2.1.2 Les peintures de sable.
2.1.2.1 Description formelle
Aussi appelées « ground painting » en
anglais, les peintures de sable (ILL.11-14) sont d'immenses tableaux
formés sur le sol avec les couleurs et textures naturellement
présentes dans le désert, c'est-à-dire principalement des
pigments, des graines, des herbes hachées, des plumes, de la fiente, du
sang et du sable. La majorité de ces compositions varient entre 6 et 30
m2 (Kimber 1993, 231) mais d'autres atteignent 100 m2, ce
qui permet des compositions très complexes dont les tableaux sur toile
ne sont généralement qu'un fragment (Michaels 1994, 53).
Certaines peintures de sable sont construites autour d'un piquet central
décoré et peuvent contenir des objets sacrés.
2.1.2.2 Peintures religieuses
Ces peintures sont rituelles. Elles sont composées lors
de cérémonies qui peuvent durer plusieurs jours. En
général, on compose une peinture par jour qui sera
détruite à la fin de la journée par les danseurs.
Néanmoins, on conserve
parfois une peinture pour l'incorporer à celle du
lendemain. Ces tableaux, associés aux peintures corporelles, aux chants
et aux danses, sont un moyen de renouer le contact avec les ancêtres
originels. Considérées comme dangereuses pour les
non-initiés à cause des forces ancestrales qu'elles invoquent,
ces cérémonies sont maintenues secrètes (Isaac 1984,
45).
2.1.2.3 Etapes de fabrication
Les hommes qui font le tableau sont tous d'âge mûr
car ils doivent avoir un niveau d'initiation très élevé
qui leur permette de connaître précisément toutes les
étapes du rituel et le rôle de chacun. Les initiés
réunis pour la cérémonie choisissent une surface plus ou
moins plane qu'ils défrichent sur un site souvent lié à
l'émergence ou à la disparition de l'ancêtre qu'ils
s'apprêtent à vénérer. Ils recouvrent le sol de
terre de termitière mouillée puis séchée et y
ajoutent parfois leur propre sang (Strehlow 1964, 51). Ces techniques rendent
la surface bien plate et durcie. Les différents matériaux
nécessaires sont rassemblés et préparés : les
herbes sont finement hachées puis colorées avec de l'ocre ou de
l'argile en poudre de manière à former une pâte
colorée semblable à du papier mâché. Les cercles
sont formés en premier par plusieurs personnes assises autour du motif
en construction. Ce principe de construction induit l'absence de sens du
tableau : on peut le regarder depuis n'importe quel côté, d'autant
plus que ces compositions ne sont pas de formes régulières mais
plutôt une surface aux bords ondulants. Les "artistes" forment les motifs
avec de petits tas de pâte colorée juxtaposés; on pourrait
voir là l'origine de points caractéristiques des peintures
actuelles sur toile. Ce travail est lent et est souvent accompagné de
chants fredonnés associés au tableau réalisé. A la
fin de la cérémonie, le tableau est entièrement
détruit par les pas des
danseurs. Ainsi les non-initiés qui viendraient sur place
après la cérémonie n'en trouveraient presque plus de
traces. (Isaac 1984, 212-3).
Les groupes des Aranda de l'Est et du Sud comme ceux du
désert occidental ne construisent pas ces peintures de sable, mais font
des cérémonies similaires où le support des motifs rituels
est non pas le sol mais des boucliers (Strelhow 1964, 51). Des peintures de
même type peuvent également décorer des pierres, des
coolamons, sorte de grands plats qui servent au transport, et d'autres objets
utilisés principalement lors de rituels (ILL. 15-18).
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