence la Cour Internationale de Justice, les
tribunaux ad hoc en vue de soutenir solidement nos analyses.
Pour mieux saisir la quintessence de ce travail,
l'élaboration du plan sommaire s'avère d'une importance
capitale.
VI. PLAN SOMMAIRE
Dans le dessein de rendre intelligible le présent
exposé, autant que de présenter clairement les résultats
de nos recherches, nous avons opté pour une répartition bipartite
de ce travail.
Outre la présente introduction et la conclusion, les
deux chapitres fourniront l'étude respective de trois questions de la
problématique dans leur aspect théorique et pratique.
Le premier chapitre consacré au rôle du Conseil
de Sécurité dans le Statut de Rome instituant la CPI
présentera d'abord le pouvoir réservé au Conseil de
Sécurité dans la saisine de la CPI, en suite la suspension de
l'activité de la Cour par le Conseil de Sécurité ainsi
que la constatation de l'acte d'agression par le Conseil de
Sécurité. Il donnera enfin le soutien du Conseil de
Sécurité en matière de coopération des Etats avec
la Cour.
Le second chapitre, quand à lui, se propose d'analyser
l'indépendance de la CPI face aux pouvoirs reconnus au Conseil de
Sécurité. Il sera question d'examiner en premier lieu le lien
entre la CPI et l'ONU ainsi que l'indépendance de la CPI face à
l'article 13, b du Statut de Rome. En suite, nous jetterons notre regard sur
l'indépendance de la CPI face aux articles 16 et 15 bis, 6 du Statut de
Rome. Enfin, ce chapitre sera clôturé par l'examen des
conséquences de l'intervention du Conseil de sécurité dans
l'activité judiciaire de la CPI et quelques pistes de solution.
Chapitre I. LE ROLE DU
CONSEIL DE SECURITE DANS LE STATUT DE ROME INSTITUANT LA COUR PENALE
INTERNATIONALE
Le Conseil de Sécurité des Nations Unies joue un
rôle central et incomparable dans le système judiciaire
international26(*) .
Ainsi, le Statut de Rome reconnait à celui-ci des pouvoirs importants
en l'occurrence, la saisine de la CPI (section I), la suspension de
l'activité de la Cour (section II), la constatation de l'acte
d'agression (Section III) et le soutien du Conseil de Sécurité en
matière de coopération des Etats avec la CPI (Section IV).
Section I. LA SAISINE DE LA
COUR PENALE INTERNATIONALE
L'article 13 du Statut de Rome dispose que « La
Cour peut exercer sa compétence à l'égard des crimes
visés à l'article 5, (.....) b) si une situation dans laquelle un
ou plusieurs de ces crimes paraissent avoir été commis est
déférée au procureur par le Conseil Sécurité
agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies ».
Cette saisine, par le Conseil de Sécurité,
constitue l'une des trois possibilités de saisine de la Cour, aux
côtés de celle reconnue à un Etat partie27(*) et au Procureur agissant
proprio motu28(*).
Elle trouve son fondement dans le chapitre VII de la Charte
des Nations Unies et elle est justifiée par diverses raisons
(§1).
La saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité
est sujette à certaines conditions et présente quelques
caractéristiques (§2). Le principe de complémentarité
de la CPI aux juridictions nationales s'applique en cas de saisine par le
Conseil de Sécurité des Nations Unies. Toutefois, il ne
s'applique pas dans sa pleine rigueur étant donné que les Etats
ne se verront pas notifier l'ouverture d'une enquête relativement
à la situation déférée.29(*) Il y a donc une
applicabilité atténuée du principe de
complémentarité (§3). Le Conseil de Sécurité
jouit d'une autonomie en matière de saisine de la CPI (§4).
Depuis l'entrée en vigueur du Statut de Rome, deux
situations, en l'occurrence celle du Darfour et celle de la Libye sont
déférées à la CPI par le Conseil de
Sécurité (§5).
§1. Fondement et raisons du
pouvoir de saisine
A. Fondement
Aux termes de l'article13, b précité du Statut
de Rome, le Conseil de Sécurité des Nations Unies peut
déférer au Procureur de la CPI une situation (notitia
criminis)30(*) dans
laquelle un ou plusieurs crimes31(*) de la compétence de la Cour paraissent avoir
été commis. Le conseil de Sécurité est donc le
deuxième sujet légitimé par le Statut à saisir la
Cour.
La saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité
se fonde sur les dispositions pertinentes du chapitre VII de la Charte des
Nations Unies32(*) et
rentre dans le cadre d'une série de mesures que le Conseil prend,
lesquelles mesures n'impliquent pas l'emploi de la force armée33(*)
Le chapitre VII de la Charte des Nations Unies confère
au Conseil de Sécurité l'autorité politique exclusive sur
les questions relatives à la préservation, à la
restauration et au maintien de la paix. Il confère également au
Conseil de sécurité le pouvoir de prendre des sanctions
destinées à préserver et maintenir la paix34(*). En conséquence, le
conseil de sécurité a le droit de renvoyer une situation à
la CPI aux fins d'enquêtes et, le cas échéant, de
poursuites.35(*)
B. Raisons du pouvoir de
saisine
La faculté pour le Conseil de Sécurité de
saisir la CPI est apparue lors des négociations comme l'aspect le moins
contesté du rôle de cet organe dans la procédure36(*). S'il est vrai que la Cour n'a
pas été conçue comme un instrument à la disposition
du Conseil de sécurité spécifiquement, la
possibilité pour ce dernier, de saisir la Cour a été
envisagée et a fait l'objet d'un large consensus dès le
début des négociations, au sein de la Commission de Droit
International37(*) et n'a
pas par la suite été sérieusement remise en
cause.38(*)
Cela s'explique en partie par le fait qu'à partir du
moment où il ne faisait aucun doute que les violations des droits de
l'Homme dont aura à connaître la Cour seront susceptibles
d'être qualifiées par le Conseil de Sécurité de
« menace contre la paix », et qu'il est un fait qu'il
pourra en réponse décider que l'engagement de poursuites
pénales à l'encontre des individus auteurs de ces crimes
contribuera au maintien de la paix et de la sécurité. Quelles que
soient les critiques émises à l'encontre de ce pouvoir de
saisine, celui-ci était plus qu'une nécessité39(*)
En l'absence de dispositions reconnaissant un rôle au
Conseil de Sécurité en matière de saisine de la Cour,
celui-ci aurait donc été susceptible de continuer à
procéder par la création de tribunaux ad hoc, ce qui, à
bien des égards, n'est pas apparu comme souhaitable40(*)
Face aux reproches adressées par un certain nombre
d'Etats à l'encontre de la création de deux tribunaux ad hoc
notamment l'interprétation discutable de la Charte des Nations Unies,
justice sélective, risques d'incohérence de la jurisprudence,
charge financière, la possibilité offerte au Conseil de
Sécurité de saisir la Cour pénale internationale est
apparue comme un moindre mal, mieux même comme un correctif à ces
défauts.
A partir du moment où le Conseil de
Sécurité se reconnait compétent pour établir des
tribunaux ad hoc41(*)
à sa discrétion et que cette démarche a suscité la
méfiance et la contestation de certains Etats, la possibilité
d'encadrer l'action du Conseil de Sécurité dans un schéma
préétabli, à savoir le Statut de la CPI, était
acceptable, voire souhaitable.42(*)
La faculté pour le Conseil de Sécurité de
saisir la CPI a été prévue par le Statut afin de lui
offrir un substitut, une alternative à la création des tribunaux
ad hoc43(*) parce que la
CPI serait immédiatement disponible par rapport aux TPI qui sont
circonstanciels.
Certes, le Statut de Rome ne saurait porter atteinte aux
prérogatives que le Conseil tient de la Charte des Nations Unies, et par
conséquent ne saurait être regardé comme prohibant la
création de nouveaux tribunaux ad hoc pour l'avenir. Cependant, comme
l'affirme Elodie DULAC, « il est peu probable et il sera
politiquement délicat, que les cinq membres permanents du Conseil de
sécurité, dont trois sont signataires du Statut de la
CPI44(*), s'accordent sur
cette création »45(*)
La saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité
est soumise à certaines conditions et elle renferme quelques
caractéristiques qu'il sied d'examiner respectivement.
§2. Conditions et
caractéristiques de la saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité
A. Conditions
Pour renvoyer une situation au Procureur, le Conseil de
Sécurité doit agir en vertu du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies46(*),
c'est-à-dire en cas de menace contre la paix, la rupture de la paix et
d'acte d'agression47(*).
Ainsi, la situation doit comporter une menace à la paix et à la
sécurité.48(*)
En outre, cette situation doit renfermer un ou plusieurs
crimes visés à l'article 5 du Statut de Rome, en l'occurrence, le
crime de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de
guerre et le crime d'agression.
B. Caractéristiques
de la saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité.
Aucun article du Statut de Rome ne précise la forme de
la saisine de la CPI par le Conseil de sécurité (I). Lorsque la
CPI est saisie par le Conseil de Sécurité, elle est
dispensée des conditions posées par l'article 12 du Statut de
Rome (II).
La mise en oeuvre de la faculté de saisine de la Cour
par le Conseil de Sécurité est incertaine (III).
Néanmoins, cette faculté confère à la Cour des
compétences assez étendues (IV).
I. La forme de la saisine
Contrairement aux articles 1449(*) et 1550(*) du Statut de Rome qui fixent respectivement les
modalités de la saisine de la CPI par un Etat partie et par le
Procureur, aucun article du Statut ne précise les modalités de la
saisine de la Cour par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
L'article 13, b du Statut se limite à dire que la CPI
peut exercer sa compétence à l'égard des crimes
visés à l'article 5 si une situation est
déférée au Procureur par le Conseil de
Sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des
Nations Unies. Cette formulation ambigüe de l'article 13, b montre que la
saisine par le Conseil de Sécurité a été un sujet
moins problématique, délaissé lors des débats au
profit des questions litigieuses.
Une piste peut être trouvée dans l'article 16 du
Statut de Rome51(*)consacrant la faculté du Conseil de
Sécurité de suspendre les poursuites et enquêtes
menées par la Cour qui spécifie que la demande de suspension doit
être faite dans une résolution adoptée en vertu du Chapitre
VII de la Charte des Nations Unies. Une résolution est-elle, en vertu du
Chapitre VII, donc nécessaire pour la saisine de la CPI ou peut-on
envisager une saisine par une recommandation?
Sur la question de savoir si une résolution est
nécessaire, nous ne pouvons que répondre par l'affirmation parce
qu'un certain nombre d'indices incitent à retenir cette
interprétation de l'expression « agissant en vertu du chapitre
VII ».
Le premier indice réside dans le fait que le pouvoir
de saisine de la CPI a été, durant les travaux
préparatoires, refusé à l'Assemblée
Générale des Nations Unies au motif que les décisions de
cet organe ont un caractère non contraignant.52(*)
A contrario, la saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité a été prévue parce que justement,
elle revêt un caractère obligatoire à l'égard de
tous les Etats membres des Nations Unies. C'est pour cela que nous disons qu'il
s'agit d'une décision contraignante telle que visée à
l'article 25 de la Charte des Nations Unies qui dispose : « les
membres de l'organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les
décisions du Conseil de Sécurité conformément
à la présente charte ».
Le deuxième argument peut être trouvé dans
la logique même du Statut, en particulier dans l'intérêt de
la saisine par le Conseil de Sécurité qui, comme nous le verrons,
permet de surmonter les obstacles statutaires au fonctionnement de la CPI
(notamment en ce qui concerne l'application du principe de
complémentarité et la coopération des Etats) ; ce qui
n'est possible que si l'article 25 de la Charte des Nations Unies portant les
caractères obligatoire et exécutoire des décisions du
Conseil de Sécurité entrent en jeu.
L'esprit même du Statut nous incite à penser
qu'une décision du Conseil de Sécurité est donc
nécessaire.
II. La non
applicabilité du régime de consentement préalable à
l'exercice par la CPI de sa compétence
La saisine de la CPI par le Conseil de sécurité
permet de dispenser la Cour des conditions posées par l'article 12 du
Statut de Rome portant régime de consentement préalable des Etats
à la compétence de la CPI.
En effet, l'article 12 du Statut de Rome dispose :
« 1. Un Etat qui devient partie au Statut
reconnaît par la même la compétence de la Cour à
l'égard des crimes visés à l'article 5.
2. Dans les cas visés à l'article
13, §a ou c, la Cour peut exercer sa compétence si l'un des
Etats suivants ou les deux sont parties au présent Statut ou ont reconnu
la compétence de la Cour conformément au §3 :
a) l'Etat sur le territoire duquel le comportement en cause
s'est produit ou, si le crime a été commis abord d'un navire ou
d'un aéronef, l'Etat du pavillon ou l'Etat d'immatriculation ;
b) l'Etat dont la personne accusée du crime est un
national.
3. Si la reconnaissance de la compétence de la Cour
par un Etat qui n'est pas partie au présent Statut est nécessaire
aux fins du §2, cet Etat peut, par déclaration
déposée auprès du greffier, consentir à ce que la
Cour exerce sa compétence à l'égard du crime dont il
s'agit. L'Etat ayant reconnu la compétence de la Cour coopère
avec celle-ci sans retard et sans exception conformément au chapitre
IX ».
Le régime de consentement préalable est
applicable en cas de saisine par un Etat partie ou le Procureur agissant
proprio motu53(*). En
effet, le paragraphe 2 de l'article 12 subordonne la compétence de la
cour, si elle est saisie dans les cas visés à l'article 13,
alinéa a ou c ; c'est-à-dire si elle est saisie par un Etat
ou par le procureur, à ce que, soit l'Etat sur le territoire duquel le
crime s'est commis, soit l'Etat dont la personne accusée du crime est
ressortissant ou les deux soient parties au Statut de Rome54(*) ou ont reconnu la
compétence de la Cour conformément au paragraphe 3 de l'article
12 qui prévoit l'acceptation ad hoc de la compétence de la Cour
par un Etat qui n'est pas partie au Statut de Rome55(*)
Il est de bon sens de considérer que l'article 12, 2
est de nature à entraver l'indépendance et surtout le
caractère effectif de la Cour. En effet, l'Etat du territoire sur lequel
le crime est commis sera, dans le cas d'un conflit interne, celui dont les
ressortissants seront susceptibles d'être accusés. On sait que ces
dernières années, ce sont les conflits internes qui ont
été à l'origine des crimes contre l'humanité et de
génocide (Cambodge, Rwanda, Ex. Yougoslavie, Irak, etc.).
En outre, cette disposition sera un frein à
l'effectivité de la Cour, car si ces deux Etats qui n'en feront qu'un,
dans bien des cas ne sont pas parties au Statut ou n'ont reconnu sa
compétence par la déclaration au cas par cas prévue au
paragraphe 3 de l'article 12, la Cour n'aura aucune espèce de
faculté pour juger des crimes qui y seront commis, sauf à
être saisie par le Conseil de Sécurité. En vertu de
l'article 13, b du Statut de Rome, le Conseil de Sécurité pourra
saisir la Cour sans aucune espèce de condition autre que celle d'agir
sur le fondement du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Cependant,
cette saisine pourra être paralysée par l'exercice du droit de
veto dont disposent les Etats membres permanents du Conseil de
Sécurité, comme la Russie et la Chine ne manqueraient de le faire
si la Cour devrait être saisie de crimes commis sur leur territoire. Le
pouvoir ainsi reconnu au Conseil de sécurité pose la question de
l'égalité entre les Etats, autrement dit, les Etats membres
permanents du Conseil de Sécurité qui n'auraient pas
ratifié le Statut de Rome se retrouveraient dans la situation
confortable de mettre en cause les autres Etats, sans courir le risque de se
voir eux-mêmes mettre en question55(*). Pour remédier à cette situation, nous
pensons qu'il serait agréable de supprimer le droit de veto reconnu aux
5 membres permanents du Conseil de Sécurité (France, la Russie,
la Chine, le Royaume Uni et les Etats Unis).
III. La saisine de la Cour
par le conseil de sécurité est incertaine
Incertaine, la procédure de saisine par le Conseil de
Sécurité l'est ;
- En premier lieu, en ce que, s'agissant d'une question de
fond, toute résolution du Conseil de sécurité suppose un
vote que peut venir entraver le recours, par l'un de cinq membres permanents,
à son droit de veto. Si tel ou tel de ces Etats entend
« protéger » un pays où se
dérouleraient des crimes relevant de la compétence de la Cour, la
saisine de celle-ci s'avérerait vite impossible.56(*)
- En second lieu, la nécessité pour le Conseil
de Sécurité de se placer dans le cadre du Chapitre VII suppose
qu'au préalable le Conseil ait constaté « une menace
contre la paix, une ne rupture de la paix ou un acte d'agression ».
Or cette constatation ne va pas de soi, dans les hypothèses de
commission de crimes relevant de la compétence de la Cour, si celles-ci
interviennent dans le cas de conflits armés non internationaux ou dans
le cadre d'une répression, purement interne, conduite par le
gouvernement d'un Etat contre un groupe ou des membres d'un groupe ethnique ou
religieux.57(*)
Certes, le Conseil de Sécurité a souvent
considéré que des conflits, apparemment internes, pouvaient
constituer une menace contre la paix, comme il en a été le cas au
Rwanda, en Haïti, Angola, Somalie, Afghanistan, RDC,....Toutefois, il
reste que, hors ces cas extrêmes, bien des situations internes peuvent
demeurer hors du champ de compétence que le Conseil de
Sécurité peut s'assigner. La situation en Algérie, le
comportement dictatorial de tel ou tel dirigeant recourant à une
répression brutale et systématique de ses opposants, par la
torture ou les disparitions, ne font pas ou n'ont pas fait l'objet d'actions
spécifiques du Conseil de Sécurité dans le cadre du
chapitre VIII.
De telles situations ne seraient donc susceptibles
d'entraîner la saisine de la Cour par le Conseil de
Sécurité. On peut également rappeler, à cet
égard que l'implication de l'ONU au Cambodge a bien davantage
résulté, dans un premier temps, de la volonté de la
communauté internationale de sanctionner l'invasion Vietnamienne du
territoire Cambodgien, condamnée par elle comme acte d'agression, que de
mettre un terme au crime de génocide perpétré par les
dirigeants Khmers rouges que, pourtant, l'agression vietnamienne contribua
à faire cesser58(*)
IV. La saisine par le
Conseil de sécurité confère à la Cour des
compétences assez étendues
La saisine de la CPI, soit par un Etat partie, soit par le
Procureur, suppose que soit Partie au traité les deux ou l'un, seulement
des Etats suivants :
« - L'Etat sur le territoire duquel le comportement
en cause s'est produit ou, si le crime a été commis à bord
d'un navire ou d'un aéronef portant pavillon ou l'immatriculation de
l'Etat en question ;
- ou l'Etat dont la personne accusée de crime est un
national »59(*)
Il ressort de cet article 12, 2 du Statut de Rome que ces
conditions restrictives ne sont pas nécessaires lorsque c'est le Conseil
de sécurité qui est l'auteur de la saisine. Cela signifie donc, a
contrario, que le Conseil de Sécurité peut saisir la Cour de
crimes survenus sur le territoire d'un Etat non partie ou commis par les
ressortissants d'un tel Etat. L'extension des compétences de la Cour en
une telle occurrence est considérable, puisqu'elle exclurait tout risque
d'impunité des auteurs de crimes selon qu'ils auraient eu pour
théâtre de leurs agissements ou pour nationalité d'un Etat
qui aurait refusé la compétence de la CPI.
Ainsi, saisie par le Conseil de Sécurité, la
compétence de la Cour n'est pas limitée aux crimes commis par des
ressortissants ou sur le territoire d'un Etat partie, mais elle s'impose aussi
aux Etat tiers et il n'est donc pas nécessaire que les auteurs
présumés soient ressortissants d'un Etat partie ou que les crimes
aient été commis sur le territoire d'un Etat partie. Il s'agit
d'une extension du domaine subjectif du Statut des Etats tiers au Traité
de Rome qui, dans une certaine mesure, peut s'opposer en terme
général aux principes « pacta tertiis nec nocent nec
pro sunt »,60(*)
« pacta sunt servanda » et « le
principe de l'effet relatif des traités ». Quoique la
faculté de saisir la CPI reconnue au Conseil de Sécurité
porte atteinte aux principes ici cités, nous pensons qu'il ne serait pas
raisonnable de supprimer cette faculté car cela serait à la base
de l'impunité des crimes commis sur le territoire d'un Etat non partie
au Statut de Rome ou commis par les ressortissants d'un tel Etat. Cela
porterait également atteinte à la vocation universelle de la
Cour.
§3. Une
applicabilité atténuée du principe de
complémentarité
Avant d'aborder l'applicabilité atténuée
du principe de complémentarité (B), il s'avère
impérieux d'examiner préalablement le sens de ce principe(A).
A. Sens du principe de
complémentarité
Le principe de complémentarité se trouve
énoncé dans le préambule du Statut de la CPI61(*) ainsi qu'à l'article
1er62(*) et 1763(*)du Statut
précité. Il s'agit là d'une différence majeure par
rapport aux Statuts des Tribunaux pénaux internationaux qui retiennent
la primauté de ces derniers sur les juridictions nationales64(*)
La CPI a un rôle secondaire65(*)par rapport aux juridictions
nationales dans la répression des crimes relevant de sa
compétence. Cette restriction se comprend aisément si l'on
considère que la Cour est instituée non pas par une
résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies
agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, mais par un
traité multilatéral. Les Etats étaient tout au long de
l'élaboration du Statut de la CPI soucieux de préserver leur
souveraineté et, en particulier, leur responsabilité
première de réprimer les crimes commis sur leurs
territoires66(*). La
justice fait en effet partie des pouvoirs régaliens de l'Etat.
Le principe de la primauté n'a à aucun moment
été envisagé de la CPI67(*). Selon Alain PELLET : « Le Statut
hésite constamment entre la motivation
« communautariste » qui l'inspire et les arrières
pensées « étatistes » qui n'ont jamais
cessé de hanter nombre de participants à la conférence de
Rome »68(*) , par conséquent, nous constatons que les
dispositions du Statut consacrant la complémentarité illustrent
bien le souci de respecter la primauté de la répression
étatique.
Certes, il est évidemment difficile de contester les
avantages de la répression étatique. Outre le fait non
négligeable qu'est en cause un des attributs de la souveraineté,
à savoir l'administration de la justice pénale, et qu'il est
illusoire d'attendre des Etats qu'ils y renoncent volontairement et de
façon générale, il est également incontestable que
les juridictions nationales seront dans la majorité des cas les mieux
placés pour agir.69(*)
A contrario, dans l'hypothèse où les Etas
n'auraient pas la volonté ou la capacité de réprimer les
crimes relevant de la compétence de la CPI, le Statut prévoit que
cette dernière peut alors déclarer l'affaire recevable.70(*)
Notons que, contrairement au projet du Statut de la Commission
de Droit international, qui était extrêmement favorable aux Etats
en ce qu'il se consentait, pour ainsi dire, de l'engagement d'une
procédure au niveau national, l'article 17 du Statut de la CPI
rétablit un certain équilibre entre les prérogatives de la
CPI et des Etats en conférant à la Cour le soin de
déterminer, à l'aide d'une série de critère
énoncés à l'article 17, s'il ya manque de volonté
ou incapacité de l'Etat à mener à bien les poursuites.
En effet, l'article 17 dispose :
« 1. Eu égard au dixième alinéa
du préambule et à l'article premier, une affaire est jugée
irrecevable par la Cour lorsque :
a) l'affaire fait l'objet d'une enquête ou de
poursuites de la part d'un Etat ayant compétence en l'espèce,
à moins que cet Etat n'ait pas la volonté ou soit dans
l'incapacité de mener véritablement à bien l'enquête
ou les poursuites,
b) l'affaire a fait l'objet d'une enquête de la part
d'un Etat ayant compétence en l'espèce et que cet Etat a
décidé de ne pas poursuivre la personne concernée,
à moins que cette décision ne soit l'effet du manque de
volonté ou de l'incapacité de l'Etat de mener
véritablement à bien des poursuites.
c) la personne concernée a déjà
été jugée pour le comportement faisant l'objet de la
plainte, et qu'elle ne peut être jugée par la Cour en vertu de
l'article 20 paragraphe 3 ;
d) l'affaire n'est pas suffisamment grave pour que la Cour y
donne suite.
2. Pour déterminer s'il y a manque de volonté de
l'Etat dans un cas d'espèce, la Cour considère l'existence, eu
égard aux garanties d'un procès équitable reconnues par le
droit international, de l'une ou de plusieurs des circonstances
suivantes :
a) la procédure a été ou est
engagée ou la décision de l'Etat a été prise dans
le dessein de soustraire la personne concernée à sa
responsabilité pénale pour les crimes relevant de la
compétence de la Cour visés à l'article 5 ;
b) la procédure a subi un retard injustifié qui,
dans les circonstances, est incompatible avec l'intention de traduire en
justice la personne concernée ;
c) la procédure n'a pas été ou n'est pas
menée de manière indépendante ou impartiale mais d'une
manière qui, dans les circonstances est incompatible avec l'intention de
traduire en justice la personne concernée.
3. Pour déterminer s'il y a incapacité de l'Etat
dans un cas d'espèce, la Cour considère si l'Etat est incapable,
en raison de l'effondrement de la totalité ou d'une partie substantielle
de son propre appareil judiciaire ou de l'indisponibilité de celui-ci,
de se saisir de l'accusé, de réunir les éléments de
preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement
à bien la procédure ».71(*)
B. Applicabilité du
principe de complémentarité en cas de saisine de la CPI par le
Conseil de Sécurité
La primauté de la CPI sur les juridictions nationales
est exclue en cas de saisine par l'Etat partie ou le procureur agissant motu
proprio. Il en est de même lorsque la saisine émane du Conseil de
sécurité, bien qu'il n'y ait pas de dispositions expresses
à ce sujet dans le Statut de Rome. L'article 17, consacrant le principe
de complémentarité ne distingue pas, comme le fait l'article 18
paragraphe 1er72(*) entre
les différents modes de saisine. Nous pouvons donc raisonnablement en
déduire que le principe de complémentarité de la CPI aux
juridictions nationales s'applique également dans l'hypothèse de
la saisine par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
De plus selon l'article 53 §1 alinéa b73(*)et §2 alinéa
b74(*) avant d'ouvrir une
enquête ou de poursuivre, le Procureur examine si l'affaire est recevable
au titre de l'article 17. Et le §3 alinéa a75(*) du même article autorise
le Conseil de sécurité lorsqu'il a saisi la Cour à
demander à la chambre préliminaire de la Cour d'examiner la
décision de ne pas poursuivre prise par le procureur en vertu des
paragraphes 1 ou 2 et demander au procureur de la reconsidérer.
L'article 53 ne fait que conforter l'interprétation
selon laquelle l'article 17 et par la même le principe de
complémentarité est applicable lorsque le Conseil de
Sécurité saisit la CPI. Ainsi le Conseil de
Sécurité va agir dans les limites fixées par le Statut.
Néanmoins, le Statut lui-même porte atteinte au
principe de complémentarité lorsque la saisine émane du
Conseil de Sécurité.
L'article 18§1 prévoit la notification, par le
procureur, de l'ouverture d'une enquête à tous les Etats parties
ou aux Etats qui, selon les renseignements disponibles, auraient normalement
compétence à l'égard des crimes dont il s'agit.
L'un quelconque de ces Etats peut alors demander au Procureur
de se dessaisir et il devra le faire sauf exception76(*). Par ce mécanisme, la
CPI invite les Etats à exercer leur primauté dans la
répression des crimes internationaux en question.
Comme nous le constatons, l'article 18 ne vise
expressément que l'article 13, a et c consacré à la
saisine par un Etat partie et par le Procureur agissant « proprio
motu ». Il ne fait aucune mention de l'article 13, b consacré
à la saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité à
laquelle cette disposition n'est pas applicable.
Le principe de complémentarité est applicable,
par la CPI en cas de saisine par le Conseil de Sécurité, mais pas
dans sa pleine rigueur étant donné que les Etats ne seront pas
notifiés l'ouverture d'une enquête relativement à la
situation déférée. En outre, bien que le Statut n'ait pas
retenu la primauté de la CPI lorsqu'elle est saisie par le Conseil de
sécurité, ce dernier va pouvoir par ricochet, parvenir à
ce résultat et remédier aux limites posées à
l'action de la CPI du fait de l'application du principe de
complémentarité. Pour ce faire, il va agir en dehors du cadre du
Statut, en utilisant les pouvoirs, que lui confère la Charte des Nations
unies et elle seule. L'article 103 en particulier, en vertu duquel les
obligations des Etats membres des Nations Unies au titre de la Charte
prévalent sur leurs obligations découlant de toutes les autres
conventions internationales au nombre desquelles le Statut de la Cour figure,
le permet.77(*)
En utilisant les pouvoirs que lui confère la Charte des
Nations Unies et auxquels le Statut ne saurait porter atteinte78(*), le Conseil de
sécurité va pallier aux insuffisances du Statut de Rome surtout
en matière de coopération des Etats non parties en
conférant de facto à la CPI la primauté que ce dernier lui
refuse.
§4. L'autonomie du
Conseil de Sécurité en matière de saisine de la CPI
En recourant à l'article 39 de la Charte des Nations
Unies, tout en se conformant aux buts et principes que cette même Charte
a posés79(*), le
Conseil de Sécurité fait usage de son pouvoir
discrétionnaire dans la qualification de menace contre la paix et la
sécurité internationales80(*). En effet l'article 39 de la Charte des Nations Unies
dispose : « le Conseil de Sécurité constate
l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte
d'agression et fait les recommandations ou décide quelles mesures seront
prises conformément aux articles 41 et 42 pour maintenir ou
rétablir la paix et la sécurité
internationales ».
Il appartient au Conseil de Sécurité de
« (....) définir sa propre légalité, et
d'apprécier non seulement l'opportunité de son intervention mais
aussi les modalités de son action éventuelle. Dans ces
conditions, aucun contrôle extérieur ne saurait être
exercé sur ses décisions. Le contrôle est celui que le
Conseil de Sécurité exerce sur
lui-même(...) »81(*)
§5. Etude de la saisine
de la CPI par le Conseil de Sécurité
Depuis l'entrée en vigueur du Statut
de Rome jusqu'à nos jours, deux situations ont été
déférées à la CPI par le Conseil de
Sécurité, à savoir la situation du Darfour (A) et celle de
la Lybie(B).
A. Situation du Darfour
devant la CPI
Bien que la tragédie du Darfour au Soudan était
déjà une réalité au début des années
quatre-vingt-dix82(*) , il
fallait attendre le rapport de la commission de droits de l'homme en mai 2004
pour que les Nations unies prennent toute la mesure du drame. Ce rapport fait
le point sur la situation des droits de l'homme au Darfour et rend compte de
nombreuses violations systématiques.83(*)
C'est seulement le 25 mai 2004 que le Conseil de
sécurité se dit alarmé par la situation et invite les
parties à la négociation pour trouver un accord84(*). Ensuite les
résolutions s'enchaînent85(*) jusqu'à la Résolution 1593 du 31 mars
2005 par laquelle le Conseil de sécurité décide de
déférer la situation du Darfour au Procureur de la CPI, afin que
la juridiction pénale internationale permanente connaisse des crimes
commis depuis le 1er juillet 2002.
Par sa résolution 1564 de septembre 2004, le Conseil
de Sécurité avait demandé au Secrétaire
général des Nations unies de « créer rapidement
une commission internationale d'enquête pour enquêter
immédiatement sur les informations faisant état de violations du
droit international humanitaire et des instruments internationaux relatifs aux
droits de l'homme par toutes les parties dans le Darfour, pour
déterminer également si des actes de génocide ont eu lieu
et pour identifier les auteurs de ces violations afin de s'assurer que les
responsables aient à répondre de leurs actes ». Suite
à cela, une commission d'enquête est établie en Octobre
2004 par le Secrétaire général et elle rend son rapport le
25 janvier 2005.
Dans ce dernier, on rapporte plusieurs violations commises
par toutes les parties au conflit, à savoir des forces gouvernementales
et des milices pro-gouvernementales, qui témoignent l'existence des
éléments matériels d'un génocide (meurtre, les
atteintes graves à l'intégrité physique ou mentale,
etc).
Poursuivant toujours la même direction, la commission
fait deux recommandations au Conseil de sécurité. La
première, et plus importante afin de cette analyse, consiste en un
transfert de la situation du Darfour à la CPI pour une mise en cause de
la responsabilité pénale individuelle des personnes
impliquées dans les crimes commis. La seconde recommandation a trait
à la création d'une commission internationale d'indemnisation
pour apporter une réparation matérielle aux personnes
lésées par ces crimes.86(*)
Le Soudan n'étant pas partie au Statut de
Rome87(*), la situation du
Darfour fut déférée devant la CPI par le Conseil de
sécurité en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies
et de l'article 13, b du Statut de Rome.
En effet, par sa résolution 1593 (2005) du 31 mars
2005, que d'aucuns qualifient d'historique88(*), le Conseil de sécurité a
déférée devant la CPI la situation du Darfour.
Dans cette résolution, le Conseil de
sécurité est revenu sur le motif de la menace contre la paix et
la sécurité internationales. Il a « constaté que
la situation au Soudan continue de faire peser une menace sur la paix et la
sécurité internationales »89(*). Il en a profité pour
exploiter les vertus de la disposition de l'article 41 de la Charte des Nations
unies qui lui octroie le pouvoir de prendre des mesures qui n'impliquent pas
l'emploi de la force armée.90(*)
La résolution du Conseil de Sécurité
relative au renvoi de la situation du Darfour à la CPI donnerait
à penser à une insuffisance de motivation, en ceci qu'elle n'a
pas indiqué autant que possible les circonstances pertinentes de la
situation du Darfour, ni n'a expliqué en quoi cette situation est
constitutive de menace contre la paix et la sécurité
internationales.
Il nous semble cependant que l'examen de la résolution
1593 (2005), mériterait d'être conjugué avec celui des
actes qui ont précédé cette dernière
résolution et qui sont intervenus dans le même contexte relatif
à la situation du Darfour.
Au nombre de ces actes, l'on pourrait citer la
déclaration du Président du Conseil de sécurité en
date du 25 mai 2004 à la 4978ème séance du
Conseil.91(*)
L'on peut également relever les résolutions
1556(2004) du 30 juillet 2004, 1564(2004) du18 septembre 2004 et 1574 du 19
novembre 2004 qui ont démontré en particulier la pertinence de
la situation du Darfour et la menace qu'elle présente contre la paix et
la sécurité internationales, le Conseil de Sécurité
a commencé par constater la poursuite de la crise humanitaire et des
violations des droits de l'homme, condamné tous les actes de violence et
violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire commis
par toutes les parties à la crise, et rappelé le besoin d'une
aide humanitaire d'urgence dont sont privés les habitants de la
région du Darfour. Les différents actes pris
précédemment par le Conseil de Sécurité et leur
motivation ont déterminé le Conseil de sécurité
à abriter sans encombre la résolution 1593(2005) derrière
la disposition de l'article 39 de la Charte des Nations Unies.
La saisine de la CPI par le Conseil de sécurité
a abouti à la délivrance par la CPI de quatre mandats d'arret
contre Ahmad Muhammad Harun, Secrétaire d'Etat soudanais, Ali Muhammad
Ali Abd-Al-Rahman Kushuyb, chef de la milice Janjawid ; Abdallah Banda
Akakaer Nourain et Saleh Mohammed Jerbo Jamus, Chefs rebelles accusés
d'avoir mené une attaque contre les forces de maintien de la paix.
La CPI a délivré un mandat d'arrêt contre
le Président soudanais Omar Al Béchir pour génocide le 12
juillet 2010. Il s'agit du premier mandat pour génocide de la CPI. Le 02
décembre 2011, la CPI a délivré un mandat d'arrêt
à l'encontre de l'actuel ministre soudanais de la Défense,
Abdelhakim Mohamed Hussein, pour crimes de guerre et crimes contre
l'humanité commis au Darfour d'août 2003 à mars
200492(*)
Quand on examine la résolution 1593 du Conseil de
Sécurité renvoyant la situation du Darfour à la Cour, on
notera que :
- Le Conseil de Sécurité procède au
renvoi en invoquant le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
conformément à la lettre de l'article 13, b du Statut de
Rome.93(*)
En effet, conformément à cet article, le 31 mars
2005, par l'adoption de la résolution 1593, « agissant en
vertu du chapitre VII de la charte des Nations Unies, le Conseil de
sécurité a décidé de déférer au
procureur de la CPI la situation au Darfour depuis le 1er juillet
2002 »94(*)
- Le Conseil de Sécurité
« décide que le gouvernement soudanais et toutes les autres
parties au conflit du Darfour doivent coopérer pleinement avec la Cour
et le Procureur »95(*), mais il ajoute « tout en reconnaissant que
le Statut de Rome n'impose aucune obligation aux Etats qui n'y sont pas
parties, le Conseil de sécurité demande instamment à tous
les Etats et à toutes les organisations régionales et
internationales de coopérer pleinement »96(*). Autrement dit, le Conseil
confirme que sa décision de confier la situation du Darfour à la
CPI ne transforme pas les Etats tiers au Statut en Etats parties, mais que ces
Etats n'en doivent pas moins collaborer avec la Cour dans le cas de
Darfour.97(*)
- Le Conseil de Sécurité exclut de la
compétence de la Cour « les ressortissants, responsables
ou personnels d'un Etat contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome de
la CPI »98(*).
Ces derniers sont soumis à la compétence exclusive de l'Etat
contributeur sauf dérogation formelle dudit Etat. Politiquement, cette
limitation de la compétence de la CPI était sans doute, une
partie du prix à payer pour obtenir d'Etats, comme la Chine et les
Etats-Unis, qu'ils ne s'opposent pas à l'adoption de la
Résolution. Juridiquement, cette limitation de la compétence de
la CPI se fonde non sur l'article 16 du Statut, mais sur le droit souverain du
Conseil de sécurité de définir le mandat de la CPI pour
les besoins de la situation qu'il lui défère99(*). Plusieurs Etats ont
regretté cette limitation de compétence notamment
l'Algérie, l'Argentine, la Tanzanie, le Bénin et le
Brésil.
- Les quatre Etats qui se sont abstenus ont invoqué les
raisons diverses :
v Les Etats Unis opposent une objection fondamentale à
l'opinion selon laquelle la CPI devrait être en mesure d'exercer sa
juridiction sur les ressortissants y compris les responsables gouvernementaux
d'Etats qui ne sont pas parties au Statut de Rome. Cela porte atteinte à
l'essence même de la notion de souveraineté.
v Selon la Chine, la CPI ne peut pas exercer sa juridiction
sur des Etats non parties et il serait difficile de souscrire à ce que
le Conseil autorise un tel cas de figure.
Selon H.ABRAHA et R.ADJOVI, la Chine s'est abstenue lors du
vote de la résolution 1593, car « elle est dans une position
d'observation. Elle garde ses propres errements au Tibet hors de la
portée d'une telle pratique. Il semble qu'il lui fallait éviter
de créer un précédent qui pourrait lui être
opposé comme modalité de la répression de crimes commis
sous son régime ».100(*)
v Le Brésil déplore qu'on affirme
l'incompétence de la CPI à l'égard des ressortissants,
responsables ou personnels en activité ou anciens responsables ou
personnels d'un Etat contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome. Il
regrette que la résolution se réfère aux accords
visés à l'article 98, §2 du Statut de Rome.
v Quant à l'Algérie, elle regrette que le
Conseil n'ait pas pris davantage en considération les propositions de
l'Union Africaine.101(*)
B. Situation de la Libye
devant la CPI
Nous n'allons pas nous étendre outre mesure sur la
situation de la Libye dès lors qu'elle présente les aspects
analogues à ceux de la situation du Darfour, analysée
précédemment.
A l'instar du Soudan, la Libye n'est pas partie au Statut de
Rome.
La situation de la Lybie est la deuxième situation
soumise à la CPI par le Conseil de Sécurité en vertu du
Chapitre VII de la Charte de l'ONU.
Face aux exactions commises par les dirigeants libyens, le
Conseil de sécurité a réagi rapidement en adoptant,
à l'unanimité, le 26 février 2011, la résolution
1970 qui déférait la situation en Libye au Procureur de la
CPI102(*). Dans cette
résolution, le Conseil de sécurité a estimé que les
attaques généralisées et systématiques qui se
déroulent en Libye contre la population civile peuvent constituer des
crimes contre l'humanité.103(*)
Le renvoi par le Conseil de Sécurité n'a pas
automatiquement déclenché une enquête de la CPI du fait que
la cour fonctionne indépendamment de l'ONU. Il appartient au Procureur
d'apprécier, par le biais d'un examen préliminaire des
données disponibles, s'il existe un motif raisonnable de procéder
à une enquête.
Le 16 mai 2011, le Procureur a soumis trois demandes de
mandat d'arrêt contre Mouammar Kadhafi, Saïf Al-Islam Kadhafi et
Abdullah Al-Senussi devant la chambre préliminaire. Cette
dernière a délivré le 27 juin 2011, trois mandats
d'arrêt à l'encontre des personnes susmentionnées. Ces
mandats d'arrêt pour meutre et persécution en tant que crimes
contre l'humanité décrivent les attaques systématiques et
généralisées contre la population civile libyenne.
Le 22 novembre 2011, la CPI a ordonné la clôture
de l'affaire de Mouammar Kadhafi suite à son
décès.104(*) Les deux autres inculpés, Saïf Al-Islam
et Abdullah Al-Senussi ne sont pas encore arrêtés.
Section II. LA SUSPENSION
DE L'ACTIVITE DE LA CPI
Seront ici abordés les aspects négatifs quant
au fonctionnement de la CPI, du rôle du Conseil de
Sécurité des Nations Unies dans la procédure,
répondant au postulat selon lequel les deux objectifs distincts du
Conseil de sécurité et de la CPI que sont le maintien de la paix
et de la sécurité internationale et la promotion de la justice
pénale internationale pourraient s'avérer problématiques
du fait de la prise en compte des dispositions de la Charte des Nations Unies
définissant les compétences du Conseil de sécurité.
Ainsi, aux termes de l'article 39 de la Charte des Nations
Unies, « Le Conseil de sécurité constate l'existence
d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression
et fait des recommandations ou décide quelles mesures seront prises
conformément aux articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la
paix et la sécurité internationales ».
Les rapports entre Conseil de Sécurité et la CPI
sont le reflet d'une contradiction.
D'une part, le statut de Rome affirme que les crimes qui
entrent dans son champ de compétence menacent, par nature, la paix et la
sécurité internationale105(*) et l'on peut donc en déduire que leur
répression permet le rétablissement de cette même paix.
Mais d'autre part, le Conseil de Sécurité, par
le biais de l'article 16 du Statut de la CPI peut également paralyser la
justice internationale pour assurer cette paix.
Certes, la CPI n'étant pas un organe des Nations
pourrait, en théorie, passer outre la prise en considération des
compétences du Conseil de Sécurité au titre du Chapitre
VII de la charte des Nations Unies.
Mais, il n'aurait été guère
réaliste de couper ainsi la CPI d'un environnement juridique
international dans lequel elle doit s'insérer en vue d'asseoir sa
crédibilité.
Ceci est d'autant plus vrai que si l'article 103 de la Charte
des Nations Unies peut lui être opposé, les Etats parties à
son Statut et membres des Nations Unies devront eux privilégier leurs
obligations au regard de la Charte, ce qui de facto porterait atteinte au
fonctionnement de la CPI.
C'est ainsi donc qu'Elodie DULAC affirme avec raison que
« le rôle du Conseil de Sécurité au regard du
chapitre VII de la Charte des Nations Unies a été
intégré dans le Statut ».106(*)
En outre, dissocier le Conseil de Sécurité de la
CPI serait à la base de l'impunité des crimes commis sur le
territoire d'un Etat non partie Statut de Rome ou commis par les ressortissants
d'un tel Etat.
Dans la présente section, nous aborderons
successivement cinq paragraphes, à savoir : le fondement et les
raisons du sursis à enquêter et à poursuivre (§1), les
conditions d'application de l'article 16 du Statut de Rome (§2), l'analyse
critique de l'article 16 du Statut de Rome (§3), quelques risques
liés au pouvoir de suspension(§4) et l'article 16 du Statut de Rome
et les Résolutions du Conseil de sécurité(§5).
§1. Fondement et raisons
du sursis à enquêter et à poursuivre
L'article 16 du Statut de Rome portant sur le sursis à
enquêter ou à poursuivre dispose : « Aucune
enquête ni aucune poursuite ne peut être engagée ni
menée en vertu du présent Statut pendant les douze mois qui
suivent la date à laquelle le Conseil de sécurité a fait
une demande en ce sens à la Cour dans une résolution
adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies ;
la demande peut être renouvelée par le Conseil dans les
mêmes conditions ».
Le sursis à enquêter et à poursuivre
trouver son fondement dans le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, donc
dans les exigences du maintien de la paix et de la sécurité
internationales.107(*)
Il est justifié par plusieurs raisons,
notamment :
- ne pas entraver des négociations diplomatiques ayant
pour objet un accord de paix ;
- le respect par la CPI des prérogatives que le Conseil
de Sécurité tient de la Charte des Nations Unies;
- Eviter des situations où la saisine de la CPI par un
Etat en raison du comportement d'un autre Etat risquerait de créer une
situation conflictuelle pouvant déboucher sur une guerre ;
- Eviter les incohérences dans la gestion des crises
internationales.
§2. Les conditions
d'application de l'article 16 du Statut de Rome
Il ressort de l'intelligence de la disposition de l'article
16 que le Conseil de sécurité ne peut solliciter de la CPI le
sursis à enquêter ou à poursuivre que lorsque les
conditions suivantes sont réunies :
- L'existence préalable d'une activité
d'enquête ou de poursuite. Considéré comme une suite
logique de l'article 15 du Statut de Rome, l'article 16 ne peut s'appliquer que
lorsqu'il est démontré que le Procureur a décidé
d'ouvrir une enquête et qu'il l'a déjà effectivement
entamée.
En d'autres termes, l'intervention du Conseil de
Sécurité ne peut sortir du néant.
- La requête en vue du sursis provient du Conseil de
Sécurité lui-même. Il s'agit d'une demande formulée
par le Conseil de sécurité par voie de Résolution, qu'il
adresse par ailleurs à la CPI.
- La motivation de la résolution du conseil de
sécurité.
La requête du Conseil de Sécurité doit
être suffisamment motivée sur fond du chapitre VII de la Charte
des Nations Unies. Il appartient en effet, au Conseil de sécurité
seul de procéder à la constatation d'une menace à la paix
et à la sécurité internationales108(*) , en démontrant
dans sa résolution que la continuation par le Procureur de
l'enquête ou de poursuites menacerait ou risquerait de menacer la paix et
la sécurité internationales.109(*)
§3. Analyse critique de
l'article 16 du Statut de Rome
L'article 16 du Statut de Rome est le fruit d'un compromis
extrêmement difficile intervenu après de trois longues et intenses
discussions.110(*)
Cette disposition a suscité de nombreux commentaires
critiques. Certains ont ainsi déploré qu'un rôle aussi
déterminant soit conféré au Conseil de
Sécurité sur le fonctionnement de la CPI alors même que
d'aucuns, au cours de la négociation, souhaitaient
précisément « déconnecter » le plus
possible la nouvelle juridiction de cette instance politique et
interétatique suprême.111(*)
Cette disposition est le fruit d'un délicat compromis,
en ce qu'elle admet, certes, que le Conseil puisse paralyser le fonctionnement
de la CPI, mais qu'elle exige, pour cela une demande expresse du Conseil de
Sécurité.
En effet, la procédure devant la CPI doit cesser
à partir du moment où le Conseil de sécurité,
après avoir traité de la même affaire entant que menace ou
atteinte à la sécurité internationale, sous le chapitre
VII de la Charte des Nations, décide de paralyser l'action de la CPI par
l'adoption d'une résolution portant suspension de la procédure
conduite devant la CPI.
Cette décision du Conseil de Sécurité de
suspendre une enquête ou une poursuite décidée par la Cour
nécessite le consentement de tous les membres permanents. La
conséquence de cette affirmation est que le veto peut empêcher le
Conseil d'user de son pouvoir de suspension.112(*)
Cet article est une des grandes critiques des partisans d'une
CPI indépendante. Si effectivement, il est nécessaire selon eux,
de ne pas entraver des négociations diplomatiques ayant pour objet un
accord de paix, un pouvoir de suspension des activités de la CPI sans
limite de temps, comme c'est le cas d'espèce, est difficilement
justifiable.113(*)
Par ailleurs, cette suspension ne permet même pas au
Procureur de mettre en oeuvre, à titre conservatoire, des investigations
qui permettraient que ne soient pas perdus preuves et
témoignages114(*), même si elle n'interdit pas le Conseil de
Sécurité d'autoriser ce type de mesure.115(*)
De plus, si le Conseil de Sécurité n'est jamais
intervenu auprès de la Cour internationale de justice116(*) dans une affaire relative
à la sécurité internationale, alors pourquoi n'en
serait-il pas de même pour la CPI ?
Le soutien apporté à l'article 16 du Statut de
Rome par les membres du Conseil de sécurité est logique, il
permet d'écarter toute éventuelle action de la CPI à
l'encontre d'un de leurs citoyens.
L'argument des partisans de cette disposition repose sur le
respect par la CPI des prérogatives que le Conseil de
Sécurité tient de la Charte des Nations unies. Il faut selon eux
intégrer la CPI au système institutionnel existant, cela dans le
respect de l'indépendance de cet organe juridictionnel et non
prétendre en vain d'affaiblir le Conseil de Sécurité.
Cette disposition permet d'éviter, comme nous l'avons
dit précédemment, des situations où la saisine de la CPI
par un Etat en raison du comportement d'un autre Etat risquerait de
créer une situation conflictuelle pouvant déboucher sur une
guerre. Elle répond également au souci de ne pas entraver
éventuellement un processus de négociation complexe visant
à signer un accord de paix ou un armistice117(*)par la délivrance et
l'exécution simultanées de mandats d'arrêt à
l'encontre de ceux là dont la signature au bas de tels accords
était recherchée118(*).
Certains auteurs vont même plus ou loin en
déclarant que l'absence d'une telle disposition dans le Statut de Rome
n'aurait empêché le Conseil de Sécurité de geler
l'activité de la CPI lorsque celle-ci viendrait à
interférer avec les priorités de maintien de la paix.
Comme cela a été rappelé à
plusieurs reprises, le Statut de Rome ne saurait limiter les
prérogatives que le Conseil de Sécurité tient de la Charte
des Nations Unies.
C'est ainsi que si l'on se place du côté du
Conseil de Sécurité, celui-ci ne peut, certes, pas, en dehors du
cadre du Statut, contraindre la CPI à suspendre les enquêtes, mais
il peut contourner cette difficulté en imposant aux Etats membres des
Nations Unies de cesser cette coopération avec elle119(*).
Si le Conseil de sécurité est l'organe
exécutif des Nations Unies en vertu de l'article 25 de la Charte des
Nations Unies et si les obligations imposées par la Charte d l'emportent
sur toute autre obligation issue d'un autre accord international, le Conseil de
Sécurité devrait être considéré comme capable
d'ordonner un arrêt des procédures de la CPI et cela uniquement
sur base de l'article 103 de la Charte précitée.
Or, ne possédant pas de force de police propre, la CPI
est très largement tributaire de la coopération que le Conseil de
Sécurité peut exiger des Etats non parties au Statut de la CPI,
en l'absence de laquelle elle serait de facto amenée à suspendre
son action.
L'article 16 du Statut de Rome était donc
incontournable en pratique parce que même en son absence, le Conseil de
Sécurité pouvait en tout état de cause, en vertu des
pouvoirs à lui conférés par la Charte des Nations Unies,
paralyser l'action de la CPI, au travers des Etats parties si le maintien de
la paix et de la sécurité internationales le
justifiait.120(*)
Cette disposition a le mérite d'institutionnaliser les
rapports entre le Conseil de sécurité et la CPI, ce qui
évite les incohérences dans la gestion des crises
internationales. Il serait malencontreux que la nouvelle institution, que
constitue la CPI intervienne dans des conflits d'une façon qui ne serait
pas cohérente avec les décisions du Conseil de
sécurité.
Pour beaucoup d'organisations de défense des droits de
l'homme, l'article 16 du Statut de Rome est une disposition funeste, le
judiciaire étant battu en brèche par le politique qui, à
tout moment, peut brider, pour une durée de douze mois renouvelable,
l'action de la CPI121(*). Les difficultés de rédaction de cette
disposition ont évidemment résulté de la
nécessité d'articuler l'action de la Cour avec la
responsabilité principale de maintien de la paix et de
sécurité internationales confiée au Conseil de
Sécurité.
D'aucuns ont relevé la contradiction
intrinsèque de l'article 16 du Statut de Rome avec le préambule,
qui affirme que les crimes que la Cour aura à juger, par nature,
menacent la paix et la sécurité dans le monde et qu'en d'autres
termes (même si cela n'est pas écrit, et cela n'est pas un hasard)
la répression de tels crimes doit être considérée
comme un facteur de paix.
Cependant, le Conseil de Sécurité, par l'effet
de cette disposition, aura ainsi la faculté de brider l'oeuvre de
justice présumée en faveur de la paix, pour
précisément assurer la paix, et ce sur le fondement du Chapitre
VII de la Charte des Nations Unies.
On peut rappeler d'ailleurs que le principal fondement
juridique de deux résolutions du Conseil de Sécurité,
n°827 du 25 mai 1993 et 955 du 08 novembre 1994 ayant institué le
TPIY et TPIR, est l'affirmation selon laquelle l'oeuvre de justice est facteur
de rétablissement de la paix.122(*)
Quoiqu'il en soit, on doit admettre d'une façon
réaliste la très grande difficulté de trouver un compromis
satisfaisant entre deux exigences a priori complémentaires et
alliés, mais qui peuvent se révéler cruellement
contradictoires.
L'article 16 du Statut de Rome est la traduction du compromis
dit de « Singapour », puis que c'est à l'initiative
de ce pays qu'il a été rédigé lors des
dernières sessions de la commission préparatoire des Nations
Unies, avant la conférence de Rome.123(*)
§4. Quelques risques
liés au pouvoir de suspension
Lorsque la CPI poursuit les hauts responsables d'Etat, le
pouvoir de suspension de l'action de celle-ci consacré par l'article 16
de son Statut, peut être sollicité par les Etats auprès du
Conseil de Sécurité, dans le but de politiser une
procédure judiciaire déclenchée, cherchant à
privilégier des solutions politiques faisant échapper ces
derniers de leur responsabilité pénale124(*)
L'exemple frappant dans ce cadre reste celui de la situation
au Darfour.
En effet, suite à la demande du mandat d'arrêt
par le procureur de la CPI inculpant le président Omar El-Béchir
pour crime de génocide, crimes de guerre et crimes contre
l'humanité, l'Union Africaine a eu à demander au Conseil de
Sécurité de l'ONU, le 21 juillet 2008, de suspendre l'action de
la Cour en différant d'un an une possible inculpation du
président soudanais.
Elle a également exhorté le gouvernement
soudanais, à enquêter sur les violations des droits de l'homme
commises au Darfour. L'UA a estimé que cette demande de mandat
d'arrêt « jetait de l'huile sur le feu »dans le
conflit du Darfour.
Il convient de souligner que, jusqu'à ce jour, cette
demande de suspension de l'action de la CPI émise par l'UA au Conseil de
sécurité n'a jamais eu de suite.
§5. L'article 16 du Statut
de Rome et les résolutions du Conseil de Sécurité
Dix jours seulement après l'entrée en vigueur
du Statut de Rome, alors que la CPI n'a pas encore commencé ses
activités judiciaires, le Conseil de Sécurité vote une
résolution125(*)
qu'il adresse à la CPI en ces termes :
« (....) agissant en vertu du Chapitre VII de la
Charte des Nations Unies, demande, conformément à l'article 16 du
Statut de Rome, que s'il survenait une affaire concernant des responsables ou
des personnels en activité ou d'anciens responsables d'un Etat
contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome, à raison d'actes ou
d'omissions liés à des opérations établies ou
autorisées par l'organisation des Nations Unies, la CPI, pendant une
période de 12 mois commençant le 1er juillet 2002,
n'engage ni mène aucune enquête ou aucune poursuite, sauf si le
Conseil en décide autrement(...) ».
Tout en demandant aux Etats membres des Nations Unies de ne
prendre aucune mesure qui soit contraire à sa résolution 1422, le
Conseil de Sécurité exprime son intention de renouveler, dans les
mêmes conditions, aussi longtemps que cela sera nécessaire, la
demande de sursis à enquêter ou à poursuivre qu'il vient de
formuler.
Cette promesse fut réalisée douze mois
après dans la résolution 1487 du 12 juin 2003, laquelle a repris
mot par mot celle de 2002. C'est que deux ans durant, à partir du
néant et sans justification aucune, le Conseil de Sécurité
a tenu en état la CPI.
Il a interdit au Procureur d'enquêter ou de poursuivre
si jamais il survenait une affaire concernant des responsables ou personnels
d'un Etat contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome à raison
d'actes ou d'omissions liés à des opérations
établies ou autorisées par l'ONU.
Initiés par les Etats-Unis d'Amérique, les
résolutions 1422 et 1487 ont eu pour vocation d'accorder aux contingents
américains en opérations militaires des Nations Unies une prime
à la capacité de nuisance. Forcément, les Etats se
trouvant dans la même situation que les Etats Unis d'Amérique
devraient tirer profit de ces résolutions.126(*)
Eu égard aux conditions précédemment
exposées, il nous revient de constater que le Conseil de
sécurité a recouru à l'article 16 du Statut de Rome sans
qu'à la base le Procureur n'ait engagé ou mené ni
enquêtés ni poursuites à l'égard de contingents
militaires américains ou autres.127(*)
C'est dire combien l'émotion a prévalu dans la
votation par le Conseil de Sécurité des résolutions 1422
et 1487, qui n'ont pas été épargnées de
critiques128(*) et qui
constituent aujourd'hui des précédents historiques fâcheux
et regrettables.129(*)
Selon L.CONDORELLI et S. VILLALPANDO : « De
très sérieux doutes surgissent quant à la
conformité de ces résolutions avec le Statut et la Charte(...).
Le fait que lesdites résolutions impliquent clairement une
interprétation exorbitante de l'article 16, permettant au politique
d'empiéter sur le judiciaire dans une mesure allant bien au-delà
de ce qui serait conforme à la ratio de cette disposition (...). En
effet, contrairement aux conditions imposées par le Chapitre VII de la
Charte, le Conseil n'y a pas du tout fait valoir que la mesure adoptée
(le sursis à enquêter ou à poursuivre pour la cour)
répondait aux intérêts relatifs au maintien de la paix et
de la sécurité internationales dans une situation
précisément identifiée » (...)130(*)
Section III. La
constatation de l'acte de l'agression
Le Conseil de Sécurité joue
un rôle crucial dans la constatation de l'acte d'agression. En effet, la
compétence de la CPI à l'égard du crime d'agression est
subordonnée au constat préalable de l'acte d'agression par le
Conseil sécurité.
Outre la définition du crime d'agression (§1), la
présente section sera axée sur l'exercice par la Cour de sa
compétence à l'égard du crime d'agression (§2).
§1.
Définition du crime d'agression
Après l'inscription de l'agression parmi les quatre
crimes justiciables de la CPI dans le Statut de Rome (131(*)), et de longues discussions
techniques et négociations politiques qui ont duré une dizaine
d'année, la communauté internationale a adopté enfin, une
définition du crime d'agression.
L'événement a eu lieu le 11 juin 2010 à
l'instant ultime de la conférence de Kampala sur la révision du
Statut de la CPI qui s'est tenue dans la capitale ougandaise du 31 mai au 11
juin 2010 (132(*)).
Il ressort de l'article 8 bis du Statut de Rome que l'on
entend par « crime d'agression », la planification, la
préparation, le lancement ou l'exécution par une personne
effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l'action politique ou
militaire d'un Etat, d'un acte d'agression qui, par sa nature, sa
gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte
des Nations Unies.
L'"acte d'agression" se définit comme l'emploi par un
État de la force armée contre la souveraineté,
l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un
autre État, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte
des Nations Unies. Qu'il y ait ou non déclaration de guerre, les actes
suivants sont des actes d'agression au regard de la résolution 3314
(XXIX) de l'Assemblée générale des Nations Unies en date
du 14 décembre 1974 :
a) L'invasion ou l'attaque par les forces armées d'un
État du territoire d'un autre État ou l'occupation militaire,
même temporaire, résultant d'une telle invasion ou d'une telle
attaque, ou l'annexion par la force de la totalité ou d'une partie du
territoire d'un autre État ;
b) Le bombardement par les forces armées d'un
État du territoire d'un autre État, ou l'utilisation d'une arme
quelconque par un État contre le territoire d'un autre État ;
c) Le blocus des ports ou des côtes d'un État par
les forces armées d'un autre État ;
d) L'attaque par les forces armées d'un État des
forces terrestres, maritimes ou aériennes, ou des flottes
aériennes et maritimes d'un autre État ;
e) L'emploi des forces armées d'un État qui se
trouvent dans le territoire d'un autre État avec l'agrément de
celui-ci en contravention avec les conditions fixées dans l'accord
pertinent, ou la prolongation de la présence de ces forces sur ce
territoire après l'échéance de l'accord pertinent ;
f) Le fait pour un État de permettre que son
territoire, qu'il a mis à la disposition d'un autre État, serve
à la commission par cet autre État d'un acte d'agression contre
un État tiers ;
g) L'envoi par un État ou au nom d'un État de
bandes, groupes, troupes irrégulières ou mercenaires armés
qui exécutent contre un autre État des actes assimilables
à ceux de forces armées d'une gravité égale
à celle des actes énumérés ci-dessus, ou qui
apportent un concours substantiel à de tels actes.
§2. L'exercice par la Cour
de sa compétence à l'égard du crime d'agression
Les articles 15 bis et 15 ter du Statut de
Rome prévoient les conditions d'exercice de la compétence de la
Cour à l'égard du crime d'agression.
A la différence des autres crimes prévus dans le
Statut de Rome, le crime d'agression fait l'objet d'un régime
juridictionnel spécifique prévu par ces articles qui
définissent quand le Procureur de la CPI peut ouvrir une enquête.
En effet, conformément à l'article 15 ter du
Statut de Rome, lorsqu'une situation est renvoyée au Procureur par le
Conseil de sécurité de l'ONU, la compétence de la cour est
activée de la même manière que pour les autres crimes du
Statut, ce qui signifie que le Procureur peut ouvrir une enquête sur le
crime d'agression (133(*)).
En revanche, en vertu de l'article 15 bis, le Procureur ne
peut ouvrir une enquête sur un crime d'agression de sa propre initiative
ou sur renvoi par un Etat seulement :
- Après s'être assuré que le Conseil de
sécurité a constaté qu'un acte d'agression a
été commis par l'Etat en cause (134(*)) conformément
à l'article 39 de la Charte des Nations unies ou après avoir
laissé passer six mois suivant la date de l'avis du Procureur au
secrétaire général de l'ONU (135(*)).
- Lorsque la situation concerne un acte d'agression commis
entre Etats parties. En effet l'article 15 bis, 4 dispose que « la
Cour peut, conformément à l'article 12, exercer sa
compétence à l'égard d'un crime d'agression
résultant d'un acte d'agression commis par un Etat partie à moins
que cet Etat partie n'ait préalablement déclaré qu'il
n'accepterait pas une telle compétence en déposant une
déclaration auprès du greffier. En ce qui concerne un Etat qui
n'est pas partie au statut de Rome, l'article 15 bis, 5 prévoit que la
cour n'exerce pas sa compétence à l'égard du crime
d'agression quand celui-ci est commis par des ressortissants de cet Etat ou sur
son territoire.
- A condition que la section préliminaire de la Cour
ait autorité l'ouverture d'une enquête. Ainsi, l'article 15 bis, 8
dispose « Lorsqu'un tel constant n'est pas fait dans les six mois
suivant la date de l'avis, le Procureur peut mener une enquête pour crime
d'agression, à condition que la section préliminaire ait
autorisé l'ouverture d'une enquête pour crime d'agression selon la
procédure fixé à l'article 15, et que le Conseil de
sécurité n'en décide autrement, conformément
à l'article 16 ».
L'article 15 bis prévoit également que les
Etats parties peuvent se soustraire à la compétence de la Cour en
déposant une déclaration de non-acceptation de la
compétence auprès du greffier de la Cour. Le retrait d'une telle
déclaration peut être effectué à tout moment et sera
envisagé par l'Etat partie dans un délai de trois ans (136(*)).
Il sied de préciser, enfin, que les articles 15 bis,
9 et 15 ter, 4 prévoient que le constat d'un acte d'agression par un
organe extérieur à la Cour est sans préjudice des
constatations que fait la Cour elle-même en vertu du Statut de Rome
(137(*)).
Section IV. SOUTIEN DU
CONSEIL DE SECURITE EN MATIERE DE COOPERATION DES ETATS AVEC LA COUR PENALE
INTERNATIONALE
Outre la saisine de la CPI, la suspension de son
activité et la constatation de l'acte d'agression, le conseil de
sécurité joue également un rôle crucial en
matière de coopération des Etats avec la Cour.
Avant d'examiner l'application de l'obligation de
coopérer en cas de saisine par le Conseil de Sécurité
(§3), il s'avère impérieux de faire, préalablement un
aperçu général sur cette obligation (§1) et les
imperfections résultants de cette dernière (§2).
§1. Aperçu
général sur l'obligation de coopération
Parce qu'elle est appelée à agir sur les
territoires et à l'égard des nationaux d'Etats souverains, la CPI
a besoin de leur pleine coopération. Cette coopération doit
déjà commencer par l'incorporation des dispositions du Statut de
Rome relatives à la poursuite et le châtiment des auteurs des
crimes internationaux devant les juridictions nationales.
Ensuite les Etats doivent prêter assistance à la
Cour lorsqu'elle est saisie. Ainsi, la Cour a besoin de la coopération
des Etats tant pour l'enquête et les poursuites que pour
l'exécution des peines.
S'agissant de l'enquête et des poursuites, la CPI doit
recevoir l'assistance des Etats tant dans la collecte des preuves, que dans
l'arrestation et le transfèrement des prévenus.
Les Etats requis doivent notamment prendre les mesures
nécessaires pour qu'un suspect présent sur leur territoire soit
maintenu à la disposition de la Cour. Celle-ci ne dispose en effet, pas
de moyens autonomes pour effectuer ces opérations, qui de surcroit, ne
peuvent pas être effectuées sur le territoire d'un Etat sans son
consentement.
Relativement à l'exécution des peines, la CPI ne
dispose pas de centres de détention. Elle n'est qu'un organe
juridictionnel. Les peines qu'elle prononce ne peuvent donc être
exécutées que dans un Etat désigné par elle.
Toutefois, la CPI ne peut imposer cette charge à un Etat. Elle le
désigne sur la liste des Etats ayant fait savoir qu'ils y
étaient disposés. Néanmoins, elle contrôle les
capacités dudit Etat à recevoir les condamnés et surveille
l'exécution de la peine.
De tout ce qui précède, il ressort que la
souveraineté des Etats lie fortement la CPI. Texte à valeur
conventionnelle, le Statut de Rome créant la CPI a pour levier d'action,
la coopération des Etats.
C'est dire simplement que si ceux-ci ne coopèrent pas
avec la CPI, les mesures susceptibles d'être prises par celle-ci
resteront vaines.
Le traité de Rome ne dispose d'aucun instrument de
coercition, force de police, pour faire appliquer ses décisions.
Luis MORENO-OCAMPO, ex-procureur de la CPI, qui s'exprimait
dans l'hebdomadaire, le courrier international, n° 877 affirme justement
que : « Je suis un Procureur sans Etat, j'ai 100 Etats sous ma
juridiction, mais sans un seul policier » (138(*)).
Le chapitre IX du Statut de Rome (article 86 à 102)
est consacré à la coopération internationale et de
l'assistance judiciaire.
Sans prétendre entrer dans le détail de ses
articles, certains parmi eux méritent néanmoins d'être ici
mentionnés.
C'est le cas de l'article 86(139(*)) qui, comme l'indique son
intitulé, pose une obligation générale de coopérer,
à la charge de tout Etat partie.
Précisons que, sur ce point, sont assimilés
à des Etats parties les Etats tiers ayant accepté, de
façon ad hoc, la compétence de la Cour, conformément
à l'article 12, 3140(*).
Quant au contenu de cette obligation, il est
détaillé par les articles 89 à 93. Il se résume en
particulier par la possibilité pour la Cour de demander aux Etats
parties d'arrêter et de lui transférer un suspect141(*).
§2. Les imperfections de
l'obligation de coopération
Force est de constater, néanmoins,
qu'en dépit des dispositions ci-haut citées, le Statut demeure
extrêmement favorable aux Etats, en ce qu'il autorise des restrictions
à l'obligation de coopérer, et offre en outre, quantité de
motifs permettent de différer sa mise en oeuvre.142(*)
Pour ce qui est, en premier lieu, des restrictions à
l'obligation de coopérer, l'article 93, 4143(*) permet à un Etat de
rejeter une demande d'assistance de la Cour lorsque sa sécurité
nationale est enjeu.
Cet article, à l'inclusion duquel la France mais
surtout les Etats Unis se montrèrent extrêmement favorables,
risque fort d'entraver de manière significative le fonctionnement de la
Cour, dans la mesure où, et c'est ce qui ressort de l'article 72, 7, la
Cour n'a pas le pouvoir d'ordonner la divulgation des documents à l'Etat
en question.
La seule conséquence que le Statut lui permette de
tirer d'un refus est la mise en oeuvre de l'article 87, 7144(*) traitant de la sanction de
non- coopération.
Or, compte tenu de la difficulté de l'adoption de
quelconques sanctions, il est peu probable qu'un Etat soit contraint de
divulguer des documents qu'il a estimé toucher à sa
sécurité nationale, avec parfois une bonne foi tout à fait
relative.
De plus, quoiqu'il en soit, l'Etat en cause pourra persister
dans son refus de coopérer tant que l'Assemblée des Etats
parties, ou le Conseil de Sécurité (lorsqu'il est à
l'origine de la saisine), ne se seront prononcés.
Le Statut offre ainsi aux Etats un motif leur permettant de ne
pas satisfaire aux demandes de coopération de la Cour sans que cela
n'apparaisse, dans la majeure partie des cas, comme de la
non-coopération caractérisée, puisque autorisé par
lui.
Certes, l'article 93, 4 du Statut de Rome se comprend en ce
sens qu'en vertu du principe de souveraineté, chaque Etat doit pouvoir
seul déterminer si sa sécurité nationale est
menacée.
Mais les risques d'abus dans l'usage de cette disposition la
font apparaître comme un obstacle à l'action de la Cour.
La proposition britannique, en vertu de laquelle la Cour
aurait pu apprécier, selon une procédure et des critères
détaillés par le Statut, le bien fondé d'une exception de
sécurité nationale, aurait permis de trouver un équilibre
entre les revendications étatiques au nom du principe de
souveraineté et le souci d'un fonctionnement efficace de la Cour,
celle-ci n'a malheureusement pas été retenue, du fait en
particulier de l'opposition américaine.145(*)
En second lieu, les articles 94 (sursis à
l'exécution d'une demande en raison de l'engagement d'une enquête
ou de poursuites)146(*)
et 95(sursis à exécution d'une demande en raison d'une exception
d'irrecevabilité147(*)prévoient la possibilité pour les Etats
parties de retarder l'exécution d'une demande de coopération.
Enfin, autre restriction à l'obligation de
coopérer, l'article 89, 1 du Statut de Rome indique que les demandes
d'arrestation et de transfert seront tributaires des procédures
prévues par les législations nationales.
Certes, en vertu de l'article 88 du Statut
précité, « les Etats veillent à prévoir
dans leur législation nationale les procédures qui permettent la
réalisation de toutes les formes de coopération visées
dans le présent chapitre », mais il n'en reste pas moins que
la rapidité et l'effectivité de l'adaptation des
législations nationales dépendra de la bonne volonté des
Etats parties.148(*)
L'article 89, 1 du Statut de Rome risque d'être
extrêmement préjudiciable au fonctionnement de la Cour, en ce
qu'il permet à la procédure d'une demande d'arrestation ou de
transfert d'être régie par la législation nationale de
l'Etat auquel elle est adressée.
§3. L'application de
l'obligation de coopérer en cas de saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité
L'article 86 du Statut de Rome ne distinguant pas entre les
différents modes de saisine, il est donc applicable également
selon toutes vraisemblances, lorsque la Cour est saisie par le Conseil de
Sécurité.
Cependant cet article ne vise que les Etats parties (compte
tenu du principe de l'effet relatif des traités-article 34 de la
Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités) ; par
conséquent, au regard du Statut, l'obligation de coopérer
n'existe pas s'agissant des Etats tiers, même lorsque le Conseil est
à l'origine de la saisine. L'article 87, 5 du Statut de Rome
prévoit uniquement à leur sujet une coopération sur une
base volontaire.149(*)
Or, la coopération des Etats tiers risque de
s'avérer primordiale au bon fonctionnement de la Cour.
En effet, selon le régime de consentement à la
compétence de la Cour retenu (article 12 du Statut de Rome), il est
parfaitement envisageable que l'Etat sur le territoire duquel a
été commis le crime, ou l'Etat de la nationalité de
l'accusé, ne soient pas partie au Statut de Rome (et n'aient pas
accepté la compétence de la Cour sur une base ad hoc). Leur
coopération sera pourtant indispensable.
Une obligation de coopérer ne pouvant être mise
à leur charge sur le fondement du Statut, elle ne saurait émaner
que d'une source extérieure à celui-ci. Et c'est
précisément à ce stade que le Conseil va s'avérer
déterminant.
De sa décision en vertu du Chapitre VII de la Charte
des Nations Unies de saisir la Cour va résulter l'obligation pour tout
Etat membre des Nations Unies de coopérer avec la Cour en vertu de
l'article 25 de la Charte précitée.
La résolution en question contiendra probablement
d'ailleurs une affirmation expresse de cette obligation. L'imposition d'une
telle obligation étant considérée comme une mesure
nécessaire au titre du Chapitre VII.
Cependant, les Etats tiers, s'ils se voient dans l'obligation
de coopérer avec la Cour, n'en deviennent pas pour autant parties au
Statut, ni ne sont considérés comme exceptant sa
compétence de manière ad hoc : c'est donc une relation se
développant en dehors du Statut, entre le Conseil de
Sécurité et les Etats tiers plus particulièrement qui va
permettre à la Cour d'avoir une action plus effective que ne le
laissaient présager ses dispositions statutaires.150(*)
L'article 87, 7 du Statut de Rome traite de la sanction du
refus de coopérer. En effet, cet article énonce que
« si un Etat partie n'accède pas à une demande de
coopération de la Cour contrairement à ce que prévoit le
présent Statut et l'empêche ainsi d'exercer les fonctions et les
pouvoirs que lui confère le présent Statut, la Cour peut en
prendre acte et en référer à l'Assemblée des Etats
parties ou au Conseil de Sécurité lorsque c'est celui-ci qui l'a
saisie ».
Et l'article 112, 2 consacré à
l'Assemblée des Etats parties, prévoit que
« L'Assemblée(...) » f) examine, conformément
à l'article 87, §5 et 7, toute question relative à la
non-coopération des Etats(...) ».
Si l'on considère que pour un Etat la simple
perspective de voir la Cour « prendre acte » de son refus
de coopérer et d'apparaître ainsi, aux yeux de la
communauté internationale, comme violant le droit international, ne
suffira pas toujours à l'inciter à respecter ses obligations au
regard du Statut151(*),
de potentielles mesures de sanctions seraient opportunes. Or l'article 112, 2
ne précise aucunement les mesures que l'Assemblée des Etats
Parties pourra adopter.
L'indéniable atout que peut représenter le
recours au Conseil de Sécurité face au refus d'un Etat de
coopérer a été reconnu dans le Statut de Rome.
Cependant, ce dernier dans le souci constant de ne pas
octroyer un rôle excessif dans la procédure au Conseil de
Sécurité, ne retient le recours à celui-ci que lorsqu'il
est à l'origine de la saisine.
CONCLUSION PARTIELLE
En guise de conclusion du premier chapitre, il sied de
souligner que le Conseil de Sécurité joue un rôle crucial
dans le fonctionnement de la CPI.
En effet, le Statut de Rome reconnait à ce dernier des
pouvoirs exorbitants, à savoir le renvoi d'une situation criminelle, la
suspension de l'activité de la Cour, la constatation de l'acte
d'agression et le soutien du Conseil de Sécurité en
matière de coopération des Etats avec la CPI.
Ces pouvoirs ont pour fondement le Chapitre VII de la Charte
des Nations Unies qui confère au Conseil de sécurité la
responsabilité principale en matière de maintien de la paix et de
la sécurité internationales.
Chapitre II. L'INDEPENDANCE
DE LA COUR PENALE INTERNATIONALE FACE AUX POUVOIRS RECONNUS AU CONSEIL DE
SECURITE
Les prérogatives exorbitantes confiées au
Conseil de Sécurité par le Statut de Rome ne rassurent pas
pleinement sur l'indépendance de la CPI.
En effet, l'intervention du Conseil de sécurité
dans l'activité judiciaire de la Cour compromet l'indépendance de
celle-ci entant qu'organe judiciaire dès lors que l'article 15 bis, 6 du
Statut de Rome place la CPI sous la coupe du Conseil de Sécurité
et l'article 16 permet à ce dernier de geler l'activité de la
Cour pendant une année renouvelable.
Il ressort de la lecture de ces dispositions, une
primauté du politique sur le judiciaire.
En d'autres termes, le judiciaire a été battu en
brèche par le politique.152(*)
D'où nécessite de réfléchir dans
le cadre de ce chapitre, sur l'indépendance de la CPI face aux articles
13, b (Section II), 16 et 15 bis, 6 (Section III) du Statut de Rome.
Au terme de ce chapitre, nous analyserons les
conséquences de l'intervention du Conseil de Sécurité dans
l'activité judiciaire de la CPI et nous proposerons quelques pistes de
solution (Section IV).
Avant d'aborder ces points, il s'avère impérieux
d'analyser le lien entre la CPI et l'ONU (Section I).
Section I. LE LIEN ENTRE LA
CPI ET L'ONU
Parmi tous les moyens disponibles pour l'établissement
de la CPI déjà à l'heure des travaux préparatoires
au sein de la commission Ad hoc, on a eu un accord presque unanime pour donner
la naissance à un organe judiciaire indépendant par un
traité multilatéral.
Cette approche qui se basait sur le consentement
exprès des Etats, permettait de concilier le principe de la
souveraineté de l'Etat et le but d'assurer l'autorité
légale de la Cour.153(*)
Les autres propos consistaient dans l'établissement de
la CPI par un amendement de la Charte de l'ONU ou par l'adoption d'une
résolution votée par le Conseil de sécurité ou par
l'Assemblée générale.
La création de la Cour par un amendement de la Charte
de l'ONU se serait traduite dans une intégration de la Charte de l'ONU
par le statut-même, avec la conséquence de devenir contraignant
pour tous les membres des Nations Unies.
La CPI se serait déplacée sur un niveau
comparable à celui de la CIJ, mais agissant dans des domaines
différents : la première aurait fait justice dans les cas de
crimes individuels, pendant que la seconde l'aurait fait dans le cadre des
relations internationales.154(*)
Même si cette solution présente des aspects
positifs, ses désavantages les plus décisifs étaient de
nature pratique et politique, parce que la procédure d'amendement de la
Charte de l'ONU est assez complexe et longue.155(*)
Les avantages d'une constitution de la Cour à travers
une résolution de l'Assemblée Générale auront
été le temps d'adoption très court et l'attribution
à la Cour d'une nature universelle à l'égard de tous les
membres des NU. Par contre, il y aurait eu, en même temps, de doutes de
légitimité en utilisant cet instrument et, puisque
l'Assemblée générale ne peut pas prendre des
décisions contraignantes à l'égard des Etats souverains,
la CPI aurait été un organe subsidiaire (au contraire de la
CIJ).
Par rapport à la dernière alternative,
c'est-à-dire à la création de la Cour par l'adoption d'une
résolution du Conseil de Sécurité, il n'y aurait pas eu de
problèmes de légitimité, en considérant
généralement acceptée la précédente
création des deux Tribunaux Ad hoc par ce moyen. Toutefois
l'établissement d'une telle Cour aurait été possible
seulement au sein de l'accomplissement des buts poursuivis par le chapitre VII,
buts qui excluent l'instauration d'une institution permanente pour tous les cas
futurs.
Il y a des raisons politiques très fortes à la
base du choix d'un traité multilatéral pour donner naissance
à la Cour, surtout celle d'assurer à la CPI la plus ample
autonomie d'action possible à l'égard des Nations Unies.
L'accord entre l'ONU et la CPI fut signé le 4 octobre
2004.
On présente ci-après le rapport156(*) faisant brièvement
l'histoire du projet d'accord négocié :
« La commission préparatoire de la Cour
pénale internationale a examiné le projet d'accord à ses
sixième, septième et huitième séances sur la base
d'une projet soumis par le secrétariat des Nations Unies. La commission
préparatoire a adopté le projet d'accord par consensus à
sa huitième séance, le 5 octobre 2001.
Après l'entrée en vigueur du Statut de Rome,
l'Assemblée a approuvé le projet d'accord à sa
première séance, le 9 septembre 2002. A sa deuxième
séance, elle a adopté la résolution ICC-ASP/2/Res.7
intitulée « Renforcer la Cour pénale internationale et
l'Assemblée des Etats Parties ». Le paragraphe 7 de cette
résolution dispose qu'elle « espère que les
négociations entre la Cour et l'Organisation des Nations Unies
progresseront et prie la Cour de la tenir informée ».
Trois mois plus tard, le 9 décembre 2003,
l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la
résolution 58/79 invitant le secrétaire général
à « prendre les mesures voulues pour conclure un accord
régissant les relations entre l'Organisation des Nations Unies et la
Cour pénale internationale et à lui présenter le projet
négocié pour approbation ».
Le 10 décembre 2003, les deux institutions ont pris
contact en vue d'engager des négociations sur l'accord.
La CPI a décidé que sa
délégation serait composée de membres de chacun de ses
trois organes ainsi que du Directeur du Secrétariat de
l'Assemblée et qu'elle serait conduite par le Président.
Quant aux objectifs des pourparlers avec les Nations Unies,
il a été convenu de s'en tenir dans toute la mesure possible au
texte du projet d'accord adopté par l'Assemblée en septembre 2002
tout en répondant aux préoccupations des Nations Unies et en
apportant des éclaircissements si nécessaires.
Une première série de négociations a
eu lieu les 26 et 27 février 2004 au siège des Nations Unies
à New York. Elle a été suivie d'un échange de
lettres qui a permis aux deux parties de clarifier leur point de vue sur un
certain nombre de questions.
Une deuxième série de négociations a
eu lieu les 20 et 21 mai 2004. Toutes les questions ont été
résolues. Le projet d'accord a été paraphé le 7
juin 2004 à La Haye par les chefs des deux délégations.
Les négociations ont donnée lieu à
quelques modifications et additions par rapport au projet d'accord
adopté par l'Assemblée. Les modifications visaient soit à
clarifier certains points soit à tenir compte de situations qui
auraient pu ne pas avoir été prévues au moment de la
négociation du projet d'accord. De l'avis de l'ensemble des organes de
la Cour du Secrétariat de l'Assemblée, ces modifications et
additions157(*) ont
amélioré le texte existant sans altérer la substance du
sujet d'accord ».
L'adoption du projet négocié régissant
les relations entre la CPI et l'Organisation des Nations Unies a
été prise au cours de la troisième séance de
l'Assemblée des Etats Parties tenues à La Haye du 6 au 10
septembre 2004158(*).
Après presque un mois, le 4 octobre 2004, l'accord a
été signé à New York par M. le juge Philippe
Kirsch, Président de la Cour, et M. Koffi Annan, secrétaire
général de l'ONU et il est entré en vigueur dès sa
signature.
Section II. L'INDEPENDANCE
DE LA CPI FACE A L'ARTICLE 13, B DU STATUT DE ROME
« Les rapports entre le Conseil de
sécurité et la CPI ne doivent pas être des rapports de
subordination mais de respect mutuel ».159(*)
Les dispositions du Statut de Rome traduisent le souci de ne
pas faire de la Cour, organe judiciaire, un instrument « à la
merci » du Conseil de sécurité, organe politique.
La répartition des rôles entre le Procureur et le
Conseil de Sécurité, en particulier, illustre cette
volonté de préserver l'indépendance de la Cour.
Pour préserver l'indépendance de la CPI au
regard du pouvoir de saisine dévolu au Conseil de
sécurité, le respect des dispositions du Statut de Rome
s'avère impérieux (§1).
En outre, le Conseil de Sécurité devrait pouvoir
saisir la Cour que de « situations » et non de cas
particuliers (§2).
Enfin, le procureur devait exercer ses fonctions en toute
indépendance. (§3).
§1. La saisine de la CPI
par le Conseil de Sécurité doit se faire dans le respect des
dispositions du Statut de Rome
La préservation de l'indépendance de la CPI
s'est matérialisée par l'intégration de l'action du
Conseil de Sécurité dans un système
préétabli, c'est-à-dire que la saisine par le Conseil de
Sécurité doit se faire dans le respect des dispositions du Statut
de Rome.
Les articles 13, 17, 19et 53160(*) du statut de Rome ne laissent aucun doute quant au
fait que le Conseil de Sécurité doit respecter les dispositions
du Statut de Rome lorsqu'il saisit la Cour.161(*)
Il ressort de l'article 13 que la Cour doit exercer sa
compétence « conformément au présent
Statut », et ce dans les trois hypothèses de saisine
prévues (par un Etat partie, par le Conseil de sécurité et
par le Procureur agissant proprio motu).
Aucun régime particulier n'est octroyé au
Conseil de Sécurité. Celui-ci ne pourra non plus de sa propre
initiative faire peser sur la Cour une obligation contraire aux dispositions du
Statut de Rome ; celle-ci n'étant pas par définition un
membre des Nations Unies.
Il ne serait guère concevable que le Conseil lorsqu'il
saisit la Cour ne soit lié que par le Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies.
Au stade de la saisine, cela signifie que le Conseil de
Sécurité devra respecter les limites à la
compétence rationne materiae162(*), ratione personae 163(*) et rationne temporis 164(*) de la Cour.
Notons que la saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité des Nations Unies permettra néanmoins à la
CPI d'exercer sa compétence à l'égard des crimes de guerre
dans l'hypothèse où serait en cause un Etat ayant utilisé
la possibilité d'opting out prévue à l'article 124 du
Statut de Rome165(*).
La CPI peut, au titre de l'article 19 de son Statut,
contrôler, sur demande ou d'office, le respect par le Conseil de
Sécurité des dispositions statutaires lorsqu'il saisit la
Cour.
§2. Le Conseil de
Sécurité ne devrait pouvoir saisir la Cour que de
« situations et non de « cas particuliers »
L'article 13 littera b prévoit que
le Conseil de sécurité saisit la Cour d'une « situation
dans laquelle un ou plusieurs de ces crimes paraissent avoir été
commis ». Le terme « situation » n'était
pas celui initialement retenu dans le projet de la Commission du Droit
International de 1993 166(*), mais s'est peu à peu imposé.
Etant précisé que le Statut ne le
définit à aucun moment, il ressort des négociations que ce
terme doit s'entendre par opposition au « cas
particulier ».
Ainsi, le Conseil de Sécurité ne pourrait pas
saisir la Cour de « cas particuliers »,
c'est-à-dire désigner nommément des personnes, mais
uniquement, de façon plus large, de « situations »,
qui seraient, comme cela fut le cas, s'agissant de la création des deux
tribunaux pénaux internationaux, limités dans le temps et
l'espace.
Les raisons du choix du terme
« situation » sont multiples :
La première a été motivée par le
souci d'une bonne administration de la justice. Si le Conseil de
sécurité saisissait la CPI de cas particuliers, seules les
personnes visées par le Conseil de sécurité dans sa
décision de saisine feraient l'objet d'enquêtes et de poursuites
et le Procureur de la CPI, privé de son pouvoir d'appréciation
dans la conduite des enquêtes et par conséquent les poursuites
à d'autres individus. Il serait limité aux affaires
déférées.
C'est pour cette raison qu'il est apparu plus conforme au
souci d'indépendance et d'impartialité de la CPI de confier la
détermination des personnes à poursuivre à un Procureur
indépendant et guidé, espérons-le, par des
considérations juridiques167(*).
La deuxième raison est que le Conseil de
Sécurité n'étant pas un organe judiciaire mais
plutôt politique, n'a pas de moyens de mener une enquête aux
fins de dégager les responsabilités pénales
individuelles.
§3. Le procureur
exerçant ses fonctions en toute indépendance
La préservation de
l'indépendance de le CPI s'est opérée par la
prévision, par le Statut de Rome, des mécanismes permettant au
Procureur d'exercer ses fonctions en toute indépendance.
Le procureur va ainsi pouvoir, si une situation lui est
déférée par le Conseil de Sécurité,
enquêter et décider en toute indépendance quels individus,
il lui parait opportun et nécessaire de poursuivre et pour quels
crimes168(*).
Dans le cas où le Procureur décide de ne pas
engager des poursuites, le Conseil de sécurité ne peut que
demander un réexamen par la chambre préliminaire (et cela
uniquement quand il est à l'origine de la saisine), afin que celle-ci
demande à son tour au Procureur de la reconsidérer169(*).
Le Conseil de sécurité est donc dans la
même position que tout Etat partie ayant saisi la Cour, et ne se voie
reconnaitre aucun régime spécial. 170(*)
Par conséquent, le Procureur n'a absolument aucune
obligation de donner suite à la saisine émanant du Conseil de
sécurité des Nations Unies.
Il n'est même pas lié par la détermination
du Conseil de Sécurité relativement à la compétence
de la CPI ou à la recevabilité d'une affaire.171(*)
Le Statut encadre ainsi strictement l'action du Conseil de
Sécurité, et celui-ci ne saurait trouver dans la Charte des
Nations Unies, une source de dérogations à ces dispositions, dans
la mesure où, ni la Cour ni le Procureur ne peuvent être
regardés comme « subordonnés » à
l'action du Conseil de Sécurité au titre du Chapitre VII,
n'étant pas membres des Nations Unies.
Section III. L'INDEPENDANCE
DE LA CPI FACE AUX ARTICLES 16 ET 15,6 DU STATUT DE ROME
L'intervention du Conseil de
Sécurité, organe politique des Nations Unies, dans
l'activité de la CPI, organe judiciaire créé par le Statut
de Rome, peut conduire au risque de politisation de la procédure
judiciaire.
Ainsi, le pouvoir de suspension de l'action de la CPI
consacré par l'article 16 de son Statut, peut être
sollicité par les Etats auprès du Conseil de
sécurité, dans le but de politiser une procédure
judiciaire déclenchée, cherchant à privilégier des
solutions politiques faisant échapper les auteurs des crimes
internationaux de leur responsabilité pénale.
D'où il s'avère impérieux de
réfléchir, dans la présente section sur
l'indépendance de la CPI au regard des articles 16 (§1) et 15,6
(§2) du Statut de Rome.
§1. L'indépendance
de la CPI face à l'article 16 du Statut de Rome
Le problème qui se pose ici concerne
l'étendue des pouvoirs reconnus au Conseil de Sécurité par
le Statut de le CPI.
En effet, si toute violation de DIH peut être
considérée comme menace contre la paix et la
sécurité internationales par le Conseil de
Sécurité, conformément au Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies, et si la CPI ne pouvait, en réalité, intervenir
qu'avec l'autorisation du Conseil de Sécurité, l'article 16 du
Statut de Rome risquerait de faire passer la CPI en sous-organe du Conseil de
Sécurité.
Ce risque a été cependant réduit à
la conférence de Rome.
En effet, l'article 23,3 du Projet de la CDI 172(*) prévoyait que la
procédure devant la CPI devrait cesser dès le moment où
le Conseil de sécurité traite de la même affaire.
N'importe quel membre Conseil de Sécurité pouvait dans ce cas
bloquer l'activité de la CPI en plaçant l'affaire à
l'ordre du jour, même si ce dernier ne règle pas l'affaire.
Si de nombreux Etats préconisaient la suppression pure
et simple de cet article, Singapour fit une proposition de compromis
173(*) entre les
défenseurs et les opposants de l'article 16.
La CPI a le droit d'agir même si le Conseil de
sécurité s'occupe déjà de l'affaire mais ce dernier
a à sa disposition une responsabilité de bloquer l'action de la
CPI avec une résolution en ce sens, adoptée sur la base du
Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
L'article 16 reflète donc la recherche d'un
équilibre entre les prérogatives du Conseil de
sécurité en vertu de la Charte des Nations Unies d'une part et la
volonté d'instaurer une CPI indépendante, capable de fonctionner
sans être sous l'empire irrémédiable du Conseil de
sécurité, un organe politique.
D'où Elodie DULAC affirme avec raison que
« L'enjeu était ici de parvenir à reconnaitre dans le
statut, la responsabilité principale du Conseil en matière de
maintien de la paix et de la sécurité internationales, sans pour
autant, autoriser une interférence excessive de celui-ci dans le
fonctionnement de la Cour, et refreiner ainsi les ardeurs des membres
permanents (à l'exception du Royaume Uni), qui se seraient fort
accommodés d'une Cour bridée par le
Conseil ».174(*)
Cet article est donc le résultat d'un compromis
puisque le droit de regard du Conseil de sécurité n'est pas aussi
automatique qu'il le parait.
En effet, le Conseil de Sécurité doit demander
la suspension des enquêtes et poursuites à la CPI.
Cette demande suppose le vote d'une résolution
à la majorité des membres du Conseil de sécurité
et surtout qu'aucun membre permanent n'exerce pas son droit de véto.
En l'absence d'une résolution adoptée sur base du Chapitre VII,
la CPI continue ses investigations.
L'article 16 du Statut de Rome porte atteinte au principe
fondamental de l'indépendance de la magistrature reconnue par les
instruments protecteurs des droits de l'homme175(*).
Cette disposition parait contraire aux règles de droit
au procès équitable, règles que la chambre d'appel du TPIY
et le Comité des droits de l'homme ont qualifiées de
règles impératives du droit international176(*). Or, comme le Conseil
de sécurité doit agir « conformément aux buts et
principes des Nations Unies »177(*), lesquels comprennent le respect des
« principes de la justice et du droit
international »178(*), il en découlerait que l'article 16 ne
pourrait justifier une intervention du Conseil de sécurité dans
les enquêtes et poursuites du Procureur.
En sens inverse, on observera qu'aux termes des principes
fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature, d'une
part, « les magistrats règlent les affaires dont ils sont
saisis impartialement, d'après les faits et conformément à
la loi, sans restrictions et sans être l'objet d'influences, incitations,
pressions, menaces ou interventions indues, directes ou indirectes, de la part,
de qui que ce soit et pour quelque raison que ce soit », d'autre
part, « La justice s'exerce à l'abri de toute intervention
injustifiée ou ingérence [...] » 179(*)
A contrario, il serait donc permis de considérer que
l'intervention du Conseil de Sécurité dans les enquêtes et
poursuites du Procureur de la CPI ne serait ni « indue » ni
« injustifiée », dès lors qu'elle est
fondée sur le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, donc sur les
exigences de maintien de la paix et de la sécurité
internationales.
Il reste que, eu égard à son caractère
exorbitant, ce pouvoir de blocage du Conseil de sécurité devrait
être interprété restrictivement : Le Conseil de
Sécurité doit justifier sa décision de suspendre une
procédure en cours devant la CPI en montrant que cette suspension
contribue réellement aux objectifs du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies180(*).
Afin de préserver l'indépendance,
l'impartialité et l'effectivité de la CPI au regard du pouvoir de
suspension de l'activité de la cour reconnu au Conseil de
Sécurité, nous pensons que la CPI devrait contrôler la
légalité du pouvoir exercé par le Conseil de
sécurité et vérifier s'il existe vraiment une menace
contre la paix et la sécurité internationales (A).
En plus, une délimitation temporelle de la période
de suspension de l'activité de la CPI s'avère d'une grande
envergure (B).
A. La reconnaissance
à la CPI d'un pouvoir de contrôle de la légalité de
la demande de sursis à enquêter ou à poursuivre
S'il est admis que le Conseil de
Sécurité peut formuler une demande de sursis, il doit être
entendu qu'il appartient à la CPI de donner suite à une telle
requête, et non faire de la demande du Conseil de Sécurité
une requête qui se transforme automatiquement en injonction ou en
directive.
Ceci revient à dire qu'il y aurait lieu de reconnaitre
à la CPI « la compétence de la
compétence »181(*), càd la possibilité de contrôler
la légalité de la demande formulée par le Conseil de
sécurité182(*).
Dans ce cas, la CPI s'emploiera à vérifier si
les conditions posées par l'article 16 sont réunies avant de
surseoir à statuer.
Plutôt que de laisser la CPI subir la décision
du Conseil de Sécurité, cette proposition a l'avantage de lui
permettre d'avoir en dernier la parole dans l'application de la
procédure de l'article 16 du Statut de Rome.
B. Une délimitation
temporelle de la période de suspension de l'activité
De prime abord, il sied de relever que l'article 16 du
statut de Rome permet au Conseil de sécurité de geler
l'activité de la CPI pendant douze mois renouvelables.
Il en résulte que le Conseil de sécurité
peut, de son gré, paralyser indéfiniment l'activité d la
Cour.
Pour y faire, nous pensons qu'il est nécessaire de
limiter temporellement la durée de suspension, en la ramenant en une
année non renouvelable. Cela permettrait à la Cour de poursuivre
avec une affaire ayant fait l'objet de suspension.
S'inscrivant dans la même intelligence, Flavia
LATTANZI, est d'avis que « sans une limite temporelle au pouvoir
du Conseil, il y a [...] le risque que la décision soit
renouvelée à l'indéfini : il ne s'agirait non pas
d'une suspension, mais de blocage de l'activité de la Cour et donc une
dangereuse dépendance d'un organe juridictionnel pénal par
rapport à un organe politique »183(*).
§2. L'indépendance
de la CPI face à l'article 15 bis, 6 du Statut de Rome
Dès le lendemain de l'adoption du
Statut de Rome, les remarques ont fusé de toutes parts. Elles ne sont
pas sans rappeler, dans une certaine mesure, les critiques dirigées
contre les tribunaux ad hoc d'Arusha et de la Haye établis par le
Conseil de Sécurité des Nations Unies.
Philippe WECKEL n'y va pas de main morte. Il discerne dans le
texte de Statut de Rome, le souci de ses auteurs de surveiller
l'activité de la Cour184(*).
Luigi CONDORELLI se fait l'écho d'une boutade selon
laquelle, « en substance, le Statut de Rome ne fait que mette
à la disposition du Conseil un tribunal pénal international
permanent ».185(*)
Observant les limitations prescrites par la convention de
Rome à l'action du Conseil de Sécurité, Serge SUR estime
qu'il est même loisible au Conseil, s'il le juge opportun, de
créer un tribunal spécial qui préempterait la
compétence de la Cour »186(*)
Les observations ci-dessus se fondent sur la teneur des
dispositions pertinentes du Statut de Rome.
Ainsi, l'article 15 bis dispose : « Lorsque le
Procureur conclut qu'l y a de bonnes raisons de mener une enquête
pour crime d'agression, il s'assure d'abord que le Conseil de
Sécurité a constaté qu'un acte d'agression avait
été commis par l'Etat en cause »187(*); « Lorsque le
Conseil de Sécurité a constaté un acte d'agression, le
Procureur peut mener l'enquête sur ce crime ».188(*)
Il ressort de la lecture de l'article 15 bis, 6 que la
compétence de la CPI à l'égard du crime d'agression,
lorsqu'elle est saisie par l'Etat partie ou par le Procureur lui-même
agissant proprio motu, est subordonnée au contact préalable de
l'acte d'agression par le Conseil de Sécurité car c'est à
lui que revient la responsabilité principale du maintien de la paix et
de la sécurité internationales 189(*) et le pouvoir de constater l'acte
d'agression190(*). La
définition des actes tels que l'agression armée commise par un
Etat tombe bel et bien dans sa compétence.
Néanmoins, ce pouvoir de constat préalable de
l'acte d'agression confié au Conseil de sécurité compromet
l'indépendance de la CPI dès lors que la compétence cette
dernière est subordonnée au constat préalable de l'acte
d'agression par le Conseil de Sécurité.
Si le Conseil de Sécurité n'a pas
procédé préalablement à la constatation de l'acte
d'agression, la Cour ne peut pas mener l'enquête sur ce crime.
Pour y faire face, le Statut de Rome prévoit que
« lorsque le constat du Conseil de sécurité n'est pas
fait dans les six mois, le Procureur peut mener une enquête pour crime
d'agression, à condition que la section préliminaire ait
autorisé l'ouverture d'une enquête pour crime d'agression selon la
procédure fixée à l'article 15 et que le Conseil de
sécurité n'en décide autrement, conformément
à l'article 16191(*).
Le fait que le Conseil de Sécurité soit un
organe politique, par opposition à la CPI, organe judiciaire, a
soulevé des protestations quant à un quelconque rôle de
celui-ci dans la procédure192(*).
Cet argument est, il est vrai, difficilement
contestable : Le Conseil de Sécurité va dans sa
détermination, être guidé par des considérations
d'ordre politique et non juridique193(*).
A ce titre, un passage de l'opinion dissidente du Juge
SCHWEBEL, dans l'affaire des activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua et contre celui-ci, mérite d'être ici cité :
« De plus, si le Conseil est habilité
à constater l'existence d'un acte d'agression, ce n'est pas en tant que
juridiction. Il peut conclure à l'existence d'une agression, ou, plus
fréquemment, refuser de conclure dan ce sens pour de
considérations politiques plus que juridiques. Si décisifs que
soient les faits susceptibles de constituer l'agression, le Conseil de
Sécurité n'outrepasse pas ses droits en décidant qu'une
constatation d'un acte d'agression ferait régresser la cause de la paix
au lieu de la promouvoir. En bref, le Conseil de Sécurité est un
organe politique guidé par des motifs politiques. Il peut tenir compte
de considérations juridiques mais, à la différence d'un
tribunal, n'est pas tenu de les appliquer »194(*).
Dans l'hypothèse, tout d'abord,
où le Conseil de Sécurité aurait déterminé
qu'un Etat a commis un acte d'agression conformément à l'article
39 de la Charte des Nations Unies, quel serait ensuite le rôle de la CPI,
et comment son indépendance serait-elle
préservée ?
Pour répondre à cette question, le Statut de
Rome prévoit que « le constat d'un acte d'agression par un
organe extérieur à la Cour est sans préjudice des
constatations que fait la Cour elle-même en vertu du présent
statut »195(*).
Il résulte de cette disposition que le constat d'un
acte d'agression par le Conseil de sécurité des Nations unies est
sans préjudice des constatations que fait la CPI elle-même.
Le Conseil de Sécurité ayant
déterminé préalablement que tel Etat à commis un
acte d'agression, la Cour va alors examiner si l'accusé, un national de
l'Etat en question, a planifié ou même cet acte
d'agression196(*).
Dans l'accomplissement de cette tâche la Cour,
contrairement au Conseil de Sécurité, va être guidée
par des considérations et des critères de nature juridique.
197(*)
Du fait de la nature différente de la Cour,
institution judiciaire, et du Conseil de Sécurité, organe
politique, et la Cour n'étant pas un organe des Nations Unies, M. POLITI
pense que cette détermination préalable ne serait qu'une simple
condition procédurale198(*).
La cour pourrait ensuite, dans cette logique, apprécier
pour elle-même l'existence de l'acte d'agression et la
responsabilité individuelle de l'accusé, en toute
indépendance, quitte à contredire éventuellement le
Conseil de Sécurité.199(*)
Si le Conseil de sécurité conclut qu'un Etat
n'a pas commis un acte d'agression, la CPI ne serait pas liée par
cette décision200(*) dès lors que, non seulement, la Cour ne forme
pas un organe de l'ONU mais aussi il s'agit là, à notre sens,
d'un argument plutôt politique que juridique.
Il serait inadmissible qu'un organe judiciaire
indépendant soit lié par une décision d'un organe
politique.
Somme toute, le constat qu'un Etat n'a pas commis un acte
d'agression fait par le Conseil de sécurité est sans
préjudice des constatations que fait la CPI201(*).
Pour Sayeman BULA-BULA, « La responsabilité
du Conseil de Sécurité dans la qualification du comportement
illicite éventuel d'un Etat comme « agression » ne
devrait pas avoir comme conséquence fâcheuse d'ôter à
la CPI son pouvoir de déterminer la responsabilité pénale
des personnes physiques dans la conception, la planification, la
préparation, le déclenchement, la conduite et l'exécution
d'une agression ».202(*)
Section IV. LES
CONSEQUENCES DE L'INTERVENTION DU CONSEIL DE SECURITE DANS L'ACTIVITE
JUDICIAIRE DE LA CPI
L'intervention du Conseil de
Sécurité des Nations Unies dans le fonctionnement de la CPI
revêt aussi bien des conséquences positives (§1) que des
conséquences négatives (§2), auxquelles il convient d'y
proposer quelques suggestions (§3).
§1. Conséquences
positives
La saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité permet à celle-ci d'atteindre sa vocation
universelle dès lors qu'elle sera compétente de juger, outre les
ressortissants d'un Etat partie au statut de Rome et les crimes commis sur
terrain d'un tel Etat, les ressortissants d'un Etat tiers au Statut de Rome et
les crimes survenus sur le territoire de cet Etat.
L'extension des compétences de la CPI est
considérable, puis qu'elle exclue tout risque d'impunité des
auteurs de crimes selon qu'ils auraient eu pour théâtre de leurs
agissements, ou pour nationalité d'un Etat qui aurait refusé la
compétence de la CPI.
La faculté pour le Conseil de Sécurité
de saisir la CPI a été prévue afin de lui offrir un
substitut, une alternative à la création des tribunaux ad
hoc203(*), comme nous
l'avons souligné précédemment.
Le régime de consentement préalable à
l'exercice par la CPI de sa compétence n'est pas applicable en cas de
renvoi d'une situation criminelle par le Conseil de sécurité.
Il sied de noter également que la saisine par le
Conseil de Sécurité permet à la CPI d'exercer sa
compétence à l'égard des crimes de guerre dans
l'hypothèse où serait en cause un Etat ayant utilisé la
possibilité d'opting out prévue à l'article 124 du Statut
de Rome.
La suspension de l'activité de la CPI par le Conseil
de Sécurité a des conséquences positives.
En effet, elle ne permet pas à la Cour d'entraver les
négociations diplomatiques ayant pour objet un accord de paix.
En outre, elle évite des situations où la
saisine de la CPI par un Etat en raison du comportement d'un autre Etat
risquerait de créer une situation conflictuelle pouvant
déboucher sur une guerre.
Le soutien du Conseil de Sécurité en
matière de coopération des Etats avec la CPI est d'une importance
capitale dès lors qu'il peut prendre des sanctions contre un Etat qui
refuse de coopérer avec la Cour.
§2. Conséquences
négatives
L'intervention du Conseil de
Sécurité dans l'activité judiciaire de la CPI ne rassure
pas pleinement sur l'indépendance de cette dernière dès
lors que l'article 15 bis, 6 du statut de Rome, subordonne la compétence
de la Cour de l'égard du crime d'agression, au constat préalable
de l'acte d'agression par le Conseil de Sécurité et l'article 16
permet à ce dernier de geler l'action de la Cour pendant un an
renouvelable.
Il ressort de ces dispositions que le judiciaire est battu
en brèche par le politique.
En cas de renvoi d'une situation criminelle par le Conseil
de Sécurité, la CPI exerce sa compétence à
l'égard des ressortissants des Etats tiers au Statut de Rome. Cette
extension de compétence porte atteinte au principe de l'effet relatif
des traités consacré par l'article 34 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités.
La suspension de l'action de la CPI par le Conseil de
Sécurité peut conduire au risque de politisation de la
procédure judiciaire car les Etats, soucieux de faire échapper
leurs ressortissants de la responsabilité pénale, peuvent
demander au Conseil de sécurité de geler l'activité de la
Cour pendant une année renouvelable.
Le pouvoir de saisine reconnu au Conseil de
Sécurité par le Statut de Rome remet en cause le principe de
l'égalité des Etats dès lors que les Etats membres
permanents du Conseil de sécurité qui n'auraient pas
ratifié le Statut de Rome se trouveraient dans la situation confortable
de mettre en cause les autres Etats, sans courir le risque de se voir
eux-mêmes être déférés devant la CPI.
Enfin, dans la finalité de protéger un Etat,
un membre permanent du Conseil de Sécurité peut imposer son droit
de véto s'opposant au renvoi d'une situation criminelle devant la CPI.
Eu égard à ce qui précède et
dans l'objectif d'éradiquer l'impunité des auteurs de crimes
internationaux et d'assurer l'égalité des Etats, il serait
souhaitable de supprimer le droit de véto s'agissant de renvoi d'une
situation criminelle par le Conseil de Sécurité devant la CPI.
§3. Quelques
Suggestions
Pour garantir l'indépendance de
l'organe judiciaire, faut-il dissocier le Conseil de Sécurité de
la CPI ?
D'aucuns y répondent par l'affirmative. Pour appuyer
leurs arguments, ils soutiennent que les deux institutions ont une nature
différente ; la CPI est une institution judiciaire
indépendante créée par le Statut de Rome, tandis que le
Conseil de sécurité est une institution politique, un organe
principal de l'ONU. Elles sont des missions différentes ; la CPI a
pour mission la promotion de la justice pénale internationale. Par
contre, le Conseil de Sécurité s'occupe du maintien de la paix
et de la sécurité internationales.
Sur le plan juridique, il n'y a aucun inconvénient de
dissocier ces deux institutions dès lors que chacune est
créée par un traité autonome.
Néanmoins, il ne serait pas réaliste de
dissocier le Conseil de Sécurité de la CPI, car les Etats parties
de l'ONU seraient dans l'obligation de privilégier leurs obligations au
regard de la Charte des Nations Unies par rapport à celles
découlant du Statut de Rome204(*).
Dissocier ces deux organes serait à la source de
l'impunité des crimes commis sur le territoire d'un Etat non partie au
Statut de Rome ou commis par les ressortissants d'un tel Etat.
Bien plus, les crimes relevant de la compétence de la
CPI sont commis dans le cadre de situations dont traite le Conseil de
Sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.
Dissocier des deux organes amènerait la Cour à méconnaitre
les attributions que la Charte confère à l'ONU. Or l'article 2,2
de l'Accord de coopération entre la Cour et les Nations unies
prévoit que «la Cour reconnait les attributions que la Charte
confère à l'ONU ».
Pour préserver l'indépendance de la CPI au
regard du pouvoir de renvoi d'une situation criminelle par le Conseil de
sécurité, le respect des dispositions du Statut de Rome,
notamment les articles 13, 17, 19 et 53 s'avère d'une importance
capitale.
En outre, le Conseil de sécurité devrait saisir
la Cour que des « situations » et non de « cas
particuliers ». Le procureur devrait exercer ses fonctions en toute
indépendance en se basant uniquement sur les considérations
juridiques.
Pour éviter la politisation de la procédure
judiciaire de la CPI face au pouvoir de suspension de l'activité de la
Cour reconnu au Conseil de Sécurité, la CPI devrait
contrôler la légalité du pouvoir exercé par le
Conseil de Sécurité et vérifier s'il existe vraiment une
menace contre la paix et la sécurité internationales.
Il s'avère également nécessaire, pour
garantir l'effectivité de la CPI de limiter temporellement la
période de suspension de l'activité de cette
dernière ; en la ramenant en une année non renouvelable, car
sans une limite temporelle au pouvoir du Conseil de sécurité, il
y a le risque que la décision soit renouvelée à l'infini.
Pour garantir l'indépendance de la CPI face au
pouvoir de constater l'agression confié au Conseil de
Sécurité, il faudrait que ce dernier reste dans les limites de
sa compétence.
Ainsi, le Conseil de Sécurité devrait se limiter
seulement à constater l'acte d'agression et prendre des mesures
nécessaires pour rétablir la paix et la sécurité
internationales, sans établir les responsabilités pénales
individuelles.
CONCLUSION PARTIELLE
Le second chapitre a été consacré
à l'indépendance de la CPI face aux pouvoirs reconnus au Conseil
de Sécurité. Ainsi, le Statut de Rome reconnaît au Conseil
de Sécurité des prérogatives exorbitantes, notamment la
suspension de l'activité de la Cour pendant un an renouvelable, la
constatation de l'acte d'agression, qui compromettent l'indépendance de
la CPI, en tant qu'organe judiciaire.
Pour préserver l'indépendance,
l'impartialité et l'effectivité de la CPI, nous avons
proposé quelques suggestions notamment la reconnaissance à la
Cour d'un pouvoir de contrôle de la légalité de la
résolution du Conseil de Sécurité portant sursis à
enquêter ou à poursuivre, une limite temporelle de la
période de suspension de l'activité de la Cour.
Le Conseil de Sécurité devrait se limiter
uniquement à constater l'acte d'agression et prendre des mesures
nécessaires pour rétablir la paix et la sécurité
internationales sans établir les responsabilités pénales
individuelles.
Il ne serait pas réaliste de dissocier le Conseil de
Sécurité de la CPI, car les Etats parties à l'ONU seraient
dans l'obligation de privilégier leurs obligations au regard de la
Charte des Nations Unies par rapport à celles découlant du Statut
de Rome (Article 103 de la Charte des Nations Unies).
Dissocier ces deux organes peut conduire à
l'impunité des crimes commis par les ressortissants d'un Etat tiers au
Statut de Rome ou survenus sur le territoire de cet Etat.
CONCLUSION GENERALE
« Le Conseil de Sécurité des
Nations Unies et la CPI : Dépendance ou
Indépendance? », voilà une construction
sémantique que nous nous sommes permis d'étudier en vue de rendre
compte des pouvoirs reconnus au Conseil de Sécurité dans le
Statut de Rome d'une part, l'indépendance de la CPI, de l'autre.
Pour ce faire, nous sommes partis des questions
suivantes : Quel est le rôle du Conseil de Sécurité
des Nations Unies dans le fonctionnement de la CPI ? Quel est le
degré d'indépendance de la Cour vu le rôle important du
Conseil de Sécurité dans son fonctionnement ? Quelle serait
l'opportunité d'une éventuelle révision du Statut de Rome
dans ce sens ?
Il apparaît clairement, au vu des éléments
développés que le Conseil de Sécurité joue un
crucial dans le fonctionnement de la CPI.
Cela se justifie par les raisons ci-après :
En premier lieu, la saisine de la CPI par le Conseil de
Sécurité étend la compétence de celle-ci aux crimes
survenus sur le territoire des Etats tiers au Statut de Rome ou commis par les
ressortissants de tels Etats.
En deuxième lieu, le renvoi d'une situation criminelle
par le Conseil de Sécurité permet à la CPI d'exercer sa
compétence à l'égard des crimes de guerre dans
l'hypothèse où serait en cause un Etat ayant utilisé la
possibilité d'opting out prévue à l'article 124 du Statut
de Rome.
En troisième lieu, l'intervention du Conseil
Sécurité permet d'obtenir la coopération des Etats membres
de l'ONU avec la CPI sur base de la Charte des Nations Unies,
particulièrement en ses articles 25 et 103.
En dépit de ces points positifs, l'intervention du
Conseil de Sécurité dans le fonctionnement de la CPI comporte des
points négatifs. Ainsi, le pouvoir de suspension de l'activité de
la CPI pendant un an renouvelable et celui du constat préalable de
l'acte d'agression reconnus au Conseil de Sécurité par le Statut
de Rome compromettent l'indépendance de la CPI.
Vu ces points négatifs, faut-il dissocier le Conseil de
Sécurité de la CPI ?
Il ne serait pas réaliste de dissocier ces deux organes
car :
Premièrement, les Etats parties à l'ONU
seraient dans l'obligation de privilégier leurs obligations au regard de
la Charte des Nations Unies par rapport à celles découlant du
Statut de Rome en cas de conflit (Article 103 de la Charte des Nations
Unies).
Deuxièmement, dissocier ces deux organes serait
à la base de l'impunité des crimes survenus sur le territoire
d'un Etat non partie au Statut de Rome ou commis par les ressortissants d'un
tel Etat.
Troisièmement, dissocier ces deux organes favoriserait
l'impunité des crimes de guerre dans l'hypothèse où serait
en cause un Etat ayant utilisé la possibilité d'opting out
prévue à l'article 124 du Statut de Rome.
Quatrièmement, les crimes relevant de la
compétence de la CPI sont commis dans le cadre de situations dont traite
le Conseil de Sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte des
Nations Unies. D'où la nécessité d'une coopération
entre ces deux organes.
Cinquièmement, le Conseil de Sécurité
permet à la CPI d'obtenir la coopération des Etats sur base de la
Charte des Nations Unies particulièrement en ses articles 25 et 103.
Sixièmement, le Conseil est l'unique organe qui peut
prendre des sanctions susceptibles d'effectivité et aussi
d'efficacité pour obliger les Etats à coopérer avec la
CPI.
Au regard de ce qui précède, nous pensons qu'il
n'est pas réaliste de dissocier le Conseil de Sécurité de
la CPI.
Pour garantir l'indépendance de la CPI face aux
prérogatives exorbitantes reconnues au Conseil de Sécurité
par le Statut de Rome, les mesures suivantes méritent d'être
prises.
D'abord, pour préserver l'indépendance de la
CPI au regard du pouvoir de renvoi d'une situation criminelle par le Conseil de
Sécurité, le respect des dispositions du Statut de Rome,
notamment les articles 13, 17, 19 et 53, s'avère d'une importance
capitale. En outre, le Conseil de Sécurité devrait saisir la Cour
que des situations et non de « cas particuliers ». Le
procureur devrait exercer ses fonctions en toute indépendance en se
basant uniquement sur les considérations juridiques.
Ensuite, pour éviter la politisation de la
procédure judiciaire de la CPI face au pouvoir de suspension de
l'activité de cette dernière reconnu au Conseil de
Sécurité, la Cour devrait contrôler la
légalité du pouvoir exercé par le Conseil de
Sécurité et vérifier s'il existe vraiment une menace
contre la paix ou la sécurité internationales. Il s'avère
également nécessaire, pour garantir l'effectivité de la
CPI, de limiter temporellement la période de suspension de
l'activité de cette dernière, en la ramenant en une année
non renouvelable, car sans une limite temporelle, il y a le risque que la
décision soit renouvelée à l'infini.
Enfin, pour sauvegarder l'indépendance de la CPI au
regard du pouvoir de constater l'acte d'agression confié au Conseil de
Sécurité, il faudrait que ce dernier reste dans les limites de sa
compétence. Ainsi, le Conseil de Sécurité devrait se
limiter seulement à constater l'acte d'agression et prendre des mesures
nécessaires pour rétablir la paix et la sécurité
internationales sans établir les responsabilités
pénales individuelles.
Hormis l'introduction et la présente conclusion, ce
travail a été circonscrit sur deux chapitres subdivisés
chacun en quatre sections. Le premier a porté sur le rôle du
Conseil de Sécurité dans le Statut de Rome instituant la CPI. Il
a été question dans ce chapitre d'examiner les
prérogatives que le Statut de Rome reconnaît au Conseil de
sécurité, à savoir la saisine, le sursis à
enquêter ou à poursuivre, la constatation de l'acte d'agression et
le soutien du Conseil de sécurité en matière de
coopération des Etats avec la CPI. Le second, quant à lui, fut
axé sur l'indépendance de la CPI face aux pouvoirs reconnus au
Conseil de sécurité. Dans ce chapitre, nous avons examiné
successivement le lien entre la CPI et l'ONU, l'indépendance de la CPI
au regard des articles 13, b ; 16 ; 15, 6 et enfin les
conséquences de l'intervention du Conseil de Sécurité dans
l'activité judiciaire de la CPI.
L'oeuvre humaine n'étant pas parfaite, nous ne pensons
pas avoir abordé exhaustivement toutes les facettes afférentes
à l'indépendance de la CPI face aux pouvoirs importants reconnus
au Conseil de Sécurité, c'est ainsi que les portes demeurent
grandement ouvertes à tout chercheur intéressé afin de
pousser la réflexion plus loin.
BIBLIOGRAPHIE
I. TRAITES INTERNATIONAUX
ET RESOLUTIONS
- Accord négocié régissant les relations
entre la CPI et l'ONU, signé et entré en vigueur le 04 Octobre
2004
- Résolution 1970 du Conseil de sécurité,
adoptée le 26 février 2011, DOC.NU/S/RES/1970(2011)
- Résolution RC/RES.6, adoptée à la
treizième séance plénière, le 11 juin 2010
- Résolution 1593 du Conseil de sécurité,
adoptée le 31 ars 2005, DOC.NU/S/RES/1593(2005)
- Résolution 1497 du Conseil de sécurité,
adoptée le 1 aout 2003, DOC.NU/S/RES/1497(2003)
- Résolution 1487 du Conseil de sécurité,
adoptée le 12 juin 2003, DOC.NU/S/RES/1487(2003)
- Résolution 1422 du Conseil de sécurité,
adoptée le 12 juillet 2002, DOC.NU/S/RES/1422(2002)
- Statut de Rome instituant la CPI, adopté le 17
juillet 1998 à Rome et entré en vigueur le 1 juillet 2002,
DOC.NU.A/CONF/183/9
- Charte des Nations Unies signée le 26 juin 1945 et
entrée en vigueur le 24 octobre 1945
II. OUVRAGES
- ALLA ND D., Droit international public, PUF,
Paris, 2000, 807p.
- ASCENSIO H. et Alii (dir), Droit International
pénal, A. Pedone, Paris, 2000, 800p.
- BASSIOUNI C., Introduction au droit pénal
international, Bruylant, Bruxelles, 2002, 343p.
- BASSIOUNI C., International criminal law, A draft
international criminal code, Alphen an den Rijn, Nettherlands, 1980,
250p.
- BOURDON W., La cour pénale internationale, le
Statut de Rome, Ed. du Seuil, Paris, 2000, 264p.
- CASSESE A. et M. DELMAS-MARTY, Crimes internationaux et
juridictions internationales, PUF, Paris, 2002, 267p.
- CHIAVARIO M., La justice pénale internationale
entre passé et avenir, Dalloz, Paris, 2003, 398p.
- CIFENDE KACIKO M. et SMIS S., Code de droit
international africain, Larcier, Bruxelles, 2011, 608p.
- COMBACAU J., Le pouvoir de sanction de l'ONU. Etude
théorique de la coercition non militaire, Pedone, Paris, 1974
- COMBACAU J.et SUR S., Droit international public,
Montchrestien, Paris, 2008, 809p.
- CURRAT P., Les crimes contre l'humanité dans le
Statut de la Cour pénale internationale, Bruylant, Bruxelles, 2006,
806p.
- DAVID E., Les éléments de Droit
pénal et européen, Bruylant, Bruxelles, 2009, 1566p.
- DAVID E., Droit des organisations internationales,
vol. II, PUF, Paris, 2008
- DOBELLE J.F., La convention de Rome portant Statut de la
CPI, AFDI, 1998.
- FERNANDEZ J., La politique juridique extérieure
des Etats-Unis à l'égard de la CPI, Pedone, Paris, 2010.
- HUET A. et KOERING JOULIN R., Droit pénal
international, PUF, Paris, 2005, 507p.
- KAMTO M., L'agression en droit international,
éd. A. Pedone, Paris, 2010, 464p.
- LA ROSA A. M, Les juridictions pénales
internationales, la procédure et la preuve, PUF, Paris 2003,
507p.
- MAISON R., La responsabilité pénale
individuelle pour crime d'Etat en Droit international public,
Bruylant, Bruxelles, 2004, 547p.
- MARTIN P., La Cour pénale internationale, quel avenir
pour une illusion?, Dalloz, Paris, 1998
- NGUYEN Q. et alii, Droit international public,
LGDJ, Paris, 1975,1189p.
- PAZARTZIS P., La répression pénale des
crimes internationaux : Justice internationale, A. Pedone, Paris,
2007, 95p.
- THOME N., Le pouvoir du Conseil de
sécurité au regard de la pratique récente du Chapitre VII
de la Charte des Nations Unies, PUAM, Aix Marseille, 2005.
- VERHOEVEN J., Droit international public, Larcier,
Bruxelles, 2000, 856p.
III. ARTICLES
- ABRAHA H.et ADJOVI R., « La résolution 1593
déférant la situation du Darfour à la CPI », In
Les premiers pas de la CPI, 2005, pp.204-300.
- ARSANJANI M.H., « The Rome statute of
international criminal court », in American Journal of law,
vol. 93, n°2, 1999, pp. 22-43.
- ASCENSIO H. et MAISON R., « L'activité
des juridictions pénales internationales (2003-2004) »,
in Annuaire français de droit international, 2004, pp. 47-70.
- AUMOND F., « La situation au Darfour
déférée à la CPI. Retour sur une résolution
historique du Conseil de sécurité », in Revue
générale de Droit international Public, Pédone,
Paris, 2008, pp.44-90.
- BASSIOUNI C., « Note explicative sur le Statut de
la Cour pénale internationale », In Revue internationale
de droit pénal, n°2, Pédone, Paris, 2000.
- BASSIOUNI C., « Projet de code pénal
international », in Revue internationale de droit
pénal, Erès, Toulouse, 1981, pp.313-320.
- BEDJAOUI M., « Un contrôle de la
légalité des actes du Conseil de sécurité est-il
possible? », in SFDI, Le Chapitre VII de la Charte ses Nations
Unies, Pedone, Paris, 1995
- BOURDON W., « Vers la fin de l'impunité
des chefs d'Etat en exercice ? », in Livre noir, Terrorisme
et responsabilité pénale internationale, ed. Calmann-
Lévy/SOS. Attentats, Paris, 2002, pp. 347-355.
- CAHIN G., « Les Nations Unies et la construction
de la paix en Afrique : Entre désengagement et
expérimentation », in RGDIP, Tome 104, N°1,
Pedone, Paris, 2000, pp. 73-105.
- CARPENTER A.C., « The international criminal court
and the crime of aggression », in Nordic journal of intenational
law, vol. 64, n°2, 1995.
- CASSESE A., «The Statute of the international criminal
court: Some preliminairy Reflections», in EJIL, Vol. 10,
N° 4, Ed. Oxford University Press, Oxford, 1999, pp.655-888.
- CONDORELLI L., « La Cour Pénale
Internationale : un pas de géant (pourvu qu'il soit
accompli) », in Revue Générale des Droit
international Public, Tome 103, N°1, Pedone, Paris, 1999, pp.7-21.
- CONDORELLI L.et VILLALPANDO S., « Les Nations
Unies et les juridictions pénales internationales », in
Revue générale de Droit International public, Pedone,
Paris, 2006.
- CORMACK M. et SIMPSON G.J., « A new international
criminal law regime? In Netherlands international law review, 1995.
- COULEE F., « Sur un Etat tiers peu discret :
Les Etats-Unis confrontés au Statut de la CPI », in
Annuaire français de droit international, 2003, pp.44-99.
- DAVID E., « La question de l'immunité des
chefs d'Etats étrangers à la lumière de l'arrêt de
la Cour de cassation française du 13 mars 2001 », in Forum
de droit international, Vol.1, N° 1, 1999, pp. 185-192.
- DAVID E., « La Cour pénale
internationale : une Cour en liberté
surveillée ? », in Forum de Droit International,
Vol.1, N° 1, 1999, pp.20-30.
- DELLE MORTE G., « Les frontières de la
compétence de la Cour pénale internationale : Observations
critiques », in Revue internationale de droit pénal,
Vol.73, Pedone, Paris, 2002, pp.23-58.
- - DOUCET G., « La Cour Pénale
Internationale : Illusion ou réalité ? », in
Revue de science criminelle de Droit pénal comparé,
n° 2, A. Pedone, Paris, 1999, pp.37-53.
- HALL C.K., « Première proposition de
création d'une cour criminelle permanente », In Revue
Internationale de la Croix Rouge, N° 829, 1998, pp.59-78.
- HOULWEG C., « Le nouveau Tribunal international
de l'ONU et le Conflit en Ex-Yougoslavie : Un défi pour la droit
humanitaire dans le nouvel ordre mondial », in Revue de Droit
Public et de la Science politique en France et à l'étranger,
N°5, 1994, pp.1337-1397.
- LATTANZI F., « La compétence de la Cour
Pénale Internationale et consentement des Etats, in
RGDIP, Tome 103, N°2, Pedone , Paris, 1999, pp.430-434.
- LATTANZI F., « La primauté du Tribunal
international pour l'ex- Yougoslavie sur les juridictions internes »,
in Revue de droit international pénal, Tome 103, Pedone, Paris,
1996
-
* 1 P. PAZARTZIS, La
répression pénale des crimes internationaux : Justice
Internationale, A. Pedone, Paris, 2007, p.5.
* 2 E.DULAC, Le
rôle du Conseil de Sécurité dans la procédure
devant la Cour Pénale Internationale, Mémoire de DEA,
université Paris I, Fac. De Droit, 1999-2000, p.8.
* 3 Le Statut de Rome instituant
la CPI a été adopté le 17 Juillet 1998 à Rome et
est entré en vigueur le 1er Juillet 2002, DOC NU A/
CONF/183/9 disponible sur
http://www. icc-cpi.
int/library/about/official journal/statut-du- Rome 120704. FR.pdf
consulté le 15 Février 2012.
* 4 Ces critiques sont notamment
l'interprétation discutable de la Charte des Nations Unies, justice
sélective, risques d'incohérence de la jurisprudence, charge
financière.
* 5 Le TPIR a été
créé par la Résolution 955 du Conseil de
Sécurité, 8 Novembre 1994, Doc. NU 5/RES 955 (1994).
* 6 Le TPIY a été
créé par la Résolution 827 du conseil de
Sécurité, 25 Mai 1993, Doc. NU S/RES 827 (1993)
* 7 S. BULABULA, La Cour
Pénale Internationale envisagée dans ses rapports avec le Conseil
de Sécurité des Nations Unies, disponible sur http :
//sbulabula. Word press.com/Publication consulté le 10
Février 2012.
* 8 .P. WECKEL, « La
Cour Pénale Internationale, Présentation
Générale», in Revue Générale de Droit
International Public, Tome 103, Vol.4, Pedone, Paris, 1999, P. 985.
* 9L. CONDORELLI, « La
Cour Pénale Internationale : un pas de géant (pourvu qu'il
soit accompli) », in Revue Générale des Droit
international Public, Tome 103, N° 1, Pédone, Paris, 1999, P.
7
* 10 S.SUR, « Vers
une Cour Pénale Internationale : La convention de Rome entre les
ONG et le Conseil de sécurité », in Revue de Droit
Internationale Public, Tome 103, N° 1, Pedone, Paris 1999, p.31
* 11 A. PELLET,
« Pour la Cour Pénale Internationale, quand même !
Remarques sur ses compétences et sur ses conditions de
saisine » , in L'observateur des Nations Unies, N°
5, Ed. Blackwell Publishing, Oxford, 1998, p. 8
* 12 Article 24, 1 de la Charte
des Nations Unies du 26 Juin 1945, disponible sur http :
//www.un.org/flench/ aboutum/charte/index. html consulté le 18
février 2012
* 13 P. BAUDOIN, Une paix
réelle repose et se construit par une justice effective et affranchie de
toute tutelle politique sur
http://www.aidh.org/Justice/02rome_02.htm
consulté le 16/02/2012.
* 14B .FERENCZ,
« Defining aggression: Where it stands and where it's
going », in American Journal of law, Vol.66, n°3, July
1972, p.491.
* 15 Article 5 du Statut de
Rome. Il sied de préciser que la CPI pourra exercer sa compétence
à l'égard du crime d'agression commis un an après la
ratification ou l'acceptation des amendements relatifs à ce crime par
trente Etats parties, sous réserve d'une décision qui sera prise
après le 1er Janvier 2017 par la même majorité
d'Etats parties que celle requise pour l'adoption d'un amendement au Statut
(article 15 bis, 2 et 3 du Statut de Rome)
* 16 H. ASCENSIO et Alii (dir),
Droit International pénal, A. Pédone, Paris, 2000, p.
742
* 17 Article 16 du Statut
précité.
* 18 Article 15 Bis, 6 du
Statut précité.
* 19 J. TASOKI MANZELE,
L'enquête des juridictions pénales internationales,
Thèse, Université Paris I, Fac. de Droit, 2011, p.150.
* 20 E. NUKURI, La
complémentarité de la Justice pénale internationale
à la justice nationale des Etas dans le cas de la CPI,
Mémoire, Université de Burundi, Fac. de Droit, 2009-2010, p.
50.
* 21 Préambule du Statut
de Rome.
* 22 F. DAINOTTI, La Cour
Pénale Internationale est une réalité, Analyse de cette
nouvelle juridiction à la fois indépendante et
interdépendante au sein d'un système de relations internationales
en pleine mutation, Mémoire, Institut Européen des Hautes
Etudes Internationales, Fac. de Droit, 2005-2006, p.38.
* 23 Article 103 de la Charte
des Nations unies.
* 24 G. DOUCET, « La
Cour Pénale Internationale : Illusion ou
réalité ? », in Revue de science criminelle de
Droit pénal comparé, n° 2, A. Pedone, Paris, 1999, p.
9
* 25 G. BALLEYGUIER,
cité par A. BASHIZI ANDEM'AMIKE, La compétence de la CPI dans
la poursuite des personnes jouissant de qualité officielle,
Mémoire, UCB, Fac. de Droit, 2006-2007, Inédit, p.6.
* 26 E.DAINOTTI,
Op.cit. p. 38.
* 27 Art. 13, a et 14 du
Statut de Rome.
* 28 Art. 13, c et 15 du Statut
précité.
* 29 E.NUKURI, Op.cit.,
p. 90.
* 30 C.BASSIOUNI,
« Note explicative sur le Statut de la Cour pénale
internationale », In Revue Internationale de Droit Pénal,
n°2, Pédone, Paris, 2000, p. 39.
* 31 Il s'agit de crimes
visés à l'art. 5 du Statut de Rome. : Le crime de
génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et
le crime d'agression.
* 32 A. CASSESE et M.
DELMAS-MARTY, Crimes internationaux et juridictions internationales,
PUF, Paris, 2002, p. 171.
* 33 J. TASOKI MANZELE,
Op.cit., p. 149.
* 34 Article 39 de la Charte
des Nations Unies.
* 35 C.BASSIOUINI,
Introduction au Droit pénal international, Bruylant, Bruxelles,
2002, p. 292.
* 36 G. SLUITER,
« An international criminal court is hereby established »,
In Netherlands Quaterly of Human Rights, n°3, 1998, p. 416.
* 37 Art. 23, 1 du projet de
Statut d'une Cour criminelle internationale, Rapport de la CDI sur les travaux
de sa 46ème session, 2 mai au 22 juillet 1994.
* 38 Seuls quelques rares
Etats se sont opposés à la faculté pour le conseil de
sécurité de saisir la Cour notamment l'Inde, le Pakistan, la
Libye et le Mexique.
* 39 E. DULAC, Op.cit.,
p. 14
* 40 Ibidem
* 41 Au titre de l'article
41 de la Charte des Nations Unies.
* 42 E. DULAC, Op.cit,
p. 15
* 43 Ibidem.
* 44 La France, Royaume Uni
et la Russie.
* 45 E.DULAC, Op.cit.,
p. 15.
* 46 N.MBAFUMOYA TCHOMBA,
La Compétence de la Cour pénale internationale à
l'égard d'Omar El-Bechir : les problèmes de
l'immunité et de la compétence ratione personae,
Mémoire UCB, Fac. de Droit, 2008-2009, Inédit, p. 53.
* 47 C.BASSIOUNI,
Introduction, Op.cit., p.22
* 48 Cf. Article 13, b du
Statut de Rome
* 49 Article 14 du statut de
Rome dispose : « 1. Tout Etat partie peut déférer
au procureur une situation dans laquelle un ou plusieurs des crimes relevant de
la compétence de la Cour paraissent avoir été commis, et
prier le procureur d'enquête sur cette situation en vue de
déterminer si une ou plusieurs personnes particulières doivent
être accusées de ces crimes.
2. L'Etat qui procède au renvoi indique autant que
possible les circonstances de l'affaire et produit les pièces à
l'appui dont il dispose.
* 50 Article 15 du Statut de
Rome : 1. Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre
initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la
compétence de la Cour. 2. Le Procureur vérifie le sérieux
des renseignements reçus. A cette fin, il peut rechercher des
renseignements supplémentaires auprès d'Etats, d'organisations
intergouvernementales et non gouvernementales, ou d'autres sources dignes de
foi qu'il juge appropriées et recueillir des dépositions
écrites ou orales au siège de la Cour.
3. S'il conclut qu'il y a de bonnes raisons d'ouvrir une
enquête, le procureur présente à la chambre
préliminaire une demande d'autorisation en ce sens, accompagnée
des éléments justificatifs recueillis. Les victimes peuvent
adresser des représentations à la chambre préliminaire,
conformément au règlement de procédure et de preuve.
4. Si elle estime, après examen de la demande et des
éléments justificatifs qui l'accompagnent, que l'ouverture d'une
enquête se justifie et que l'affaire semble relever de la
compétence de la Cour, la chambre préliminaire donne son
autorisation, sans préjudice des décisions que la Cour prendra
ultérieurement en matière de compétence et de
recevabilité.
5. Une réponse négative de la chambre
préliminaire n'empêche pas le procureur de présenter par la
suite une nouvelle demande en se fondant sur des faits ou des
éléments de preuve nouveaux ayant trait à la même
situation. 6. Si, après l'examen préliminaire visé aux
§1 et 2, le procureur conclut que les renseignements qui lui ont
été soumis ne justifient pas l'ouverture d'une enquête, il
en avise ceux qui les lui ont fournis. Il ne lui est pas pour autant interdit
d'examiner, à la lumière de faits ou d'éléments de
preuve nouveaux, les autres renseignements qui pourraient lui être
communiqués au sujet de la même affaire.
* 51 Article 16 du Statut de
Rome est ainsi conçu : « Aucune enquête ni aucune
poursuite ne peut être engagée ni menée en vertu du
présent Statut pendant les douze mois qui suivent la date à
laquelle le Conseil de sécurité a fait une demande en ce sens
à la Cour dans une résolution adoptée en vertu du chapitre
VII de la Charte des Nations Unies, la demande peut être
renouvelée par le Conseil dans les mêmes conditions.
* 52 Article 14 de la Charte
des Nations Unies : « Sous réserve des dispositions de
l'article 12, l'Assemblée générale peut recommander les
mesures propres à assurer l'ajustement pacifique de toute situation,
quelle qu'en soit l'origine, qui lui semble de nature à nuire au bien
général ou à compromettre les relations amicales entre
nations, y compris les situations résultant d'une infraction aux
dispositions de la présente Charte où sont énoncés
les buts et les principes des Nations Unies ».
* 53 E.DULAC, Op.cit.,
p. 25.
* 54 W.BOURDON, La Cour
pénale internationale, le Statut de Rome, Ed. du Seuil, Paris,
2000, p. 79.
* 55 E. DULAC,
Op.cit., p. 25.
* 55 I.COKOLA, NTADUMBA,
La Cour pénale internationale, est-ce la fin de l'impunité en
RDC ?, Mémoire, UCB, Fac. de Droit, 2007-2008, p. 78.
* 56 A.BAHATI CIBAMBO,
l'UA et la CPI : Aux sources des craintes des Etats africains,
Mémoire, UCB, Fac. de Droit, 2009-2010, pp. 93-94.
* 57
http://www.senat.fr/rap/98-313-mono.html consulté le 24 Avril 2012.
* 58 Idem
* 59 Article 12, 2 du Statut
de Rome.
* 60 M.CHIAVARIO, La
justice pénale internationale entre passé et avenir, Dalloz,
Paris, 2003, p.117.
* 61 Alinéa 10 du
préambule du Statut de Rome : « Soulignant que la Cour
pénale Internationale dont le Statut porte la création est
complémentaire des juridictions criminelles nationales ».
* 62 Article 1er
du Statut de Rome : « (...) Elle est complémentaire des
juridictions criminelles nationales ».
* 63 L'Article 17 du Statut
de Rome, relative aux questions de recevabilité détaille dans son
premier paragraphe le contenu du principe de complémentarité et
dans ses paragraphes 2 et 3 les cas dans lesquels la Cour peut conclure au
manque de volonté ou à l'incapacité d'un Etat et de
déclarer l'affaire recevable.
* 64 Article 9(2) du Statut
du TPIY, article 8(2) du Statut du TPIR.
* 65 D.NTANDA NSEREKO,
« The international criminal court: Jurisdictional and
related issue», in Criminal law forum, vol. 10, n°1, 1999,
p.114.
* 66 E.DULAC, Op.cit.,
p. 43.
* 67 E.DULAC, Idem,
p. 44.
* 68 A. PELLET, Op.cit.,
p. 144
* 69 Notamment pour ce qui
est de l'accès aux éléments de preuve, mais aussi, du fait
que la justice pénale sera mieux administrée au niveau national
en raison de la proximité qu'au plan international où elle fait
ses premiers pas.
* 70 Article 17, 2 et 3 du
Statut de Rome.
* 71Article 17 du Statut de
Rome, in M. CIFENDE KACIKO et S.SMIS, Code de droit International africain,
Larcier, Bruxelles, 2011, p. 367.
* 72 Article 18, 1 du Statut
de Rome dispose : « Lorsqu'une situation a été
déférée à la Cour comme le prévoit l'article
13, alinéa a, et que le Procureur a déterminé qu'il y
aurait une base raisonnable pour ouvrir une enquête au titre des articles
13, paragraphe c, et 15, le Procureur le notifie à tous les Etats
Parties et aux Etats qui, selon les renseignements disponibles, auraient
normalement compétence à l'égard des crimes dont il
s'agit(...) »
* 73 Article 53 §1 du
Statut de Rome : « Le Procureur, après avoir
évalué les renseignements portés à sa connaissance,
ouvre une enquête, à moins qu'il ne conclue qu'il n'y a pas de
base raisonnable pour poursuivre en vertu du présent Statut. Pour
prendre sa décision, le procureur examine:(...) b) si l'affaire est ou
serait recevable au regard de l'articla 17(...)»
* 74 Article 53§2 du
Statut de Rome : « Si, après enquête, le Procureur
conclut qu'il n'y a pas de base suffisante pour engager des poursuites :
:(...) b) si l'affaire est ou serait recevable au regard de l'articla
17(...)»
* 75 Article
53 § 3 alinéa a du Statut de Rome : « A la
demande de l'Etat qui a déféré la situation
conformément à l'article 14, ou du Conseil de
sécurité s'il s'agit d'une situation visée à
l'article 13, paragraphe b, la chambre préliminaire peut examiner la
décision de ne pas poursuivre prise par le Procureur en vertu des
paragraphes 1er ou 2 et demander au Procureur de la
considérer ».
* 76 Article 18 §2 du
Statut de Rome : « ... » Si l'Etat lui demande, le
Procureur lui défère le soin de l'enquête, à moins
que la chambre préliminaire ne l'autorise, sur sa demande, à
faire enquête lui-même ».
* 77 M.H. ARSANJANI,
« The Rome statute of international criminal court », in
American Journal of law, vol. 93, 1999, pp. 22-23.
* 78 Le Conseil de
Sécurité a des prérogatives exorbitantes en vertu de la
Charte des Nations Unies auxquelles le Statut de Rome ne saurait porter
atteinte car le Conseil de sécurité a été
créé par la Charte des Nations Unies différente du Statut
de Rome qui a créé la Cour Pénale Internationale.
* 79 Article 24, 2 de la
charte des Nations unies.
* 80 J.COMBACAU, Le
pouvoir de sanction de l'ONU, Etude théorique de la coercition non
militaire, Pedone, Paris, 1974, p. 100.
* 81 J.COMBACAU et S. SUR,
Droit international public, Montchrestien, Paris, 2008, pp.
647-648.
* 82 H.ABRAHA et R.ADJOVI,
« La résolution 1593 déférant la situation du
Darfour à la CPI », in les premiers pas de la CPI, 2005, pp.
243-245.
* 83 F.DAINOTTI,
Op.cit., p.41
* 84 Déclaration
faite par le Président du Conseil de Sécurité,
S/PRST/2004/18.
* 85 On a en ordre : la
Résolution 1547(S/RES/1547/2004), la Résolution
1556(S/RES/1556/2004), et la Résolution 1564(S/RES/1564/2004)
* 86 V.ABRAHA et R.
ADJOVI, Op.cit. p. 246.
* 87 Le Soudan a
signé le Statut de Rome le 08 septembre 2000. Le 14 juillet 2008, son
Président Omar El-Bashir est mis en accusation pour crimes contre
l'humanité et crimes de guerre. Le 26 Août 2008, le Soudan, qui,
n'a pas ratifié le Statut de Rome, fait part de son retrait de la CPI,
disponible sur http//fr.wikipedia.org./wiki/cour-p%c3%A9nale-internationale
consulté le 11/03/2012.
* 88 F.AUMOND,
« La situation au Darfour déférée à la
CPI. Retour sur une résolution historique du Conseil de
sécurité », in Revue générale de
Droit international Public, Pédone, Paris, 2008, p. 113.
* 89 Résolution
1593(2005), Conseil de sécurité, 5158ème
séance, 31 mars 2005.
* 90 J. TASOKI MANZELE,
Op.cit., p. 151.
* 91 A cette occasion, le
Président du Conseil de sécurité s'était
exprimé dans les termes suivants : « (....) le Conseil de
sécurité se déclare gravement préoccupé par
la détérioration de la situation humanitaire et des droits de
l'homme dans la région du Darfour au Soudan. Notant que des milliers de
personnes ont été tuées et que des centaines de milliers
d'autres risquent de mourir dans les prochains mois(...) le Conseil est de
même profondément préoccupé par les informations
selon lesquelles des violations massives des droits de l'homme et du droit
international humanitaire continuent d'être perpétrées au
Darfour(...) » (S/PRST/2004/18).
* 92
http://www.franceonu.org
consulté le 11/03/2012.
* 93 E. DAVID, Les
éléments de Droit pénal et européen, Bruylant,
Bruxelles, 2009, p. 955.
* 94 Résolution 1593
du Conseil de sécurité du 31 mars 2005, Doc.
NU.S./RES/1593(2005).
* 95 Idem
* 96 Idem
* 97 E. DAVID, Droit des
organisations internationales, vol. II, PUF, Paris, 2008, p. 20.
* 98 Résolution 1593
du Conseil de sécurité.
* 99 E.DAVID, Les
éléments, Op.cit., p. 955.
* 100 H.ABRAHAHA et
R.ADJOVI, Op.cit., p. 249.
* 101 E.DAVID, Les
élément., Op.cit., p. 958
* 102M. BRIENS, Conseil de
sécurité-Libye, disponible sur
http://www.franceonu.org/spip.php?
Article 5872, consulté le 11/03/2012.
* 103
http://www.coalitionfortheicc.org
consulté le 11 mars 2012.
* 104
http://www.franceonu.org
consulté le 11/03/2012.
* 105 Préambule du
Statut de Rome, §3, « Reconnaissant que les crimes d'une telle
gravité menacent la paix, la sécurité et le
bien-être du monde ».
* 106 E.DULAC, Op.cit.,
p.64
* 107 E.DAVID, Op.cit,
p. 946.
* 108 L.CONDORELLI et
S.VILLALPANDO, « Les Nations Unies et les juridictions pénales
internationale », in Revue générale de Droit
International public, Pedone, Paris, 2006, p. 230.
* 109 J.TASOKI MANZELE,
Op.cit., p.380.
* 110 W. BOURDON,
Op.cit., p.90.
* 111
http.//www.senat.fr/rap/r98-313-mono.html loc17 consulté le 10/05/2012.
* 112 E.NUKURU, Op.Cit.,
p. 95.
* 113 Une suspension pour une
durée limitée et au regard uniquement de l'exécution des
mandats d'arrêt ou actes de poursuite aurait paru plus acceptable. Cf.P.
BAUDOUIN, La Cour pénale internationale set déjà
paralysée, Ed. Electronique, Sl, Sd, p.2.
* 114 L'amendement
proposé à Rome-notamment par la Belgique-établissant une
disposition en ce sens mais ne fût pas adopté. W.BOURDON,
Op.cit. p. 92.
* 115 Une telle initiative ne
serait jamais un droit mais toujours le résultat d'une autorisation
expresse du Conseil de sécurité. W.BOURDON, Idem, p.
93.
* 116 E. NUKURI, Op.cit,
p.97
* 117 Armistice est une
convention par laquelle des belligérants suspendent les
hostilités sans mettre fin à l'état de guerre. LAROUSSE,
Dictionnaire de Français, France, 2006, p. 24.
* 118 E.NUKURI,
Op.cit., p. 98.
* 119 Articles 25, 39, 41, de
la Charte des Nations Unies, voire également S.SUR, Op.cit., p.
44
* 120 P. WECKEL,
Op.cit., p. 992
* 121 W.BOURDON, Op.cit.
p. 90.
* 122 W. BOURDON, Idem,
p. 91
* 123 W.BOURDON,
Op.cit. p. 92
* 124 A. BASHIZI ANDEM'AMBIKE,
La compétence de la CPI dans la poursuite des personnes jouissant
d'une qualité officielle, Mémoire, UCB, Fac. de Droit,
2007-2008, inédit, p. 68.
* 125 Résolution 1422
du Conseil de sécurité du 12 juillet 2002, Doc,
N.U.S./RES/1422(2002).
* 126 Il s'agit d'autres
Etats contributeurs non parties au Statut de Rome mais aussi d'Etats parties au
Statut de Rome dont les ressortissants seraient placés sous le
commandement d'un Etat contributeur qui n'est pas partie au Statut de Rome.
Lire dans ce sens F. COULEE, « Sur un Etat tiers peu discret :
Les Etats-Unis confrontés au Statut de la CPI », In
Annuaire Français de Droit international, XLIX, 2003, pp.
53-54.
* 127 H.ASCENSION et R.
MAISON, « L'activité des juridictions pénales
internationales (2003-2004) », In Annuaire Français de
Droit international, 2004, p. 429.
* 128 J. FERNANDEZ, La
politique juridique extérieure des Etats-Unis à l'égard
de la CPI, Pedone, Paris, 2010, pp. 468 et s.
* 129 L. CONDORELLI et S.
VILLALPANDO, Op.cit. p. 232.
* 130 Ibidem.
* 131 Article 5 du statut de
Rome
* 132 M. KAMTO,
L'agression en droit international, éd. A. Pedone, Paris, 2010,
p.2.
* 133 M. WENEWESER et alii,
Crime d'agression disponible sur http :
www.iccnow.orgmod=agression$lang=fr
consulté le 10/05/2012.
* 134 Article 15 bis, 6 du
Statut de Rome.
* 135 Article 15 bis, 8 du
Statut précité
* 136 Article 15 bis, 4 du
statut de Rome, Lire également P. CURRAT, la conférence de
Kampala face au crime d'agression, disponible sur http://
www.phileppecurrat.ch/index2.php?post
consulté le 10/05/2012.
* 137 E. BAKAMA BOPE,
Document : crime d'agression selon la CPI à Kampala,
quid ? sur
http://www.cherikfitanews.nt/article-cocum
consulté le 11/05/2012
* 138 F. DJONKO,
Op.cit, p.4
* 139 Article 86 du Statut de
Rome : « Conformément aux dispositions du présent
Statut, les Etats coopèrent pleinement avec la Cour dans les
enquêtes et poursuites qu'elle mène pour les crimes relevant de sa
compétence ».
* 140 Article 12, 3 du Statut
de Rome : « Si la reconnaissance de la compétence de la
Cour par un Etat qui n'est pas partie au présent Statut est
nécessaire aux fins du §2, cet Etat peut, par déclaration
déposée auprès du greffier, consentir à ce que la
Cour exerce sa compétence à l'égard du crime dont il
s'agit. L'Etat ayant reconnu la compétence de la Cour coopère
avec celle-ci sans retard et sans exception conformément au chapitre
IX »
* 141 E.DULAC,
Op.cit., p. 51 ; Lire également A.M. LA ROSA, Les
juridictions pénales internationales : La procédure et la
preuve, PUF, Paris, 2003, p.84.
* 142 C. LAUCCI,
« La compétence et complémentarité dans le
Statut de la future CPI », in L'observateur des Nations Unies,
n°7, 1999, p. 141.
* 143 Art. 93, 4 du Statut de
Rome: « conformément à l'article 72, un Etat partie
peut rejeter, totalement ou partiellement, une demande d'assistance de la Cour
que si cette demande a pour objet la production de documents ou la divulgation
d'éléments de preuve qui touchent à sa
sécurité nationale ».
* 144 Article 87, 7 du Statut
de Rome : « Si un Etat partie n'accède pas à une
demande de coopération de la Cour contrairement à ce que
prévoit le présent Statut, et l'empêche ainsi d'exercer les
fonctions et les pouvoirs que lui confère le présent Statut, la
Cour peut en prendre acte et en référer à
l'Assemblée des Etats Parties ou au Conseil de sécurité
lorsque c'est celui-ci qui l'a saisie »
* 145
http://www.asil.org/insigh.20.htm
consulté le 10 mai 2012.
* 146 E. DULAC,
Op.cit., p. 53.
* 147 Ibidem
* 148 W.BOURDON, Op.cit.,
p. 247
* 149 Article 87, 5 du Statut
de Rome : « La Cour peut inviter tout Etat non partie au
présent chapitre sur base d'un arrangement ad hoc ou d'un accord conclu
avec cet Etat ou sur toute autre base appropriée(...) ».
* 150 E. DULAC,
Op.cit., p. 55.
* 151
http://www.lchr.org/icc/iccpap5.htm
consulté le 12 mai 2022.
* 152 W.BOURDON, Op.cit.
p. 90.
* 153 F.DAINOTTI, Op.cit.,
p.30.
* 154 Ibidem.
* 155 Art.108 de la Charte des
Nations Unies : « Les amendements à la
présente Charte entreront en vigueur pour tous les membres des Nations
Unies quand ils auront été adoptés à la
majorité des deux tiers des membres de l'Assemblée
générale et ratifiés, conformément à leurs
règles constitutionnelles respectives, par les deux tiers des membres de
l'Organisation, y compris tous les membres permanents du Conseil de
Sécurité ».
* 156 ICC-ASP/3/15.
* 157 DAINOTTI,
op.cit, p.35
* 158 ICC-ASP/3/RES.4.
* 159 Déclaration du
représentant de l'Uruguay lors de la conférence de Rome, au cours
de la huitième séance plénière, 18 juin 1998,
A/CONF.183/SR.8, p.5
* 160 Article 53 du Statut de
Rome portant ouverture d'une enquête dispose :
« 1. Le Procureur, après avoir
évalué les renseignements portés à sa connaissance,
ouvre une enquête, à moins qu'il ne conclue qu'il n'y a pas de
base raisonnable pour poursuivre en vertu du présent Statut. Pour
prendre sa décision, le Procureur examine :
a) Si les renseignements en sa possession donnent des raisons
de croire qu'un crime relevant de la compétence de la Cour a
été ou est en voie d'être commis;
b) Si l'affaire est ou serait recevable au regard de
l'article 17;
c) S'il y a des raisons sérieuses de penser, compte
tenu de la gravité du crime et des intérêts des victimes,
qu'une enquête ne servirait pas les intérêts de la
Justice.
S'il conclut qu'il n'y a pas de raison sérieuse de
poursuivre et si cette conclusion est fondée exclusivement sur les
considérations visées à l'alinéa c), le Procureur
en informe la Chambre préliminaire.
2. Si, après enquête, le Procureur conclut qu'il
n'y a pas de motifs suffisants pour engager des poursuites :
a) Parce qu'il n'y a pas de base suffisante, en droit ou en
fait, pour demander un mandat d'arrêt ou une citation à
comparaître en application de l'article 58;
b) Parce que l'affaire est irrecevable au regard de l'article
17; ou
c) Parce que poursuivre ne servirait pas les
intérêts de la justice, compte tenu de toutes les circonstances, y
compris la gravité du crime, les intérêts des victimes,
l'âge ou la déficience de l'auteur présumé et son
rôle dans le crime allégué; il informe de sa conclusion et
des raisons qui l'ont motivée la Chambre préliminaire et
l'État qui lui a déféré la situation
conformément à l'article 14, ou le Conseil de
sécurité s'il s'agit d'une situation visée à
l'article 13, paragraphe b).
3. a) À la demande de l'État qui a
déféré la situation conformément à l'article
14, ou du Conseil de sécurité s'il s'agit d'une situation
visée à l'article 13, paragraphe b) la Chambre
préliminaire peut examiner la décision de ne pas poursuivre prise
par le Procureur en vertu des paragraphes 1 ou 2 et demander au Procureur de la
reconsidérer;
b) De plus, la Chambre préliminaire peut, de sa propre
initiative, examiner la décision du Procureur de ne pas poursuivre si
cette décision est fondée exclusivement sur les
considérations visées au paragraphe 1, alinéa c) et au
paragraphe 2, alinéa c). En tel cas, la décision du Procureur n'a
d'effet que si elle est confirmée par la Chambre de première
instance.
4. Le Procureur peut à tout moment reconsidérer
sa décision d'ouvrir ou non une enquête ou d'engager ou non des
poursuites à la lumière de faits ou de renseignements
nouveaux ».
* 161 R. B. PHILIPS,
« The international criminal court statute : jurisdiction
and admissibility », in criminal law forum, vol. 10, n°1;
1999, pp.81-83
* 162 Article 5 du Statut de
Rome : « La compétence de la Cour est limitée aux
crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté
internationale. En vertu du présent Statut, la Cour a compétence
à l'égard des crimes suivants : a) Le crime de
génocide, b) Les crimes contre l'humanité, c) Les crimes de
guerre, d) le crime d'agression.
* 163 Article 25 du Statut de
Rome : « 1. La Cour est compétente à
l'égard des personnes physiques en vertu du présent
Statut ».
* 164 Article 11 du statut de
Rome : « 1. La Cour n'a compétence qu'à
l'égard des crimes relevant de sa compétence commis après
l'entrée en vigueur du présent Statut ».
* 165 Art. 124 du statut de
Rome : « Nonobstant les dispositions de l'article 12,
paragraphes 1er et 2, un Etat qui devient partie au présent
Statut peut déclarer que, pour une période de sept ans à
partir de l'entrée en vigueur du Statut à son égard, il
n'accepte pas la compétence de la Cour en ce qui concerne la
catégorie de crimes visée à l'article 8 lorsqu'il est
allégué qu'un crime a été commis sur son territoire
ou par ses ressortissants. Il peut à tout moment retirer cette
déclaration. »
* 166 L'article 25
(Affaires soumises à la Cour par le Conseil de sécurité)
employait le terme « affaire », au sens de « cas
particulier », rapport du groupe de travail sur un projet de statut
pour une cour criminelle internationale, in Rapport de la Commission du
Droit International sur les travaux de sa quarante-cinquième
session, 3 mai-23 juillet 1993, A/48/10.
* 167 E. DULAC,
Op.cit, p.40
* 168 Article 42
§1er du statut de Rome
* 169 Article 53 §3
alinéa a du statut précité
* 170 E. DULAC,
op.cit, p.40
* 171 F. LATTANZI,
Compétence de la Cour Pénale internationale et consentement
des Etats, in RGDI, n°2, 1999, P.41.
* 172 Article 23,3 du projet
de la CDI : « Aucune poursuite ne peut être engagée en
vertu du présent statut à raison d'une situation dont le conseil
de sécurité traite en tant que menace contre la paix ou rupture
de la paix ou acte d'agression aux termes du chapitre VII de la Charte des
Nations Unies, à moins que le conseil de sécurité n'en
décide autrement »
* 173 J.F. DOBELLE, La
convention de Rome portant statut de la CPI, AFDI, 1990, pp.356-369
* 174 E. DULAC,
op.cit, p.72
* 175 Art. 10 de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, Art.14, §1 du Pacte
International relatif aux Droits Civils et Politiques
* 176 E. DAVID,
op.cit, p.945
* 177 Article 24 §2 de la
Charte des Nations Unies
* 178 Article 1
§1er de la Charte précitée.
* 179 Principes adoptés
par le 7e congrès des Nations Unies pour la prévention
du crime et le traitement des délinquants, Milan, 26 août-6
septembre 1985, approuvés par l'Assemblée générale
des Nations Unies, A/Rés. 40/146, 13 décembre 1985
* 180 L. CONDORELLI et S.
VILLALPANDO, Op.cit, pp.646-647
* 181 Idem, pp. 640
et s.
* 182 L'article 19, §1er
reconnaît à la Cour le pouvoir de s'assurer qu'elle est
compétente pour connaître de toute affaire portée devant
elle.
* 183 F. LATTANZI, op.ct,
p.443.
* 184 P. WELKEL, Op.cit,
p.985.
* 185 L. CONDORELLI,
Op.cit., p.17.
* 186 S. SUR, Op.cit,
p.45
* 187 Article 15 bis, 6 du
Statut de Rome.
* 188 Article 15 bis, 7 du
Statut précité.
* 189 Article 24, 1 de la
Charte des Nations Unies.
* 190. Article 39 de la Charte
précitée.
* 191Article 15 bis, 8 du
Statut précité.
* 192 M. CORMACK et G.J.
SIMPSON, « A new international criminal law regime? in
Netherlands international law review, 1995, p.188
* 193 M. BEDJAOUI, Nouvel
ordre mondial et contrôle de la légalité des actes du
Conseil de sécurité, Bruylant, Bruxelles, 1994, p.11
* 194 CIJ, Rec. 1986, p.290
* 195 Article 15 bis, 9 et
Article 15 ter, 4 du Statut de Rome
* 196 D.D. NTANDA NSEREKO,
op.cit, p.94
* 197 D.D. NTANDA SEREKO,
idem, p.97
* 198 M. POLITI,
« Le statut de Rome de la Cour pénale internationale : le
point de vue d'un négociateur », in Revue
Générale de Droit International Public, Tome 103, n°4,
1999, p.30
* 199 A.C. CARPENTER,
« The international criminal court and the crime of
aggression », in Nordic journal of intenational law, vol.
64, n°2, 1995, p.235
* 200 Rapport de la commission
du droit international sur les travaux de sa quarante-sixième session,
4 mai - 24 juin 1992, Doc. A/47/1°,p.27
* 201 Articles 15 bis, 9 et 15
ter, 4 du statut de Rome.
* 202 S. BULA-BULA,
Op.cit, p.7
* 203 E. DALAC,
Op.cit, p.15
* 204 Article 103 de la Charte
de Nations Unies.
|