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Le « droit au retour » des réfugiés palestiniens dans la perspective d'une solution du conflit au Moyen- Orient

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par Stéphanie Nakhel
Université Paris Sud 11 - Master en diplomaties et négociations stratégiques 2010
  

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LE c DROIT AU RETOUR » DES RÉFUGIÉS
PALESTINIENS DANS LA PERSPECTIVE D'UNE
SOLUTION DU CONFLIT AU MOYEN ORIENT
APPROCHE BASÉE SUR LE DROIT INTERNATIONAL

Mémoire pour l'obtention du Master en Diplomaties et Négociations
Stratégiques

Publié et Soutenu Par:

Stéphanie Nakhel

Directeur de Recherche :

P. Fadi Fadel

Beyrouth, Mai 2011.

REMERCIEMENTS

Je tiens à offrir mes plus sincères remerciements au Père Fadi Fadel pour sa supervision, son aide et ses précieux conseils.

Aux membres de ma famille pour leur grande patience et leur appui indéfectible.

Je remercie particulièrement ma soeur Maya pour son aide et son soutien indispensables dans l'élaboration de ce travail.

J'adresse mes remerciements aux professeurs et à la direction de ce Master, en particulier Dr Amine Lebbos et Mme Laure Saad pour leur aide et leur soutien tout au long de cette année académique.

Mes pensées s'adressent finalement à mes collègues au Master pour leur sincère amitié.

TABLE DES MATIÈRES

ABRÉVIATIONS . 6

INTRODUCTION .7

PREMIÈRE PARTIE:

Le «Droit au Retour» des Réfugiés Palestiniens dans une Perspective du Droit International 11

Chapitre I:

Les Agences Onusiennes Concernées par la Question des Réfugiés Palestiniens .13

Section I:

L'ONU et les Réfugiés Palestiniens : Un Engagement Purement Humanitaire 13

§1- L'Évolution du Régime International des Réfugiés 13

§2- Qui sont les Réfugiés Palestiniens ? 14

§3- La Commission de Conciliation des Nations Unies pour la Palestine 16

§4- L'Office de Secours et des Travaux des Nations Unies pour les Réfugiés de Palestine

dans le Proche-Orient 18

§5- Pourquoi les Réfugiés Palestiniens ne sont pas Sous le Mandat du HCR ' .20

Section II:

UNRWA, Six Décennies d'Aide aux Réfugiés Palestiniens .23

§1- Quel bilan tenir de l'UNRWA, 62 ans Après sa Création ' ..23

§2- L'UNRWA et le « Droit au Retour » 26

§3- L'UNRWA et la Recherche des Solutions Durables pour les Réfugiés Palestiniens .28
Chapitre II:

L'Existence Juridique d'un « Droit au Retour » 30

Section 1 :

Les Principes Généraux du Droit International 30

§1- Les Réfugiés Palestiniens et le Droit Individuel de Retour 30

1- Le «Droit au retour» et le Droit de la Nationalité Relatif à l'Ordre de Succession

des Etats 31

2- Le « Droit au Retour » dans le Droit International Humanitaire .....36

3- Le « Droit au Retour » et le Droit International des Droits de l'Homme 40

4- Le Droit au Retour dans le Droit des Réfugiés et la Pratique des Etats 44

§2- Le «Droit au Retour» comme Expression d'un Droit Politique d'Exercice Collectif 46

Section2 :

Les Résolutions Onusiennes Relatives au «Droit de Retour» ..49

§1 La Résolution 194 et le Problème des Réfugiés 51

§2- Dans quelle Mesure l'Application du «Droit au Retour » est elle Contraignante ? 53

DEUXIÈME PARTIE :

Faire du « Droit au Retour » une Réalité Concrète 56

Chapitre I :

Le Retour des Réfugiés dans la Pratique Internationale 58

Section I :

Les Principales Tendances dans l'Élaboration de Solutions Durables pour les

Réfugiés dans le Monde 58

§1- Le Retour des Réfugiés : la Solution Durable Préférée 58

§2- Le Retour des Réfugiés: L'Élément-clé de toutes les Conventions et Résolutions Internationales 62

§3- L'Étroite Relation entre le Retour des Réfugiés et un Accord de Paix Réussi 66

§4- Le Rapatriement Volontaire entre Opérations d'Urgences et Développements .67
§5-Le Caractère Volontaire en Matière de Solutions Durables dans les Normes Internationales 70

Section 2 :

Dans quelle Mesure ces Pratiques sont Pertinentes au Contexte Palestinien? 75

§1- Est-ce que le Cas des Réfugiés Palestiniens est-il Vraiment Unique ? 75

§2- Comment Profiter de l'Expérience Internationale pour la Recherche des Solutions au

Problème Israélo-palestinien ? .78

1- Quel rôle pour les agences internationales? 78

2- Relation entre paix et réconciliation .79

3- Le choix des réfugiés .81

4- Le rôle de la communauté internationale .82

Chapitre 2 :

Le Futur des Réfugiés : Entre Solution et Dissolution ....84

Section I :

Les Palestiniens en Exil dans le Processus de Paix ..84

§1- Négocier le « Droit au Retour » des Réfugiés Palestiniens 84

§2- L'accord d'Oslo : Un «Versailles» Palestinien ? 90

§3- Le Processus de Paix : L'Autorité Palestinienne Face aux Réfugiés .93

Section II :

Résoudre le Problème des Réfugiés Palestiniens ..96

§1- Le Rôle des Nations Unies dans la Résolution du Conflit Israélo-palestinien 96

§-2- Quelle Solution pour la Question des Réfugiés Palestiniens? 99

CONCLUSION 105

BIBLIOGRAPHIE 109

ABRÉVIATIONS

AP : Autorité Palestinienne.

AGNU : Assemblée générale des Nations Unies

CCNUP : Commission de Conciliation des Nations Unies pour la Palestine. CERD : Comité pour l'élimination de la discrimination raciale

CESCR : Comité des droits économiques, sociaux et culturels.

CDI: Commission du droit international

CSNU : Conseil de Sécurité des Nations Unies

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'homme.

HCR : Haut Commissariat pour les réfugiés

ICERD: Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

OIR : Organisation internationale des réfugiés.

OLP : Organisation de Libération de la Palestine.

ONU : Organisation des Nations Unies.

PIDCP : Pacte international relatif aux droits civils et politiques

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement (en anglais UNDP).

TMI : Tribunal Militaire International

TPO : Territoires Palestiniens Occupés.

UNRPR : Secours des NU aux réfugiés de la Palestine (en anglais : United Nations Relief for Palestine Refugees).

UNRRA : L'Administration des Nations unies pour les secours et la reconstruction. UNRWA : Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (En anglais: United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East).

INTRODUCTION

INTRODUCTION

« Juste à côté de la frontière qui existe entre le `nous' et `l'étranger', se trouve un territoire périlleux : celui de la non appartenance : c'est l'endroit où, à des époques primitives, on bannissait les gens, et où, à l'ère moderne, d'énormes masses humaines errent en tant que réfugiés et personnes déplacées (...)

Car contrairement au nationalisme, l'exil est un état discontinu. Les exilés sont coupés de leur terre, de leur passé ».

Edward Said, «Reflections on Exile», 1984.

C'était en 1948 que le destin du peuple palestinien fut changé à jamais, lorsque, suite au vote du plan du partage1, une nation presque entière a entamé son voyage sur les routes d'un exil interminable, laissant derrière elle, foyers, terres, souvenirs et tout un passé ; laissant surtout un pays : la Palestine.

Dans l'espace de quelques semaines, les Palestiniens se retrouvèrent en majorité des réfugiés. Cette année-là marqua le point de départ d'une histoire sans pareil : celle d'un peuple qui a perdu toute identification autre que celle de « réfugié ».

Le 15 mai 2011 marque le 63eme anniversaire de la « Nakba » qui a frappé le peuple palestinien à travers l'établissement de l'État d'Israël sur 78% de la Palestine historique. Il y a soixante trois ans, le monde a assisté à l'expulsion de plus de 700.000 Palestiniens de leurs villes et villages, le massacre de centaines de civils et la destruction de centaines de villages. Ces Palestiniens ont été déplacés, dépossédés de leurs maisons, formant ainsi la plus grande population de réfugiés sur terre.

A une époque où l'homme s'évertue pour protéger ses droits, où les superpuissances prétendent ériger la justice en règle sacro-sainte : un réfugié sur trois dans le monde est palestinien2. Plus que la moitié de ce peuple vit en dehors des frontières historiques de la Palestine3, principalement en Jordanie, au Liban et en Syrie.

Avec les années qui ont suivi, on a vu trois générations de Palestiniens naître sous le statut de réfugiés, d'apatrides et d'exilés. Leur nombre a ensuite enflé, pour atteindre les six millions4.

1 Le 29 novembre 1947, le plan de partage de la Palestine est approuvé par l'Assemblée générale de l'ONU par le vote de la résolution 181.

Ce plan prévoit la partition de la Palestine en trois entités, avec la création d'un État juif et d'un État arabe, Jérusalem étant placée sous contrôle international.

2 T.Rempel, «Who are Palestinian refugees?», Forced Migration Review, Issue 26 p5.

3 Centre de Badil, Sondage sur les réfugiés palestiniens et personnes déplacées palestiniennes, 2006-2007 p 43, ( www.badil.org).

4 Entre enregistrés et non enregistrés.

Il y a 4.8 million de palestiniens admissibles aux services de l'UNRWA ( http://www.unrwa.org/etemplate.php?id=86).

La grande majorité s'est vu refuser la reconnaissance des droits de l'Homme les plus basiques et a souffert de l'insuffisance de la protection et de l'assistance internationale, pour se voir confinée dans des camps de réfugiés démunis.

Ce peuple exilé n'a pourtant jamais perdu l'espoir ni la foi de revenir un jour à sa terre qu'il a été forcé de quitter. Le retour est devenu un facteur fondamental dans la reconstruction de l'identité nationale palestinienne en exil.

Quoique le débat israélo-palestinien qui entoure la question des réfugiés ait subi des changements perceptibles depuis le début des années 1990, certains éléments importants sont restés constants car, pour les Palestiniens, le noeud du problème ne réside pas dans des considérations pragmatiques ou idéologiques en tant que telles, mais dans des questions de justice. Une justice qui ne peut être réalisée sans le retour qui constitue un principe fondamental du droit naturel et international.

L'expérience des efforts de paix a en effet montré que la résolution du problème des réfugiés palestiniens est une condition majeure pour parvenir à un accord, et la clé de ce problème n'est autre que la question du « droit au retour ».

Si certains considèrent que la question des réfugiés palestiniens est purement humanitaire, elle est par contre beaucoup plus fondamentale, étant un problème politique découlant de la violation du droit international.

Dans cette étude, on va démontrer l'importance et la nécessité de construire une approche fondée sur ce droit afin de résoudre la situation des réfugiés et de mettre en évidence le lien entre le retour, le processus de paix et sa consolidation.

Il est reconnu depuis longtemps qu'une solution équitable et acceptable au problème des réfugiés, forme un élément essentiel pour parvenir à une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens. Mais en fait, une solution juste et globale pourrait-elle exclure le « droit au retour » des réfugiés? Existe-t-il un « droit de retour » dans le droit international public ? Quelle est la validité de l'affirmation selon laquelle les réfugiés palestiniens constituent un cas particulier? Dans quelle mesure la pratique internationale peut-elle offrir un point de vue constructif sur le cas de la Palestine? L'exclusion des réfugiés d'un futur accord de paix serait-il possible? Quelle est la relation entre la réconciliation et l'établissement d'une paix durable dans la région?

Ces sujets figurent parmi les principales questions auxquelles on va tenter de répondre dans cette étude.

Dans un premier temps, on va passer en revue les Organisations onusiennes concernées par la question palestinienne, pour ensuite examiner la question de l'exclusion des Palestiniens de la Convention de Genève5, et dresser finalement un bilan des activités de l'UNRWA pendant ces six dernières décennies.

5 Celle de 1951.

Dans le deuxième volet de notre étude on va démontrer que les réfugiés palestiniens ont le droit de retourner dans leurs foyers d'origine conformément au droit international. Et cela en étudiant tout d'abord le droit individuel de retour dans quatre sources du droit international coutumier. Par la suite, on va traiter la question du retour dans le cadre du droit des peuples à disposer d'eux mêmes, pour en finir avec les résolutions onusiennes relatives au « droit au retour », et surtout la résolution 194.

L'objectif du troisième volet est de chercher à contextualiser la question du retour des réfugiés à travers une étude comparative. Pour le faire on va se baser sur l'expérience de la communauté internationale dans le traitement d'autres situations de réfugiés en vue de voir comment les idées et les leçons apprises peuvent être appliquées au cas palestinien.

D'une part, cette analyse sera utile en raison de la richesse des pratiques et des précédents dans le domaine de la protection des réfugiés. Et d'autre part, parce que l'idée est de comparer les normes et les pratiques internationales avec celles qui ont émergé des pourparlers israélopalestiniens.

Dans un dernier temps, on va montrer la relation entre la question du retour des réfugiés et un règlement permanent du conflit israélo-palestinien.

Au début, on verra la façon avec laquelle le problème des réfugiés a été abordé dans le Processus de Paix, et comment l'absence de cette question cruciale des accords d'Oslo a conduit à l'échec de ceux-ci.

Ensuite on examinera, le rôle des Nations Unies dans ce différend.

Enfin, on étudiera la possibilité de résoudre ce conflit dans le cadre de la théorie de la justice transitionnelle.

PREMIÈRE PARTIE

Le «Droit au Retour» des Réfugiés Palestiniens dans

une Perspective du Droit International

Première partie

Le « Droit au Retour » des Réfugiés Palestiniens dans une Perspective du Droit International.

Cette partie a pour objet l'analyse du cadre juridique du « droit au retour ».

Avant d'examiner les fondements juridiques de ce droit, on va préalablement exposer au premier chapitre le contexte historique et institutionnel qui s'y rattache.

Pour ce faire, on présentera au premier abord un aperçu sur l'évolution du régime international des réfugiés et sur la définition du refugié palestinien, avant d'aborder le sujet des organismes onusiens concernés par la question des refugiés palestiniens, leur mandat et leur rôle.

Par suite, on analysera dans le second chapitre, les sources du droit international qui sont en rapport avec notre étude. On verra que si les normes régissant ce retour prennent leur source dans plusieurs branches du droit international, elles puisent l'essentiel de leurs fondements dans le droit international de la nationalité relatif à l'ordre de succession des Etats, dans le droit international humanitaire et dans le droit international des droits de l'homme.

On étudiera également la résolution 194 de l'Assemblée générale de l'ONU et on mentionnera la mesure dans laquelle elle pourrait être contraignante.

Chapitre1

Les Agences Onusiennes Concernées par la Question des Réfugiés Palestiniens.

Ce chapitre présente un certain nombre de questions qui seront essentielles dans la compréhension du contexte élargi de cette étude ; il est divisé en deux parties.

La première partie fournit un aperçu bref sur le régime international des réfugiés, la définition des réfugiés palestiniens et les agences des Nations Unies concernées par cette question, y compris des informations sur l'histoire, les mandats et les activités essentielles de ces organismes, tout comme la marge d'application de l'article 1D de la convention de Genève ; alors que la seconde partie est consacrée pour évoquer le rôle joué par l'UNRWA pendant ses 62 ans de mandat.

Section I

L'ONU et les Réfugiés Palestiniens : Un Engagement Purement Humanitaire.

§1- L'Évolution du Régime International des Réfugiés.

Bien que la notion du refuge des gens en désespoir existe depuis la nuit des temps, ce n'est qu'à partir du dix neuvième siècle que les pays admettent officiellement l'existence d'un droit d'asile pour les réfugiés politiques6. Avant la Première Guerre mondiale, la protection des réfugiés était soutenue de façon ad hoc sans qu'aucune véritable norme ni procédure n'en dirige la pratique. Les profonds renversements politiques qui influencèrent le début du 20eme siècle viennent néanmoins changer le statu quo. Les déferlements massifs de réfugiés provoqués par la Première Guerre mondiale et la Révolution russe, avantagèrent l'apparition d'un régime international de protection des réfugiés.

En 1921, la Société des Nations7 a créé le poste du Haut Commissaire pour faire face au grand nombre de réfugiés de la Première Guerre mondiale, la révolution russe, et l'effondrement de l'Empire ottoman. La Société des Nations désigna en 1921 un premier Haut Commissaire pour les réfugiés : M. Fridtjof Nansen, dont le mandat était uniquement restreint aux réfugiés russes, mais qui réussit à étendre sa mission pour venir également en aide aux réfugiés grecs, bulgares et arméniens8.

6 Voir, Guy Goodwin-Gill, " The Refugee in International Law», Oxford University Press, (2007), p.202.

7 La Société des Nations était une organisation internationale introduite par le traité de Versailles en 1919, lui-même élaboré au cours de la Conférence de paix de Paris (1919), dans le but de conserver la paix en Europe après la Premiere Guerre Mondiale. Basée à Genève, elle est remplacée en 1945 par l'ONU.

8HCR, « Les réfugiés dans le monde 2000 », (2000), p.15.

M. Finnemore et M.Barnell, «Rules for the World: International Organizations in Global Polities», Ithaca, Cornell University Press, (2004), p. 77.

L'organisation temporaire avait pour but, le rapatriement et la réinstallation des réfugiés, ainsi ces derniers furent désormais considérés comme sujets de droit.

Affrontés aux flux migratoires de la Seconde Guerre mondiale, les États créèrent de nouvelles organisations internationales consacrées au problème des réfugiés.

L'Administration des Nations Unies pour le Secours et la Reconstruction (UNRRA), a été créée en 1944 pour mener à bien le rapatriement des personnes déplacées après la guerre en Europe, l'organisation des secours, la mise en en place du rapatriement de masse et les programmes de réinstallation.

En 1945, la Société des Nations a été remplacée par l'ONU et en 1946 cette dernière a créé un nouvel organisme appelé l'Organisation Internationale des Réfugiés (OIR) afin de traiter avec le rapatriement et la réinstallation. L'OIR a été créé comme une agence d'intérim pour tenter de trouver une solution aux centaines de milliers de réfugiés en Europe et leur fournir les secours, le rapatriement, la réinstallation et la protection juridique. La protection conférée par l'OIR était cependant nettement plus complète que celle des institutions précédentes.

Malgré des avancements majeurs réalisés pendant la première moitié du vingtième siècle, il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour voir naître une « véritable stratégie de protection" en réponse au problème des réfugiés9 et pour adopter la « Convention relative au statut de réfugié " du 28 juillet 1951, qui elle constitue la pierre angulaire du droit international des réfugiés.

Le régime international des réfugiés a eu à la fois des succès marquants et des histoires mouvementées. Il a réussi à fournir une protection internationale à des millions de réfugiés dans le monde lorsque leurs propres Etats étaient incapables ou refusaient de les protéger. Mais, malgré ces réalisations, le régime a parfois échoué à résoudre de graves problèmes et n'a pas été en mesure d'imposer des solutions durables pour bon nombre de réfugiés dans le monde tels que les réfugiés palestiniens.

§2- Qui sont les Réfugiés Palestiniens ?

Les réfugiés palestiniens ou les réfugiés de Palestine sont les palestiniens arabophones et leurs descendants, qui pendant et après le conflit israélo-palestinien de 1948 ont fui ou ont été expulsés de leurs maisons situées dans la Palestine sous mandat britannique.

L'Office de Secours et de Travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) ; organe de l'Organisation des Nations Unies créé pour aider les réfugiés de 1948, définit le « Réfugié de Palestine " 10 : toute personne « dont la résidence habituelle se trouvait en Palestine pendant la période allant du 1er juin 1946 au 15 mai 1948 et qui a perdu à la fois sa maison et ses moyens de subsistance à la suite du conflit de 1948 ". Cette définition de base a évolué au fil des ans11 sans préjudice de la mise en oeuvre des

9 Joseph Bemba, « Dictionnaire de la justice internationale, de la paix et du développement ", Paris, L'Harmattan, (2004), p. 289.

10 Il est nécessaire de préciser que l'Assemblée générale des Nations Unies n'a jamais défini le terme "réfugiés de Palestine".

11 Voir, par exemple, UN Doc. A/1451/Rev.1, «Interim Report of the Director of the United Nations Relief and Works Agency
for Palestine Refugees in the Near East»,( 6 October 1950), paragraph 15: "Pour les besoins de son travail, l'Agence a décidé

résolutions de l'Assemblée générale dans ce domaine, en particulier le paragraphe 11 de la résolution 194 (III) du 11 décembre 194812.

Les services de l'UNRWA sont disponibles à tous ceux qui répondent à cette définition, vivant dans sa zone d'opérations, qui sont enregistrés auprès de l'Agence et qui ont besoin d'aide.

Les descendants des réfugiés palestiniens d'origine sont également admissibles à l'enregistrement. Lorsque l'agence a commencé à travailler en 1950, c'était pour répondre aux besoins des réfugiés de Palestine qui comptaient environ 750.000. Aujourd'hui, 4,8 millions de réfugiés palestiniens sont admissibles aux services de l'UNRWA.13

Un tiers des « réfugiés de Palestine » enregistrés: près de 1,4 millions, vivent dans 58 camps de réfugiés reconnus en Jordanie, au Liban, dans la République arabe syrienne, la bande de Gaza et dans la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, -sachant que l'UNRWA n'officie que dans cinq Etats ou régions : la Bande de Gaza, la Cisjordanie, la Jordanie, la Syrie et le Liban-14.

Selon Elia Zureik,15 la définition de l'UNRWA ne permet de dénombrer qu'une partie des réfugiés palestiniens. Un certain nombre de personnes doivent être reconnues comme réfugiées alors qu'elles ne sont pas comptabilisées par l'Agence de l'ONU :

· Les exilés de 1948 qui sont arrivés dans un pays où l'UNRWA n'officie pas comme l'Afrique du Nord, l'Irak, les Etats du Golfe ou l'Egypte.

· Les personnes déplacées à l'intérieur d'Israël qui devaient être prises en charge par l'UNRWA, et qui ne l'ont finalement pas été.

· Les individus déportés par les autorités israéliennes hors des territoires occupés après 1967.

· Les arrivants tardifs, c'est-à-dire ceux qui ont quitté les territoires occupés pour des études, pour rendre visite à la famille, pour travailler ou se marier, et dont le permis de séjour délivré par Israël est expiré, et qui ne peuvent donc retourner chez eux.

· Les Palestiniens qui se trouvaient en dehors de la Palestine en 1948 et ceux qui se trouvaient en dehors des territoires occupés en 1967.

qu'un réfugié était une personne dans le besoin, qui, suite à la guerre en Palestine, a perdu son domicile et ses moyens de subsistance"; UN Doc. A/2717/Add.1, «Special Report of the Director of the Advisory Commission of the United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East»,( 30 June 1954), paragraph 19: "La définition d'une personne ayant droit au secours est, telle qu'utilisée par l'Agence depuis quelques années, "une personne dont la résidence habituelle était la Palestine au minimum deux ans avant l'éclatement du conflit en 1948 et qui, suite à ce conflit, a perdu sa résidence et ses moyens de subsistance"; UN Doc. A/8413, `'Report of the Commissioner-General of the United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East»,( 30 June 1971), footnote 1:"Un réfugié de Palestine, selon la définition de travail de l'UNRWA, est une personne dont la résidence habituelle était en Palestine au minimum deux ans avant l'éclatement du conflit en 1948 et qui, suite à ce conflit, a perdu sa résidence et ses moyens de subsistance et a trouvé refuge dans un des pays où l'UNRWA apporte son secours".

12 En créant l'UNRWA et en prolongeant son mandat, l'Assemblée générale des Nations Unies a systématiquement spécifié dans le paragraphe 5 que les activités de l'Agence étaient sans préjudice des dispositions du paragraphe 11 de la résolution 194 (III) du 11 décembre 1948.

13 Voir le site web officiel de l'UNRWA, http://www.unrwa.org/etemplate.php?id=86.

14 Israël a été exclu du champ d'activité de l'UNRWA.

15 Voir, E. Zureik, «Palestinian Refugees and the Peace Process», Washington DC: Institute for Palestine Studies, (1996), p.9-10.


· Les réfugiés de 1948 qui ne se sont pas inscrits à l'UNRWA, parce qu'ils n'en éprouvaient pas le besoin, ou ceux qui ont été radié des fichiers de l'UNRWA parce qu'ils n'avaient pas perdu leurs moyens de subsistance.


· Les résidants de Gaza et de Cisjordanie déplacés pour la première fois en 1967, qui ne sont pas comptabilisés comme réfugiés mêmes s'ils sont pris en charge par l'UNRWA.

Une proposition de définition du statut de « réfugié palestinien » a été présentée par le Groupe de travail sur les réfugiés16, elle comprend les réfugiés immatriculés à l'UNRWA, auxquels il faut ajouter ceux précédemment définis par Elia Zureik, ainsi que les "absents".

Si l'on prend en compte cette dernière définition plus exhaustive, le nombre de réfugiés palestiniens effectif serait beaucoup plus important que celui des personnes immatriculées à l'UNRWA, puisqu'il s'élève alors à plus de six millions d'individus.

La question de la définition du « Réfugié de la Palestine » est au coeur des négociations de paix en raison de ses conséquences politiques et démographiques qui sont en relation avec la résolution 194 de l'AGNU, en d'autres termes avec « le Droit au Retour ».

§3- La Commission de Conciliation des Nations Unies pour la Palestine.

L'idée d'une « commission de conciliation » des Nations Unies a été mise en avant par le médiateur de l'ONU pour la Palestine le comte Folke Bernadotte17.

Après son assassinat en Septembre 1948, l'Assemblée générale, se basant sur la résolution 194 du 11 décembre 1948, a voté pour la création d'un organisme qu'elle a appelé la Commission de Conciliation des Nations Unies pour la Palestine (CCNUP). L'objectif de la Commission de Conciliation a été d'assumer la mission conciliatrice du médiateur de l'ONU. La CCNUP a été structurée comme un corps composé de trois membres de l'AGNU, les Etats Unis d'Amérique, la France et la Turquie.

Poursuivant les efforts du Médiateur des Nations Unies sur la Palestine, l'Assemblée générale a aussi chargé la CCNUP de:

- Prendre des mesures afin d'aider les gouvernements et les autorités concernés à parvenir à un règlement définitif de toutes les questions qui demeurent en suspens18.

- Faciliter le rapatriement ou la réinstallation et l'indemnisation des réfugiés palestiniens. En effet, tout en affirmant le droit des réfugiés palestiniens à retourner dans leurs foyers19, l'Assemblée générale a également chargé la Commission de Conciliation à: faciliter le rapatriement, la réinstallation et la réhabilitation économique et sociale des réfugiés et le

16 Délégation palestinienne, réunion sur les refugiés, (13 mai 1992) à Ottawa, Canada.

17 Folke Bernadotte, comte de Wisborg et petit-fils du roi Oscar II de Suède, était un diplomate suédois et président de la Croix-Rouge suédoise, connu pour avoir négocié la libération de 15 000 prisonniers des camps de concentration durant la Seconde Guerre Mondiale. Il fut assassiné le 17 septembre 1948 à Jérusalem par des membres d'un groupe armé juif sioniste.

18 Voir, Paragraphe 6 de la résolution 194(III) de l'AGNU.

19 Voir, Paragraphe 11 ibid.

paiement de l'indemnisation. En 1950, l'Assemblée générale a expressément demandé à la Commission de conciliation de protéger les droits, les propriétés et les intérêts des réfugiés20.

- Statuer sur Jérusalem : dans la quatrième session ordinaire de l'Assemblée générale se trouve des propositions détaillées concernant un régime international permanent pour la région de Jérusalem, qui fournirait de l'autonomie locale maximale pour les groupes distincts, conformément au statut international spécial de la région de Jérusalem21.

- Conclure des ententes entre les gouvernements et les autorités concernés qui faciliteraient le développement économique de la région, y compris les modalités d'accès aux ports et aux aérodromes et l'utilisation de moyens de transport et de communication22.

La commission de conciliation a commencé sa fonction en Janvier 1949. Les commissaires ont commencé un tour de navettes diplomatiques dans les capitales du Moyen-Orient, ils ont tenu une conférence avec les représentants arabes à Beyrouth, puis ont organisé une grande conférence à Lausanne entre avril et août 1949, rencontrant les représentants arabes et israéliens séparément. Après, il y a eu une nouvelle série de discussions à Genève en 1950 et une conférence de délégués arabes et israéliens à Paris vers la fin de 1951.

La Commission de conciliation a été établie avec un double mandat. Tout d'abord, comme son nom l'indique, la Commission a été faite pour concilier et aider les parties à trouver, conformément à la résolution 194 (III) de l'Assemblée générale, une solution permanente à tous les problèmes en suspens du conflit israélo-arabe, y compris le problème des réfugiés palestiniens. Le deuxième mandat a été de fournir une protection aux réfugiés par la sauvegarde de leur « droit au retour » et d'autres droits connexes, y compris leur droit à la propriété. La Commission de conciliation a essayé de persuader Israël de permettre le retour de certaines catégories de réfugiés et surtout de réunir les familles. Elle a également tenté de faciliter la restitution des biens des réfugiés par des appels à la réforme des lois israéliennes sur la propriété.

En 1950, la Commission a créé un sous-bureau, l' « Office des Réfugiés » pour identifier les propriétés arabes en Israël et examiner les diverses mesures provisoires par lesquelles les réfugiés pourraient tirer un revenu de leurs propriétés. Une identification globale et individuelle des biens palestiniens a été basée sur les enregistrements de données du mandat britannique23. Dans le début des années 1960, l'identification a été remplie: 430 000 enregistrements documentant l'ordre de 1,5 millions d'exploitations individuelles24. La numérisation de cette base de données a été achevée dans les années 1990. Ce travail servira de base fondamentale pour les années à venir, y compris les années post-Oslo, puisque les données recueillies par la CCNUP et

20 Voir, résolution 394(V) de l'AGNU, (14 Décembre 1950).

21 Voir, Paragraphe 8 de la résolution 194(III) de l'AGNU.

22 Voir, Paragraphe 10 ibid.

23 Pour un examen détaillé des activités de la CCNUP et les procédures relatives à la propriété, voir :

M. Fischbach, « Records of Dispossession, Palestinian Refugee Property and the Israeli-Arab Conflict ».New York, Columbia University Press, (2003).

S. Hadawi, «Palestinian Rights and Losses in 1948, A Comprehensive Study». London: Saqi Books, (1988).

24 UNCCP, «Working Paper Prepared by the Commission's Land Expert on the Methods and Techniques of Identification and Valuation of Arab Refugee Immovable Property Holdings in Israel». UN Doc. A/AC.25/W.84, 28 (April 1964).

avalisées donc par les Nations Unies- serviront de base de travail pour la question de la compensation que doit Israël aux réfugiés palestiniens, sur le modèle évoqué dès 1951, notamment par la France, de la compensation obtenue par Israël de l'Allemagne, à la suite de la deuxième guerre mondiale.

La CCNUP a également examiné les moyens et les principes pour la mise en oeuvre de l'indemnisation, en recommandant que la compensation soit accordée principalement aux personnes (et non aux gouvernements).

La commission a tenté en vain de parvenir à un accord sur des propositions spécifiques pour un règlement de paix ; ses efforts pour trouver des solutions durables pour les réfugiés palestiniens ont échoué, en raison de l'objection d'Israël au retour des réfugiés et le manque de volonté politique internationale suffisante pour appliquer les dispositions de la résolution 194 (III) de l'AGNU. Après l'échec de la conférence de Paris, la Commission, convaincue que les parties n'étaient pas encore prêtes à faire la paix, a limité ses efforts pour faire face au problème des réfugiés palestiniens. Sur ce sujet, elle n'a pas pu faire que des progrès limités, essentiellement sur des études de fond des aspects techniques concernant l'indemnisation future (comme on vient de le voir précédemment).

Les efforts de la CCNUP vers la réinstallation des réfugiés palestiniens ont également échoué, les Etats arabes d'accueil et les réfugiés eux-mêmes étaient opposés à la réinstallation sans se voir offrir la possibilité de retour.

En début des années 1950, la Commission de Conciliation a reconnu qu'elle était incapable de s'acquitter de son mandat en raison de la réticence des parties à appliquer intégralement les résolutions de l'Assemblée générale en vertu desquelles elle opérait25.

Si elle a effectivement cessé de fonctionner activement depuis 1966, la CCNUP existe jusqu'à nos jours, avec toujours pour membres les Etats Unis, la France et la Turquie ; et pour secrétaire, un employé du Secrétariat de l'ONU.

§4- L'Office de Secours et des Travaux des Nations Unies pour les Réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient.

« L'aggravation de la situation des réfugiés, qui constitue un obstacle à la paix en Palestine, a incité l'AGNU, en novembre 1948, à faire appel aux nations du monde entier pour leur demander de fournir des fonds en vue de nourrir, d'habiller et d'abriter les réfugiés » ; trentetrois pays fourniront une aide financière. L'organisation des Nations Unies créera, pour gérer cet argent, un organisme : l'UNRPR (Secours des NU aux réfugiés de la Palestine)26, mais cette mesure s'avérera insuffisante.

25 CCNUP, « Rapport intérimaire de la Commission de conciliation des Nations Unies pour la Palestine », UN Doc. A/1985, 20 (Novembre 1951): In response to the impasse, the United Nations General Assembly passed a series of measures beginning in 1951 that effectively terminated the UNCCP's role of implementing the durable solution of return and curtailed its role as intervener with Israel (or other states) to protect refugees' rights and interests.

S. Akram, «Palestinian Refugees and Their Legal Status: Rights, Politics, and Implications for a Just Solution,» Journal of Palestine Studies, Vol. XXXI, No. 3, (2002), p. 36-51.

26 Crée par la résolution 212(III) de l'AGNU, (le 19 Novembre 1948).

En Décembre 1949, l'Assemblée générale des Nations Unies s'est réunie pour envisager la création d'un successeur à l'UNRPR, un projet a été présenté, celui-ci était parrainé par la France, la Turquie et les États-Unis, les trois pays formant la CCNUP,27 ainsi que la Grande Bretagne.

Ce projet a été modifié pour prendre en considération les préoccupations des pays hôtes et des pays arabes et a ensuite été adopté sans opposition, le 8 décembre 1949, par la résolution 302 suite à laquelle l'UNRWA a été crée, en vue de « mener à bien, en coopération avec les gouvernements locaux (...) des programmes de secours et de travaux » pour les réfugiés de Palestine et de « consulter les gouvernements du Proche-Orient en préparation de la période où l'assistance internationale pour ne sera plus disponible »28.

L'UNRWA est chargée de fournir une aide de première nécessité et d'assurer le fonctionnement des services sociaux de la santé et de l'éducation. Son mandat ne comprend pas les missions fondamentales du HCR, à savoir la recherche de solutions durables et la protection internationale des réfugiés, car cette mission était dévolue à la CCNUP.

L'Agence a commencé ses activités en mai 1950, initialement, sont mandat devait être de courte durée, mais en l'absence d'une solution globale au problème des réfugiés palestiniens, l'Assemblée générale a maintes fois renouvelé le mandat de l'UNRWA29.

Les deux principaux piliers des activités de l'UNRWA sont l'éducation de base et la fourniture gratuite de soins de santé. Par ailleurs, l'agence fournit des prestations sociales aux réfugiés qui ne sont pas en mesure de couvrir eux-mêmes leurs besoins essentiels. Un programme de micro financement octroie des crédits aux petites entreprises et aux familles pauvres. L'UNRWA alloue aussi régulièrement des ressources à l'aide d'urgence dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, en particulier depuis le début de la seconde Intifada, en septembre 2000.

Depuis sa création, l'Agence a fourni ses services aussi bien en temps de calme (relatif) au Moyen-Orient, qu'en temps d'hostilités.

Le travail de l'UNRWA illustre un engagement international pour le développement humain des réfugiés de Palestine, les aidant à acquérir des connaissances et des compétences, à mener une longue et saine vie, à atteindre les normes d'une vie décente et à jouir des droits de l'homme dans toute la mesure du possible30.

27 Voir, résolution 194 de l'AGNU, (11 Décembre 1948).

La CCNUP a été crée trois semaines après l'établissement de l'UNRPR.

28 La résolution 302 (IV) du 8 décembre 1949 de l'Assemblée générale des Nations Unies invite l'UNRWA à consulter la Commission de conciliation des Nations Unies pour la Palestine (CCNUP) "dans le meilleur intérêt commun de leurs (UNRWA et CCNUP) tâches respectives, en faisant une référence particulière au paragraphe 11 de la résolution 194 (III) de l'Assemblée générale", (11 décembre 1948).

29 Son mandat doit arriver à terme le 30 Juin 2011 ; mais le 15-11-2010, la Quatrieme Commission de l'AGNU, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation a adopté, quatre projets de résolution sur l'UNRWA parmi lesquels un projet (A/C.4/65/L.8) qui recommande à l'Assemblée Générale de proroger le mandat de l'UNRWA jusqu'au 30 juin 2014.

30 Voir, le site web official de l'UNRWA: http://www.unrwa.org/etemplate.php?id=85.

L'UNRWA est unique en terme de son engagement de longue date pour un groupe de réfugiés, grâce à ses contributions au bien-être et au développement humain de quatre générations de réfugiés palestiniens.

Initialement prévue comme une organisation temporaire, l'Agence a progressivement adapté ses programmes pour répondre aux besoins changeants des réfugiés.

§5- Pourquoi les Réfugiés Palestiniens ne sont pas sous le Mandat du HCR ?

Les réfugiés palestiniens ont un statut qui est unique en vertu du droit international des réfugiés. Contrairement à tout autre groupe ou catégorie de réfugiés dans le monde, les Palestiniens sont distingués par des traitements exceptionnels dans les principaux instruments juridiques internationaux qui régissent les droits et obligations des États envers les réfugiés. En fait, en Décembre 1950, exactement un an après la création de l'UNRWA, l'Organisation des Nations Unies a créé le bureau du Haut Commissaire pour les Réfugiés (HCR) -le principal instrument international chargé de la protection des réfugiés à travers le monde-, et l'a chargé de superviser les conventions internationales relatives aux réfugiés. Plusieurs mois plus tard, en Juillet 1951, une conférence convoquée par l'ONU à Genève31 a approuvé la Convention historique relative au statut des réfugiés, qui à son tour a mandaté le HCR pour représenter les réfugiés, intervenant si nécessaire avec l'Etat en leur nom, afin d'assurer leur protection. La Convention de 1951 est le document juridique le plus complet jamais publié sur les droits des réfugiés: Il définit le réfugié comme la personne « qui, suite aux événements survenus avant le premier janvier 1951 et craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut pas se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner 32».

Les Etats contractants sont appelés à accorder aux réfugiés « un traitement aussi favorable que possible et de toute façon un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui qui est accordé, dans les mêmes circonstances, aux étrangers en général ». La protection et droits prévus par la convention comprennent le droit à l'éducation, à la libre circulation, à posséder et celui d'aliéner des biens mobiliers et immobiliers, le droit à former des associations, à obtenir un travail rémunéré, et à avoir accès aux tribunaux.

Toutefois, les réfugiés palestiniens, ne sont pas concernés par cette convention puisque son article 1D stipule: « Cette Convention ne sera pas applicable aux personnes qui bénéficient actuellement d'une protection ou d'une assistance de la part d'un organisme ou d'une institution des Nations Unies autre que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés ».

31 La Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, dite Convention de Genève.

32 Article 1A (2) ibid.

Les Palestiniens ne sont pas littéralement mentionnés dans cette clause, mais il ne fait aucun doute que ce sont eux qui sont concernés par cette exclusion, puisque, en principe, ils étaient sous l'assistance de deux organes de l'ONU : la CCNUP, créée pour assurer leur protection sur la base de la résolution 194 de l'AGNU, et l'UNRWA pour leur fournir assistance et secours.

Le Statut du HCR33 comporte une disposition similaire excluant de son mandat les réfugiés palestiniens, ainsi le paragraphe 7 (c) mentionne qu'il est entendu que le mandat du Haut Commissaire, tel qu'il est défini au paragraphe 6 ci-dessus, ne s'exerce pas : « sur les personnes qui continuent de bénéficier de la protection ou de l'assistance d'autres organismes ou institutions des Nations Unies ».

Le paragraphe 1 de l'article 1D est en fait une clause d'exclusion, mais il ne signifie par pour autant que certains groupes de réfugiés palestiniens ne puissent jamais bénéficier de la protection prévue par la Convention de 1951. Le paragraphe 2 de l'article 1D contient, quant à lui, une clause d'inclusion garantissant des droits automatiques à la protection prévue par la Convention de 1951 pour de tels réfugiés. « Lorsque cette protection ou cette assistance aura cessé pour une raison quelconque, sans que le sort de ces personnes n'ait été définitivement réglé, conformément aux résolutions relatives adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies, ces personnes bénéficieront de plein droit du régime de cette Convention »34. La Convention de 1951 évite ainsi le chevauchement des compétences entre l'UNRWA et le HCR, mais aussi, en conformité avec le Statut du HCR, garantit la continuité de la protection et de l'assistance des réfugiés palestiniens, autant qu'il est nécessaire.

Le HCR a éclairé ce point en présentant sa note35 sur l'applicabilité de l'article 1D de la Convention de 1951 relative au Statut des réfugiés. Le HCR considère que deux groupes de réfugiés palestiniens entrent dans le champ d'application du paragraphe 1 de l'article 1D de la Convention de 1951:

« - Les "réfugiés de Palestine"36 qui ont été déplacés de la partie devenue Israël, et qui n'ont pas eu la possibilité d'y retourner.

- Les Palestiniens qui sont des "personnes déplacées" dans le sens de la résolution de l'Assemblée générale 2252 (ES-V) du 4 juillet 1967 et des résolutions de l'Assemblée générale ultérieures, et qui n'ont pu retourner dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967.

33 Résolution no 428 (V) de l'Assemblée générale du 14 décembre 1950 sur le Statut Du Haut Commissariat Des Nations Unies pour les Réfugiés.

34 Il existe une disposition similaire à l'article 1D de la Convention de 1951 dans le Statut du HCR, le paragraphe 7(c), lequel stipule que la compétence du Haut Commissaire ne s'exerce pas sur les personnes qui "continuent de bénéficier de la protection ou de l'assistance d'autres organismes ou institutions des Nations Unies".

35 Publiée le 2 Octobre 2002 par le HCR.

36 Le terme "réfugié de Palestine", même s'il n'a jamais été explicitement défini par l'Assemblée générale des Nations Unies, englobe très probablement ce qu'on appellerait aujourd'hui des personnes déplacées à l'intérieur. Voire à ce sujet, par exemple, UN Doc. A/AC.25/W.45, Analysis of paragraph 11 of the General Assembly's Resolution of 11 December 1948, 15 May 1950, Part One, paragraph 1.

Pour une analyse plus précise du terme "réfugiés de Palestine", voir, par exemple, UN Doc. W/61/Add.1, Addendum to Definition of a "Refugee" Under paragraph 11 of the General Assembly Resolution of 11 December 1948, 29 May 1951.

UN Doc. A/AC.25/W.81/Rev.2,» Historical Survey of Efforts of the United Nations Commission for Palestine to secure the implementation of paragraph 11 of General Assembly resolution 194 (III)», (October 1961), section III.

Pour les besoins de l'application de la Convention de 1951, ces deux groupes incluent les personnes qui ont été déplacées au moment des hostilités, ainsi que leurs descendants37.

(Par ailleurs, les personnes auxquelles s'appliquent les articles 1C, 1E ou 1F de la Convention ne relèvent pas de l'article 1D, même si elles demeurent des "réfugiés de Palestine" et/ou des "personnes déplacées" dont le sort doit encore être réglé de manière définitive en conformité avec les résolutions pertinentes de l'Assemblée générale).

Une troisième catégorie de réfugiés palestiniens englobe les personnes qui ne sont ni des "réfugiés de Palestine", ni "des personnes déplacées", mais qui, du fait d'une crainte réelle d'être persécutées pour des raisons de race, de religion, de nationalité, d'appartenance à un groupe social particulier ou d'opinion politique, se trouvent hors des territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 et ne peuvent ou ne veulent y retourner du fait de cette crainte. De tels Palestiniens ne relèvent pas de l'article 1D de la Convention de 1951 mais satisfont aux critères applicables pour la reconnaissance du statut de réfugié en conformité avec l'article 1A(2) de la Convention, à condition qu'ils n'aient jamais cessé d'être des réfugiés au sens de l'article 1C et qu'ils ne soient pas exclus du statut de réfugié au sens des articles 1E et 1F ».

Cependant, si une personne se trouve en dehors de la zone où l'UNRWA est opérationnelle, elle ne peut plus bénéficier de la protection ou de l'assistance de cette agence et relève donc du paragraphe 2 de l'article 1D, -à moins que les articles 1C, 1E et 1F ne s'appliquent pas-. Une telle personne bénéficie de plein droit du régime de la Convention de 1951 et relève de la compétence du HCR. Il en serait ainsi même si la personne en question n'avait encore jamais résidé dans la zone où l'UNRWA est opérationnelle38.

Le fait de savoir si les Etats, dans lesquels l'UNRWA n'opère pas, sont en train d'appliquer la Convention de Genève sur les refugiés et demandeurs d'asile palestiniens, continue à susciter un grand débat. Mais, on ne va pas s'attarder sur ce point, on préfère se centrer sur la question de la protection des réfugiés palestiniens.

Les réfugiés ne sont pas différents des autres personnes dans leur droit à la protection contre les violations de leurs droits humains fondamentaux. Lorsqu'un Etat n'assure pas cette fonction critique, l'intervention de la communauté internationale devient essentielle.

Alors que les réfugiés et demandeurs d'asile au monde sont tous sous le mandant du HCR qui procure protection, recherche des solutions durables et une assistance pour les réfugies, les palestiniens quant à eux relèvent de deux organismes onusiens un pour la protection et l'autre pour l'assistance. Ce cas peut sembler normal, dû à quelques aspects exceptionnels des refugiés

37 L'inquiétude de l'Assemblée générale des Nations Unies au sujet des descendants, tant des "réfugiés de Palestine" que des "personnes déplacées" a été exprimée dans la résolution de l'Assemblée générale 37/120 I du 16 décembre 1982, qui a demandé au Secrétaire Général des Nations Unies, en coopération avec le Commissaire Général de l'UNRWA, d'émettre des cartes d'identité à "tous les réfugiés de Palestine et leurs descendants (...)

38 Par exemple, le descendant d'un "réfugié de Palestine" ou d'"une personne déplacée" palestinienne peut n'avoir jamais résidé dans la zone où l'UNRWA est opérationnelle et ne pas relever des articles 1C ou 1E de la Convention de 1951.

palestiniens, mais le problème est que dès le début des années 60, la CCNUP a cessé de fonctionner laissant les refugiés palestiniens sans organisme international qui les représente sur le plan de la protection et de la recherche de solutions durables.

Par contre, dans des situations concernant des réfugiés, on voit le HCR, intervenir à différents niveaux avec les gouvernements directement concernés, les pays donateurs et les réfugiés euxmêmes, et cela dans le but de faciliter la réalisation des solutions durables. Bref, partout où le sort des réfugiés est discuté à la table des négociations, le HCR est souvent présent afin de s'assurer que leurs intérêts seront représentés39.

Section II

UNRWA, Six Décennies d'Aide aux Réfugiés Palestiniens.

§1- Quel bilan tenir de l'UNRWA, 62 ans Après sa Création ?

Le Décembre 2011 va marquer le soixante deuxième anniversaire de l'UNRWA, c'est une occasion sans aucun doute désolante en raison de tout ce temps passé sans trouver de solutions pour le problème des refugiés palestiniens, mais en même temps, c'est une occasion pour évaluer les défis de l'Agence et ses réalisations au cours de ces six décennies de travail aux côtés de millions de réfugiés palestiniens.

L'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), a accompagné les réfugiés palestiniens pendant les périodes de conflits et de crises, les périodes d'espoir et de longues années de déception. Il s'agit en fait d'une relation sans précédent dans les annales de l'aide humanitaire et de développement.

En effet, le paradoxe entre la nature temporaire de cette agence et la durée de son mandat, illustre le caractère extraordinairement complexe et unique du problème des réfugiés palestiniens.

Conformément à la résolution 393 (V) de l'Assemblée générale, l'UNRWA a passé ses six premières années, concentrée sur la question de la réinsertion des « réfugiés de Palestine » dans la vie économique de leur pays hôte. Toutefois, au cours de cette période, il est devenu évident à l'Agence que ces programmes n'ont pas pu tenir la promesse d'améliorer significativement la situation humanitaire et économique des réfugiés Palestiniens.

Cela s'est traduit par le passage progressif des programmes de l'Agence, de la réinsertion aux travaux de secours et de développement des ressources humaines. Au fil des ans, son mandat semble avoir évolué de manière flexible en fonction des évolutions dans la région, et s'est plié aux besoins générés par chaque situation. Il apparaît également que la communauté internationale n'a pas hésité à confier des responsabilités plus larges a l'UNRWA, qu'il s'agisse

39 L.Takkenberg «The search for durable solution for Palestinian refugees», Max Planck Institute for Comparative Public Law and International Law, «Israel and the Palestinian refugees», (2007), p.382.

de ses programmes, la gamme de ses activités ou les catégories de ses bénéficiaires. La position de l'Agence a toujours été que son mandat est souple, et donc facilement adaptable pour répondre aux urgences qui se présentent.

À la fin des années 1950, l'Agence avait établi un modèle primaire pour ses activités axées sur la formation professionnelle, l'auto-assistance, l'enseignement primaire, les soins de santé primaires et les secours continus pour les réfugiés dans le besoin. Ces interventions humanitaires ont été mises au point pour former les trois programmes réguliers de l'Agence: l'éducation, la santé et les secours, les services sociaux, ainsi que son programme spécial pour la micro entreprise et la micro finance. En fait, il était devenu clair à partir du milieu des années cinquante, que le développement général de la situation au Moyen-Orient augure mal pour un règlement imminent de la question des réfugiés; un éventuel retour des réfugiés devenait problématique avec la croissance et la consolidation de l'État d'Israël et le refus catégorique de la réinstallation permanente des réfugiés dans leur pays d'accueil. L'UNRWA a donc choisi la seule option qui lui reste ouverte, se concentrant sur l'éducation et la formation des réfugiés.

En mettant l'accent sur la formation individuelle, l'Agence a pu donner les moyens d'assurer un avenir aux réfugiés qui y virent le seul instrument de mobilité sociale politiquement acceptable. Ce pari sur le développement humain mis en oeuvre en collaboration avec l'UNESCO, a facilité jusqu'à nos jours la réinsertion professionnelle de bon nombre de refugiés en tant qu'employés locaux de l'UNRWA ou comme main-d'oeuvre qualifiée, dans les pays du Golfe notamment. Jusqu'à la fin des années 1980, le mouvement migratoire ainsi initié constitua une véritable planche de salut pour l'UNRWA puisque, tout en permettant de réduire le nombre de réfugiés à sa charge, il permit aussi d'élever le niveau de vie des familles des réfugiés migrants restés dans le pays d'accueil40.

Avec cette dimension humaine tournée vers l'éducation, vers la santé et les services sociaux, l'UNRWA a pu s'adapter aux épreuves et tribulations qui ont marqué la région depuis plus d'un demi-siècle.

Au lendemain de la guerre de 1967, la communauté internationale a demandé à l'UNRWA d'aider les personnes déplacées ayant besoin d'assistance. L'agence a ainsi élargi son mandat pour couvrir une catégorie de Palestiniens qui n'étaient pas des réfugiés de 1948 ; après 1967, lorsque l'ancienne Palestine mandataire a passé dans son intégralité sous le contrôle d'Israël, l'UNRWA a émergé de plus en plus comme l'expression tangible de la communauté internationale dans sa préoccupation de l'ensemble des palestiniens et non seulement des réfugiés de 1948.

Ce souci de confier à l'Agence les problèmes humanitaires de la population palestinienne est devenu évident pendant l'invasion israélienne du Liban. En fait, l'UNRWA a entrepris de surveiller la sécurité des réfugiés palestiniens dans les territoires Libanais, a fait parfois des déclarations publiques sur la situation et pris des mesures appropriées avec le gouvernement d'Israël et les divers membres du Conseil de Sécurité pour la protection des réfugiés41.

40 Voir l'article de H. El Najjar, "Planned Emigration: The Palestinian Case". International Migration Review, (1993), vol. 27, n°101, p. 34-50.

41 L.Takkenberg, «The Status of Palestinian Refugees in International Law», Oxford, Clarendon Press, (1998), p.282.

Également, dans sa résolution 37/120 du 16 Décembre 1982, l'Assemblée générale a demandé au Secrétaire général, en coopération avec l'UNRWA, de délivrer des cartes d'identification à tous les réfugiés de Palestine et de leurs descendants, indépendamment du fait qu'ils soient bénéficiaires ou non des rations et des services de l'Agence ; ainsi qu'à toutes les personnes déplacées et à celles qui ont été empêchées de retourner dans leurs foyers à la suite des hostilités de 1967, et de même pour leur descendants42.

Avant ce point, l'Agence avait décidé d'émettre auprès des réfugiés enregistrés des cartes d'enregistrement individuelles pour remplacer les cartes de familles, mais cette décision n'a pas pu être mise en oeuvre en raison du manque de coopération de nombreux pays dans lesquels les réfugiés avaient pris résidence au fil des années43.

L'Intifada de 1987-1993 a été la deuxième occasion dans laquelle l'UNRWA a été appelée à mettre en oeuvre des activités de protection passive44 en relation avec les réfugiés de Palestine. Cela est arrivé par le biais de la résolution 605 du 22 Décembre 1987 du Conseil de sécurité, qui, après avoir pris note et déploré vivement les violations israéliennes des droits de l'homme du peuple palestinien vivant dans les territoires palestiniens occupés, a demandé au Secrétaire général d'évaluer la situation et de se rapporter aux recommandations du Conseil de sécurité sur les voies et les moyens d'assurer la sécurité et la protection des civils palestiniens sous occupation israélienne45. En vertu de cette résolution, et suite à un rapport46 présenté par le Secrétaire général au Conseil de sécurité, l'UNRWA a établi un Programme d'agence des affaires des réfugiés chargé de l'aide humanitaire des victimes de la violence résultant de l'insurrection des populations des territoires occupés de la Cisjordanie et Gaza .

L'avènement de l'autonomie palestinienne, consécutive aux accords d'Oslo de septembre 1993, a eu pour conséquence d'accentuer cette dimension "développementaliste" de l'action de l'agence onusienne. En décembre de la même année, l'AGNU chargeait en effet l'UNRWA de contribuer de façon décisive à imprimer un nouvel élan à la stabilité économique et sociale des territoires occupés47. Le "Programme pour la Mise en OEuvre de la Paix" (ensemble de mesures visant à stimuler l'emploi et à développer l'infrastructure physique et sociale des camps, qu'adopta alors l'UNRWA), vise aujourd'hui encore à améliorer la situation économique de ces territoires désormais autonomes, en soutien à l'ANP48. Cette nouvelle orientation met alors en perspective l'évolution de la dimension politique informelle du mandat de l'UNRWA.

Initialement chargé d'assurer la réintégration massive des réfugiés, synonyme d'éradication de la
notion même d'identité palestinienne, l'Office se retrouvait 62 ans plus tard impliqué

42 Voir, résolution (37/120 I) de l'AGNU, (1982), UN Doc. A/RES/37/120 I, paragraphe 2.

43 Voir, L.Takkenberg, «The Status of Palestinian Refugees in International Law», Oxford, Clarendon Press, (1998), p. 283. 44Terme utilisé par le HCR.

45 Résolution du Conseil de sécurité, 605, (1987), UN Doc. S/RES/605, paragraphe 6.

46 UNSG, Report Submitted to the Security Council by the Secretary-General in Accordance with Resolution 605, (1987), UN Doc. S/19443 (1987), paragraph 28.

47 Résolution 48/40: "Aide aux réfugiés de Palestine", (13 décembre 1993).

48 Voir Rapport du Commissaire général de l'UNRWA, (19 juillet 1993-30 juin 1994), p. 2, par.5.

officiellement dans le processus de construction étatique en marche en Cisjordanie et dans la bande de Gaza49.

Finalement et malgré son mandat limité, l'UNRWA reste un organisme unique au sein du système des Nations Unies. Conçue au début comme une organisation temporaire, avec l'échec des mécanismes de l'ONU visant à traiter les questions politiques du problème de la Palestine, l'UNRWA s'est métamorphosée et a dü se réorienter dans une agence à tout faire.

L'évolution de l'agence et la gamme de ces services montrent qu'en l'absence d'une solution juste et durable au problème des réfugiés, la situation dans laquelle l'organisme a été créé a changé de façon spectaculaire, et l'UNRWA n'est plus considérée comme une agence temporaire visant à implanter les refugiés dans leur pays d'accueil.

Après soixante deux ans de fonctionnement, l'UNRWA est parvenue à représenter une sorte de stabilité dans la région et est restée opérationnelle principalement parce que le problème des réfugiés est resté actuel. La présence de l'organisme continue d'être essentielle pour répondre aux besoins humanitaires d'une population de réfugiés palestiniens sans cesse croissante.

§2- L'UNRWA et le « Droit au Retour ».

L'UNRWA a toujours été entourée par des débats controversés sur de nombreux domaines de son travail, si bien qu'elle a dû constamment défendre sa façon de gérer ses opérations.

Depuis le début du processus de paix en 1992, l'UNRWA a été dans la ligne de mire, elle a dû faire face à des revendications concurrentes. Israël a critiqué l'agence pour politiser la question des réfugiés, et pour la maintenir vivante, et donc perpétuer la situation des réfugiés, plutôt que de la résoudre. Les Palestiniens ont eux-mêmes accusé l'agence de tenter de les réinstaller contre leur volonté et contre les termes de la résolution 194.

Créée dans le but d'aider les refugiés palestiniens à la réinstallation, l'UNRWA s'est vue accusée 62 ans plus tard d'avoir aidé à la pérennité de l'idée du retour50.

En fait, l'UNRWA s'est très rapidement trouvée enracinée dans l'environnement local des communautés de réfugiés. Son implication directe en faveur de leurs droits économiques et sociaux, et l'établissement de liens privilégiés par le biais des services dispensés ainsi que des rapports professionnels noués, constituent les bases de son enracinement. Mais d'autres facteurs sont à prendre en compte, relatifs à la façon dont ces communautés ont elles-mêmes perçu et géré leurs relations avec l'Office.

49 J. Husseini, « L'UNRWA et les réfugiés : Enjeux humanitaires, intérêts nationaux », dans « Le Droit au Retour : le problème des refugiés palestiniens », E.Sanbar- F.Mardam-Bey, Actes Sud, (2002), p.214.

50 Un rapport en 2008 par Barry Rubin,Asaf Romirowsky, and Jonathan Spyer, intitulé «UNRWA: Refuge of Rejectionism», décrit: «Since its inception, UNRWA has managed to transform itself into the guardian of the refugees' isolation whereby the uniqueness of the Palestinian refugees as far as an entity that cannot be assimilated into any Arab country. UNRWA reinforced this sentiment by becoming the parental supervisor for all things concerning refugees. This dependency also caused the refugees not to get involved in politics but to have UNRWA, which means the PLO and now Hamas, to be their advocate».

( www.globalpolitician.com/24777-unrwa-palestinepalestinian-refugees)

Ce sont surtout les attributs politiques que les réfugiés ont donné au mandat d'assistance de l'UNRWA. Indifférents aux instructions données à l'Office sur les concepts de réhabilitation socio-économique, les réfugiés ont préféré voir dans ces services le prix à payer par les Nations Unies pour leur responsabilité directe dans leur exode ou, plus formellement, une obligation en attendant qu'une solution équitable à leur problème, basée sur les résolutions onusiennes, soit trouvée. En fait, au cours des soixante deux dernières années, les réfugiés ont agi comme une contrainte et parfois comme un frein dans la mise en oeuvre des projets de l'UNRWA, en particulier ceux ayant pour but la réinstallation.

Défendant la position de l'agence, l'ex-commissaire général de l'UNRWA Karen Abu Zayd51, a affirmé en 2008 que les activités humanitaires et le développement humain de l'UNRWA n'ont pas un caractère politique et sont pratiques dans leur orientation, déclarant que: « Pour être efficace l'UNRWA doit être consciente de la complexité du contexte dans lequel la condition des réfugiés de Palestine se trouve. Nous devons comprendre que les causes, l'évolution et la résolution des situations de réfugiés sont entraînées par les courants découlant des intérêts perçus des Etats, des concours pour l'influence internationale et du flux et reflux de la géopolitique, entre les forces militaires et économiques52.

L'importance que revêt aujourd'hui l'office pour les réfugiés s'avère tenir autant des services accordés que de leur valeur morale. A l'heure où, au nom d'un certain réalisme, certaines voix s'élèvent en Israël et en Occident pour imposer à nouveau un reglement économique permanent de la question des réfugiés basé sur leur réinstallation permanente, l'UNRWA et son réseau de services leur apparaissent comme des témoins essentiels, voire comme l'incarnation de la persistance de leur problème et de la nécessité de le résoudre de manière politique, notamment par le retour des réfugiés à leurs foyers. La nomination de l'UNRWA au prix Nobel 2000 par une organisation non-gouvernementale palestinienne, représente à cet égard un geste typique de l'attachement à la fois humanitaire et politique des Palestiniens à l'Agence53.

Bien qu'elle ait indirectement contribuée à la consolidation de ce principe, la question de la défense du « droit au retour » ne concerne pas directement l'UNRWA. Des le début, elle a été fondée comme une organisation humanitaire apolitique. Son pendant politique, créé par les Nations unies, est la Commission de Conciliation toujours en service mais, qui depuis les années 1960 se trouve dans un état comateux. La seule chose que cette agence puisse faire est d'affirmer l'existence d'un lien organique54 d'une part entre la résolution 194 qui évoque le retour et la compensation des réfugiés, et d'autre part la résolution 302 qui a crée l'UNRWA.

51 L'actuel Commissaire général de l'UNRWA est Filippo Grandi.

52 Discours prononcé par Karen AbuZayd à Princeton, (l6 May 2008), «Palestine refugees: exile, isolation and prospects».

53 L'UNRWA, déclara alors l'ONG palestinienne dans un communiqué de presse, "en est venue à représenter l'intégrité à la fois humaine et juridique de la question des réfugiés palestiniens"

54 C'est ce qu'elle a déjà fait par le biais des déclarations de ses Commissaires généraux.

Pour Jalal Al Husseini55, « Le lien entre le mandat d'assistance de l'UNRWA et la résolution 194 (III) est indiscutable. Il est d'abord de nature organique, comme l'a souligné le Commissaire général de l'UNRWA dans son rapport annuel 1986-198756 : la résolution 302 (IV) instituant l'UNRWA découle directement des recommandations formulées dans la résolution 194 (III). Cette résolution a en outre été mentionnée dans toutes les résolutions annuelles adoptées par l'AGNU sur l'UNRWA ».

Juridiquement, il y a sans doute un acheminement. Cela dit, elle peut informer, prendre position sur des questions touchant au déroulement de ses opérations, mais n'a pas vocation à prendre des positions politiques de fond. Seule, la Commission de Conciliation pourrait le faire, or cette dernière, comme on l'a vu, fut morte avant même de naître.

§3- L'UNRWA et la Recherche des Solutions Durables pour les Réfugiés Palestiniens.

Comme on l'a déjà vu, les palestiniens n'ont pas la même protection que les autres réfugiés. Cependant, cette protection s'avère être cruciale pour parvenir à une solution durable aux problèmes de ces personnes.

Le mandat de protection de l'UNRWA a provoqué de graves lacunes dans la protection internationale des réfugiés palestiniens. Aucun organisme international n'est actuellement reconnu par la communauté internationale comme ayant un mandat explicite de travailler systématiquement à la réalisation des droits fondamentaux de tous les réfugiés palestiniens et de rechercher à appliquer des solutions durables conformes au droit international et à la résolution 194 de l'AGNU.

Comme le souligne le Professeur Guy Goodwin-Gill57, «...sans protection -telle que l'intervention pour assurer l'admission et le non-refoulement des réfugiés- il ne peut y avoir de possibilité pour trouver des solutions durables ».

Bien que les réfugiés palestiniens aient été laissés en dehors du régime international des réfugiés, des solutions durables pour ces réfugiés devraient toutefois être abordés. Mais, est-ce que l'UNRWA serait elle capable de jouer ce rôle ?

Selon Lex Takkenberg 58, « L'UNRWA est bien placée pour combler cette lacune à cette jonction particulière. Elle pourrait s'appuyer sur le travail accompli par le CCNUP et rechercher de nouvelles orientations au travail du HCR, quoique le cas de ce dernier ait montré que la participation à la recherche de solutions durables n'est pas incompatible avec un mandat essentiellement humanitaire. D'autre part, rendre l'UNRWA impliquée dans cette nouvelle voie pourrait ouvrir de nouvelles perspectives ; cette agence pourrait travailler avec l'autorité et les

55 J. Husseini, « L'UNRWA et les refugiés: Enjeux humanitaires, intérêts nationaux », dans le livre « Le Droit au retour : le problème des refugiés palestiniens » par E.Sanbar-F.Mardam Bey, Actes Sud, (2002), p.225-226.

56 Rapport du Commissaire général de l'UNRWA, (1 juillet 1987-30 juin 1986), p. 2, par. 3.

57 Professeur de droit international des réfugiés et Directeur de recherche à l'Institut des études européennes de l'Université d'Oxford (Royaume-Uni).

58 L.Takkenberg, «The search for durable solutions for Palestinian refugees» dans «Israel and the Palestinian Refugees», E.Benvenisti-C.Gans-S.Hanafi, Max-Planck-Institut for comparative Public Law and International Law, (2007), p. 382.

ONG palestiniennes pour faire participer les réfugiés de façon plus systématique dans le processus de paix ».

Jusqu'à présent, et à cause de cette lacune dans le mandat de l'UNRWA, aucune initiative de l'ONU n'avait abouti à un accord acceptable des deux parties en conflit. Depuis le milieu des années 1980, les superpuissances mondiales ont réussi à mettre l'ONU à l'écart du processus de paix. Cette organisation a été incapable de jouer un rôle important depuis le début de la deuxième « Intifada » palestinienne en Septembre 2002.

La conséquence de l'absence d'un mandat pour la recherche des solutions durables, fut qu'aucun accord international satisfaisant n'a été trouvé.

Pour qu'un accord, résolvant les problèmes des réfugiés conformément au droit international, puisse être atteint dans le proche avenir, il faut combler la lacune de protection des refugiés, et l'UNRWA est la mieux placée que pour le faire.

Transformer le mandat de l'UNRWA afin qu'elle soit en mesure de concevoir des solutions durables, aurait l'avantage d'être approuvé par la communauté des réfugiés et des pays hôtes, sans oublier que cette agence a le personnel possédant l'expérience requise pour travailler avec les refugiés palestiniens, et l'habitude de travailler dans des situations critiques propres au conflit israélo-arabe.

Chapitre 2

L'Existence Juridique d'un « Droit au Retour ».

Le droit au retour des réfugiés palestiniens constitue une question délicate qui ne peut être abordée qu'à travers une analyse profonde du droit international.

Deux grandes catégories de règles permettent d'établir le « droit au retour » des réfugiés palestiniens dans leurs foyers.

Il y a d'abord les regles issues du droit international général (Première Section).

Il y a une autre catégorie de regles dont la valeur obligatoire est disputée : il s'agit des résolutions des Nations-Unies (Deuxième Section).

Section 1

Les Principes Généraux du Droit International

Les palestiniens exilés et jusqu'ici interdits de revenir chez eux sont soutenus dans leur revendication d'un droit au retour par des normes générales du droit international.

Gelles-ci sont à la base à la fois de l'exercice individuel de ce droit, comme plusieurs branches du droit international coutumier (sous-section une) et de l'exercice collectif du droit au retour, comme un droit collectif articulé au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes (sous-section deux).

§1- Les Réfugiés Palestiniens et le Droit Individuel de Retour.

« Selon le droit international, tous les individus ont un droit de retour.

Le droit de retour garantit à tous les individus un droit fondamental de retourner dans leurs foyers (communément appelés les «foyers d'origine») chaque fois qu'ils ont été déplacés, en raison de circonstances indépendantes de leur volonté »59.

Ce que l'on désigne par « droit de retour » dans le cas des palestiniens, n'est en réalité qu'une pièce d'un droit plus large, celui de disposer de la liberté d'aller et de venir, un droit parmi ceux proclamés en faveur des individus par la Charte Internationale des Droits de l'Homme. L'ensemble des règles qui fondent ce droit se sont formées à la suite de la seconde guerre mondiale dans une situation qui élucide fortement ce qui était recherché : entamer un statut universel de l'humain et de ses libertés et lui donner partout des garanties permettant que des situations de violence, de malheur, d'indignités comme celles connues par tant de personnes avant et pendant la guerre, ne puissent plus se reproduire.

59 Ibid, p.5.

L'objectif de cette section est de démontrer qu'en vertu du droit international, les réfugiés palestiniens de 1948 ont le droit de retourner dans leurs foyers d'origine à l'intérieur de ce qu'on appelle aujourd'hui Israël.

Pour le faire, ce document passe en revue quatre sources du droit international relatif au « droit au retour » individuel.

Le droit individuel de retour est ancré dans quatre entités distinctes du droit international: le droit de la nationalité, le droit humanitaire, les droits de l'homme et le droit des réfugiés.

1-Le « Droit au retour >> et le Droit de la Nationalité Relatif à l'Ordre de Succession des Etats60 .

La loi de la nationalité est une branche de la « loi des nations », qui régit les obligations entre Etats, cette loi soutient le droit des réfugiés palestiniens au retour par les principes et règles suivants :

1.1- Les limites à la liberté des États dans la régulation du statut de leur nationalité.

Le premier principe pour le «droit au retour», est celui de la liberté des Etats dans la régulation du statut de leur nationalité, c'est-à-dire dans l'attribution ou le retrait de la nationalité à un individu.

Cependant, les limites de cette liberté sont clairement définies sous le Droit International. La liberté des Etats à réguler le statut de leur nationalité n'est reconnue par le Droit International que dans la mesure où cette liberté n'enfreint pas ce dernier.

Ce principe est reconnu universellement, et a été réaffirmé en 1923 par une étude rendue publique par la Cour Permanente Internationale de Justice61; en 1930 dans la convention de Hague62 concernant certaines questions relatives aux lois sur les conflits de nationalités, et par la Cour Internationale de Justice en 195563 ; il a également été clairement formulé par divers organes des Nations Unies, y compris la Sixième Commission (juridique) de l'Assemblée générale64 et le Haut Commissariat pour les réfugiés65.

60 Nous nous inspirons dans la répartition de cette partie de l'article de Gail Boling, «The 1948 Palestinian Refugees and the Individual Right of Return, an International Law Analysis», BADIL, Seconde Edition: Juillet 2007.

61 Décrets de nationalité en Tunisie et au Maroc, avis consultatif, CPJI, 1923, indiquant que «dans l'état actuel du droit international, les questions de nationalité sont, en principe, au sein de la compétence nationale des Etats réservés», mais la qualification de la déclaration par l'expression «en principe» à prévu des cas où le droit international serait pertinent à la détermination du statut de nationalité et peut renverser les décisions du droit interne.

62 Convention concernant certaines questions relatives aux conflits de lois sur la nationalité, la Ligue des Nations Recueil des Traités, vol. 179 (1930). L'article I énonce qu'il appartient à chaque Etat de déterminer par sa législation quels sont ses ressortissants. Cette législation doit être reconnue par d'autres États dans la mesure où elle est conforme aux conventions internationales, coutumes internationales et principes de droit généralement reconnus en matière de nationalité. Id., art. I

63 Affaire Nottebohm, 1955 CIJ , énonce le principe que la détermination d'un Etat en ce qui concerne l'octroi du statut de la nationalité peut seulement être reconnue par d'autres Etats, si celle-ci est dans le cadre des normes internationales relatives à l'existence d'un «lien substantiel» entre l'individu et l'état.

64 « Assemblée générale documents officiels », 51eme session, la Commission du droit international, 48e session, deuxième
rapport sur la succession d'Etats et son impact sur la nationalité des personnes physiques et morales, p. 9, U.N. Doc.
A/CN.4/474,1996, (observing that in the UN General Assembly Sixth Committee debate, «it was generally recognized that, while

Le droit international fournit une norme qui sert à mesurer l'existence des « liens étroits et durables " entre une personne et « son propre pays " par l'ensemble des critères énoncés en 1955 par la Cour Internationale de Justice.

Dans l'arrêt historique rendu dans l'affaire « Nottebohm " sur la détermination de la nationalité, la cour a considéré que l'existence de liens «réels" et «effectifs" entre un individu et un Etat était basée sur « (...) un rattachement, un lien réel d'existence, d'intérêts et de sentiments ". La Cour a également fait observer : « Les éléments [pris] en considération sont divers et leur importance varie d'un cas à l'autre : il y a le domicile de l'intéressé, mais aussi le siège de ses intérêts, ses liens de famille, sa participation à la vie publique, l'attachement à un pays manifesté par l'éducation des enfants, etc. " Parmi les autres critères cités par la cour figurent les traditions culturelles, le mode de vie, les activités et les intentions pour l'avenir proche. Les critères fixés par la cour sont également pertinents pour déterminer le « propre pays " d'un individu dans la mesure où ils sont considérés comme étant la norme pour mesurer l'existence effective des liens entre l'individu et l'Etat.

Selon le droit de nationalité, les Etats sont limités dans leur liberté domestique de régulation du statut de nationalité par plusieurs obligations additionnelles en vertu du droit international, comme il est présenté ci-dessous.

1.2- La Loi de succession d'Etats.

La Loi de Succession d'Etats s'applique lorsqu'un territoire subit un changement de souveraineté66. Ce principe exige que le nouvel Etat souverain offre aux habitants habituels du territoire géographique subissant le changement de souveraineté, sa nationalité.

En vertu de la loi, les habitants67 du territoire géographique relevant de la souveraineté du nouvel Etat se voient offrir la nationalité de ce dernier. Plus encore, cette regle s'applique indépendamment de la présence ou de l'absence physique sur le territoire concerné, des habitants habituels, au moment du changement de souveraineté. Cette règle constitue une norme coutumière, elle lie68 tous les pays et s'applique à tous les Etats69.

nationality was essentially governed by internal law, certain restrictions on the freedom of action by States derived from international law»).

65 UNHCR, Regional Bureau for Europe, Division of International Protection, «The Czech and Slovak Citizenship Laws and the Problem of Statelessness», (February 1996) (stating that «Nationality matters fall within the sovereign domain of each State and it is for each State to define the rules and principles governing the acquisition and loss of nationality provided these rules do not contradict international law»).

66 I. Brownlie, «Principles of Public International Law», Oxford: Clarendon Press, (1990), p. 654.

67 Communément dénommés "résidents habituels": «Habitual residents» are inhabitants of a particular geographical area whose long-term residence there has established that area as their place of permanent residence, containing their homes of origin. Regarding the selection of the concept of «habitual residents» as the operative concept upon which to base the rules of the law of state succession, see General Assembly Resolution A/RES/55/153, (12 December 2000), «Articles on Nationality of Natural Persons in Relation to the Succession of States,» which endorsed the International Law Commission's choice of «habitual residents» as the operative concept.

68 Voir par exemple: UNHCR , «Comment: UNHCR and Issues Related to Nationality,» Vol. 14, no. 3 Refugee Survey Quarterly , 91, 102, (1995), (stating that «State practice internationally reinforces the rule that, in principle, the population goes with the territory and, therefore, receives nationality corresponding with residency»).

69 Article 14 des Articles sur la nationalité des personnes naturelles en relation avec la succession d'État.

L'Assemblée générale a adopté 70 un ensemble de principes juridiques qui montrent que selon les règles de la loi de succession d'Etats, les réfugiés palestiniens de 1948 ont le droit absolu de retourner dans leurs foyers d'origine à l'intérieur des lignes d'armistice de 1949. Ces principes sont appelés les « articles sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession d'Etats ».

Ils ont été préparés par la Commission du Droit International (CDI), qui est un organe onusien d'experts juridiques chargés de clarifier des sujets spécifiques du droit international qui lui sont confiés par l'Assemblée générale pour les étudier. L'Assemblée générale a adopté les articles de la CDI sur la Nationalité/Succession d'États textuellement comme ils sont présentés par celle-ci71 à l'Assemblée générale, et a demandé aux États de les suivre dans leur pratique sur l'attribution de nationalité dans le cadre de la succession d'Etats72.

Ainsi, les articles de la CDI sur la Nationalité/Succession d'Etats reflètent une règle contraignante du droit international coutumier, puisque leur but est de clarifier l'application de certaines règles du droit de la succession d'Etats.

Article 14 (2) des articles de la CDI sur la Nationalité/Succession d'Etats énumère spécifiquement un «droit de retour» dans la loi de succession d'Etats pour tous les résidents habituels d'un territoire objet d'un changement de souveraineté. Ce «droit de retour» est basé uniquement sur le statut d'une personne à titre de résident habituel sur le territoire objet du changement de souveraineté:

Article 14 : Statut de résident habituel

« 1. La succession d'États n'affecte pas le statut des personnes concernées en tant que résidents habituels.

2. Un État concerné doit prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre aux personnes concernées qui, en raison d'événements liés à la succession d'États, ont été forcées de quitter leur résidence habituelle sur son territoire d'y retourner »73.

On peut déduire de cet article :

Premièrement, que le «droit au retour» est indépendant de la nationalité des résidents habituels à qui il est conféré (dans ce cas, la nationalité n'est pas un élément requis à l'existence du `droit de retour'), que le droit de retour s'applique par ses termes à tous les résidents habituels d'un territoire géographique donné qui est l'objet d'un changement de souveraineté, même s'ils étaient effectivement en dehors du territoire géographique concerné dans la réelle « date de succession ».

Deuxièmement, que la mise en oeuvre de l'article 14 (2) est obligatoire pour tous les États successeurs, comme cela est indiqué par l'utilisation du mot « doit ».

70 Voir, Assemblée générale résolution A/RES/55/153du 12 Décembre 2000, «Articles sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession».

71 Voir le rapport de la Commission du droit international sur les travaux dans sa cinquante et unième session,( 3 mai - 23 Juillet 1999).

72 Voir Assemblée Générale résolution A/RES/55/153 (12 Décembre 2000).

73 Voir, CDI, «Articles sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession», art. 14.

L'article 5 des articles de la CDI sur la Nationalité/Succession d'États présente la même règle que l'article 14 (2), mais, il la formule dans la langue traditionnelle de la loi de la nationalité. Article 5: Présomption de nationalité

« Sous réserve des dispositions des présents articles, les personnes concernées qui ont leur résidence habituelle sur le territoire affecté par la succession d'États sont présumées acquérir la nationalité de l'État successeur à la date de cette succession »74.

Il est évident que les réfugiés palestiniens de 1948 sont concernés par cet article, parce qu'ils ont leur résidence habituelle sur le territoire qui a subi le changement de souveraineté et auraient dû être considérés automatiquement comme ressortissants de l'Etat successeur (Israël) et acquérir la nationalité de ce dernier à compter de la date de la succession.

1.3- La mise en oeuvre du « Droit de Retour » est une obligation due par un Etat à tous les autres Etats.

En vertu de la loi de la nationalité, l'obligation de mettre en oeuvre le « droit de retour » des personnes est due par un Etat pour tous les autres Etats.

La règle est que les Etats sont tenus de réadmettre leurs propres ressortissants (par exemple, permettre d'exercer leur `droit au retour'), y compris les personnes temporairement déplacées en cas de succession d'Etats, parce que, refuser de le faire équivaudrait à imposer à un autre pays une obligation de recevoir ou d'accueillir l'individu rejeté. Ce principe est connu comme la « règle de réadmission ».

La règle repose sur le principe selon lequel un Etat ne peut choisir de rejeter ou de laisser brin un ressortissant hors de ses frontières en refusant sa réadmission, parce qu'une telle action serait imposer un fardeau inacceptable à un autre Etat (recevant) pour qu'il accepte la personne en détresse75.

1.4- L'interdiction de dénationalisation.

Il existe une autre règle coutumière contraignante en vertu de la loi de la nationalité connue sous le nom d'« interdiction de la dénationalisation ». Cette règle interdit un Etat d'utiliser la révocation du statut de la nationalité (dénationaliser) comme le moyen d'éviter la réadmission de ses propres ressortissants. En outre, comme la règle de la réadmission, elle avait atteint le statut coutumier bien avant les événements de 1948.

L'interdiction de la dénationalisation existe dans un projet de convention internationale datant de 193076 et faisant autorité dans diverses déclarations régionales77 et dans des résolutions d'organes des Nations Unies78.

74Voir, CDI, «Articles sur la nationalité des personnes physiques en relation avec la succession», art. 5.

75G. Boling, «The 1948 Palestinian Refugees and the Individual Right of Return», BADIL Resource Center, p.41.

76 Research in International Law, Harvard Law School, «Nationality, Responsibility of States, Territorial Waters: Drafts of Conventions Prepared in Anticipation of the First Conference on the Codification of International Law, The Hague, (1930),» The Law of Nationality, 23 American Journal of International Law 13, 16 (1929) (Article 20, of which, provides that «A State may

La dénationalisation est interdite en vertu du droit international, dans le cas d'une instance unique affectant une seule personne. Son interdiction est donc beaucoup plus forte quand elle est mise en oeuvre sur une grande échelle et quand le gouvernement agissant de la sorte a l'intention de chasser toute une classe importante de ressortissants de l'organisme politique de l'Etat. Mais paradoxalement, à travers sa « loi sur la nationalité », qui a été adoptée en 1952, Israël a interdit tous les réfugiés palestiniens de retourner dans l'Etat d'Israël. La Loi israélienne de 1952 sur la nationalité pour les «non-Juifs » viole complètement la règle de la loi de la nationalité interdisant la dénationalisation.

Israël a deux lois régissant la citoyenneté: une pour les juifs et une autre pour les non-juifs. La loi conférant la citoyenneté des Juifs est la loi du retour79, elle fournit automatiquement la citoyenneté israélienne à tout Juif dans le monde qui désire immigrer en Israël80.

En revanche, la loi de 1952, celle de la nationalité pour les non-juifs, impose des exigences strictes. Ainsi, les personnes demandant la nationalité (ou citoyenneté) fondée sur la présente loi doivent répondre à trois conditions:

- avoir résidé en Israël le jour de sa fondation;

- y avoir résidé le jour où la loi sur la nationalité est entrée en vigueur ;

- avoir été enregistré en tant que tel dans un registre spécifique.

De ce fait, la grande majorité des réfugiés palestiniens de 1948 se sont rendus incapables de répondre à cette loi dure qui exigeait leur présence physique en Israël et les empêchait à jamais de retourner à domicile et d'acquérir la citoyenneté israélienne, leur refusant par conséquent d'être entendu par la justice pour mettre en question la légalité de la loi israélienne sur la nationalité.

Toutefois, le droit interne ne peut pas l'emporter sur le droit international coutumier et « la loi de retour » d'Israël enfreint les obligations légales envers les réfugiés palestiniens et viole les normes internationales contre la dénationalisation arbitraire et la discrimination.

not refuse to receive into its territory a person, upon his expulsion by or exclusion from the territory of another State, if such person is a national of the first State or if such person was formerly its national and lost its nationality without having or acquiring the nationality of any other State»).

77La Déclaration de Strasbourg, ratifiée le 26 novembre 1986 garantit les droits de tout être humain de quitter un pays, et en particulier son pays d'origine, ainsi que le droit d'y retourner, art. 6, para. (b).

78 Draft Principles on Freedom and Non-Discrimination in Respect of Everyone to Leave Any Country, Including His Own, and to Return to His Country, U.N. Sub commission on Prevention of Discrimination and Protection of Minorities, Res. 2B(XV), U.N. Doc. E/CN.4/846 (1963) p. 44 at p. 46 (paragraph II(b) of which states «No one shall be arbitrarily deprived of his nationality... as a means of divesting him of the right to return to his country»).

79 Voir, Les lois de l'État d'Israël 114 (1950).

80 Les lois de l'État d'Israël 114 (1950) L'article 1 de la loi dispose: «Tout Juif a le droit de venir dans ce pays (Israël) comme un oleh (immigrant juif)".

2- Le « Droit au Retour » dans le Droit International Humanitaire.

Le « droit de retour » est également enraciné dans le droit international humanitaire ; ce dernier étant l'organisme du droit réglementant ce que les Etats sont autorisés à faire pendant la guerre. Les règlements de La Haye annexés à la Convention de 1907 de La Haye (IV) concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre 81 (qui sont universellement reconnus, y compris par Israël, d'avoir obtenu le statut coutumier en 1939) 82 et la 4eme Convention de Genève83 (à laquelle Israël est signataire), prévoient tous les deux le droit de retour des personnes déplacées dans leurs foyers après la cessation des hostilités. Ainsi, le droit de retour existe comme une norme contraignante du droit humanitaire, et Israël est dans l'obligation de s'assurer de sa mise en oeuvre.

Le droit international humanitaire a défini de manière certaine l'interdiction du transfert des populations (2.1), la protection des personnes déplacées (2.2), le droit au retour (2.3) et le respect des biens appartenant aux réfugiés (2.4).

2.1 - Interdiction du transfert des populations.

L'interdiction de l'expulsion forcée a son fondement dans l'article 46 (1) du Règlement de La Haye84. Pierre Mounier -un procureur adjoint pour les Alliés dans la poursuite pénale des dirigeants nazis devant le Tribunal Militaire International (TMI) de Nuremberg-, a déclaré dans ses arguments d'ouverture le 20 Novembre 1945 que la déportation a violé l'article 46 du Règlement de La Haye, ainsi que le droit international coutumier en général85. Pour cette raison, la Charte du Tribunal militaire international (TMI)86 a inclus l'exportation dans la définition des crimes de guerre87 et des crimes contre l'humanité88. L'interdiction du retour des personnes

81 Voir, Convention (IV) concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre et son Annexe: Règlement concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre. La Haye, (18 Octobre 1907).

82 La Haute Cour israélienne a statué régulièrement, à commencer par la fameuse affaire Eichmann 1962, que le Règlement de La Haye constitue un droit international coutumier et lie Israël. Voir, Attorney-General of the Government of Israel v. Adolf Eichmann, 36 International Law Reports p. 293, (29 May 1962). Cette décision a été depuis confirmée de façon constant; voir, Hilu v. The Government of Israel, HC 302/72, HC 306/72, 27 Piskei Din [2] 169; Ayyoub v. Minister of Defence, HC 606/78, 610/78, 33 Piskei Din [2] 113; A Teacher's Housing Cooperative Society v. The Military Commander of the Judea and Samaria Region, HC 393/82, 37 Piskei Din [4] 785, 793.

83Voir, La Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, actuellement en vigueur, fut signée le12 août 1949. Elle est aussi appelée la « quatrième Convention de Genève ».

84 Convention de la Haye (IV) Article 46 :L'honneur et les droits de la famille, la vie des individus et la propriété privée, ainsi que les convictions religieuses et l'exercice des cultes, doivent être respectés. La propriété privée ne peut pas être confisquée ».

85Trial of the major war criminals before the International Military Tribunal, Nuremberg 1945-46, at 49 (42 vols. 1947-49), statement of Pierre Mounier, assistant prosecutor for the French Republic, in opening remarks on 20 November 1945: «These deportations were contrary to the international conventions, in particular to Article 46 of the Hague Regulations, 1907, the laws and customs of war, the general principles of criminal law as derived from the criminal laws of all civilized nations, the internal penal laws of the countries in which such crimes were committed, and to Article 6(b) of the Charter of the International Military Tribunal at Nuremberg».

86 Charter of the International Military Tribunal, Annexed to the London Agreement for the Prosecution and Punishment of the Major War Criminals of the European Axis, 1945, reproduced in D. Schindler & J. Toman (eds.), the laws of armed, 3d edition, (1988).

87 Dans l'article 6 (b) de la Charte de la TMI.

88 Dans l'article 6 (c) Ibid.

expulsées de force a été de même condamnée pour son caractère illégal89. Par conséquent, les Règlements de La Haye ont été définitivement interprétés par les procureurs du TMI pour inclure le «droit au retour» en cas d'expulsion par la force dans le droit humanitaire coutumier. L'interdiction, pour un Etat, de déporter ou de transférer une partie de sa population civile dans un territoire qu'il occupe apparaît dans trois articles de la 4eme Convention de Genève.

L'article 4590 limite strictement les circonstances dans lesquelles des personnes protégées pourront être transférées provisoirement (par exemple, seulement pour les soins d'un autre Etat signataire de la quatrième Convention de Genève) et exige catégoriquement le rapatriement des personnes protégées à leur résidence après la cessation des hostilités.

L'article 49, alinéa 6 de la 4eme Convention de Genève91, définit cette pratique comme étant une violation grave du droit international humanitaire et par le Protocole additionnel I92 et le Statut de la Cour Pénale Internationale,93 sanctionne comme crime de guerre « le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d'une partie de sa population civile, dans le territoire qu'elle occupe ». L'ONU, de manière régulière, a rappelé au respect de ces regles.

L'article 147 de la Quatrième Convention de Genève définit les infractions graves à la Convention comme des violations soumises à des sanctions pénales par tous les autres Etats qui ont signé cette Convention. En effet, les déportations et les transferts forcés de populations sont classés comme des infractions graves94. Également, en vertu de la théorie développée par les procureurs au TMI de Nuremberg, bloquer délibérément le droit de retour des personnes expulsées de force s'inscrit dans le cadre d'une violation grave de la Quatrième Convention de Genève.

Les tentatives de modifier la composition démographique d'un territoire occupé ont notamment été condamnées par le Conseil de sécurité de l'ONU à propos de l'ex-Yougoslavie ; notamment, par la résolution 752 du 15 mai 1992. D'ailleurs, le Conseil de sécurité a appelé toutes les parties à renoncer aux expulsions forcées du lieu où vivent les personnes et a condamné toute action visant à changer la composition ethnique de la population. Pour le rapporteur spécial des

89 Trial of the major war criminals before the International Military Tribunal, Nuremberg, 1945-46, at 596 (42 vols. 1947-49) (Captain S. Harris, assistant prosecutor for the United States, introduced evidence on 14 December 1945 on the illegality of preventing the return of forcibly expelled persons: «The first expulsion action was carried out in Alsace in the period from July to December 1940; in the course of it, 105,000 persons were either expelled or prevented from returning»).

90 Article 45 : « Les personnes protégées ne pourront être transférées à une Puissance non partie à la Convention. Cette disposition ne saurait faire obstacle au rapatriement des personnes protégées ou à leur retour au pays de leur domicile après la fin des hostilités ».

91Article 49 al. 6 : « La Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d'une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ».

92 Protocole additionnel a la 4eme Convention de Genève, (Protocole I), 8 juin 1977.

Art. 85 Part.4 : « Outre les infractions graves définies aux paragraphes précédents et dans les Conventions, les actes suivants sont considérés comme des infractions graves au Protocole lorsqu'ils sont commis intentionnellement et en violation des Conventions ou du présent Protocole :

a) le transfert par la Puissance occupante d'une partie de sa population civile dans le territoire qu'elle occupe, ou la déportation ou le transfert à l'intérieur ou hors du territoire occupé de la totalité ou d'une partie de la population de ce territoire, en violation de l'article 49 de la IVe Convention ;

b) tout retard injustifié dans le rapatriement des prisonniers de guerre ou des civils »

93 Voir, Statut de Rome de la cour pénale internationale, Art. 8, par. 2.

94 4eme convention de Genève, art. 147:« Les infractions graves (...) sont celles qui comportent l'un ou l'autre des actes suivants, s'ils sont commis contre des personnes ou des biens protégés par la Convention : (...) la déportation ou le transfert illégaux »

Nations Unies sur les transferts de populations, « l'implantation de colons » est un acte illicite qui met en jeu la responsabilité de l'État et la responsabilité pénale des individus95.

La 24eme Conférence Internationale de la Croix-Rouge a affirmé que « les colonies de peuplement installées dans les territoires occupés sont incompatibles avec les articles 27 et 49 de la 4eme Convention de Genève »96.

En 1946, le Tribunal Militaire International de Nuremberg a conclu à la culpabilité de deux des accusés pour tentative de « germanisation » des territoires occupés97.

2.2 -- Protection des personnes déplacées.

Selon l'article 49 alinéa 3 de la 4eme Convention de Genève, une autorité occupante qui opère une évacuation pour garantir la sécurité de la population civile ou pour de pressantes raisons militaires « devra faire en sorte, dans toute la mesure du possible, que les personnes protégées soient accueillies dans des installations convenables, que les déplacements soient effectués dans des conditions satisfaisantes de salubrité, d'hygiène, de sécurité et d'alimentation et que les membres d'une même famille ne soient pas séparés les uns des autres ».

Aux termes du Protocole additionnel II98, si des déplacements de la population civile sont ordonnés pour assurer la sécurité des personnes civiles ou pour des raisons militaires impératives, « toutes les mesures possibles seront prises pour que la population civile soit accueillie dans des conditions satisfaisantes (...) ». Sur un autre plan, le Protocole additionnel II99 exige que « toutes les mesures appropriées soient prises pour faciliter le regroupement des familles momentanément séparées»100 et le Conseil de sécurité a appelé au respect de cette règle dans tous les conflits armés101.

La Convention relative aux droits de l'enfant102 ajoute que « les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré »103.

95 Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités (de la Commission des Nations Unies pour les droits de l'homme), Rapporteur spécial sur les transferts de population, y compris l'implantation de colons et de colonies, considérés sous l'angle des droits de l'homme, rapport final, UN Doc. E/CN.4/Sub.2/1997/23, (27 Juin 1997), par.16, 64-65.

96 Voir, 4eme Conférence internationale de la Croix-Rouge, Manille 7-14 Novembre 1981, Res. III, par. 5.

97 Voir, TIM de Nuremberg, jugement du 1 Octobre 1946, p. 238, 261, 295 et 335.

98 Voir, Art. 17, par. 1

99 Art. 4, par. 3, all. b.

100 La règle qui exige que des mesures soient prises pour protéger la population civile en cas de déplacement se retrouve dans des accords conclus entre les parties aux conflits armés en Bosnie-Herzégovine, au Mozambique et au Soudan.

101 Conseil de sécurité, Résolution 361, 30 aout 1974, par. 4 ; Résolution 752, 15 Mai 1992, par. 7; Résolution 1040, 29 Janvier 1996, préambule.

102 Voir, Art. 9, par. 1

103 Voir à ce sujet, G. Devers, « Les réfugiés palestiniens et le droit au retour », Centre de recherche sur la mondialisation, (8 septembre 2010).

2.3 -- Droit au retour.

L'article 49 de la 4eme Convention de Genève, stipule dans son alinéa 2, que « la population ainsi évacuée sera ramenée dans ses foyers aussitôt que les hostilités dans ce secteur auront pris fin ». Le Conseil de Sécurité de l'ONU, l'AGNU et le Conseil des Droits de l'Homme ont rappelé à diverses reprises le droit des réfugiés et des personnes déplacées de retourner à leur foyer librement et dans la sécurité.

Les refugiés devraient être capables de retourner dans la sécurité et sans discrimination. L'ensemble des principes du droit international humanitaire qui protègent les personnes civiles doivent s'appliquer aux réfugiés qui vont retourner dans leurs foyers d'origine104.

2.4 -- Le respect des biens appartenant aux réfugiés.

Le droit de propriété des refugiés doit être respecté. La propriété et les biens soustraits aux refugiés en 1948 doivent être préservés de la destruction, pareil aux confiscations, acquisitions ou utilisations injustes et illégales.

En plus des lois et procédures spécifiques réservées aux refugiés, la législation de l'intégralité des pays du monde garantit une forme de protection contre la saisie arbitraire ou illégale des biens, qui est assurément un principe général de droit.

« La question des droits de propriété des personnes déplacées a suscité une attention toute particulière dans les conflits récents, avant tout dans le contexte des conflits dans l'exYougoslavie, mais aussi en Afghanistan, à Chypre, en Colombie, en Géorgie et au Mozambique105. Dans le contexte des conflits de l'ex-Yougoslavie, des traités et d'autres instruments ont affirmé que les déclarations et les engagements relatifs aux droits de propriété faits sous la contrainte sont nuls et non avenus106.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a notamment adopté en 1995 une résolution dans laquelle il demandait à la Croatie «d'abroger toute disposition fixant un délai avant l'expiration duquel les réfugiés devraient rentrer en Croatie afin de récupérer leurs biens''107.

On retrouve des dispositions de ce type dans l'accord général de Paix signé pour le Mozambique en 1992, avec l'article IV (e) 108 : « Les personnes réfugiées ou déplacées sont garanties d'obtenir la restitution de leurs biens encore existants ou du droit d'agir en justice pour obtenir la restitution de leur propriété'' » 109.

104 Comité exécutif du HCR, conclusion n° 18 (XXXI) : rapatriement librement consenti, (16 Octobre 1980), partie f.

105 Accord quadripartite sur le rapatriement librement consenti des réfugiés et des personnes déplacées de Géorgie (1994), partie 3, all. 1 g) ; Accord sur les réfugiés et les personnes déplacées, annexe 7 de l'accord cadre général pour la paix en BosnieHerzégovine, (1995), art. premier, partie 1 ; Agreement on the Normalisation of Relations between Croatia and the FRY, art. 7.

106 Voir, p. ex., Accord sur les réfugiés et les personnes déplacées, annexe 7 de l'accord cadre général pour la paix en BosnieHerzégovine (1995), art. XII, partie 3 ; Recommandations sur la situation des civils en Bosnie et en Herzégovine, (1992), partie 4(c) ; Déclaration commune des Présidents de la République fédérative de Yougoslavie et de la République de Croatie, septembre (1992), partie 6.

107 Conseil de sécurité, Résolution 1019, (9 Novembre 1995), Par.7.

108 Accord général de paix pour le Mozambique, (1992), Protocole III, Section IV, par. e.

109 G. Devers, « Les réfugiés palestiniens et le droit au retour », Centre de recherche sur la mondialisation, (8 septembre 2010).

3- Le « Droit au Retour » et le Droit International des Droits de l'Homme.

Les droits de l'homme sont un concept selon lequel tout être humain indépendamment de sa condition sociale, a des droits « inhérents à sa personne, inaliénables et sacrés », et donc opposables en toutes circonstances à la société et au pouvoir.

Les droits de l'homme qui attribuent des droits directement aux individus et non par les Etats, contiennent également le «droit de retour». Ce droit qui existe comme une obligation contraignante pour les Etats dans la loi de la nationalité telle qu'elle est appliquée à la succession d'Etats et dans le droit humanitaire, a donc son corollaire comme droit individuel détenu en vertu du droit international des droits de l'homme.

Le « droit de retour » individuel se trouve dans un vaste éventail de traités internationaux et régionaux des droits de l'homme dont il est une règle coutumière, si bien que, vu son importance pour les individus, une obligation correspondante liant tous les États garantit sa pleine application.

La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH), que l'Assemblée générale a adopté en 1948, (un jour avant la résolution 194), est le fondement du droit individuel de retour dans les lois de droits de l'homme.

L'article 13(2) de la DUDH prévoit le «droit au retour» comme suit :

« Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays »110.

« En tant que recommandation dépourvue de caractère juridiquement obligatoire, la Déclaration universelle ne peut être source d'obligations pour les Etats. Il n'en reste pas moins que plusieurs énoncés de la Déclaration peuvent parfaitement avoir une valeur normative111et relever du droit coutumier, spécialement lorsque les principes proclamés par la Déclaration constituent de simples rappels de règles coutumières ou lorsque leur enracinement progressif dans la pratique internationale leur fait progressivement acquérir la qualité de règles coutumières. Elles peuvent parfois même avoir valeur de normes impératives112.

En mettant l'accent sur la qualité de droits fondamentaux énoncés dans la Déclaration, la Cour accepte de donner, à certains d'entre eux tout au moins, un caractère indérogeable, dont l'assimilation au jus cogens113 est incontestable.

Au minimum, par application du principe de la bonne foi, les Etats membres de l'ONU doivent
s'abstenir de toutes mesures susceptibles de remettre en cause les énoncés de la Déclaration.

110 On notera que la formule "et de revenir dans son pays" a été introduite à la suite d'un amendement proposé par le Liban.

111 CIJ, Avis consultatif de 1996, Licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires.

112 Dans l'affaire du Personnel diplomatique et consulaire des Etats-Unis à Téhéran, la CIJ a ainsi estimé que "le fait de priver abusivement de leur liberté des êtres humains et de les soumettre, dans des conditions pénibles, à une contrainte physique est manifestement incompatible avec les principes de la Charte des Nations Unies et avec les droits fondamentaux énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme"

113 Le jus cogens regroupe les normes impératives de droit international général. Cette notion est définie par la Convention de Vienne du 23 mai 1969, dans son article 53 : « Aux fins de la présente Convention, une norme impérative de droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère. »

Tout Etat membre est en droit de l'appliquer et sa responsabilité internationale ne saurait être recherchée s'il agit conformément à cette résolution "114.

Toutes les conventions internationales et régionales suivantes ont confirmés l'importance même du «droit de retour». Par exemple, le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP)115 a intégré le droit individuel de retour dont il a hérité de la DUDH, et qui donne force de loi à de nombreux droits énoncés par la DUDH dont l'article 12 (4) dispose : « Nul ne peut être arbitrairement privé du droit d'entrer dans son propre pays".116

Le droit de retourner dans son pays est de la plus haute importance pour les réfugiés qui demandent un rapatriement librement consenti. Il implique également l'interdiction des transferts forcés de populations ou d'expulsions massives vers d'autres pays117.

Israël a adhéré à ce pacte en 1991, et refuse de reconnaître l'application de cet article aux déplacements forcés opérés en 1948. En fait, à l'argument de l'application du principe dans le temps, il y a un contre-argument. Le pacte international explicite une règle du droit international qui a une valeur coutumière ; en conséquence, cette règle est rétroactive dans la mesure où elle préexiste au Pacte. Son application est donc recevable pour toutes les expulsions opérées en 1948118.

Le libellé du «droit de retour» en vertu de l'article 12 (4) du PIDCP, qui utilise le terme « entrer " plutôt que « retour " est plus large que la formulation du droit en vertu de la DUDH. Ainsi, la formulation du PIDCP sur le droit au retour tiendrait compte de la situation des réfugiés palestiniens de la deuxième, troisième ou quatrième génération.

L'article 12 (4) du PIDCP utilise l'expression « son propre pays " pour définir la destination ou bien le lieu où le «droit au retour» doit être exercé.

En Novembre 1999, le Comité des Droits de l'Homme a émis L'"Observation générale n ° 27"119, interprétant d'une manière générale l'article 12 et de façon particulière le « droit de retour " dans l'article 12(4).

L'observation générale n ° 27 confirme définitivement l'applicabilité du «droit de retour» de l'article 12 (4) dans le cas des réfugiés palestiniens de 1948.

Le Comité des Droits de l'Homme qui contrôle l'application du PIDCP, a donné une interprétation autorisée de l'expression « son propre pays " qui précise quelles sont les personnes habilitées à exercer le « droit au retour ". Le Comité affirme que ce droit s'applique même dans le cas des territoires contestés ou qui sont passés sous le contrôle d'un autre pays. De plus, il a fait l'observation suivante au paragraphe 20 :

114 E. Canal-Forgues, « Le Droit au Retour des Refugiés Palestiniens ", site web : http://www.cedroma.usj.edu.lb/pdf/implan/canfor.pdf

115 Adopté par l'AGNU le 16 décembre 1966, entré en fonction le 23 mars 1976 et ratifié par Israël le 3 octobre 1991.

116 Voir, International Covenant on Civil and Political Rights, art. 12, par. 4.

117 Comité des Droits de l'homme, Observation générale, (27 mai 2008), HRI/GEN/1/rev. 9, Vol. 1, par. 19.

118 Voir à ce sujet l'étude de G.J.Bolling, « The question of timing in evaluating Israel's duty under international law to repatriate 1948 palestinian refugees » dans le livre «Israël and the Palestinian Refugees» par G.Benvenisti - C.Gans - S.Hanafi, Max-Planck Institut, (2007), p219-233.

119 Comité des Droits de l'Homme, CCPR/C/21/Rev.1/Add.9, Observation générale no. 27, Liberté de circulation, art.12, 2, (Novembre 1999).

« La signification du terme «son propre pays» est plus vaste que celle du «pays de sa nationalité». Elle n'est pas limitée à la nationalité au sens strict du terme, à savoir la nationalité conférée à la naissance ou acquise par la suite ; l'expression s'applique pour le moins à toute personne qui, en raison de ses liens particuliers avec un pays ou de ses prétentions à l'égard d'un pays, ne peut être considérée dans ce même pays comme un simple étranger. Tel serait par exemple le cas des territoriaux d'un pays auxquels la nationalité aurait été retirée en violation du droit international, et des personnes dont le pays d'origine aurait été intégré ou assimilé à une autre entité nationale dont elles se verraient refuser la nationalité »120.

Toutes ces trois catégories de personnes énumérées, ont le droit de retourner dans leurs foyers d'origine en vertu de l'article 12 (4), selon l'interprétation de la Commission des Droits de l'Homme des Nations Unies. Le plus important encore, est que les réfugiés palestiniens de 1948 en tant que groupe, s'intègrent réellement dans chacune des catégories énumérées dans l'observation générale n ° 27.

Par conséquent, il peut être exposé de manière concluante que l'article 12 (4) du PIDCP sur le « droit de retour » s'applique certainement au cas des réfugiés palestiniens121.

Tous les droits énoncés dans le PIDCP sont accordés à des individus à titre personnel, sans considération pour le nombre de personnes qui pourraient chercher à exercer le même droit, et sans les lier à un délai122.

En outre, différents organes de l'ONU, y compris le Haut Commissariat pour les Réfugiés, ont expressément constaté que les grands groupes de personnes ont un « droit de retour »123 qui est explicitement fondé sur l'article 12 (4) du PIDCP et l'article 13 (2) de la DUDH. Comme un commentateur l'a noté, le « droit au retour » dans la DUDH et le PIDCP a été à la base des accords de paix signés afin de résoudre les conflits au Rwanda et en Géorgie, qui ont produit des centaines de milliers de réfugiés et de personnes déplacés124.

120 General Comment No. 27, paragraph 20, addressing the interpretation of Article 12(4): The wording of article 12, paragraph 4, does not distinguish between nationals and aliens («no one»). Thus, the persons entitled to exercise this right can be identified only by interpreting the meaning of the phrase «his own country.» The scope of «his own country» is broader than the concept «country of his nationality.» It is not limited to nationality in a formal sense, that is, nationality acquired at birth or by conferral; it embraces, at the very least, an individual who, because of his or her special ties to or claims in relation to a given country, cannot be considered to be a mere alien. This would be the case, for example, for nationals of a country who have been stripped of their nationality in violation of international law, and of individuals whose country of nationality has been incorporated in or transferred to another national entity, whose nationality is being denied them. The language of article 12, paragraph 4, moreover, permits a broader interpretation that might embrace other categories of long-term residents, including but not limited to stateless persons arbitrarily deprived of the right to acquire the nationality of the country of such residence.

121 G.J.Boling, «The 1948 Palestinian Refugees and the Individual Right of Return, an International Law Analysis», BADIL, Seconde Edition: Juillet 2007, p.65.

122: M. Nowak,» UN covenant on civil and political rights»: CCPR commentary 220, (1993), stating that Article 12 applies «even if masses of people are claiming this right».

123 Voir à ce sujet: G.J.Boling, «The 1948 Palestinian Refugees and the Individual Right of Return, an International Law Analysis», BADIL, seconde edition (Juillet 2007), p.68.

124 Voir, l'article d'E. Rosand, «The right to return under international law following mass dislocation: The Bosnia precedent?», (1998), Michigan Journal of International Law, University of Michigan Law School,.

Dans le cas des réfugiés rwandais, les gouvernements de Rwanda et de Zaïre sont entrés dans un accord tripartite avec le HCR125 le 24 Octobre 1994 pour le retour volontaire des réfugiés rwandais du Zaïre; cet accord a été spécifiquement fondé sur l'article 12 du PIDCP et l'article 13 (2) de la DUDH ainsi que l'article 5 de la Convention de L'OUA126de 1969 sur les droits civils et politiques, qui contient également le «droit au retour». Dans le cas des personnes déplacées pendant le conflit géorgien, le HCR a conclu un Accord quadripartite similaire sur le retour volontaire des réfugiés et des personnes déplacées127 avec les gouvernements de la Géorgie, l'Abkhazie et la Russie le 4 avril 1994, qui, encore une fois, a explicitement « reconnu que le droit de tous les citoyens à vivre et à retourner dans leur pays d'origine est inscrit dans la DUDH et le PIDCP »128.

De même, la Sous-commission des Nations Unies sur la Prévention de la Discrimination et la Protection des Minorités a invoqué à la fois l'article 12 (4) du PIDCP et l'article 13 (2) de la DUDH dans la suite de la résolution de 1995 relative à l'irrecevabilité des expulsions de masse : « les pratiques de l'exil forcé, les expulsions et les déportations massives, les transferts de population, le nettoyage ethnique et d'autres formes de déplacement forcé de populations dans un pays ou à travers les frontières privent les populations touchées de leur droit à la liberté de mouvement »129.

Enfin, et c'est la réfutation la plus concluante à l'argument tentant d'empêcher l'application de l'article 12 (4) à de grands groupes de personnes, l'observation générale n ° 27 elle-même affirme sans ambiguïté l'applicabilité du « droit de retour » de l'article 12 (4) a de grands groupes de personnes, et cela dans le paragraphe 19: « Le droit au retour est de la plus haute importance pour les réfugiés qui demandent leur rapatriement volontaire. Il implique également l'interdiction des transferts forcés de population ou d'expulsions massives vers d'autres pays »130.

En conclusion, il devient clair que le « droit au retour » constitue une norme contraignante du droit coutumier des droits de l'homme. Par conséquent, Israël est tenue de mettre en oeuvre le « droit de retour » individuel des réfugiés palestiniens de 1948, étant d'une part une question d'obligation traitée en vertu du PIDCP131, et d'autre part étant lié généralement, comme tous les autres Etats, par le statut coutumier général du « droit de retour » dans le droit international des droits de l'homme.

125 E. Rosand, «The right to return under international law following mass dislocation: The Bosnia precedent?», (1998), University of Michigan Law School, Michigan Journal of International Law, «the parties agreed that all Rwandan refugees voluntarily wishing to return had the right to do so».

126 Organisation de l'Unité Africaine.

127 Quadripartite Agreement on Voluntary Return of Refugees and Displaced Persons (part of political settlement of Georgia/Abkhazia civil war), Annex II, par. 1, U.N. Doc. S/1994/ 397, (1994).

128 Ibid.

129 Voir, ONU. Sous commission sur la prévention de la discrimination et la protection des minorités, Résolution 1995/13, ONU, 50e Session, (1995).

130 Voir, commentaire général n° 27, paragraphe 19.

131 Ratifié par Israël.

4- Le Droit au Retour dans le Droit des Réfugiés et la Pratique des Etats.

Il existe un vaste corpus de jurisprudence découlant de la pratique des Etats, reflétant l'existence d'une obligation légale (opinio juris)132 de la part des Pays, qui sont tenus de permettre aux personnes déplacées, y compris les réfugiés, d'exercer leur «droit de retour» dans leurs foyers d'origine et cela en vertu du droit international coutumier.

L'obligation des Etats de permettre le retour des réfugiés dans leurs foyers d'origine a été solidement établie bien avant les événements de 1948 et continue de gagner plus de poids à chaque nouvelle instance de la pratique des Etats appliquant le «droit au retour». Ainsi, le droit de retourner dans son pays existe dans un quatrième corps indépendant du droit international, qui est la loi relative aux réfugiés (un sous-ensemble de lois des droits de l'homme qui intègre les principes du droit humanitaire). Le principal instrument régissant les droits des réfugiés et l'obligation des Etats à leur égard est la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés133 et son protocole de 1967134.

La mise en oeuvre effective du « droit au retour » est effectuée par le biais du Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies (HCR).

L'article 1 du Statut de 1950 de l'HCR définit le mandat de l'Agence comme l'action de faciliter le rapatriement librement consenti des réfugiés, ou leur assimilation dans de nouvelles communautés nationales.

En vertu du droit des réfugiés, le principe de leur « droit de retour » absolu sur une base volontaire dans leurs foyers d'origine est au coeur de la mise en oeuvre la plus favorable des trois "solutions durables" conçues par la communauté internationale pour traiter les flux de la population de réfugiés, et cette solution n'est autre que le retour volontaire135.

Quant aux trois solutions durables principales qui doivent être mises en oeuvre sous les auspices du HCR, elles sont : le rapatriement volontaire, l'absorption volontaire et la réinstallation volontaire.

Passons maintenant à l'examen des obligations relatives à chaque pays. Le seul pays d'origine a l'obligation de recevoir à nouveau les réfugiés qui ont été initiés à partir de ses frontières (frontières de facto ou autrement) ; tandis que les autres Etats (y compris les pays d'accueil) ne sont pas tenus d'absorber des réfugiés originaires d'autres pays de façon permanente136.

132 C'est la conviction que l'usage répété constitue une règle de droit.

133 La Convention relative au statut des réfugiés, Adoptée le 28 juillet 1951 à Genève et entrée en vigueur le 22 avril 1954.

134 Protocole de 1967 relatif au statut des réfugiés, Conclu à New York le 31 janvier 1967, entré en vigueur le 4 octobre 1967.

135 L. Takkenberg, «The status of Palestinian refugees in international law» 233, (1998), «voluntary repatriation is considered by UNHCR, as well as by many others, the best of the `three durable solutions' to deal with refugee problems»; «voluntary repatriation in peace and dignity is by far the preferred solution to any refugee situation»; «the prominent place that voluntary repatriation presently takes in the search for solutions is clearly recognized by the international community».

(L'auteur est un officier de l'UNRWA).

136 Bien qu'il y ait une obligation légale d'aider les réfugiés temporairement dans le cas où ils pourraient être persécutés en les renvoyant dans leur pays d'origine avant que les conditions de la sécurité soient établies là-bas.

L'obligation absolue du pays d'origine de recevoir ses réfugiés 137 (quand ils choisissent d'y retourner) découle directement de la règle traditionnelle de réadmission qui constitue une base du droit international de la nationalité.

Un « droit de retour » résultant d'une expulsion forcée existe dans le droit des réfugiés138; dans le cas où ces derniers ont été expulsés par la force, le « droit au retour » découle de l'illégalité de l'expulsion elle-même. Il est généralement reconnu qu'un Etat ne peut légalement expulser une population sous son contrôle ; les expulsés ont clairement un droit de renverser un acte illégal, tout simplement en retournant dans leur patrie139.

Il est clair (on va le montrer dans le chapitre qui va suivre), que le « droit au retour » des réfugiés dans leurs foyers continue à occuper la place primordiale dans l'hiérarchie des solutions.

Le retour volontaire et le rapatriement ont toujours constitué les objectifs de la politique centrale de toutes les institutions des Nations Unies visant à remédier aux déplacements de masse.

(Ce sujet, ainsi que celui de la pratique des États concernant le retour des réfugiés, seraient traités dans le chapitre suivant).

Au terme de cette section sur le retour des réfugiés palestiniens dans le droit international, il devient évident de noter que le « droit au retour » constitue une norme contraignante du droit international.

137 For detailed elaboration on the obligation of a state of origin to receive back (i.e., implement the right of return of) all those displaced persons whose refugee status was created by the policies of the state of origin, as well as the related obligations of compensation and restitution, see «Declaration of Principles of International Law on Compensation to Refugees,» approved by consensus by the International Law Association (ILA) at its 65th Conference in Cairo in April 1992, text reproduced in ILA, Report of the Sixty-Fifth Conference: Cairo, (1992).

138 Voir, G.J.Boling, «The 1948 Palestinian Refugees and the Individual Right of Return, an International Law Analysis», BADIL, Seconde Edition: Juillet 2007, p.75-77.

139 L. Takkenberg, «The status of palestinian refugees in international law» (1998).

§2- Le «Droit au Retour» comme Expression d'un Droit Politique d'Exercice Collectif.

Les droits de l'homme et les droits des peuples sont dans la plupart des cas indissociables dans leur réalisation concrète. Et le respect des uns conditionne le plus souvent la garantie des autres.

Le droit des peuples est apparu d'abord, au moins dans sa substance en droit international général et en dehors de la problématique coloniale, comme le droit pour une collectivité nationale d'être protégée dans son intégrité en cas de conflits et d'agression ou d'occupation armée par d'autres.

L'autodétermination, initialement appelée droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, est le principe selon lequel chaque peuple dispose d'un choix libre et souverain de déterminer la forme de son régime politique. Le principe a été proclamé, pendant la Première Guerre mondiale, dans les «quatorze points de Wilson»140, légitimant après-guerre les nouvelles frontières de l'Europe. C'est, suivant le droit international, le principe selon lequel un peuple a le droit de déterminer sa propre forme de gouvernement, indépendamment de toute influence étrangère. Il a été réaffirmé, après la Seconde Guerre mondiale, dans la Charte des Nations Unies, signée en 1945, qui inclut, parmi « les buts des Nations Unies », celui de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes »141.

L'article 73 de la Charte des Nations Unies énonce ce qui suit :

« Les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsabilité d'administrer des territoires dont les populations ne s'administrent pas encore complètement elles-mêmes reconnaissent le principe de la primauté des intérêts des habitants de ces territoires. Ils acceptent comme une mission sacrée l'obligation de favoriser dans toute la mesure possible leur prospérité, dans le cadre du système de paix et de sécurité internationale établie par la présente Charte et, à cette fin ils réclament:

1) D'assurer, en respectant la culture des populations en question, leur progrès politique, économique et social, ainsi que le développement de leur instruction, de les traiter avec équité et de les protéger contre les abus;

2) De développer leur capacité de s'administrer elles-mêmes, de tenir compte de leurs aspirations politiques et de les aider dans le développement progressif de leurs libres institutions politiques, dans la mesure appropriée aux conditions particulières de chaque territoire et de ses populations et à leurs degrés variables de développement; enfin

3) D'affermir la paix et la sécurité internationales. »

140 Les quatorze points de Wilson sont le nom donné au programme du Président des Etats-Unis Woodrow Wilson pour mettre fin à la Première Guerre Mondiale et reconstruire l'Europe.

141 Voir, Article 1, alinéa 2.

Le droit à l'autodétermination est alors reconnu de façon indirecte comme étant une obligation pour les puissances mandataires, d'encourager l'autonomie de la population indigene et de tenir compte à juste titre des ambitions politiques des peuples.

L'évolution du droit international offrira un peu plus tard aux palestiniens un soutien plus précis à leur conception collective du « droit au retour ». En effet, à partir des années soixante, tout un corpus de textes vient enrichir le droit des peuples et en détailler le contenu.142

En fait, vue la non-observation de nombreuses résolutions de l'ONU concernant les Palestiniens, l'Assemblée générale a décidé de relier le « droit de retour » au droit fondamental à l'autodétermination. En 1969, elle adoptait une résolution reconnaissant le «peuple de Palestine»143. En 1975, l'Assemblée générale a aussi crée le Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien. Depuis, le droit à l'autodétermination ainsi que tous les droits du peuple palestinien, incluant le « droit de retour », ont été réaffirmés à maintes reprises par la communauté des nations.

L'avis consultatif de la CIJ concernant l'édification du mur144 dans les territoires palestiniens occupés vient s'ajouter dans cette direction ; en fait la cour a considéré que l'édification du mur est une violation au droit des peuples a disposer d'eux-mêmes145 et a toutes les règles pertinentes du droit international, du droit relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire146, insistant que certaines conventions font désormais partie du droit international coutumier147.

142 Le droit à l'indépendance complete et au respect de l'intégrité du territoire national (résolution 1514 de l'assemblée générale qui forme à partir du 14 décembre 1960 la charte de la décolonisation).

Résolution 2625 du 24 octobre 1970.

Déclaration sur le renforcement de la sécurité internationale, du 16 décembre 1970 dans laquelle les Nations Unies demandent aux Etats « de s'abstenir de toute tentative visant à rompre partiellement ou totalement l'unité nationale et l'intégrité territoriale de tout autre Etat ou pays ».

143 Résolution 2535 B (XXIV).

144 Voir, Cour Internationale de Justice, « Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé », Requête pour avis consultatif, (9 juillet 2004).

145 « Quant au principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, la Cour fait observer qu'il a été consacré dans la Charte des Nations Unies et réaffirmé par la résolution 2625 (XXV) de l'Assemblée générale déjà mentionnée, selon laquelle «tout Etat a le devoir de s'abstenir de recourir à toute mesure de coercition qui priverait de leur droit à l'autodétermination les peuples mentionnés dans ladite résolution». L'article 1er commun au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au pacte international relatif aux droits civils et politiques réaffirme le droit de tous les peuples à disposer d'euxmêmes et fait obligation aux Etats parties de faciliter la réalisation de ce droit et de le respecter, conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies. La Cour rappelle sa jurisprudence antérieure, qui soulignait que l'évolution actuelle du droit international à l'égard des territoires non autonomes, tel qu'il est consacré par la Charte des Nations Unies, a fait de l'autodétermination un principe applicable à tous ces territoires, et que le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est un droit opposable erga omnes».

146«(...) Cette interprétation reflète l'intention des auteurs de la quatrième convention de Genève de protéger les personnes civiles se trouvant d'une manière ou d'une autre au pouvoir de la puissance occupante, indépendamment du statut des territoires occupés. (...) Au vu de ce qui précède, la Cour estime que la quatrième convention de Genève est applicable dans les territoires palestiniens qui étaient, avant le conflit de 1967, à l'est de la Ligne verte, et qui ont à l'occasion de ce conflit été occupés par Israël, sans qu'il y ait lieu de rechercher quel était auparavant le statut exact de ces territoires ».

147 « Pour ce qui concerne le droit international humanitaire, la Cour (...) estime que les dispositions du règlement de La Haye de 1907 ont acquis un caractère coutumier, comme d'ailleurs tous les participants à la procédure devant la Cour le reconnaissent. Elle observe en outre que, conformément à l'article 154 de la quatrième convention de Genève, le règlement de La Haye a été complété en ses sections II et III par les dispositions de ladite convention. La section III dudit règlement, qui concerne «l'autorité

Mais les textes les plus explicites sont ceux des Pactes internationaux des Nations Unies du 16 décembre 1966, relatifs respectivement aux droits civils et politiques148 et aux droits économiques, sociaux et culturels149.

En outre, les articles 1 et 12 du Pacte mentionnent respectivement le « droit au retour » et le droit à l'autodétermination des peuples ; ce dernier présentant également un grand intérêt pour le retour dans un pays ou sur un territoire dont le statut est disputé.

En tant qu'instruments conventionnels possédant un caractère obligatoire, les deux Pactes des Nations Unies énoncent en des termes identiques dans leur article premier, le droit à l'autodétermination des peuples.

« Article premier : 1. Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

2. Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance.

3. Les Etats parties au présent Pacte, y compris ceux qui ont la responsabilité d'administrer des territoires non autonomes et des territoires sous tutelle, sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, et de respecter ce droit, conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies ».

Reconnu non à des individus mais à un groupe dénué de personnalité légale, ce droit qui n'a pas de titulaire individuellement identifiable n'est pas cependant en soi un obstacle à la reconnaissance d'obligations à la charge des Etats.

Du reste, le tribunal arbitral constitué dans l'affaire de la détermination de la frontière maritime entre la Guinée-Bissau et le Sénégal,150 a admis, au moins implicitement, le caractère impératif du droit à l'autodétermination des peuples. Après la résolution 181 (II) du 29 novembre 1947, la première résolution de l'Assemblée générale à reconnaître le droit des Palestiniens à l'autodétermination est la résolution 2649 (XXV) du 30 novembre 1970.

C'est en se fondant sur cette règle essentielle du droit international que le peuple palestinien (en tant que collectivité) livre depuis longtemps un combat pour l'application de son droit à l'autodétermination. C'est par cet effort que ce peuple a imposé la reconnaissance de son droit par la Communauté internationale, et même par Israël à partir des accords d'Oslo.

militaire sur le territoire de l'Etat ennemi», est particulièrement pertinente en l'espèce(...) La Cour rappelle que la quatrième convention de Genève a été ratifiée par Israël le 6 juillet 1951 et qu'Israël est partie à cette convention».

148 Le pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) a été adopté à New York le 16 décembre 1966 par l'AGNU. Il est entré en vigueur après la ratification par 35 États le 23 mars 1976. Il est en principe applicable directement par les juridictions des États signataires.

149 Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a été adopté à New York le 16 décembre 1966 par l'AGNU dans sa résolution 2200 A (XXI). Il est entré en vigueur après sa ratification par trente-cinq États le 3 janvier 1976.

150 Sentence du 31 juillet 1989.

Mais la revendication du « Droit au retour » collectif, tire sa complexité notamment au regard des négociations sur un accord de paix. Le processus de paix dans la région ne concerne pas seulement Israël et la Palestine, mais aussi les Etats arabes ; puisque certains de ces pays reçoivent sur leur territoire un nombre parfois très élevé de refugiés palestiniens. (Ce sujet sera traité dans le chapitre consacré au processus de paix)

Section2

Les Résolutions Onusiennes Relatives au «Droit de Retour».

La résolution 181 du 29 novembre 1947151 était le certificat de naissance de l'État d'Israël. Cette résolution prévoyait la création d'un État arabe et d'un État juif en Palestine, elle n'est pas sans relation avec différentes facettes du « droit au retour » puisqu'elle interdit les expropriations de terres des arabes dans l'Etat juif et qu'elle met toutes les personnes relevant de la juridiction de l'Etat sous la protection de la loi.

Suite au déplacement massif de la population palestinienne en 1948, la préoccupation des Nations Unies s'exprime par la voix de son médiateur envoyé sur place: le comte Bernadotte qui met le « droit du retour » au centre de ses préoccupations. Les derniers échos du comte furent transmis le 16 septembre 1948 à l'Assemblée générale, un jour avant son assassinat par des terroristes israéliens du groupe Lehi152: « Il est toutefois indéniable qu'aucun règlement ne serait juste et complet si l'on ne reconnaissait pas aux réfugiés arabes le droit de retourner dans les lieux, que les hasards de la guerre et la stratégie des belligérants en Palestine les avaient contraints à quitter (...) Il convient de proclamer et de rendre effectif le droit des populations innocentes, arrachées à leurs foyers par la terreur et les ravages de la guerre, de retourner chez elles ».

Aussi, a-t-il noté -le comte Bernadotte- dans son rapport d'étape du 16 Septembre 1948, sous le titre: le «droit au rapatriement», qu' « Il convient de proclamer et de rendre effectif le droit des populations innocentes, arrachées à leurs foyers par la terreur et les ravages de la guerre, de retourner chez elles; il convient également d'assurer, pour la perte de leurs biens, des dédommagements suffisants aux personnes qui décideraient de ne pas regagner leurs foyers»153 .

Il a poursuivi en disant, toujours dans le même rapport: Il faudra assurer aux « populations arabes déplacées à la suite des opérations militaires, le droit de rentrer dans leurs foyers (...).

Ce serait offenser les principes élémentaires que d'empêcher ces innocentes victimes du conflit de retourner à leur foyer, alors que les immigrants juifs affluent en Palestine et, de plus, menacent, de façon permanente, de remplacer les réfugiés arabes enracinés dans cette terre depuis des siècles».

151 Autrement connue sous le nom du: Plan de partage de la Palestine.

152 Nommé par les autorités britanniques: la bande de Stern.

153 Document ONU A/648, (21 Sept-12 Déc. 1948).

Bernadotte a demandé à l'ONU d'affirmer le « droit au retour » et non pas l'inventer. Son dernier rapport a consacré une recommandation, son testament politique, qui est devenu le noyau de la fameuse résolution 194 des Nations Unies, adoptée par l'Assemblée générale le 11 Décembre 1948, décide que les réfugiés qui souhaitent rentrer dans leurs foyers et vivre en paix avec leurs voisins devraient être autorisés à le faire le plus tôt possible, et que la compensation doit être réparée par les gouvernements ou autorités responsables, en vertu des principes du droit international et d'équité.

La Résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 11 Décembre 1948 a été adoptée par 35 voix pour, 15 contre et 8 abstentions ; et a été réitérée pratiquement à chaque session de l'Assemblée générale depuis lors.

Par cette résolution, l'Assemblée générale donne aussi naissance à la Commission de conciliation pour la Palestine (CCNUP) qui est chargée « de faciliter le rapatriement, la réinstallation et le relèvement économique et social des réfugiés, ainsi que le paiement des indemnités ».

Quant au Conseil de sécurité, organe principal dans le domaine du maintien de la paix, il est toujours resté en retrait sur cette question. Quasiment silencieux pour les refugiés de 1948, il ne sortira, et faiblement de sa réserve qu'après la guerre de 1967. Alors, par la résolution 237 de juin 1967, il prie les israéliens de faciliter le retour des habitants qui se sont enfuis depuis le déclanchement des hostilités. Quelques mois plus tard, par la résolution 242 du 22 novembre 1967, le conseil affirme la nécessité de réaliser un juste règlement du problème des refugiés, mais il ne va pas plus loin.

Mais jusqu'aux années quatre-vingt, les Nations Unies ont été marquées par un équilibre politique entre le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale, souvent réalisé au profit de cette dernière154.

C'est donc l'Assemblée générale qui, après avoir voté la résolution 194, se trouve confrontée à la persistance du problème et même à son aggravation et se préoccupe de le régler ; elle réaffirma obstinément que le «droit au retour» persiste tant que le retour et l'indemnisation n'auront pas eu lieu. De plus, on trouve une cinquantaine de résolutions allant dans ce sens155, parmi lesquelles la résolution A/RES/51/129 adoptée en décembre 1996 par l'Assemblée générale, qui affirme que « les réfugiés arabes de Palestine ont droit à leurs biens et aux revenus en provenant, conformément aux principes de la justice et de l'équité ». Et aussi, l'Assemblée « prie le Secrétaire général de prendre (...) toutes les mesures appropriées pour protéger et administrer les biens, les avoirs et les droits de propriété arabes en Israël, et de conserver et actualiser les registres existants » ; alors que la résolution 3236, votée en 1974, réaffirme « le droit inaliénable

154 M. Chemillier-Gendreau «Le retour des palestiniens en exil et le droit international», dans « le droit au retour » E.SanbarF.Mardam Bey, Actes sud, (2002), p.305.

155 Résolutions 302, 303 et 309 de 1949, 394 de 1950, 512, 513 et 614 de 1952, 720 A de 1953, 818 de 1954, 916 de 1955, 1018 et 1191 de 1957, 1315 de 1958, 1456 de 1959, 1604 et 1725 de 1961, 1856 de 1962, 1912 de 1963, 2052 de 1965, 2154 de 1966, 2341 de A de 1967, 2452 A, 2452 B, 2535 A de 1968, 2062 A de 1970, 2792 A de 1971, 2963 A de 1972, 3089 B de 1973, 3331 A de 1974, 3419 B de 1975, 31/15 A de 1976, 32/90 A de 1977, 33/112 A de 1978, 34/52 A de 1979, 35/13 de 1980, 36/146 F de 1981, 37/120 de 1982, 38/83 A de 1983, 39/99 A de 1984, 40/165 A de 1985, 41/69 A de 1986, 42/69 A de 1987, 43/57 A de 1988, 44/47 A de 1989, 45/73 A de 1990, 46/46 de 1991, 47/69 A de 1992, 48/40 A de 1993, 49/35 A de 1994.

des Palestiniens de retourner à leurs foyers et leurs propriétés, d'où ils avaient été déplacés et déracinés ".

Quant aux Palestiniens exilés depuis la guerre de 1967, l'Assemblée générale a réaffirmé dans la résolution A/RES/52/59 adoptée en décembre 1997, « le droit de toutes les personnes déplacées du fait des hostilités de juin 1967 et des hostilités postérieures de regagner leurs foyers ou anciens lieux de résidence dans les territoires occupés par Israël depuis 1967 ".

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, en mars 1998, le rapport présenté par Israël. Dans ses conclusions156, le Comité a clairement réaffirmé dans les termes suivants les obligations d'Israël quant au «droit au retour» des Palestiniens : « De nombreux Palestiniens se voient actuellement dénier le droit de rentrer chez eux et de reprendre possession de leur maison en Israël. L'État partie devrait donner un haut rang de priorité au redressement de cette situation. Ceux qui ne peuvent reprendre possession de leur maison devraient avoir droit à réparation ".

Les récentes (2007) observations du Comité des Nations Unies sur l'élimination de la discrimination raciale soulignent la pertinence du paragraphe 11 sur le fait de résoudre la question des réfugiés palestiniens aujourd'hui. Le Comité a réitéré sa préoccupation concernant « le déni du droit de nombreux Palestiniens de revenir et de reprendre possession de leurs terres en Israël " et a appelé Israël à « assurer l'égalité de chacun dans le droit de retour dans son pays et dans la possession de ses biens"157.

§1 La Résolution 194 et le Problème des Réfugiés.

Le document onusien le plus clair et le plus direct qui affirme le « droit au retour " des réfugiés palestiniens, est l'article 11 de la résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations Unies, ratifiée le 11 Décembre 1948.

Cette résolution énonce dans son paragraphe 11 :

« L'Assemblée générale :

11- Décide qu'il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins, et que des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé lorsque, en vertu des principes du droit international ou en équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les gouvernements ou autorités responsables".

Pour certains, et bien que le terme « Droit au Retour " ne soit nulle part mentionné, c'est par cette résolution qu'est consacré pour la première fois au plan international « le droit au retour " des réfugiés palestiniens dans leurs foyers.

156Conclusions du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale : Israel, CERD/C/304/Add.45, (03/30/1998). 157 Ibid, CERD/C/ISR/CO/13, (2007).

La résolution 194 a proposé deux solutions distinctes pour les réfugiés palestiniens déplacés en 1948. D'une part, le retour et l'indemnisation pour les dommages subis, de l'autre, le non-retour et l'indemnisation pour tous les biens laissés et dommages subis.

D'ailleurs, la Résolution 194 identifie très clairement le lieu auquel les réfugiés ont le droit de retourner: dans leurs foyers, non pas dans leur région de provenance; elle affirme ensuite que la décision de retour doit être guidée par le choix individuel de chaque réfugié, et indique le délai dans lequel doit s'effectuer le retour des réfugiés: le plus tôt possible. Elle impose aussi l'obligation, à Israël, de réadmettre les réfugiés. Cette résolution a été écrite pour s'appliquer à tous les réfugiés palestiniens. Depuis 1948, l'Assemblé générale des Nations Unies a rappelé et réaffirmé chaque année la résolution 194. L'admission d'Israël au sein de l'ONU était conditionnelle au respect de la résolution 194; ce qui signifie que l'AG considère qu'Israël est entièrement responsable de s'assurer que le « droit de retour » des réfugiés palestiniens soit correctement exercé.

La résolution194, paragraphe 11, sous-paragraphe 1, par ses termes exprès, identifie trois droits distincts que les réfugiés palestiniens ont le droit d'exercer en vertu du droit international, le retour, la restitution et l'indemnisation. Elle affirme en outre que les réfugiés qui choisissent de ne pas exercer leur droit au retour ont droit à la réinstallation et à recevoir une compensation pour leurs pertes. Le paragraphe 11, le sous-paragraphe 2, charge la CCNUP de faciliter la mise en oeuvre d'un ensemble de solutions à la situation des réfugiés ; il s'agit du rapatriement, de la réinstallation, de l'indemnisation et de la réhabilitation économique et sociale.

Plusieurs principes sont pertinents pour la mise en oeuvre du «droit au retour» comme défini dans la résolution 194. Premièrement, la résolution indique clairement l'endroit exact où les réfugiés ont le droit de retour (à savoir, dans leurs foyers). L'historique de la rédaction de cette disposition158 est instructif, en choisissant le terme « chez eux » le Secrétariat de l'ONU a déclaré que l'Assemblée générale a clairement signifié le retour de chaque réfugié spécifiquement à « sa maison ou logement et non pas (en général) à sa patrie »159. L'Assemblée générale a rejeté les amendements qui on parlés plus généralement « des zones desquelles ils (les réfugiés) sont venus ».

Deuxièmement, la résolution affirme que le retour doit être guidé par le choix individuel de chaque réfugié ; selon le rapport du médiateur de l'ONU, c'était un "droit inconditionnel" des réfugiés « de faire un choix libre qui doit être pleinement respecté »160.

En revoyant l'histoire de rédaction de la résolution 194, le Secrétariat de l'ONU a déclaré que le
paragraphe 11 "visait de conférer aux réfugiés, en tant que personnes, le droit d'exercer un libre
choix quant à leur avenir". Le conseiller juridique à la Mission d'enquête économique de l'ONU

158 Voir à ce sujet, par exemple : UN Doc. A/AC.25/W.45, «Analysis of paragraph 11 of the General Assembly's Resolution of 11 December 1948», (15 May 1950), Part One, paragraph 3: «According to the above interpretation the term «refugees» applies to all persons, Arabs, Jews and others who have been displaced from their homes in Palestine. This would include Arabs in Israel who have been shifted from their normal places of residence».

159 «Analysis of Paragraph 11 of the General Assembly Resolution of 11 December 1948», United Nations Conciliation Commission for Palestine, Working Paper Prepared by the U.N. Secretariat, U.N. Doc. A/AC.25/W.45, (15 May 1950).

160 Voir, «Mediator's Progress Report», part I («The Mediation Effort»), sect. V («Refugees»), subsection 8.

est arrivé à la même conclusion: «Le verbe «choisir» indique que l'Assemblée générale suppose que le principe (celui du « droit au retour ») serait pleinement appliqué et que tous les réfugiés auront le libre choix quant à savoir s'ils souhaitent ou non rentrer chez eux »161

Le principe du choix du réfugié a aussi été incorporé dans le mandat de l'Organisation Internationale pour les Réfugiés, créée en 1947 pour faciliter les solutions pour les réfugiés de la Seconde Guerre mondiale en Europe, et serait par la suite devenu un principe clé des solutions durables aux flux de réfugiés.

Troisièmement, la résolution 194 identifie le délai pour le retour des réfugiés: "le plus tôt possible".

Quatrièmement, la même résolution impose une obligation à Israël d'admettre à nouveau les réfugiés palestiniens. Le Secrétariat de l'ONU a estimé qu'Israël était tenu en vertu des dispositions de la résolution 194 de créer les conditions qui faciliteraient le retour des réfugiés. Examinant la signification de la phrase qui stipule que les réfugiés souhaitant rentrer dans leurs foyers « devraient être autorisées à le faire », le Secrétariat des Nations Unies a noté que l'injonction a imposé une obligation « d'assurer le retour en paix des réfugiés et leur protection contre tous les éléments qui cherchent à perturber cette paix »162.

Finalement, l'importance de la résolution 194 (III), paragraphe 11, est qu'elle nous ramène aux premieres règles qui constituent les fondements d'une solution basée sur les principes universels d'égalité et des droits et libertés fondamentaux.

§2-Dans quelle Mesure l'Application du «Droit au Retour » est elle Contraignante ?

La force contraignante du droit au retour diffère suivant sa source. D'une part, il est avancé par les opposants du « droit au retour » que la résolution 194 est une résolution de l'Assemblée générale, plutôt que d'une résolution du Conseil de sécurité (sous le cadre du chapitre VII), dans ce cas, elle est "non contraignante".

La signification exacte et la force coercitive de la résolution 194 a toujours été contestée. Il y a ceux qui considèrent qu'elle constitue une opinio juris, du fait de sa continuelle réaffirmation, tandis que d'autres insistent qu'elle soit dénuée de toute force contraignante.

C'est vrai que les résolutions de l'AGNU n'imposent pas d'obligations aux Membres, plutôt elles les invitent, les incitent, les encouragent à faire telle ou telle chose sans rien leur imposer, puisqu'elles n'ont pas de force coercitive. Mais cela n'empêche pas qu'Israël soit moralement et éthiquement tenue d'appliquer le 194. Toutefois, cette résolution réaffirmée par l'AGNU et le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale des dizaines de fois, porte son importance dans le fait

161 P. Contini, «Legal Aspects of the Problem of Compensation to Palestine Refugees», attached to Letter and Memorandum, Concerning Compensation, United Nations Economic-Survey Mission for the Middle East, UNCCP, U.N. Doc. W/32, 19 (January 1950).

162 Voir, «Analysis of paragraph 11 of the General Assembly's Resolution of 11 December 1948», (15 May 1950), Part One, par. 3, UN Doc. A/AC.25/W.45.

qu'elle soit annuellement réaffirmée depuis 1948 par la plupart des membres de l'AGNU (à l'exception d'Israël et des Etats Unis) ; il n'y a rien de tel dans l'histoire des Nations Unies. Ce consensus universel élève le poids de la présente résolution d'une « recommandation » à une expression de la volonté internationale.

Donc, cette unanimité est en fait la preuve de l'importance de cette résolution et elle représente la volonté et la détermination de la communauté internationale à affirmer le principe du retour établi dans le droit international coutumier.

De plus, l'admission d'Israël à l'ONU en tant qu'Etat membre, par la résolution 273163 a été conditionnée par son acceptation et sa mise en oeuvre de la résolution 194. Par conséquent, Israël est tenu, comme condition d'adhésion à l'ONU, de mettre en oeuvre le 194 et de faciliter le retour des réfugiés palestiniens.

Il apparaît donc que l'admission d'Israël était liée à sa coopération à l'application du «droit de retour», sachant que le texte de la résolution 273 rappelait la nécessité de mettre en oeuvre les résolutions 181 et 194. Ainsi, la majeure entrave à l'exécution du «droit de retour» est bien l'absence de la volonté d'Israël de reconnaître ce droit.

D'ailleurs, même les résolutions du Conseil de sécurité concernant le conflit israélo palestinien sont traités sous le cadre du chapitre VI de la charte, ce qui prouve que l'ONU n'a jamais cherché à trouver de vraies solutions à ce conflit, surtout que c'est elle qui l'a crée par sa fameuse résolution 181 (celle du partage de la Palestine) et qui, paradoxalement, se trouve être une résolution de l'assemblée générale. Ceci s'applique également à la résolution 273 de l'AGNU du 11 mai 1949 qui a admis Israël à l'ONU. Cela nous indique que ce qui importe c'est la présence d'une réelle volonté de la communauté internationale à mettre en oeuvre les résolutions de l'AGNU et du CSNU, quelle que soit la force contraignante des résolutions de ces derniers.

Mais cela n'empêche pas l'existence de situations, où la CIJ et la pratique des Nations Unies ont confirmé que le Conseil de sécurité peut adopter des décisions contraignantes en dehors du chapitre VII sur la base de ses pouvoirs généraux, en vertu de l'article 24 (2) de la Charte164.

Le caractère contraignant de ces résolutions découle d'un certain nombre de facteurs: elles peuvent être déclaratoires des règles existantes de droit international, elles peuvent contenir des décisions de droit quasi-judiciaire, ou bien la terminologie utilisée peut être la preuve de leur caractère obligatoire165.

Dans une autre perspective, Israël est tenu de mettre en oeuvre le « droit de retour » dans le cas des réfugiés palestiniens comme une question d'obligation de respecter les traités qu'elle a

163 Résolution 273 (III), Assemblée générale, (11 mai 1949).

164 Voir, » avis consultatif de la CIJ sur les conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie » (Sud-ouest africain), la résolution 276, (l970).

165 Voir, V.Gowland-Debbas, «The Security Council and the question of Palestine» dans «Le Liban au conseil de Sécurité, Nouvel Acteur, Ancien Sujet», F.Fadel- C.Eid, Université Antonine, (2010).

ratifié166, tout en étant liée en général, comme tous les autres Etats, par le statut coutumier général du « droit de retour »167 en matière des droits de l'homme, du droit humanitaire, des lois de la nationalité et du droit des réfugiés.

Par conséquent, la résolution 194 (et donc le « droit au retour ») est entièrement réalisable sur la base du droit international coutumier et conventionnel.

166 Ex : La Convention de 1907166 de La Haye (IV) et ses règlements annexés; La 4eme Convention de Genève ; Le PIDCP et plus précisément en vertu de son article 12 (4).

167 On rappelle que le droit coutumier est une source contraignante du droit international ; ce dernier ayant sa source dans le droit des traités (ou « droit conventionnel »), mais aussi dans le droit international coutumier qui découle d'une pratique générale, acceptée comme « étant le droit » et possède donc un caractère contraignant, par exemple, le Statut de la Cour internationale de Justice dispose dans son article 38 :

« 1. La Cour, dont la mission est de régler conformément au droit international les différends qui lui sont soumis, applique :

a. les conventions internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles expressément reconnues par les Etats en litige;

b. la coutume internationale comme preuve d'une pratique générale acceptée comme étant le droit;

c. les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées;

d. sous réserve de la disposition de l'Article 59, les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de détermination des règles de droit.

2. La présente disposition ne porte pas atteinte à la faculté pour la Cour, si les parties sont d'accord, de statuer ex aequo et bono ». Le fait que le droit international coutumier soit appliqué par les cours et tribunaux nationaux et internationaux constitue une illustration de son caractère contraignant.

DEUXIÈME PARTIE :

Faire du « Droit au Retour » une Réalité Concrète.

Deuxième partie

Faire du « Droit au Retour » une Réalité Concrète.

Après avoir fourni un bref aperçu sur les organisations onusiennes concernées par le cas palestinien et après avoir analysé le cadre juridique du « Droit au retour », on présente dans cette partie un certain nombre de questions de fond qui sont essentielles dans la compréhension du contexte plus large de cette étude.

Est-ce que la question des réfugiés palestiniens est elle unique ?

Sinon, dans quelle mesure ces derniers peuvent-ils profiter de la pratique internationale sur le retour ?

Où se situe la question des exilés par rapport à l'accord de paix israélo-palestinien ?

Et finalement, est-ce qu'une solution juste et globale à cette question est un mythe ou une réalité ?

Pour pouvoir traiter ces questions, on a divisé cette partie en deux chapitres. Dans le premier, on traitera les principales tendances sur le retour des réfugiés dans la pratique internationale et sa pertinence par rapport à la question des réfugiés palestiniens. On examinera ensuite la façon dont la question des refugiés a été traitée dans le processus de paix israélo-palestinien, avant de rechercher des solutions durables à ce problème.

Chapitre 1

Le Retour des Réfugiés dans la Pratique Internationale.

Le « droit de retour " est l'un des droits les plus fondamentaux accordés aux personnes déplacées dans le monde entier et qui est ancré dans plusieurs organes du droit international. Historiquement, il a été démontré que le succès des accords de paix et de sécurité dans les zones post-conflictuelles est inextricablement lié au retour des personnes déplacées et des réfugiés dans leurs foyers d'origine.

Un bref examen de la résolution des conflits à travers le monde, montre l'importance de ce principe et de l'argument selon lequel aucun accord de paix au Moyen-Orient ne sera efficace sans la mise en oeuvre concrete du « droit au retour " des refugiés palestiniens.

Notre objectif dans ce chapitre est d'examiner la pratique internationale dans le retour volontaire et la mesure dans laquelle cette pratique serait utile à la cause palestinienne.

Le chapitre est divisé en deux sections principales : la première section examine les principales tendances du retour des réfugiés dans le monde, tandis que la deuxième section se concentre sur les leçons tirées de cette pratique et la possibilité de leur application au cas palestinien ; mais cela après avoir examiné dans quelle mesure le cas palestinien est unique.

Section I

Les Principales Tendances dans l'Élaboration de Solutions Durables pour les Réfugiés dans le Monde.

§1- Le Retour des Réfugiés : La Solution Durable Préférée.

En dépit de sa classification par le HCR comme étant l'une des trois « solutions durables ", le retour des réfugiés n'a pas toujours été une priorité au niveau international. En effet, entre l'achèvement de la Seconde Guerre Mondiale et la fin des années 1980, les principaux partisans du régime international des réfugiés ont rarement considéré comme important le retour des réfugiés168. Le rapatriement169 était incompatible avec les objectifs de la politique étrangère et les réfugiés ont souvent été des pions dans les guerres par procuration des superpuissances, comme le cas des réfugiés afghans utilisés par les États-Unis contre l'ex-Union Soviétique.

L'accent mis sur le droit de quitter son pays plutôt que sur le droit d'y retourner était dü en partie à la nature de la guerre froide : lorsque les réfugiés, la plupart d'entre eux provenant de pays communistes, étaient pratiquement incapables de revenir à leur pays.

168 B.S. Chimni, «From Resettlement to Involuntary Repatriation: Towards a Critical History of Durable Solutions to Refugee Problems, New Issues in Refugee Research», Working Paper No. 2, UNHCR, Geneva, (1999).

169 Dans cette étude, quant on parle de « rapatriement " et de « retour » c'est pour les considérer comme étant un seul corpus de solutions durables.

Il est nécessaire de préciser que le « rapatriement " est considéré comme le retour dans son pays, alors que « le retour" est généralement conçu comme le retour dans son foyer.

Les pays d'accueil ont souvent considéré la présence de ces réfugiés comme un signe de l'échec des Etats communistes, un signe qu'ils étaient heureux d'encourager et de soutenir. Dans ce contexte, les intérêts idéologiques de l'Occident étaient que l'intégration locale dans les pays d'accueil en Europe, ou la réinstallation dans l'Amérique du Nord, sont généralement des options plus attrayantes ; les pénuries de la main d'oeuvre a aussi influencé les attitudes des pays d'accueil170, avec comme résultat, la tendance des politiques publiques à se concentrer sur l'intégration ou l'assimilation plutôt que sur la promotion du retour.

Jusqu'en 1989, la réinstallation était communément prise pour la seule solution durable acceptable. Dans la pratique, la promesse virtuelle de la réinstallation encourage de nouveaux exodes.

Quand la guerre froide a pris fin, la situation a radicalement changé avec les changements géopolitiques des années 1990, le rapatriement des réfugiés fut considéré comme à la fois nécessaire et compatible avec d'autres efforts internationaux visant à promouvoir la paix postconflictuelle, la réconciliation et le développement. En outre, pour de grands groupes de réfugiés qui avaient passé une décennie ou plus dans des camps et avaient peu d'espoir d'obtenir des droits de la citoyenneté ailleurs, le rapatriement vers le pays d'origine est devenu la seule solution viable. Le Haut Commissaire Sadako Ogata171 a réitéré le message à plusieurs reprises, comme par exemple à l'Université de Notre Dame, le 14 Septembre 1991:

« Pour le HCR le rapatriement volontaire des réfugiés n'est pas seulement la solution la plus réaliste, mais aussi la plus souhaitable. Dans un monde où la plupart des réfugiés sont confinés dans des camps de fortune surpeuplés, dans des conditions aussi lamentables (ci ce n'est plus) que la situation qu'ils ont fuie, le droit de revenir dans son pays est aussi important que le droit de chercher asile à l'étranger ».

La fin de la guerre froide a également créé un « dividende de la paix », qui a ouvert de nouvelles possibilités pour le retour. De 1989 à 1992, l'ONU a lancé des opérations de maintien de la paix beaucoup plus que dans ses précédents 43 ans172.

Le HCR, ainsi que la communauté internationale ont considéré les années 1990, comme la décennie du rapatriement volontaire. Des opérations complexes de grandes envergure ont eu lieu partout dans le monde dans des pays comme le Cambodge, le Mozambique, le Rwanda, la Bosnie-Herzégovine, le Guatemala et autres.

Dans les quelques années entre le retour des réfugiés en Namibie en 1989 et le retour en Mozambique en 1993-94, le rôle du HCR dans les opérations de rapatriement a profondément changé. Au cours des décennies précédentes, l'engagement du HCR dans les opérations de retour a été généralement de courte durée et à petite échelle et l'organisation se concentrait

170 Ibid.

171 Sadako Ogata a servi comme Haut Commissaire du HCR de 1991 à 2000.

172 R. Black- S. Gent, «Working Paper, Defining, Measuring and Influencing Sustainable Return: The Case of the Balkans», Sussex Centre for Migration Research, (December 2004), p.5.

principalement à assurer le retour sain et sauf des réfugiés. Les opérations de rapatriement en Amérique centrale, au Cambodge et au Mozambique ont impliqué une approche nouvelle et plus large. Dans chaque cas, le HCR a joué un rôle majeur dans les opérations de consolidation de la paix des Nations Unies. Le rapatriement humanitaire et la consolidation de la paix se sont intégrés dans un large cadre stratégique et politique visant à assurer la réconciliation, la réinsertion et la reconstruction173. Cela a conduit le Haut Commissaire pour les réfugiés, Sadako Ogata, de prévoir que, dès 1992 il aurait une « décennie de rapatriement ».

Le retour n'était pas seulement considéré comme une solution pour les réfugiés individuels, mais comme un pilier central de processus de paix tel qu'ils ont évolué pendant cette période. La majorité de ces mouvements de retour ont été effectués en Afrique.

Pendant la majeure partie des années 1980, le HCR n'a consacré que 2 pour cent de son budget aux activités de rapatriement. Entre 1990 et 1997174, cependant, le HCR a canalisé environ 14 pour cent de son budget aux activités liées aux retours.

Les dépenses pour les activités de réintégration ont presque doublé entre 1994 et 1996. En général, pour la communauté internationale, les avantages tirés des programmes de retour de haut niveau sont que ces derniers permettent de valider les régimes post-conflictuels, qui de plus en plus ont été portés au pouvoir par une coalition internationale ou des acteurs internationaux. Ainsi, le retour vise à inspirer confiance au public et aux donateurs dans le programme de reconstruction et de consolidation de la paix175. En revanche, la persistance d'un nombre important de réfugiés représente un obstacle à la légitimité des Etats post-conflictuels176.

L'hypothèse que le « droit au retour » des réfugiés soit un principe établi et universellement reconnu du droit international, et qu'il soit lié aux foyers et aux biens177, a servi de base pour une grande partie du discours des Etats-Unis, de l'OTAN, et de l'ONU pendant le conflit du Kosovo en 1999. En effet, ce conflit semble avoir été une réaffirmation massive du « droit au retour » comme principe général du droit international, et même un casus belli178 valable pour l'``intervention humanitaire» dans les affaires intérieures d'Etats souverains, tout en étant lié particulièrement a des droits de propriété.

173 UNHCR, «The state of the world's refugees: Fifty years of humanitarian action», Oxford: Oxford University Press, (2000).

174 J. Crisp, «Mind the gap: Humanitarian assistance, the development process and UNHCR», International Migration Review, Vol. 35, (2001), p.8.

«While the available statistics are not totally reliable, it would appear that the proportion of UNHCR funding spent on repatriation-related activities increased from an average of just two per cent of the organization's total budget prior to 1984 to some 14 per cent in the period 1990-1997. In 1996, UNHCR allocated some $214 million to reintegration programs, almost twice as much as its expenditure in 1994».

175 UNHCR, «The State of the World's Refugees», Geneva: UNHCR, (1997), p.162.

176 R. Black - K. Koser, «The End of the Refugee Cycle? Refugee Repatriation and Reconstruction», Oxford: Berghahn, (1999), p.5.

177 Non seulement à un pays ou territoire.

178 Casus belli est une locution latine signifiant littéralement « Cas de guerre ». Des évènements violents, fortuits ou provoqués ont souvent été utilisés par les nations, pour justifier, par la voie d'une propagande, leur initiative d'un conflit armé ouvert, présentée comme une riposte globale nécessaire, et ce, à l'encontre d'un pays tiers ou d'un adversaire politique intérieur, rendu responsable et coupable de casus belli.

Au cours de la crise du Kosovo, le 6 avril 1999, l'ancien président américain Bill Clinton a déclaré « Nous ne pouvons pas dire : nous allons prendre tous ces gens et oublier leurs droits à rentrer à leurs foyers. Les réfugiés appartiennent à leur propre domicile situé sur leur propre terre. Notre objectif immédiat est de fournir des secours. Notre objectif à long terme est de leur donner leur droit au retour ».

Des sentiments similaires ont été exprimés par le Premier ministre britannique Tony Blair le 19 mai 1999, qui a dit:« Ces gens ont été chassés de leurs foyers et leur patrie. Notre mission est très simple et très claire : celle de nous assurer qu'ils retournent chez eux et qu'ils soient capables de vivre dans la paix et la sécurité comme devrait être le droit de tout être humain civilisé ».

Le porte-parole de l'OTAN, Jamie Shea, a déclaré aux journalistes lors d'une réunion le 24 avril 1999, « ce qui est absolument clair sont nos conditions préalables, essentielles, que nous n'allons pas négocier, et qui sont le droit au retour des réfugiés, l'accès aux organisations humanitaires, le retrait des forces serbes, le déploiement d'une force internationale très robuste, et un processus politique ». Le 5 avril 1999, Shea a déclaré à la presse : « La chose la plus importante est qu'à la fin de la journée ces gens devront être en mesure d'exercer leur droit au retour ».

Les fonctionnaires humanitaires des Nations Unies ont convenu avec les dirigeants politiques et militaires que le « droit au retour » est un aspect fondamental du droit international des droits de l'homme comme en témoigne la crise au Kosovo. Le 19 avril 1999, Dennis McNamara (directeur de la protection au HCR) a dit du conflit du Kosovo, « Les droits de l'homme ont été au coeur de l'exode, le droit d'asile a été crucial pour sauver des milliers de vies, et le droit au retour devrait être honoré pour toute solution durable qui serait atteinte ».

Ainsi, une fameuse transformation de perspectives s'est accomplie, puisque on est passé d'une riposte essentiellement humanitaire au problème du retour volontaire, à une approche qui met l'accent sur les droits qui sont en jeu pendant et après le retour. Cette démarche est de plus en plus associée au principe de la justice réparatrice, elle perçoit la restitution comme un moyen de recours qui favorise le choix d'une solution durable par les réfugiés.

Ce changement a profondément modifié la dynamique du retour et du rapatriement librement consenti, ainsi que la façon dont la communauté internationale et les acteurs locaux s'impliquent dans ces processus. « Ce ne sont pas uniquement des changements de nature politique ou humanitaire, et c'est là un point important : cette évolution s'est progressivement traduite dans les lois et les autres instruments nationaux, régionaux et internationaux qui reconnaissent la restitution des logements et des biens comme un droit fondamental, autonome, interdépendant avec un ensemble d'autres droits qui y sont reliés (...) A propos de la restitution, les principes fondamentaux disposent que «La restitution devrait, dans la mesure du possible, rétablir la victime dans la situation originale qui existait avant que les violations flagrantes du droit international des droits de l'homme, ou les violations graves du droit international humanitaire ne se fussent produites. La restitution comprend, selon qu'il convient, la restauration de la

liberté, la jouissance des droits de l'homme, de l'identité, de la vie de famille et de la citoyenneté, le retour sur le lieu de résidence et la restitution de l'emploi et des biens» »179.

§2- Le Retour des Réfugiés: L'Élément-clé de toutes les Conventions et Résolutions Internationales.

Le HCR a identifié trois solutions durables aux problèmes des réfugiés, l'intégration dans le pays hôte, la réinstallation dans un pays tiers, et le retour volontaire au pays d'origine180.

Le « droit de retour » est désormais compris comme englobant non seulement le retour dans son pays, mais aussi dans son foyer. En fait, le droit des réfugiés et des personnes déplacées de regagner leur foyer, est reconnu par la communauté internationale comme étant, en soi, un droit distinct et autonome181, ce qui est étonnamment similaire à la façon dont le «droit au retour» est formulé dans la Résolution 194 de l'AGNU.

«En 1980, l'Assemblée générale, dans sa résolution 35/124 relative à la coopération internationale qui vise à éviter de nouveaux courants de réfugiés, a réaffirmé « le droit des réfugiés de regagner leur foyer dans leur patrie ». C'est là un élément important pour la réussite des efforts visant à protéger efficacement le « droit au retour » des réfugiés et des personnes déplacées et à améliorer les situations qui sont sources d'instabilité et de déplacement.

L'Organisation des Nations Unies a par ailleurs systématiquement réaffirmé ce principe à propos de cas spécifiques de déplacements. C'est ainsi que le Conseil de sécurité, dans sa résolution 820 concernant la Bosnie-Herzégovine, adoptée le 17 avril 1993, a réaffirmé que « Toutes les personnes déplacées ont le droit de rentrer en paix dans leurs anciens foyers et devraient recevoir une assistance à cette fin ».

Le Conseil de sécurité a réaffirmé en des termes analogues le droit de regagner son foyer dans
les résolutions qu'il a adoptées, concernant les personnes déplacées dans de nombreux pays et

179« Manuel sur la restitution des logements et des biens des réfugiés et personnes déplacées», (Pour la mise en oeuvre des «Principes Pinheiro» ), de l'OCHA (OCHA/IDD), UN Habitat, le UNHCR, la FAO, le HCDH, le Conseil norvégien pour les Réfugiés (NRC) et l'Observatoire des situations de déplacement interne (IDMC),( Mars 2007), p.10.

180 UNHCR EXCOM Conclusion No. 56, «Durable solutions and refugee protection», (13 October 1989).

181 Security Council resolutions 1287 (2000) (reaffirming the right of all refugees and displaced persons ... to return to their homes in secure conditions), 1244 (1999) (reaffirming the right of all refugees and displaced persons to return to their homes in safety), 1999 (1998) (reaffirming the right of all refugees and displaced persons to return to their homes in safety), 1036 (1996) (reaffirming the right of all refugees and displaced persons ... to return to their homes in secure conditions), 971 (1995) (reaffirming the right of all refugees and displaced persons ... to return to their homes in secure conditions), 876 (1993) (affirming the right of refugees and displaced persons to return to their homes), 820 (1993) (reaffirming ... that all displaced persons have the right to return in peace to their former homes and should be assisted in doing so); General Assembly resolutions 51/126 (reaffirming the right of all persons displaced ... to return to their homes or former places of residence), 35/124 (reaffirming the right of refugees to return to their homes in their homelands); Sub-Commission on the Prevention of Discrimination and Protection of Minorities resolutions 1998/26 (reaffirming the right of all refugees ... and internally displaced persons to return to their homes and places of habitual residence in their country and/or place of origin), 1994/24 (affirming the right of refugees and displaced persons to return, in safety and dignity, to their country and/or within it, to their place of origin or choice); Committee on the Elimination of Racial Discrimination, General Recommendation XXII on refugees and displaced persons, (forty-ninth session) (A/51/18) (reaffirming that all ... refugees and displaced persons have the right freely to return to their homes of origin under conditions of safety).

régions, dont l'Abkhazie, la République de Géorgie182, l'Azerbaïdjan183, la BosnieHerzégovine184, le Cambodge185, la Croatie186, l'île de Chypre187, le Kosovo188, le Koweït189, la Namibie190 et le Tadjikistan191.

D'autres organismes des Nations Unies ont eux aussi réaffirmé ce droit. L'Assemblée générale a ainsi réaffirmé ou reconnu le droit des personnes déplacées de regagner leur foyer non seulement dans la résolution 35/124 mentionnée ci-dessus, mais dans des résolutions concernant l'Algérie192, l'île de Chypre193, la Palestine194et le Rwanda195.» 196

Dans le contexte du conflit en Bosnie et en Croatie, le Conseil de sécurité a publié les résolutions suivantes, affirmant l'existence d'un « droit au retour »:

· Résolution 1145197 (1997) du Conseil de sécurité: réaffirme le droit, de tous les réfugiés et personnes déplacées originaires de la République de Croatie, de retourner dans leurs foyers d'origine dans la République de Croatie.

· La résolution 1088198 (1996) du Conseil de sécurité: félicite l'engagement des parties aux droits de tous les réfugiés et personnes déplacées de retourner dans leurs foyers d'origine en toute sécurité.

· La résolution 1079 199 (1996) du Conseil de sécurité: réaffirme le droit de toutes les personnes originaires de la République de Croatie de retourner dans leurs foyers d'origine à travers la République de Croatie.

· La résolution 1019200 (1996) : exige que le gouvernement de la Croatie respecte les droits de la population serbe locale, y compris leur droit de rester (en) ou de retourner (dans leurs foyers d'origine) en matière de sécurité.

182 Résolutions 1287(2000), 1036 (1996), 971 (1995) et 876 (1993) du CSNU.

183 Résolution 853 du CSNU (1993).

184 Résolution 752 du CSNU (1992).

185 Résolution 745 du CSNU (1992).

186 Résolution 1009 du CSNU (1995).

187 Résolution 361 du CSNU (1974).

188 Résolutions 1244 (1999) et 1199 (1998) du CSNU.

189 Résolution 687 du CSNU (1991).

190 Résolution 385 du CSNU (1976).

191 Résolution 999 du CSNU (1995).

192 Résolution 1672 de l'AGNU (1961).

193 Résolution 3212 du l'AGNU (1974).

194 Résolutions 126 et 194 de l'AGNU (1948).

195 Résolution 51/114 de l'AGNU (1997).

196 Voir, Commission des Droits de l'Homme, Sous-commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme, Cinquante-quatrième session, «Droits Économiques, Sociaux et Culturels : Restitution des biens des réfugiés ou des personnes déplacées », 12 juin 2002, E/CN.4/Sub.2/2002/17.

197 Résolution 1145 du CSNU (1997).

198 Résolution 1088 du CSNU (1996).

199 Résolution 1079 du CSNU (1996).

200 Résolution 1019 du CSNU (1995).


· La résolution 947 (1994) du Conseil de sécurité: affirme le droit de toutes les personnes déplacées de rentrer volontairement dans leurs foyers d'origine dans la sécurité et la dignité avec l'aide de la communauté internationale.

· La résolution 820201 (1993) du Conseil de Sécurité : réaffirme une fois encore que toute acquisition de territoire par la force ou toute pratique de purification ethnique est illégale et inacceptable, insistant sur le fait que toutes les personnes déplacées ont le droit de rentrer en paix dans leurs anciens foyers.

De même, dans le cas du conflit en Géorgie, le Conseil de sécurité a de nouveau confirmé le droit des réfugiés de retourner dans leurs foyers d'origine. Dans une ressemblance plus forte à un autre aspect important de la résolution 194, le Conseil de sécurité a expressément déclaré que dans le cas de la Géorgie, le droit des réfugiés au retour est indépendant de toute solution politique définitive (et donc ne pouvait pas être conditionné par des exigences politiques faites par l'une des parties au conflit).

· La résolution 1097202 (1996) du Conseil de sécurité : réaffirme le droit de tous les réfugiés et personnes déplacées touchés par le conflit, de retourner dans leurs foyers conformément au droit international et a souligné le caractère inacceptable de tout lien avec le retour des réfugiés et des personnes déplacées et la question du statut politique de l'Abkhazie, en Géorgie.

Une autre forte ressemblance à la résolution 194 est le cas de la Namibie, où le Conseil de sécurité a affirmé le « droit de retour » des Namibiens, encore une fois indépendamment de toute solution politique, le proclamant ainsi comme un droit absolu qui ne saurait être subordonnée à des considérations politiques.

· La résolution 385203 (1977) du Conseil de sécurité : indique que le rapatriement des Namibiens devrait être mis en oeuvre par l'Afrique du Sud "en attendant le transfert du pouvoir" sans attendre un règlement politique.

Enfin, dans un autre cas parallèle très important pour le cas palestinien, tant dans la Bosnie qu'au Kosovo, dans les opérations de retour mises au point par la communauté internationale, les droits individuels et collectifs ont été conjointement protégés. Dans ces deux pays, les droits collectifs à une entité indépendante ou un Etat ont été conservés, ainsi qu'un mécanisme pour les réfugiés individuels à faire valoir leurs droits à être rapatriés et à obtenir restitution et/ou compensation. Chacune de ces situations en cause a impliqué la création de commissions de réclamations dans le cadre d'un règlement négocié, mais le droit de l'individu à faire valoir sa demande a été conservé indépendamment de la question de l'autodétermination204.

201 Résolution 820 du CSNU (1993).

202 Résolution 1097 du CSNU (1996).

203 Résolution 385 du CSNU (1977).

En effet, la restitution des logements et des biens doit être considérée comme un important élément de la mise en oeuvre du droit de réintégrer son foyer. Aussi, dans le cadre du droit international relatif aux droits de l'homme, le droit à la restitution des logements et des biens est reconnu comme une composante essentielle du « droit au retour » des réfugiés et des personnes déplacées205.

Le droit à la restitution des logements et des biens a également été reconnu et invoqué dans plusieurs accords visant à mettre fin à un conflit, notamment ceux portant sur le retour des personnes déplacées en Bosnie-Herzégovine206, au Cambodge207, au Guatemala208, au Kosovo209, au Mozambique210 et au Rwanda211.

Plusieurs pays, dont la Bosnie-Herzégovine212, la Bulgarie213, la République tchèque214, l'Estonie215, l'Allemagne216, le Rwanda217, la Slovénie218, l'Afrique du Sud219et le Tadjikistan220, ont inscrit le droit à la restitution des logements dans leur Constitution ou dans leur législation nationale. Ces initiatives sont autant d'exemples de la façon dont des mécanismes en matière de logement et de biens peuvent être créés et appliqués pour faire face à des situations spécifiques.

204 S. Akram - T. Rempel, «Recommendations for Durable Solutions for Palestinian Refugees: A Challenge to the Oslo Framework,» Palestine Yearbook of International Law, (2000-2001).

205 S. Leckie, «Housing and property issues for refugees and internally displaced persons in the context of return: key considerations for UNHCR policy and practice», Refugee Survey Quarterly, vol. 19, No. 3, Geneva, UNHCR (2000).

206 General Framework Agreement for Peace in Bosnia and Herzegovina, Annex 7, Agreement on Refugees and Displaced Persons.

207 Voir, Les Accords du règlement politique global du Conflit au Cambodge (1991).

208 Voir, Accord sur l'identité et les droits des peuples autochtones (Processus de Paix au Guatemala) (31 Mars 1995); Accord sur la réinstallation des populations déracinées par le conflit armé (17 Juin 1994).

209 United Nations Interim Administration in Kosovo (UNMIK) Regulation No. 1999/23 (on the establishment of the Housing and Property Directorate and the Housing and Property Claims Commission) (15 November 1999).

210 General Peace Agreement (4 October 1992), Protocol III, Section IV; Tripartite Agreement between the Government of the Republic of Mozambique, the Government of Zimbabwe and UNHCR for the Voluntary Repatriation of Mozambican Refugees from Zimbabwe (1993).

211 Voir Accord de Paix en Arusha (Aout 1993).

212 Law on the Cessation of the Application of the Law on Temporarily Abandoned Real Property Owned by Citizens (3 April 1998) (Federation of Bosnia and Herzegovina); Law on the Cessation of The Application of the Law on Abandoned Apartments (1998) (Federation of Bosnia and Herzegovina); Law on the Taking Over of the Law on Housing relations (Federation of Bosnia and Herzegovina); Law Amending the Law on the Sale of Apartments with Occupancy Rights (6 December 1997) (Federation of Bosnia and Herzegovina); Law on the Cessation of the Application of the Law on the Use of Abandoned Property (2 December 1998) (Republika Srpska).

213 Voir, Restitution on Ownership of Nationalized Real Property Act of 1992.

214 Voir, Law No. 116/1994 Coll.; Law No. 87/1991 Coll.

215 Law on the Fundamentals of Ownership Reform of 1991, as amended in 1993; Land Reform Act of 1991, as amended in 1993.

216 Federal Restitution Law of 1957; German Act Regulating Unresolved Property of 1990.

217 Voir, Ministerial Order No. 01/96 of 23 September 1996 Regarding the Temporary Management of Land Property.

218 Loi de dénationalisation (1991, telle que modifiée en 1998).

219 Constitution of the Republic of South Africa, art. 25 (1996); Restitution of Land Rights Act 22 of 1994.

220 Special Law on the Return of Illegally Occupied Houses; Law of the Republic of Tajikistan on Forced Migrants (20 July 1994); Resolution No. 542 of 22 August 1995 on Additional Measures Facilitating the Return of Refugees-Citizens of the Republic of Tajikistan and Forced Migrants to the Places of Permanent Residence and Their Social and Legal Protection.

§3- L'Étroite Relation entre le Retour des Réfugiés et un Accord de Paix Réussi.

La pratique internationale a établi que l'aboutissement a un accord de paix juste et durable est incontestablement associé au « droit de retour » des personnes déplacées et des réfugiés dans leurs foyers d'origine.

Dans les dernières décennies, presque tous les grands accords de paix dans les zones conflictuelles où il y a eu des déplacements massifs des populations, ont inclu des dispositions relatives au retour des réfugiés et des personnes déplacées, qui ont été fondées sur le droit international.

Pendant les années 1990, environ 12 millions de réfugiés ont été rapatriés dans le monde entier vers des pays comme l'Angola, la Bosnie-Herzégovine, le Cambodge, l'Éthiopie, le Guatemala, le Mozambique, le Rwanda et l'Afrique du Sud.

Un bref examen de la résolution des conflits dans plusieurs pays va montrer l'importance de ce principe et mettre davantage l'accent sur l'argument selon lequel, aucun accord de paix au Moyen-Orient ne sera efficace sans la mise en oeuvre concrete du « droit au retour » des réfugiés palestiniens.

Ces dernières années, un certain nombre d'accords de paix ont été signés ; ils contiennent des dispositions concernant les droits des réfugiés et des personnes déplacées à retourner dans leurs foyers. Le plus complet est peut-être l'Accord Général pour la paix en Bosnie-Herzégovine221, autrement connu comme l'Accord de paix de Dayton, qui a été signé en décembre 1995. Les arrangements qu'il renferme accordent le droit de reprendre possession des biens perdus pendant le conflit et l'indemnisation. Il constitue également la base pour l'établissement d'un mécanisme global pour l'exercice de ces droits.

Outre l'Accord de paix de Dayton, un certain nombre d'autres accords ont établi des droits similaires. L'accord sur un règlement politique global du conflit au Cambodge, signé en Octobre 1991222, prévoit que des efforts devraient être faits pour créer les conditions nécessaires au retour volontaire et à l'intégration, et offre une protection pour le droit à la propriété. Il précise également que les droits inclus dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et autres instruments internationaux sont garantis à toutes les personnes au Cambodge, y compris les réfugiés et personnes déplacées.

La série d'accords qui mirent fin au conflit au Guatemala en 1994 contiennent des dispositions concernant à la fois le retour et la réinstallation223. Les personnes déplacées se trouvaient devant une alternative : « le droit au retour » ou la réinstallation dans le lieu de leur choix.

C'est aussi le cas de l'Accord de paix d'Arusha224 qui a mis fin au conflit du Rwanda et les accords de paix au Mozambique225 et en Somalie226 qui ont fourni le renforcement des droits à la

221 L'accord de paix pour la Bosnie-Herzégovine a été conclu le 21 novembre 1995 à Dayton (États-Unis) et signé à Paris le 14 décembre 1995 par les présidents de la République de Bosnie-Herzégovine, de la République fédérative de Yougoslavie et de la République de Croatie. Cet accord a mis un terme aux hostilités sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.

222 L'Accord pour un règlement politique global du conflit au Cambodge, signé à Paris le 23 octobre 1991, A/46/608-S/23177.

223 Accord en vue de la réinstallation des populations déracinées du fait des affrontements armés (juin 1994).

propriété. Au Mozambique, les réfugiés et personnes déplacées sont garantis de restituer leurs biens dans les cas où la propriété existe toujours, et ont le droit d'engager des poursuites judiciaires contre les possesseurs actuels. Les réfugiés somaliens sont autorisés à reprendre tous les biens qui leur ont été illégalement confisqués, volés, saisis, détournés ou pris par d'autres moyens frauduleux.

En effet, « les opérations coordonnées de retour et de rapatriement librement consentis, ainsi que les accords qui les régissent, peuvent aussi inclure des dispositions explicites sur la restitution des logements et des biens pour les personnes rentrées au pays. Les accords de rapatriement librement consenti concernant le Vietnam, le Guatemala, la République démocratique du Congo, le Mozambique, le Rwanda, l'Angola, la Géorgie, le Burundi et de nombreux autres pays, garantissent des variantes des droits à restitution des logements et des biens. Les principes constituent une source rassemblant des normes internationales justifiant la prise en compte des préoccupations liées à la restitution dans les futurs projets de rapatriement librement consenti et de retour »227.

Il faut noter que de nombreuses opérations de maintien de la paix des Nations Unies ont directement participé aux efforts entrepris pour la restitution des logements et des biens. Ainsi, la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) a institué, administré et géré la Direction des logements et des biens228 et la Commission des litiges relatifs aux logements et aux biens immeubles. Au sein de l'Administration Transitoire des Nations Unies au Timor Oriental (ATNUTO), une unité a formulé des propositions détaillées pour apporter une réponse institutionnelle au problème de la restitution.

§4- Le Rapatriement Volontaire entre Opérations d'Urgences et Développements.

Ceux qui procurent l'assistance au retour considèrent que son principal objectif est l'intégration des rapatriés. Dans un modèle parfait de rapatriement, les réfugiés exprimant le désir de retourner dans leur pays d'origine signent un formulaire de rapatriement volontaire, sont assistés à retourner dans leur pays, reçoivent un niveau minimal d'aide personnelle et communautaire afin de faciliter leur processus d'intégration, puis, dans un an (plus ou moins), y seront intégrés au point qu'ils n'auront plus besoin d'aide extérieure. Ce genre de réflexion a guidé la « Décennie de rapatriement » du HCR dans les années 1990 et continue d'être le paradigme dominant de la planification de rapatriement.

224 Les accords d'Arusha, concernant le Rwanda, se sont déroulés de juin 1992 à août 1993 par étapes successives entre l'État Rwandais et le Front patriotique rwandais. Les négociations d'Arusha ont été conduites en Tanzanie. L'accord définitif fut signé le 4 Août 1993.

225 Accord général de paix pour le Mozambique ; la signature des derniers protocoles a eu à Rome le 4 Octobre 1992.

226 Accord d'Addis-Abeba du 27 Mars 1993, conclu à la première session de la Conférence de réconciliation nationale en Somalie.

227 Voir, « Manuel sur la restitution des logements et des biens des réfugiés et personnes déplacées», (Pour la mise en oeuvre des «Principes Pinheiro»), de l'OCHA (OCHA/IDD), UN Habitat, le UNHCR, la FAO, le HCDH, le Conseil norvégien pour les Réfugiés (NRC) et l'Observatoire des situations de déplacement interne (IDMC),( Mars 2007).

228 Kosovo Housing and Property Directorate, HPD.

Avec le retour de plus en plus considéré comme ayant des implications non seulement pour les individus, mais aussi pour les communautés d'origine et le processus plus large de développement, l'expérience a montré que ce retour lui-même ne suffit pas de promouvoir la paix, mais plutôt il doit être « réussi ». Ainsi, le HCR indique: « L'expérience montre que si la question de la durabilité ou la réinsertion des réfugiés et populations déplacées ne sont pas traitées de façon appropriée, les pays concernés vont presque inévitablement sombrer à nouveau dans le conflit » 229. Une gamme de programmes d'aide au retour volontaire, des projets à impact rapide et d'autres programmes ont tenté d'influencer la réussite des retours230 et ainsi de promouvoir la paix.

Bimal Ghosh identifie comment la combinaison harmonieuse des effets bénéfiques pour les migrants eux-mêmes et le développement économique et social du pays d'origine peut « mettre en branle un cercle vertueux » de développement231.

Bien que les règlements de retour dans la plupart des cas ne soient pas devenus des centres florissant et innovant de nouvelles formes de production, néanmoins ils peuvent être interprétés comme ayant eu des effets en termes de reconstruction de l'État après le conflit armé. Le cas de la réinstallation après le déracinement peut être considéré comme un marqueur symbolique de la transition du conflit à la paix dans des sociétés généralement sédentaires232.

Avant d'aller plus loin sur le sujet du développement, on va présenter en concision les principales étapes d'un processus de retour.

Les mouvements de réfugiés à grande échelle se produisent normalement, soit après la cessation des conflits, soit après un changement de gouvernement. De tels retours exigent des négociations préalables qui sont parfois très longues en fonction des relations des gouvernements concernés et des besoins des réfugiés à leur arrivée.

Les termes seront établis dans un protocole d'entente entre le pays d'accueil et le gouvernement du pays d'origine. Avant le retour des réfugiés en masse, les fonctionnaires du HCR les informent sur les conditions auxquelles ils devraient faire face à leur arrivée au pays d'origine et du type d'assistance qui sera mise à leur disposition.

Le rapatriement effectif peut avoir lieu par voie terrestre, au moyen d'autobus, de camions et d'autres formes de transports pour les réfugiés et leurs possessions. Quand les camps de réfugiés sont situés près de la frontière, ceux qui sont valides peuvent marcher jusqu'à la maison233.

229 UNHCR, «Dialogue on Voluntary Repatriation and Sustainable Reintegration in Africa», (8 Mars 2004), p.1.

230 Voir, UNHCR, «The State of the World's Refugees», Geneva: UNHCR, (1997).

231 B. Ghosh, «Managing Migration: Time for a New International Regime?», Oxford University Press, (2000), p.185.

232 F. Stepputat, «Repatriation and Everyday Forms of State Formation in Guatemala». In R. Black - K. Koser «The End of the Refugee Cycle? Refugee Repatriation & Reconstruction», Oxford: Berghahn Books, New York (1999).

A. Helton, «The Price of Indifference: Refugees and Humanitarian Action in the New Century», Oxford: Oxford University Press, (2002).

S. Petrin, «Refugee return and state reconstruction: a comparative analysis», New Issues in Refugee Research. Working Paper No.66. UNHCR, Geneva, (2002).

233 Voir à ce sujet, P. Weiss Fagen, «UNHCR and Repatriation», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.44.

À l'autre extrême, illustrée par la Namibie en 1989, quelque 40 000 réfugiés rapatriés ont été transportés par voie aérienne à un coût élevé, en raison des conditions dangereuses en cours de route et la nécessité de vitesse.

Dans la plupart des cas du retour à grande échelle, les réfugiés qui regagnent spontanément leur pays sont plus nombreux que ceux ramenés formellement par le HCR, bien qu'ils soient généralement dans les deux catégories en mesure de profiter de toute assistance post-retour qui est mise à leur disposition.

Après avoir réussi à négocier des accords de paix post-conflictuels, l'ONU et ses agences ont commencé à superviser des programmes ambitieux de consolidation de paix et de reconstruction. La plupart des guerres des années 1980 et 1990 ont été des guerres civiles, et les victimes en grande partie ont étés elles aussi civiles.

Une fois les réfugiés rapatriés à ces pays déchirés par la guerre, ils ne pouvaient pas compter sur le soutien économique significatif de leurs gouvernements. Par conséquent, leur réinsertion a nécessité l'appui des agences des Nations Unies, des ONG et des donateurs.

Le HCR et pratiquement tous les acteurs principaux ont accepté le fait que la réintégration des populations déracinées soit un élément essentiel de consolidation de la paix post-conflictuelle, comme elle est aussi essentielle pour la consolidation des accords de paix, la reconstruction de l'économie et du tissu social d'un pays.

Encore une fois, les paroles de septembre 1991 du Haut Commissaire Ogata:

« Les réfugiés retournant peuvent être correctement réintégrés, seulement s'il ya des programmes complets pour la construction ou reconstruction politique, économique et sociale.

En tant que tel, assurer le succès du rapatriement volontaire va au-delà du mandat ou des ressources du HCR seul ».

Ainsi, les retours en masse au Cambodge, El Salvador et au Mozambique au début des années 1990, ont transformé l'approche traditionnelle des activités d'intégration du HCR, qui jusque-là consistait à fournir des programmes d'aide aux familles de rapatriés individuels et des interventions visant à assurer des garanties judiciaires.

En plus des préoccupations d'ordre juridique, le HCR a créé des projets pour restaurer les infrastructures, améliorer la gouvernance locale et générer les revenus.

Le concept de base de l'aide et du développement des réfugiés et des rapatriés remonte aux années 1980 ; les gouvernements africains se sont plaints d'avoir accueilli des centaines de milliers de réfugiés, mais en retour, ils ont été incapables de fournir des opportunités économiques pour leurs propres citoyens. À cette époque, le HCR et les donateurs persistaient à envisager les problèmes des réfugiés principalement dans les domaines juridiques et politiques alors que les acteurs de développement avaient d'autres priorités.

Le changement de perspective est seulement arrivé à la fin de cette décennie en Amérique
centrale, où les processus de paix régionaux et les engagements des donateurs avaient conduit à
une approche nouvelle et plus large de la réinsertion sociale. Le plan a prévu la coordination des

activités des donateurs, des gouvernements et des ONG locales et internationales, au moyen d'un secrétariat conjoint avec le HCR et le PNUD234. C'était la première fois que ces deux organismes travaillaient ensemble dans un programme à long terme.

En termes de réinsertion, la répartition des responsabilités dans les trois différentes phases (secours, reconstruction et développement) a été reprise dans le protocole d'entente entre le HCR et le PNUD. Alors que le HCR mettait l'accent sur les besoins immédiats des rapatriés, le PNUD se concentrait sur la réintégration à long terme.

Ce type de projet a été transmis au Cambodge, Mozambique, Tadjikistan, Afghanistan, Angola, et à d'autres situations de rapatriés.

L'apogée de l'engagement du HCR dans les activités de réintégration a eu lieu au Mozambique; entre 1993 et 1996, le HCR a aidé à rapatrier et/ou à réintégrer plus de 1,5 millions de personnes235. Sur le montant total des 108 millions dépensés sur les opérations au Mozambique, 20% seulement ont été dépensés sur le rapatriement236 ; le programme de réinsertion englobait beaucoup plus que le nombre de personnes rapatriées par le HCR, puisque la plupart des réfugiés mozambicains sont rentrés spontanément.

§5-Le Caractère Volontaire en Matière de Solutions Durables dans les Normes Internationales.

Comme nous l'avons vu, les principes de base régissant les solutions durables pour les réfugiés et les personnes déplacées sont bien connus. Tous les réfugiés et personnes déplacées ont le droit de retourner dans leurs foyers d'origine volontairement, en toute sécurité et dignité et reprendre possession de leurs propriétés237. Ceux qui ne souhaitent pas exercer ces droits peuvent opter pour l'intégration dans les pays d'accueil ou la réinstallation dans des pays tiers238. Outre que les pays d'accueil ne doivent pas pousser les réfugiés à rentrer et les pays d'origine ne doivent pas empêcher leur retour239. En d'autres termes, le point de départ dans l'élaboration de solutions durables est le souhait du réfugié lui-même. Bien que la mise en oeuvre soit souvent imparfaite, ces principes de base sont la condition sine qua non240 pour l'élaboration de solutions durables pour les réfugiés et personnes déplacées.

234 Programme des Nations Unies pour le Développement (en anglais UNDP).

235 On estime deux fois plus le nombre de personnes déplacées.

236 UNHCR, « Mozambique: An account from a lessons learned seminar on reintegration », Geneva, (1996).

237 Voir, par exemple, UNHCR, Executive Committee Conclusion No. 18, «Voluntary Repatriation», (1980);

UNHCR, Executive Committee Conclusion No. 40, «Voluntary Repatriation; International Convention on the Elimination of All Forms of Racial Discrimination», and refugees and displaced persons, (24 August 1996);

UN Sub-Commission on Human Rights Resolution 2002/30, «The right to return of refugees and internally displaced persons», (15 August 2002);

UN Sub-Commission on Human Rights Resolution 2002/7, «Housing and property restitution in the context of refugees and other displaced person»s, (14 August 2002); and, «Housing and property restitution in the context of the return of refugees and internally displaced persons», (16 June 2003).

238 UNHCR, Executive Committee Conclusion No. 67, «Resettlement as an Instrument of Protection», (1991).

239 UNHCR, «Handbook, Voluntary Repatriation: International Protection». Geneva (1996), p. 10.

240 Un terme juridique latin signifiant « sans laquelle cela ne pourrait pas être ».

Dans ce contexte, de nombreux spécialistes, étudiant les migrations forcées, ont critiqué la tendance du HCR en faveur du rapatriement qui forçait les réfugiés à rentrer à la maison241. Bien que le HCR ait toujours reconnu dans le cadre de son mandat la nécessité de s'assurer que les réfugiés ne soient pas refoulés contre leur gré dans leur pays d'origine, cela n'a pas toujours été la pratique implicite242.

Comme une publication du HCR déclare carrément: « Il est clair qu'une forte proportion de récents rapatriés dans le monde ont regagné leur pays sous une certaine forme de contrainte » 243.

Prenons l'exemple afghan : le HCR qui a été largement en faveur du retour volontaire pendant la période de 1990-1995, a cédé244 sous les pressions croissantes en provenance du Pakistan, Iran et les gouvernements européens pour aider par conséquent à réduire leur population de réfugiés afghans.

L'agence s'est donc trouvée dans une position particulièrement faible, étant donné que des centaines de milliers de réfugiés étaient en train de retourner en Afghanistan dans les trois mois de l'émergence d'un nouveau gouvernement intérimaire, qui n'avait pas la capacité de gouverner ou de fournir une infrastructure adéquate pour soutenir les réfugiés de retour245.

Cependant, la politique du rapatriement du HCR a radicalement changé au fil des ans. Le noeud du rapatriement librement consenti est tel que les réfugiés ne peuvent être renvoyés contre leur gré à un pays d'origine qui, dans leur évaluation subjective n'a pas sensiblement changé pour le mieux et, pour cette raison présente encore la même situation que celle qui a déclenché leur exil. Sachons qu'il existe un débat considérable sur ce qui a provoqué ce changement. En effet, une explication possible démontre que les États ont poussé le HCR à le faire. Vers la fin des années 1970, l'Ouest et le Tiers-Monde ont commencés à réclamer l'allégement des lourdes charges qui leur étaient imposées par le régime des réfugiés. De leur côté, les pays occidentaux étaient de plus en plus agités par le nombre croissant de demandes d'asile en provenance du Tiers-Monde. Comme ils considéraient fausses un grand nombre de ces demandes, ces Etats ont commencé à refuser de nouveaux demandeurs d'asile, et exigeaient un changement dans le droit des réfugiés. Les pays du Tiers-Monde se sont également montré de plus en plus intolérants aux flux des réfugiés qui imposaient de lourds coûts financiers, environnementaux et politiques246. Le résultat fut que l'Ouest et le Tiers-Monde ont demandé que le HCR soit impliqué dans ce que le Haut Commissaire a dénommé une politique de dissuasion247.

La doctrine de «retours imposés» a d'abord été officiellement diffusée en septembre 1996 par

241 B. Harrell -Bond (1989) et F. De Le Houérou (2006).

242 Comme par exemple, les rations du HCR refusés aux Mozambicains en Afrique du Sud ou Erythréens au Soudan.

243 UNHCR, The State of the World's Refugees: A Humanitarian Agenda (Oxford: Oxford University Press, 1997), p. 147.

244 HCR est tributaire du financement des gouvernements occidentaux.

245 P.Marsden, «UNHCR under duress: The reducing power of UNHCR to influence outcomes for Afghan refugees», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2006), p.237 and n.

246 M. Barnett, «UNHCR and the ethics of repatriation», Forced Migration review 10, p. 31-32.

247 Executive Committee of the High Commissioner's Programme, `Note on International Protection.' 31 August 1983, p3.

Dennis McNamara : directeur de la Division de la Protection Internationale du HCR, qui a souligné dans son exposé à Washington, « Le retour imposé est devenu nécessaire en raison de la pression des pays d'accueil et le manque d'argent pour prendre soin des réfugiés »248.

Elazar Barkan a considéré que le rapatriement volontaire est parfois une « couverture pour le retour forcé, ou une entrave à ce retour »249.

Des recherches montrent également que la notion de rapatriement volontaire a été appliquée de manière trop large et vague. Dans de nombreux cas, l'absence d'alternatives appropriées oblige les réfugiés à collaborer à leur propre rapatriement, si bien que ce dernier est souvent involontaire250.

C'est un fait, la pression exercée par les pays d'accueil continue à augmenter puisque le plus souvent ces pays sont extrêmement pauvres, confrontés à une situation dans laquelle les Etats du Nord ne sont pas disposés à actualiser le principe du partage des charges. Or l'absence de partage des charges doit être soulignée, tant au niveau de l'asile, qu'au niveau des ressources251. Ainsi, le régime que les États du Nord ont construit pour empêcher les réfugiés d'atteindre leurs côtes, et la hâte indécente pour faire retourner les réfugiés de l'ex-Yougoslavie, a enlevé leur autorité morale pour protester contre le rapatriement involontaire quand il a eu lieu dans le Sud252.

De son côté, la réticence du Nord à partager le fardeau des États d'accueil au niveau des ressources, a fait que les « réfugiés doivent, soit retourner, soit devenir la seule responsabilité de l'État d'accueil »253. Prenons le cas de la République Démocratique du Congo (ex-Zaïre) et de la Tanzanie, qui ont donné asile à 2.500.000 réfugiés rwandais en 1994. Ils figurent parmi les pays les plus pauvres dans le monde avec un classement selon l'Indice du Développement Humain (IDH) du PNUD, respectivement de 168 et 148 sur 169254.

Plusieurs autres pays d'accueil qui offrent refuge à des milliers de réfugiés sont classés parmi les pays les plus pauvres dans le monde, y compris, la Guinée, l'Ouganda, le Soudan, le Népal, le Bangladesh, et le Pakistan.

Il n'est donc pas surprenant que les gouvernements des pays d'origine ne soient pas souvent en mesure d'assumer la responsabilité de la réintégration des réfugiés ou d'autres populations déplacées.

248 Reuters, 29 September 1996.

249 E. Barkan, «Repatriating refugees and crossing the ethnic divide: A comparative perspective. Refugee repatriation», Migrinter, Poitiers (2004), p 7.

250 S.Hanafi, «Palestinian return migration: Lessons from the international refugee regime», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.274 and n.

251 Voir, B.S Chimni, «From resettlement to involuntary repatriation: towards a critical history of durable solutions to refugee problems», New Issues in Refugee Research, (UNHCR), working Paper N° 2.

252 B. Frelick, "The Year in Review", The World Refugee Survey, New York: United States Committee for Refugees, (1997), p. 14-19.

Bill Frelick writes: "Africa, which for decades stood as a shining example of solidarity and hospitality, retreated from fundamental principles. On both sides of the continent, the spirit of generosity withered. ... Like it or not, U.S. actions set a standard. If the United States treats refugees and asylum seekers without regard to fundamental refugee principles, rest assured that other countries will cite that as justification for their own misbehavior."

253 B. Rutinwa, "Beyond Durable Solutions: An Appraisal of the New Proposals for Prevention and Solution of Refugee Crisis in the Great Lakes Region", Journal of Refugee Studies, Vol. 9, No. 3 (1996), p. 312 and n.

254 Indice de développement humain (IDH) du PNUD, Classements 2010. ( http://hdr.undp.org/fr/statistiques/)

Avant de conclure, il est nécessaire de donner un aperçu sur le cadre existant et le développement juridique applicable au rapatriement volontaire.

Le principe de base du droit des réfugiés est le principe de non-refoulement adopté par la Convention de Genève de 1951, relative au statut des réfugiés dans son article 33.1 qui stipule: « Aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie et sa liberté seraient menacées en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ". Outre ce principe, il y a « le droit au retour ", qui est particulièrement pertinent pour le rapatriement volontaire. Ce droit est consacré par l'article 13.2 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948: « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays ".

C'est sur ces motifs que la condition du « caractère volontaire " joue un rôle clé dans le rapatriement librement consenti.

La communauté internationale et le HCR ont été conscients des problèmes précédemment décrits à partir d'une perspective orientée vers l'action et l'évolution de la politique internationale. C'est à cet effet que le HCR, en vertu de son mandat255, a encouragé le débat et la réflexion sur les questions du rapatriement volontaire qui sont toujours en cours mais qui n'ont pas atteint la mise en place claire et rigoureuse du HCR. Les Consultations Mondiales sur la Protection Internationale ont conduit à l'Ordre du Jour de la Protection en 2002. La quatrième réunion de ces Consultations a expressément abordé le programme de rapatriement volontaire, indiquant que « du point de vue du HCR, le rapatriement volontaire de base est le retour dans et à des conditions de sécurité physique, juridique et matérielle, avec la pleine restauration de la protection nationale du produit final "256.

En vertu de l'article 35 de la Convention de 1951, les Etats parties sont invités à coopérer avec le HCR dans ce domaine, entre autres. L'Assemblée générale a constamment réaffirmé et élargi les fonctions du HCR ayant égard au rapatriement librement consenti, y compris dans le pays d'origine257. Les conclusions du Comité exécutif258 réaffirment également les principes internationaux et contiennent des normes régissant le processus de rapatriement librement consenti, y compris ses éléments clés, parmi lesquels :

- l'importance de fournir l'information nécessaire aux réfugiés concernant les conditions prévalant dans leur pays d'origine et cela afin de faciliter la prise de décision,

255 Article 1 of the Statute of the Office of the United Nations High Commissioner for Refugees states: «The United Nations High Commissioner for Refugees, acting under the authority of the General Assembly, shall assume the function of providing international protection, under the auspices of the United Nations, to refugees who fall within the scope of the present Statute and of seeking permanent solutions for the problem of refugees».

256 UNHCR, « Global consultation on international protection», 4th meeting, Voluntary repatriation, EC/GC/02/5, Geneva: UNHCR, (2002a), p.15.

257 Voir en particulier les résolutions 49/169 du 23 décembre 1994 et 52/1003 du 12 décembre 1997 de l'Assemblée générale.

258 Les plus pertinentes sont les conclusions No 18 (XXXI) de 1980 et No 40 (XXXVI) de 1985, toutes

deux réaffirmées par la conclusion No 74 (XLV) de 1994. La conclusion No 85 (XLIX) est également pertinente.

- le cas échéant, des visites d'inspections sur le terrain pourraient avoir lieu (Sans perdre le statut de réfugié).

- des garanties formelles pour la sécurité des rapatriés,

- une fonction de suivi des rapatriés du HCR, y compris l'accès direct et non entravé aux rapatriés à tous les stades,

- la fourniture des documents nécessaires et la restitution de la citoyenneté,

- la nécessité d'accueil et la fourniture d'une assistance à la réintégration par le HCR et les autres agences des Nations Unies,

- la promotion du dialogue entre les principaux acteurs,

- l'établissement de mécanismes consultatifs et tripartites,

- le rôle moteur du HCR dans la promotion, la facilitation et la coordination du rapatriement librement consenti,

- la responsabilité primordiale des Etats dans la création de conditions propices au rapatriement librement consenti comme solution au problème des réfugiés259.

Le Guide du HCR sur le rapatriement volontaire, regroupe les différentes normes et définit les modalités des opérations de ce rapatriement. Le HCR prévoit de mettre à jour ce guide afin de s'assurer qu'il traite de nouvelles questions et normes juridiques, qu'il s'occupe du suivi des rapatriés, du renforcement des capacités et de la réconciliation260. Naturellement, le rapatriement volontaire implique un équilibre entre deux mandats politiques opposés. D'une part, il devrait être encouragé et facilité, d'autre part, les réfugiés par définition, ont de bonnes raisons de craindre pour leur sécurité en cas de retour, et de ce fait pensent rester à l'étranger. Le guide du HCR a tenté d'assurer cet équilibre.

On peut alors conclure que les États dominants dans le système international décident de temps à autre, à la lumière de leurs intérêts, quelle solution au problème des réfugiés mondiaux devrait être promue comme solution durable privilégiée. Le rapatriement involontaire peut donc être décrit comme la solution privilégiée des États du Nord dans l'ère de la mondialisation, marquée par la fin de la guerre froide et par un fossé Nord-Sud grandissant.

Cependant, il y a des situations où les réfugiés veulent rentrer chez eux mais se voient incapables d'exercer leur « droit au retour », ce sont en réalité les seuls réfugiés au monde qui sont sans protection depuis des décennies, il s'agit incontestablement des réfugiés palestiniens.

259 UNHCR, « Global consultation on international protection», 4th meeting, Voluntary repatriation, EC/GC/02/5, Geneva: UNHCR, (2002a), p.12.

260 Global Consultations on International Protection, 4th meeting, Voluntary Repatriation, EC/GC/02/5, 25 April 2002, Part III, article 13.

Section 2

Dans quelle Mesure ces Pratiques sont Pertinentes au Contexte Palestinien?

Avant de commencer cette analyse, il est important de discuter d'un sujet qui a suscité beaucoup de débats, c'est la question de l'unicité du cas palestinien par rapport aux autres conflits internationaux.

§1- Est-ce que le Cas des Réfugiés Palestiniens est-il Vraiment Unique ?

Historiquement, les Palestiniens étaient et sont toujours considérés comme exclus. C'est un fait, il y a un large fossé au coeur de la politique des réfugiés dans le monde, entre les réfugiés palestiniens et tous les autres.

Quoique le rapatriement volontaire demeure en principe et en pratique, la principale solution durable pour les réfugiés à travers le monde, les principaux membres de la communauté internationale continuent à considérer l'intégration au pays d'accueil et la réinstallation, comme les principales solutions durables pour les réfugiés palestiniens.

D'un autre côté, il existe encore un manque considérable de connaissances populaires et/ou des désinformations au sujet de la plus importante population de réfugiés au monde. Une étude télévisée au Royaume-Uni261, menée pendant une couverture du conflit israélo-palestinien, a montré que la plupart des téléspectateurs britanniques ne savaient pas que les Palestiniens ont été déracinés de leurs maisons et leurs terres, suite à la création de l'Etat d'Israël en 1948. Même ceux qui sont familiers avec la cause palestinienne -comme les auteurs d'un document de travail élaboré par le Centre des Études sur les Réfugiés pour le Ministère britannique du développement international (DFID)-, ont tendance « à les voir comme un cas à part par rapport aux autres réfugiés et particulièrement, dans le contexte mondial généralement »262.

Pour les raisons qui pourraient être à l'origine de cette exclusion, Scott Leckie263 s'interroge : « Nous avons besoin de demander à l'ensemble de la communauté humanitaire, pourquoi les réfugiés palestiniens sont traités de façon systématique différemment de tous les autres groupes de réfugiés dans le monde. Sur quelles bases les droits des Palestiniens à la restitution des logements et des biens sont tant négligemment ignorés? Est-ce parce que le défi est tellement immense, que le HCR risque un échec dès le départ? Est-ce parce qu'une grande partie de la communauté internationale sait que la position extrémiste prise par Israël envers les réfugiés palestiniens est tellement enracinée que la recherche de solutions pour les réfugiés, d'une manière qui soit compatible avec leurs droits, est tout simplement irréalisable? Ou bien est-ce parce que tout simplement, la communauté internationale ne peut pas être dérangée par une telle population

261 T. Rempel, «Who are Palestinian refugees?», p.5-7,Forced Migration review, issue 26, (August 2006).

262 www.rsc.ox.ac.uk/PDFs/Policy%20Approach es%20to%20Refugees%20and%20IDPs%20RSCDFID% 20Vol%20II.pdf

263 S. Leckie, «Peace in the Middle East: getting real on the issue of Palestinian refugee property», (January 2003). Scott Leckie est le Directeur Exécutif du Centre des Droits de Logements et des Expulsions (COHRE), Genève.

difficile de réfugiés, alors que le HCR est préoccupé par des crises financières et des problèmes (internes) moraux? ». Des questions qui demeurent toujours ouvertes et Scott Leckie va encore plus loin : « Pour les réfugiés palestiniens, les arguments politiques, juridiques ou financiers sont tout simplement des excuses pour l'inaction, dont le résultat serait un prolongement de l'injustice et de la misère qu'ils subissent chaque jour, tant qu'ils sont empêchés de retourner dans leurs foyers, terres et propriétés. Toute prétention que les réfugiés palestiniens reçoivent le soutien, la protection et l'attention qu'ils méritent, frôle l'absurde ».

En effet, ce fossé entre réfugiés palestiniens et non-palestiniens a toujours été justifié par l'hypothèse que le cas des réfugiés palestiniens est unique, et doit être traité comme tel264.

Mais cette hypothèse a été remise en question265.

Il semble évident qu'il existe des raisons derriere ce point de vue d'unicité, et on va tenter de les examiner :

Premièrement, les Palestiniens sont le seul groupe de réfugiés dans le monde qui dépendent de deux agences spéciales des Nations Unies dédiées à leur aide et leur protection : l'UNRWA, et la CCNUP de facto inactive. L'existence de ces organismes a contribué à exclure de nombreux Palestiniens des avantages de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, et de la protection et l'assistance de l'agence principale de l'ONU sur les réfugiés, le HCR.

Deuxièmement, la population des réfugiés palestiniens est massive par rapport aux autres groupes de réfugiés, étant donné qu'ils représentent la plus grande communauté de déplacés dans le monde. Elle est aussi la plus grande par rapport au total de la population palestinienne, car environ les trois quarts de tous les Palestiniens sont des réfugiés ou des personnes déplacées.

Troisièmement, le problème des réfugiés palestiniens remonte à 1948. Il était presque, le premier exode massif du XXème siècle, mais, contrairement aux anciens exemples arménien, grécoturque, indo-pakistanais (entre autres), les réfugiés palestiniens sont restés une population distincte pendant six décennies. Plutôt que de s'intégrer dans les communautés d'accueil, l'identité nationale palestinienne distincte a augmenté en exil.

Mais, ces raisons ne sont pas suffisantes pour prétendre que le cas palestinien est unique et qu'il devra être traité ainsi, surtout concernant la recherche des solutions au conflit israélo-palestinien. On peut dire que, s'éloigner de l'exceptionnalisme palestinien est la tendance la plus évidente et la plus complète dans le domaine des solutions durables,266 où chacun des leaders politiques

264 Karen AbuZayd, (UNRWA Commissioner-General), «Palestine Refugees in Global Context: Issues and Prospects», American University of Cairo, Center for Migration and Refugee Studies, (14 December 2009).

M. Dumper, «The Future for Palestinian Refugees: Toward equity and peace», Lynne Rienner, (2007), p.347.

265 The August 2006 issue of Forced Migration Review that I have quoted above in fact posed a question. It's cover title was: «Palestinian Displacement: A case apart?»

266 M.Kagan, «The Decline of Palestinian Exceptionalism: Observation of a trend, and its consequences for refugee studies in the Middle East», Paper Prepared for the Migration and Refugee Movements in the Middle East and North Africa, The Forced Migration & Refugee Studies Program, October 2007, p.7.

palestiniens et de la société civile ont largement adopté le droit international comme base pour la cause des réfugiés.

Récemment, les livres cherchant à comparer leur cas aux autres, en termes de solutions ou de l'application du droit international, sont de plus en plus communs267.

B.S. Chimni a critiqué l'imposition involontaire de rapatriement sur la plupart des réfugiés avec l'observation suivante:

« Je souhaite terminer en attirant l'attention sur ces situations où les réfugiés veulent rentrer chez eux mais sont incapables d'exercer leur droit au retour. En particulier, il me vient à l'esprit le droit des réfugiés palestiniens à retourner dans leur pays d'origine »268.

Ainsi, si les réfugiés Ex-yougoslaves ont le droit de retourner dans leurs foyers sans considération des différences ethniques, nationales et des divisions religieuses, et les réfugiés du continent africain et sud-américain ont le droit de retourner dans leur pays et de récupérer leurs biens expropriés, pourquoi alors les mêmes principes ne s'appliquent-ils pas aux Palestiniens?

Comme Kathleen Lawand a observé:

« La question des réfugiés palestiniens (...) n'est pas plus politique ni moins juridique que la question du rapatriement des réfugiés hutus au Rwanda, ou celle des refugiés Bosniens en Bosnie, pour n'en nommer que quelques exemples ; elle ne mérite pas moins l'application du droit international, et le niveau de controverse politique entourant les origines et les droits de la diaspora palestinienne, n'est pas pertinent à ce point »269.

« Aveuglés par l'idéologie d'un faux pragmatisme, les acteurs internationaux ont peu fait pour s'opposer à la séparation visible entre la cause palestinienne et la pratique internationale. Certains ont même rejeté les préoccupations des réfugiés à cet égard, étant irrationnelles.

Le retrait du soutient formel américain à la résolution 194 de l'AGNU au début du processus d'Oslo, et les recommandations européennes au sein du Conseil de l'Europe pour une soi-disant solution pragmatique à la question des réfugiés270 -parmi d'autres décisions internationales et déclarations au cours de cette période- ont suscité un sentiment de trahison et de méfiance dans le processus »271.

Ces réalités juxtaposées ont donc uniquement confirmé les soupçons d'une norme double standard de longue date, sur le plan politique et pratique au sujet du conflit israélo-palestinien.

267 Parmi les principaux exemples: M. Dumper (2005) «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge. Et E. Benvinisti - C. Gans - S. Hanafi, (2007), «Israel and the Palestinian Refugees», Heidelberg: Spinger.

268 Voir, B.S. Chimni, «From Resettlement to Involuntary Repatriation: Towards a Critical History of Durable Solutions to Refugee Problems», New Issues in Refugee Research No.2, (1999), p.17.

269 K. Lawand, «The Right to Return of Palestinians in International Law,» International Journal of Refugee Law, Vol. 8, No. 4 (1996), p. 534.

270 Résolution 1156, le 23 avril 1998.

271 «A Practical Approach to Durable Solutions for Palestinian Refugees as Part of a Comprehensive Solution to the Israeli-Palestinian Conflict», Working Paper, BADIL Resource Center for Palestinian Residency Rights, Prepared for the IDRC Stocktaking Conference on Palestinian Refugees, Ottawa, (18-20 June 2003), p.6.

En dépit de quelques caractéristiques uniques des réfugiés palestiniens, qui à certains égards doivent être traités séparément, néanmoins il semble être évident que cette unicité ne peut être tenue pour acquise dans tous les domaines. Le sort des réfugiés palestiniens porte également beaucoup de points communs avec d'autres réfugiés, et tant qu'il ne sera pas accepté que les réfugiés palestiniens soient traités comme les autres refugiés partout dans le monde, un accord juste et durable ne serait jamais atteint.

Toutefois, si vraiment on est en train de rechercher une vraie solution au problème des refugiés palestiniens, il est temps de briser ce mythe d'unicité du conflit israélo-arabe.

§2- Comment Profiter de l'Expérience Internationale pour la Recherche des Solutions au Problème Israélo-palestinien ?

L'étude sur la pratique internationale et les programmes de retour, a mis en évidence un certain nombre de facteurs qui sont utiles en termes de l'élaboration de solutions durables et de la conception d'un programme de retour des réfugiés palestiniens.

Dans cette partie, l'accent sera mis sur quatre thèmes :

- la nécessité de coordination entre les organismes de secours et de développement, - celle d'oeuvrer pour la réconciliation,

- la nécessité de prendre en considération le choix volontaire des réfugiés,

- la nécessité d'un rôle actif et objectif de la communauté internationale.

1- Quel rôle pour les agences internationales?

Un autre aspect de l'engagement international est le rôle de l'agence dirigeante.

Selon Michael Dumper272, l'expérience et la pratique du HCR montre que l'attribution du rôle d'agence principale à une institution unique est essentielle dans un programme de rapatriement. L'alternative est à éviter car elle comporte beaucoup de chevauchement, une diffusion d'objectifs, des concours sur les fonds, des rivalités entre inter-agences et des guerres de territoire conduisant à une réponse confuse aux besoins des réfugiés. En outre, comme Peter Mardsen273 l'a montré, il y a des preuves pour suggérer que l'utilisation des acteurs historiques dans un contexte donné évite le gaspillage du temps, puisque les nouvelles agences se verront consacrer des efforts et des ressources pour s'établir.

Concernant les réfugiés palestiniens et comme on l'a déjà vu, l'avenir de l'UNRWA est l'un des plus grands débats. D'après son mandat, l'UNRWA doit rester responsable des réfugiés jusqu'à leur retour à leurs foyers. Toutefois, suite à la création d'un Etat palestinien, il existe une hypothèse que son service serait progressivement transféré aux ministères palestiniens concernés

272 M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.295.

273 P.Marsden, «UNHCR under duress: The reducing power of UNHCR to influence outcomes for Afghan refugees», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2006), p.232-270.

et l'UNRWA serait progressivement démantelée. C'est le sens des accords de principes conclus dans les pourparlers de Taba et dans les Accords de Genève274.

Deux points de vue opposés sont énoncés sur le rôle des institutions ou agences internationales pendant et après un accord de paix. Le premier275 montre que les Palestiniens doivent éviter de dépendre d'une seule organisation, en ajoutant que le HCR et l'OIM276 doivent être responsables du retour des réfugiés ou de leur réinstallation dans des pays tiers vu qu'ils ont le plus d'expérience dans ce domaine, alors que l'UNRWA, le PNUD et la Banque mondiale doivent être en charge de l'intégration des réfugiés palestiniens qui veulent rester dans leur pays d'accueil277. En revanche, le deuxième avis278considère que, quel que soit le scénario qui va prendre place, l'expérience de la communauté internationale donne à penser qu'un seul organisme devrait être responsable de la logistique, de la coordination et la planification d'un programme de rapatriement, et dans une certaine mesure, de la réinsertion des réfugiés de retour. En effet, l'expérience internationale montre l'avantage de faire usage des acteurs historiques qui possèdent une expérience dans le domaine et une mémoire institutionnelle qui pourrait servir de référence279.

Tous ces facteurs suggèrent un réexamen de l'hypothèse que l'UNRWA serait éliminée rapidement après un accord ; il est clair qu'il s'agit d'un référentiel de compétences, de crédibilité et de légitimité dans les communautés de réfugiés et ce sont de précieux atouts dans une période de transition volatile et risquée.

Donc le deuxième avis est le plus convaincant, et comme on l'a déjà vu dans la premiere partie, il est primordial que l'agence qui a accompagné les refugiés durant les années conflictuelles étende ses activités à la phase post conflictuelle.

Ainsi, l'UNRWA est l'agence la plus habilitée à traiter d'un éventuel retour palestinien, et cela en coopération et non pas en parallèle avec d'autres agences.

2- Relation entre paix et réconciliation.

Le conflit qui provoque le déplacement est souvent profondément enraciné dans l'ethnicité, le régionalisme, la religion ou la classe sociale, et le déplacement lui-même aura causé plus de souffrance et de douleur. Les réfugiés sont peu susceptibles de revenir si ceux qui ont causé leur déplacement sont toujours au pouvoir ou continuent d'être en mesure d'agir en dehors des contraintes de la loi.

274 A voir dans le chapitre suivant.

275 S.Hanafi, «Palestinian return migration: Lessons from the international refugee regime», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.273-285.

276 L'Organisation Internationale pour les Migrations.

277 S. Akram - T. Rempel, «Temporary Protection for Palestinian Refugees», IDRC, (2003).

278 Soutenu par M. Dumper, (2005), op.cit.

279 Ibid., p.303.

Il existe effectivement un nombre croissant d'expériences qui indique que, à moins que les causes et les traumatismes à la fois du conflit et du déplacement soient traités par un programme conscient de la réalisation de la justice et la réconciliation, le conflit risque de survenir une fois de plus. Pour cette raison, les programmes de rapatriement exigent également un élément de réconciliation politique et sociale280.

Les mouvements migratoires forcés et les crises de réfugiés contemporains ont principalement eu lieu dans des contextes de guerre ou des contextes liés au conflit, ces situations sont caractérisées, entre autres circonstances, par une violence généralisée affectant l'ensemble de la société, par des troubles sociaux, politiques et socio-économiques, par une fragilité et répartition des institutions de l'Etat, par une destruction physique et par l'insécurité281.

Dans les dernières décennies, on estimait que les conflits internes constituaient la base de la majorité des flux de réfugiés et cela signifie, du point de vue du rapatriement volontaire, que le processus de retour des réfugiés dans leur pays d'origine signifie beaucoup plus que le simple fait de traverser les frontières. Pour la population des réfugiés, cela constitue une nouvelle rencontre avec le peuple et avec l'ensemble du pays qui est dans une situation post-conflictuelle, tant au niveau politique et juridique qu'au niveau social et économique. Et c'est dans cette situation, souvent caractérisée par les divisions provoquées par le conflit, que la notion de réconciliation acquiert une importance particulière.

L'expérience internationale de sa part, a reconnu que la réconciliation est une partie intégrante d'un programme de rapatriement ; pour que cette dernière se produise, la justice doit également apparaître comme ayant été rendue282. Mais sans connaître la nature exacte de l'accord de paix qui conduit au rapatriement, il est difficile de délimiter les façons possibles dont la justice apparait comme étant faite.

Nous avons donc vu que la question des réfugiés dans d'autres conflits a été traitée comme l'un des principaux sujets, de sorte que la réconciliation risque d'être entravée si la question de retour n'est pas incluse dans les futurs accords de paix.

Cependant, pour que cela se fasse, il faut qu'il y ait un accord global, considéré comme juste et équitable et que certaines pratiques, telles que les nouvelles colonisations israéliennes et les incursions démolissant des maisons, cessent.

Mais les grandes lignes d'un modèle de réconciliation doivent comporter des éléments de justice

280 C.Bell, « Peace agreements and human rights», Oxford: Oxford University Press, (2000).

L. Welchman, «The role of international law and human rights in peacemaking and crafting durable solutions for refugees: Comparative comment», BADIL, (May 2003).

281 A.Garcia Rodicio, «Re-approaching voluntary repatriation within a reconciliation framework: A proposal drawn from the Cambodian return process», in M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.215.

282 « Not only must Justice be done; it must also be seen to be done » (Il faut non seulement que justice soit rendue, mais qu'elle apparaisse aussi, comme ayant été rendue).

Une célèbre citation du juge britannique Gordon Hewart, dans l'affaire R v Sussex Justices ex parte McCarthy, 1924.

réparatrice, qui exigeraient des excuses pour les souffrances causées à la suite du conflit, d'où la nécessité qu'Israël reconnaisse l'injustice commise en 1948. A cet effet, une commission de trêve et de justice pourrait être créée pour les témoignages publics des crimes contre l'humanité et une amnistie serait offerte sur la base des aveux. Aussi un certain nombre d'activités conjointes pourraient être lancées à partir de journées de commémoration commune pour les victimes du conflit, allant jusqu'aux échanges culturels283.

Donc, justice et réconciliation vont de pair pour apporter la guérison psycho-sociale et établir une plate-forme d'actions visant à prévenir que tels conflits n'éclatent de manière violente dans le futur.

3- Le choix des réfugiés.

Les pratiques des Etats sur le rapatriement volontaire indiquent que le choix réel des réfugiés aura besoin davantage de garanties que celles établies dans le droit international et les normes du HCR aujourd'hui. Même lorsque les organismes officiels, comme le HCR, ne favorisent pas officiellement une solution particulière, les préférences des gouvernements puissants détiennent néanmoins une grande emprise. Par conséquent, tout plan de solution durable, subordonné au libre choix individuel, doit inclure encore plus de garanties que ce qui est en place. Mais la question des réfugiés palestiniens est spécifique. Comme avec presque toutes les crises de réfugiés (sauf en Palestine), la faille dans la protection était que le retour leur était imposé.

C'est pourquoi le déni du retour des Palestiniens a été contre la tendance historique. Autrement dit, les réfugiés palestiniens se sont vu refuser le retour à une situation qu'ils avaient toujours préconisé.

Loin de focaliser l'attention sur la question du rapatriement en particulier, évoquons l'idée qu'il existe généralement une solution politique plus préférée, que les réfugiés sont contraints d'accepter « volontairement ». Pareillement, une solution à la crise des réfugiés palestiniens ne serait pas différente, même si le classement des solutions préférés ne serait pas le même. Il faut savoir que le choix individuel des réfugiés est inhérent à la résolution 194 de l'AGNU, qui parle des « réfugiés désireux de rentrer » et prévoit une indemnisation pour « ceux qui choisissent de ne pas rentrer ». En supposant par là que le droit international est finalement appliqué aux Palestiniens, il sera essentiel que ces derniers vont exercer ce choix perçu comme juste et légitime, car volontaire, et dans cette perspective se présentant comme un élément important pour la résolution de la crise.

Cependant, ce qui importe c'est que les options soient transparentes et claires et qu'elles fassent partie d'un ensemble complet qui sera juste et donc acceptable.

Un autre aspect de cette question est la participation des réfugiés et la création d'un sentiment
d'appartenance. Plusieurs facteurs ont fait que l'articulation et l'inclusion des voix des réfugiés

283 M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.299.

dans la planification du rapatriement soit extrêmement problématique. (Sujet à traiter dans le chapitre suivant)

4- Le rôle de la communauté internationale.

La plupart des retours de réfugiés, surtout depuis les années 1990, sont précédés par un accord bilatéral qui est supporté par des accords complémentaires trilatéraux, soit avec le HCR soit avec un organisme régional, soutenu par des garanties de grands acteurs internationaux. De tels accords comportent des dispositions spécifiques pour le programme de rapatriement. La communauté internationale a pour rôle de s'assurer que le degré de protection et de sécurité dans le pays d'origine soit aussi bon, si ce n'est pas supérieur à celui du pays d'accueil. Un élément important de ces accords a été la mise en place d'un mécanisme de financement pour débourser le programme de rapatriement. De bons exemples de cette tendance sont le Cambodge, le Timor oriental, le Guatemala et le cas Bosnien284. Pour voir la mesure dans laquelle cela pourrait être reconnu, il faut se référer au « Manuel du HCR sur le rapatriement librement consenti : la protection internationale », où les sections détaillées suggèrent le contenu de clauses à inclure dans tout accord de paix, y compris le rapatriement des réfugiés.285 Aussi bien, le chapitre intitulé: « Le rôle du HCR dans les opérations de rapatriement librement consenti », présente des sections sur l'importance de la compilation d'un profil de la communauté des réfugiés et du pays d'origine, sur la nécessité d'être préparé pour des rapatriements organisés et spontanés, comme sur le rôle capital des agences de communication transfrontalière et des éléments qui doivent être incorporés dans des accords de rapatriement286.

Les processus d'exécution de ces démarches suscite forcément des tensions dans le pays d'origine vers lequel les refugiés vont revenir, et la peur de voir le conflit renaître, faute de la bonne organisation du processus, peut freiner les activités de retour. Dans ces cas, le rôle de la communauté internationale est d'intervenir comme arbitre indépendant et objectif, servant de médiateur pour calmer les tensions tout au long du processus de construction d'une paix durable.

«Dans de nombreux contextes, la communauté internationale a joué un rôle clé en contribuant à l'abrogation des lois discriminatoires, utilisées pour justifier la non-exécution des décisions de restitution, adoptée en faveur de personnes de retour chez elles. Ainsi, en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, plusieurs lois datant d'avant la guerre ou adoptées pendant le conflit ont été abrogées grace à l'implication directe de la communauté internationale''287.

284M.Dumper, op.cit, p.293.

285 HCR, « Manuel sur le rapatriement librement consenti : protection internationale », (15 avril 1996).

286 Ibid., p. 15-40.

287 « Manuel sur la restitution des logements et des biens des réfugiés et personnes déplacées», (Pour la mise en oeuvre des «Principes Pinheiro» ), de l'OCHA (OCHA/IDD), UN Habitat, le UNHCR, la FAO, le HCDH, le Conseil norvégien pour les Réfugiés (NRC) et l'Observatoire des situations de déplacement interne (IDMC),( Mars 2007).

Ce qui importe aussi c'est de déterminer le rôle des pays voisins dans ce programme de rapatriement. En effet, les pays voisins peuvent jouer de nombreux rôles au cours du conflit et de la période d'exil, vu qu'ils sont à l'autre bout de la violence et du sang, mais surtout ils servent de pays hôtes d'un grand nombre de réfugiés. Cependant ces derniers peuvent amener ces pays à se laisser entraîner dans ce conflit, et cela qu'ils le veuillent ou pas. Les rôles du Pakistan, Thaïlande, Mexique, Kenya, etc. dans les conflits voisins sont tous des exemples. En outre, les pays voisins ont un intérêt dans le règlement final et ses implications pour eux en termes de stabilité du régime, de l'avenir des réfugiés qu'ils accueillent et de leur rôle en tant que pays de transit. Un cadre régional qui permet la consultation et la participation dans le rapatriement prévu, est donc un élément crucial pour la viabilité du programme de rapatriement. Alors, dans une certaine mesure, le soutien des pays hôtes est essentiel et leur manque de coopération pourrait saboter un programme convenu.

Nous pouvons donc constater que la participation de la communauté internationale dans un accord de paix comprenant le rapatriement des réfugiés palestiniens, est une condition sine qua non de toute résolution du conflit israélo-arabe. Aussi bien que les protagonistes ont une très profonde histoire de méfiance pour croire en un accord qui n'a pas de garants internationaux. D'ailleurs, Les structures pour de telles participations sont déjà largement en place.

Chapitre 2

Le Futur des Réfugiés : Entre Solution et Dissolution.

Comme on vient de voir dans le chapitre précédent, l'inclusion de la question des réfugiés dans les processus de paix mondiaux a participé à la réussite de ceux-ci ; mais qu'en est il du cas des palestiniens ?

Est-ce que des solutions durables pour les réfugiés ont été incluses dans les accords de paix israélo-palestiniens ? Sinon, quelles sont les mesures à prendre pour remettre ce processus sur la bonne voie ?

La question des réfugiés palestiniens a été pendant 63 ans le principal obstacle à un accord entre Israël et les pays arabes. Malgré le rejet par ces derniers de l'existence même de l'Etat hébreu, de nombreuses tentatives de négociations pour parvenir à un accord, même limité, ont été faites mais la plupart d'entre elles ont achoppé sur la question des réfugiés. Celle-ci est aujourd'hui centrale dans la perspective d'un juste règlement de la question palestinienne.

On va examiner dans la première section les principales étapes de ce processus de paix, et comment celui-ci a traité la question des réfugiés. La deuxième section sera consacrée à une breve étude sur le rôle de l'ONU dans le règlement du conflit au Proche-Orient, avant de voir quelle est la solution la mieux adaptée pour la résolution du conflit le plus épineux au monde.

Section I

Les Palestiniens en Exil dans le Processus de Paix.

§1- Négocier le « Droit au Retour » des Réfugiés Palestiniens.

La question des réfugiés est l'un des problèmes les plus douloureux et les plus complexes des relations israélo-arabes.

Des tentatives ont été faites pour résoudre le problème grâce à des discussions politiques entre Israël et ses voisins arabes au cours des années 1949 (pourparlers de Lausanne) et 1951 (pourparlers de Paris), mais ils se sont avérés vains. A cette époque, les Etats arabes étaient les principaux gardiens des intérêts palestiniens, ces derniers ne faisant pas partie de ces discussions en tant que participants officiels.

Au cours des quatre décennies qui ont suivi, il n'y a pas eu de négociations israélo-arabes ou israélo-palestiniennes dédiées à la résolution de la question des réfugiés.

On a du attendre la fin de 1991 pour voir cette question retourner à la table des négociations avec la convocation à Madrid d'une conférence internationale de paix qui, pour la première fois depuis quarante ans, a prévu des discussions entre Israël et les représentants palestiniens sur la question des réfugiés palestiniens.

Vingt ans plus tard, -une époque marquée par les accords d'Oslo, la création de l'Autorité palestinienne, et des pourparlers intensifs sur la question finale des réfugiés- cette question reste aussi intraitable que jamais. Les opinions divergent sur le classement du problème des réfugiés dans la liste des obstacles qui ont mené à l'effondrement du processus de paix israélopalestinien ; néanmoins, tout le monde est d'accord pour considérer que cette question est l'une des principaux obstacles à un accord final.

Les discussions sur la question des réfugiés a passé par différentes étapes, depuis 1991.

L'exposé qui suit passe ces étapes en revue pour tenter de mettre en évidence ce qui demeure en suspens dans ces négociations épiques israélo-palestiniennes.

La question des Palestiniens en exil est entrée dans une nouvelle phase après le séisme qui a secoué l'Europe de l'Est et le Golfe arabe au début des années 1990. Cela a été suivi par un appel à la Conférence de Madrid du 30 Septembre 1991 et le début du processus de paix pour mettre fin à ce conflit.

Le 30 Octobre 1991, les représentants du Liban, la Syrie, la Jordanie, Israël et les Palestiniens, se sont réunis à Madrid initiés par Washington et nominalement coparrainés par une URSS agonisante qui disparaîtra cinq semaines plus tard.

La conférence a établi un groupe de travail multilatéral pour traiter le problème des réfugiés palestiniens. Ces derniers étaient représentés par des délégués en provenance d'Israël, de la Jordanie (dont un contingent palestinien), de l'Europe, de l'Amérique du Nord et de l'Asie288. Palestiniens et Israéliens ont commencé les discussions par rappeler leurs positions de longue date. D'une part, les Palestiniens ont demandé à Israël de porter entière responsabilité pour la création du problème des réfugiés, et ont aussi invoqué l'article 11 de la résolution 194, demandant à Israël de permettre à tous les réfugiés désireux de retourner, de le faire dès que possible289.

Israël, d'autre part, a rejeté toute possibilité qu'un nombre significatif de réfugiés palestiniens soit autorisé à retourner dans un endroit à l'intérieur de ses frontières d'avant 1967 ; les représentants de l'Etat hébreux ont refusés de se déclarer responsables de la genèse du problème des réfugiés et ont fait valoir que tout retour significatif de réfugiés compromettrait le caractère judéo-sioniste de l'État, mettant en danger sa sécurité, et renversant son économie290.

Israël a également exprimé une objection de procédure : à son avis, une solution au problème des réfugiés ne pourrait jamais être atteinte dans un cadre multilatéral291 ; parce que selon elle, les Palestiniens, entourés des représentants de nombreux gouvernements, étrangers et arabes, vont présenter des demandes irréalisables et profiter des pourparlers pour rallier l'opinion internationale plutôt que de négocier. En particulier, les diplomates israéliens ont craint que les

288 J. Peters, «Pathways to Peace: The Multilateral Arab-Israeli Peace Talks», London: Royal Institute of International Affairs, (1996), p. 5-8.

289 E. Zureik, «Palestinian Refugees and the Peace Process», Washington: Institute for Palestine Studies, (1996), p. 89.

290 J. Tovy, «Negotiating the Palestinian Refugees», Middle East Quarterly, (2003).

291 Ibid.

Palestiniens ne cherchent à créer un front pour soutenir le « droit au retour » 292. La délégation israélienne a donc demandé que le groupe concentre ses discussions sur les aspects humains du problème des réfugiés (leur bien-être économique et social) et non sur les angles politiques (« droit au retour » et à la compensation)293.

La délégation israélienne a fini par l'emporter. En fait, pendant les deux premières séries de réunions en mai et novembre 1992, le groupe de travail a décidé de se centrer d'abord sur les questions humanitaires, ainsi que sur le sujet de la réunification des familles -qui a une dimension politique-.

Dans la Déclaration de Principes, Israël et l'OLP se sont reconnu l'un l'autre et ont ouvert un canal direct de négociations. L'accord prévoyait que les négociations sur les aspects politiques du problème des réfugiés de 1948 aura lieu plus tard dans les négociations israélo-palestiniennes directes sur un règlement permanent. Le groupe de travail multilatéral sur les réfugiés était désormais axé sur la discussion des aspects humanitaires de ce problème, en tenant compte des plans établis pour améliorer le sort des réfugiés se trouvant dans les camps. Au total, ce groupe de travail avait tenu huit réunions officielles entre mai 1992 et mai 1996, à divers endroits au Moyen-Orient, en Europe et au Canada. En Mars 1997, la Ligue arabe a décidé de boycotter toutes les négociations multilatérales, y compris le groupe de travail sur les réfugiés ainsi que le blocage général des négociations294, pour protester contre la construction des colonies israéliennes dans la Cisjordanie et Gaza. La courte vie du groupe de travail sur réfugiés avait ainsi pris fin.

En 1993, le texte négocié secrètement en Norvège par Yasser Arafat et Itzhak Rabin depuis plusieurs mois, fut dévoilé solennellement le 13 septembre à la Maison Blanche, en présence du président Bill Clinton.

Les Accords d'Oslo sont le résultat d'un ensemble de discussions menées en secret, en parallèle aux discussions publiques consécutives à la Conférence de Madrid de 1991, qui se sont déroulés entre des négociateurs israéliens et palestiniens en Norvège pour poser les premières pierres à une résolution du conflit israélo-palestinien. La Déclaration de Principes annonçait que le gouvernement israélien et l'OLP trouvent « qu'il est temps de mettre fin à des décennies de conflit, de reconnaître leurs droits légitimes (...), de s'efforcer de vivre dans la coexistence pacifique, la dignité et la sécurité mutuelles, et de parvenir à un règlement juste de paix ».

Les Accords d'Oslo de 1993, ont désignés le problème des réfugiés palestiniens comme étant une
question de "statut final", ce qui signifie qu'il a été considéré parmi les sujets qu'Israël et les

292 Ibid.

293 Rex Brynen, "Much Ado about Nothing? The Refugee Working Group and the Perils of Multilateral Quasi-negotiation», International Negotiations, (1997).

294Ibid.

Palestiniens auraient à résoudre dans un accord final d'une paix permanente. Ces accords ont soulevé plusieurs débats entre les Palestiniens concernant l'avenir des réfugiés.

Les pourparlers d'Oslo ont été achevés avec la signature de l'Accord Gaza-Jéricho le 4 mai 1994 suivi de l'Accord Israélo-palestinien de Transition concernant la Cisjordanie et la bande de Gaza, signé à Washington le 28 septembre 1995, autrement connu comme l'Accord d'Oslo II.

Au cours de la période transitoire qui a suivi les accords d'Oslo, les positions des deux parties sur la question des réfugiés sont restées nettement inconciliables chaque fois qu'il y a eu des contacts sur un accord de statut permanent. Le problème n'a pas été résolu dans les pourparlers secrets de Stockholm du printemps 2000, ni à Camp David quelques mois plus tard. En effet, à Camp David, les deux parties ont simplement répété les positions qu'elles avaient soumises à Stockholm295. Israël a refusé de reconnaître la résolution 194 et d'assumer sa responsabilité dans la création du problème des réfugiés palestiniens.

Du point de vue israélien, les Palestiniens étaient libres de rapatrier les réfugiés à un futur état palestinien, et à le nommer « retour ", mais Israël ne voulait pas reconnaître que ce droit existait296.

Selon Yasser Abed Rabbo, « à Camp David, Bill Clinton et Ehoud Barak traitèrent Yasser Arafat comme un chef indien qui en échange de bimbeloterie297, d'une bouteille de whisky et d'un revolver pour se tirer dessus, serait prêt à vendre le Nebraska ". Telles furent les prétendues « offres généreuses " faites aux Palestiniens à Camp David : absence de contenu concret et mépris moral, l'expression même indiquant un cadeau fait par un vainqueur au vaincu298.

Les deux parties ont débattu la question à nouveau en décembre, à la veille de la publication des propositions du président Clinton et immédiatement après.

Les "Paramètres" du Président Clinton prévoient que les réfugiés auront le « droit au retour", mais seulement à leur « patrie ", soit, le futur Etat palestinien. Les réfugiés qui décident de ne pas retourner auront le droit de choisir entre leur réinsertion dans leur lieu de résidence actuel ou leur réinstallation dans un autre pays. Un nouveau mécanisme international serait mis en place pour s'occuper de la réhabilitation des réfugiés à laquelle Israël pourrait contribuer, dans le cadre de sa rémunération pour les réfugiés299.

Il était devenu évident que les Palestiniens n'étaient pas satisfaits de la proposition des États-Unis relative à la question des réfugiés. La réservation palestinienne a été déclarée dans une prise de positions qui a été distribuée aux consuls étrangers à Jérusalem. Selon ce document : "La proposition des États-Unis reflète une adoption en gros de la position israélienne".

Les Palestiniens ont également annoncé que c'est aux réfugiés -et non pas à Israël- que revient le droit de décider où ils souhaitent s'installer, et qu'il n'y avait pas de précédent dans l'histoire de

295 Voir à ce sujet, M. Dumper, «Palestinian Refugee Repatriation: Global Perspectives», Routledge, (2005), p.98.

296 M. Klein, "The Jerusalem Problem: The Struggle for the Permanent Solution", University of Florida Press, (2003), p.44

297 Un mot qui signifie bazar.

298 Selon C. Cartigny, « Le Processus d'Oslo : La Paix Enterrée ", (2008), p.10.

299 The Washington Post, (Dec. 27, 2000);

U.S.A. Today, (Dec. 27, 2000);

The New York Times, (Dec. 28, 2000).

l'humanité où une nation a renoncée à son « droit au retour » et à ses terres ; "Nous ne serons pas les premiers à le faire", ont-ils affirmé.

Cette prise de position a également souligné que la reconnaissance par Israël du «droit au retour» et du droit des réfugiés de choisir où ils souhaitent s'installer, était une condition préalable pour mettre fin au conflit israélo-palestinien. La seule concession que les Palestiniens étaient prêts à envisager était celle « des mécanismes de la mise en oeuvre du «droit au retour»300 ».

En accord avec ces déclarations, la réunion du cabinet palestinien (qui a eu lieu au cours de la même semaine où Clinton avait présenté ses propositions), a pris cette décision: "La direction palestinienne confirme son engagement à respecter pleinement les droits des réfugiés à retourner dans leurs terres et leurs foyers, conformément à la résolution 194"301.

Pour ce qui est des réactions populaires, des milliers de Palestiniens ont manifesté dans les rues de Naplouse, Tulkarm et Ramallah contre le plan Clinton et pour appuyer la question du «droit au retour » 302.

En 2001, lors des pourparlers de Taba, on avait approché une solution concrète ; un texte remis par les délégués israéliens aux délégués palestiniens reconnaissait la responsabilité de l'Etat d'Israël dans « le déplacement et l'expropriation de la population civile palestinienne devenue ainsi réfugiée », et ajoutait : « Un règlement juste du problème des réfugiés palestiniens, en accord avec la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations Unies, doit conduire à l'application de la résolution 194 de l'Assemblée générale des Nations Unies».

A partir de ces principes, des solutions concrètes devaient être proposées aux réfugiés palestiniens, tant au sujet du choix de leur pays d'installation (Israël pour un nombre à déterminer, l'Etat de Palestine, le lieu de résidence ou un autre pays prêt à les recevoir) qu'en matière d'indemnisations financières. Mais le Premier ministre Ehoud Barak a cependant interrompu les pourparlers de Taba en démissionnant, provoquant ainsi les élections qui portèrent Ariel Sharon au pouvoir.

Ces négociations ont démontré qu'a partir du moment où l'on accepte de reconnaître l'histoire, les responsabilités et les aspirations des peuples en conflit, une solution peut être trouvée.

Il y a eu ensuite une initiative quasi-diplomatique, dite "Initiative de Genève" car elle a été lancée publiquement à Genève sous les auspices de la ministre suisse des Affaires étrangères303. Ses protagonistes étaient les négociateurs de Taba mais les partenaires israéliens n'avaient plus de responsabilité officielle, et comme à Taba, son élan a été brisé par Ariel Sharon.

Le modèle d'accord qui en est sorti consacre son chapitre VII à la question des réfugiés et leur propose quatre options principales :

300 Palestine Ministry of Information, "Remarks and Questions from the Palestinian Negotiating Team Regarding the United States Proposal", (Jan. 15, 2001), ( www.minfo.gov.ps).

301 The New York Times, (Dec. 31, 2000).

302 Middle East Times (international edition), (Jan. 5, 2001).

303 ( http://www.confluences-mediterranee.com/spip.php?article2001)

- un certain nombre serait admis à retourner en Israël,

- ceux qui le souhaitent rentreront en Palestine (après la création de l'Etat),

- la plupart resteront dans leur pays d'accueil avec un statut, selon les cas, soit de citoyen soit de résident étranger,

- enfin certains réfugiés pourraient demander à immigrer dans un pays tiers.

Tous recevraient une indemnité.

Néanmoins, le "texte de Genève" n'est pas satisfaisant car il n'est pas tranchant sur la question de la responsabilité d'Israel dans l'exode palestinien, d'autant que l'Etat hébreu accueillerait un quota de réfugiés dans la même proportion -si ce n'est pas moins- par rapport aux autres pays304.

Par conséquent, les Accords de Genève, comme les négociations de Taba et les « Paramètres de Clinton » avant eux, supposent que l'Etat palestinien serait la destination majeure de ceux qui souhaitent retourner dans leur patrie305.

Après l'accord de Genève, il y a eu la Feuille de Route306 du 30 avril 2003 et les Sommets d'Aqaba,307 de Charm El Cheikh308 et d'Annapolis309 mais aucun progrès tangible sur la question des réfugiés n'a été réalisé.

Depuis lors, nous suivons les chapitres de cette comédie avec moins d'entrain, les développements variant entre un gel et une poursuite de négociations.

Dans cette perspective, tout tend à faire croire qu'il est nécessaire de maintenir le statu quo, celuici constituant la situation idéale pour Israël, qui non seulement vise à préserver ses acquis, mais aspire à de nouveaux gains, profitant du temps perdu et de l'indifférence de la communauté internationale, pour construire de nouvelles colonies.

La preuve du manque du sérieux de la part des Israéliens envers le processus de paix est l'annonce faite par le premier ministre israélien310 le 5 décembre 2007 -à peine plus d'une semaine après s'être engagé à poursuivre des négociations de bonne foi avec l'OLP à Annapolis- qui visait à construire 307 nouveaux logements dans une colonie de Jérusalem-Est311.

A chaque étape du processus de paix, en échange de lambeaux de territoires où installer
l'Autorité, l'OLP avait dü multiplier les concessions, sans pourtant être en mesure d'obtenir la
suspension des activités de construction juives en territoire palestinien, qu'Israël poursuit envers

304 Ibid.

305 R. Brynen - R. El-Rifai, «Palestinian Refugees: Challenges of Repatriation and Development», International Development Research Centre, Ottawa, (2007).

306 La «Feuille de Route » (en anglais Road Map) a été adoptée par le Quartette diplomatique réuni le 30 avril 2003 comme une proposition pour mettre un terme au conflit israélo-palestinien.

Ce Quartette était composé de l'ONU, de l'Union européenne, des Etats-Unis et de la Russie.

La Feuille de route était destinée à aboutir, par étapes, à un règlement permanent du conflit israélo-palestinien, sur la base du principe de l'existence de deux États.

307 De juin 2003.

308 Du 25 Juin 2007.

309 Du 26 Novembre 2007.

310 Ehoud Olmert.

311 Z. Clot, «Il n'y aura pas d'Etat Palestinien», Max Milo, (2010), p.65.

et contre tout. La colonisation, la confiscation illégale de nouvelles terres, la destruction des maisons palestiniennes se poursuivront donc, parallèlement au processus de paix312.

Rien ne pourra exprimer cette situation tragique mieux que cette fameuse citation d'Ève Curie: « La paix à n'importe quel prix, ce n'est plus la paix».

§2- L'accord d'Oslo : Un «Versailles» Palestinien ?

Ainsi, la solution de la question des réfugiées étant la pierre angulaire de tout accord de paix, l'on se demande pourquoi elle n'a pas été traitée par les accords d'Oslo et ceux qui l'ont suivi. En effet, lorsque la Déclaration des Principes a été signée à Washington, peu de personnes savaient encore son contenu ou son impact sur le Moyen-Orient et principalement sur le sort des Palestiniens. Le lendemain de la fameuse « poignée de main » dans la Maison Blanche313, le peuple palestinien fut poignardé par la réalité qu'Edward Said a bien défini : « Appelons l'accord par son vrai nom: un instrument de la reddition palestinienne, un «Versailles»314 palestinien ». Parmi ses multiples illusions et pièges, le processus de paix a carrément ignoré les réfugiés palestiniens de 1948 ; effectivement, plusieurs déclarations officielles de la part des Etats-Unis et d'Israël ont confirmé que la résolution 194 de l'AGNU n'a pas été la base pour la Conférence de paix de Madrid qui a conduit au processus d'Oslo315.

L'accord d'Oslo a contribué à l'affaiblissement du problème des réfugiés et cela pour les raisons suivantes :

- En concentrant l'attention sur la création de territoires autonomes confiés à une Autorité Palestinienne, Oslo a été une tentative supplémentaire de liquider « la question des réfugiés ». Le règlement de la question du retour des réfugiés était différé à des « négociations finales » dont on espérait qu'elle se perdrait dans les sables de la négociation des accords intérimaires.

En faisant de la construction de « l'Etat palestinien indépendant » son objectif prioritaire, la direction de l'OLP marginalisait la cause des réfugiés, qui était pourtant la raison d'être du mouvement de libération de la Palestine316.

- Le processus d'Oslo a été dominé par une approche essentiellement politique, qui considère que le droit international applicable et les dispositions relatives aux Droits de l'Homme sont impraticables et constituent un obstacle à une solution négociable de la question des réfugiés palestiniens. L'exclusion du droit international des négociations a été la cause majeure de l'échec du processus d'Oslo.

312 Ibid.

313 Entre Arafat et Rabin.

314 Le traité de Versailles de 1919 est le traité de paix entre l'Allemagne et les Alliés de la Première Guerre Mondiale qui a imposé des sanctions énormes à l'encontre de l'Allemagne.

315 «Le droit de retour du peuple palestinien », ( http://members.tripod.com/~PSC_McGill/refugees.html).

316 Voir à ce sujet, P-Y. Salingue, « Pas de « solution juste» sans le droit au retour des réfugiés palestiniens », Mondialisation, (24 février 2008).

Dans ce contexte, nous notons que les Accords d'Oslo et la création de l'Autorité palestinienne, qui vise à établir un Etat palestinien, ont créé une grande confusion sur le sens du « droit au retour » si bien qu'il est devenu courant pour les experts internationaux de présenter l'établissement des réfugiés palestiniens dans le nouvel Etat comme étant la mise en oeuvre du « droit au retour » 317.

Il est donc nécessaire de préciser que les négociations politiques et les accords entre Israël et l'Autorité Palestinienne, n'invalident pas le droit international et les résolutions des Nations Unies. Les négociations d'Oslo représentent un effort pour obtenir une solution de facto de la question des réfugiés en dehors du cadre du droit international et des résolutions de l'ONU ; une renonciation explicite de ce droit par l'Autorité palestinienne dans un futur accord politique avec Israël ne peut pas délégitimer la revendication des réfugiés.

- Parmi les graves erreurs de ces accords c'est l'adoption des résolutions 242318 et 338319 comme fondement du dénouement de la question palestinienne, alors qu'elles n'ont rien à voir avec cette cause, et on ne trouve même pas dans leur contenu le mot Palestine ou réfugiés palestiniens et cela parce qu'elles ont été initialement adoptées pour lutter contre les effets des guerres de 1967 et de 1973 entre Israël et les pays arabes. En revanche les deux principales résolutions dans la question palestinienne ont été exclues: la résolution 181 320 qui prévoit le droit des Palestiniens à un État indépendant, et la résolution 194 de 1948, qui donne aux réfugiés un « droit au retour » et à l'indemnisation.

- Une autre omission importante à Oslo et, plus tard dans les pourparlers de Taba et les Accords de Genève, est le manque de référence pour un cadre régional qui comprend les pays voisins et les pays d'accueil. Ceci est en partie le résultat du refus d'Israël de négocier sur un accord de paix global, préférant avoir une série de traités bilatéraux.

Parmi les questions de statut permanent, seule la question des réfugiés ne peut pas être discutée ou résolue dans un contexte purement bilatéral ; Israël et l'Autorité Palestinienne contrôlent la plupart des éléments des autres questions et peuvent conclure des accords ou des compromis qui ne concernent pas directement les autres parties ; mais tout compromis ou accord conclu entre Israël et l'OLP sur la question des réfugiés va impliquer, et éventuellement mettre en péril, les intérêts vitaux des pays d'accueil et des réfugiés.

Il y a donc un risque qu'un arrangement bilatéral sur les réfugiés serait réglé au détriment des autres parties prenantes, à savoir les pays d'accueil et les réfugiés eux-mêmes.

Les pays arabes avaient longtemps réclamé un Accord de Paix « équitable » et « global » qui impliquerait un cadre multilatéral de négociations (permettant ainsi au pays arabes de mettre en commun leurs ressources de négociations collectives).

317 Voir par exemple, D. Arzt, «Refugees into Citizens, Palestinian Refugees and the End of the Arab-Israeli Conflict». New York: Council on Foreign Relations, (1997).

318La résolution 242 du Conseil de sécurité de l'ONU (22 novembre 1967).

319 La Résolution 338 (1973) du Conseil de sécurité de l'ONU adoptée le 22 octobre 1973, après le déclenchement de la guerre du Kippour.

320 Le plan du partage du 29/11/1947.

Israël (soutenue par les États-Unis), a longtemps privilégié une dynamique de négociations bilatérales (qui lui permettrait de tirer le meilleur parti de sa plus grande puissance) et s'est opposée à toute intervention extérieure autre que celle des États-Unis.

- Un autre aspect négatif d'Oslo, c'est qu'il a divisé les Palestiniens entre population à l'intérieur du territoire et réfugiés.

Cette division s'est produite lorsque les cadres politiques de l'OLP se sont réinstallés dans le territoire au terme des accords d'Oslo après 1993, devenant dans le processus : l'Autorité Nationale Palestinienne, qui est uniquement responsable des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza. Cela a eu des répercussions graves sur le peuple palestinien dans son ensemble puisque l'OLP avait opéré dans une relation étroite avec les associations de base des camps de réfugiés. En effet, les Palestiniens ont toujours résisté aux tentatives de séparer le «dehors» du «dedans» et cela depuis l'occupation israélienne de la Cisjordanie et de Gaza en 1967, lorsque Israël a tenté d'établir une direction alternative à l'OLP en exil à travers les «ligues des villages» ou d'autres mesures collaborationnistes. Plutôt que de le faire, presque tous les Palestiniens vivant sous occupation militaire dans les frontières de 1967, ont été depuis 1965 membres des mouvements qui composaient l'OLP. Pourtant, l'une des conséquences du passage d'une grande partie de l'appareil officiel de l'OLP à l'intérieur des territoires palestiniens occupés en 1994, a été que ce mouvement n'a pas seulement affaibli la représentation des réfugiés, mais a ainsi créé de nouveaux clivages avec la population de l'intérieur.

L'agression la plus grave à la souveraineté collective du corps palestinien était l'interdiction des refugiés de participer aux élections321 et de porter le passeport palestinien. Par contre au cours de cette période on a délivré des passeports au nom de l'Autorité Palestinienne pour les Palestiniens de la Cisjordanie et la bande de Gaza. En effet, le ministre de l'Intérieur a noté : « Le passeport a été délivré sur la base de l'accord du gouvernement autonome palestinien, selon les accords d'Oslo signés à Washington le 13 Septembre 1993 »322.

Le sentiment d'exclusion et de marginalisation vécu par les réfugiés a en outre été renforcée par le décalage entre les textes des accords d'Oslo et les accords de paix qui ont trouvé des solutions durables pour d'autres groupes de réfugiés, comme ceux de Guatemala, Cambodge, Rwanda, Mozambique, Bosnie et Kosovo. D'ailleurs, les instruments juridiques internationaux et les résolutions de l'ONU ont fourni un cadre pour les accords de paix, et l'élaboration de solutions durables pour les réfugiés.

Les accords d'Oslo ont rompu cette relation entre le droit et la politique, puisque, dans le contexte du conflit israélo-palestinien, le droit international et les résolutions des Nations Unies ont souvent été perçus plus comme des obstacles que comme un outil pour une solution politique négociée.

321 K. Nabulsi, «Participatory Models of Democracy and the Refugee Issue», Nuffield College, Oxford University.

322 The Register of Depopulated Localities in Palestine. ( http://www.prc.org.uk/newsite/en/resources?start=40)

§3- Le Processus de Paix : L'Autorité Palestinienne Face aux Réfugiés.

Après les accords d'Oslo, la vision que l'Autorité Palestinienne a été fortement impliquée dans un processus de renforcement de l'État et moins préoccupée par la mise en oeuvre de la résolution 194, a mobilisé les réfugiés.

Le projet de construction nationale palestinienne construite en exil semblait menacé par le processus de paix. Les hypothèses relatives à un transfert progressif des programmes d'aide aux réfugiés, de l'UNRWA à l'Autorité Palestinienne, ont été fortement contestées par plusieurs comités des camps de réfugiés qui craignaient de perdre leur droit de retourner à leurs foyers. Selon Riccardo Bocco323, au cours des années d'Oslo et par la suite, la direction de l'AP/OLP a souvent semblé percevoir les réfugiés plus comme obstacles et menaces que comme de potentiels partenaires-clés ou des acteurs ayant un aperçu crucial pour les négociations. La modification de cette approche aurait pu contribuer à remédier au sentiment de méfiance et d'opposition ressenti par de nombreux réfugiés palestiniens et ainsi attirer le soutien des refugiés, ouvrant la voie à une nouvelle dynamique de négociations participatives324.

La communauté des réfugiés palestiniens est devenue de plus en plus préoccupée par l'absence de référence au droit dans les accords de paix signés entre l'OLP et Israël ; ces réfugiés -qui constituent l'écrasante majorité du peuple palestinien- ont eu l'impression de ne plus être entendus et d'être abandonnés par leurs dirigeants. Non seulement ils se voyaient mis à l'écart d'un projet national centré sur l'expérience étatique en Cisjordanie et à Gaza, mais, de plus, la perspective d'une réinstallation permanente a réveillé de nombreuses tensions avec la société d'accueil.

La réaction face à cette situation se manifesta au milieu des années 90 : dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et en Israël, les réfugiés s'organisèrent et mirent sur pied des conférences populaires destinées à établir l'agenda et les principes de base d'une campagne commune sur le « droit au retour ». L'ampleur croissante de ces conférences aboutit, en 2001, à la création d'une coalition palestinienne pour le « droit au retour »325. Cette coalition de réfugiés palestiniens des pays arabes, d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Amérique Latine, pousse les dirigeants palestiniens à prendre leurs responsabilités, à représenter tous les Palestiniens, à défendre les droits des réfugiés et à ne pas les exclure des discussions326.

En septembre 2008, une lettre -intitulée : « Les droits des réfugiés et les négociations du statut permanent »- a été remise au président Mahmoud Abbas au nom de 78 ONG palestiniennes ; cette pétition rappelle qu'aucun reglement juste et durable du conflit israélo-palestinien n'est possible sans le respect des droits des réfugiés, et au premier plan : la reconnaissance et la mise

323 Professeur de sociologie politique à l'Institut des Hautes Etudes Internationales et du Développement (IHEID) de Genève. Il travaille actuellement sur la question de la construction de la paix et les politiques de réconciliation au Moyen-Orient.

324 R. Bocco, «UNRWA and the Palestinian Refugees: a history within history», Oxford journals, (May 2010).

325 Al Awda: www.al-awda.org.

326 M.van Belle - E. Lernout, « Mobilisation pour une paix juste», Globo, numéro 21, (Mars 2008), p.9.

en oeuvre du « droit au retour ». Le document a été signé par l'ensemble des fractions palestiniennes, y compris le Fatah et le Hamas 327.

Il peut paraître surprenant que les réfugiés n'aient jamais été sérieusement considérés comme des acteurs à part entière du règlement de paix.

Or, c'est là un élément crucial puisque, quels que soient les termes exacts de l'accord de paix, sa validité politique et opérationnelle est en fin de compte largement tributaire de l'attitude des réfugiés face aux choix qui leur seront proposés entre le retour, le rapatriement, la compensation, l'implantation définitive dans le pays d'accueil ou l'émigration vers des pays tiers.

Le « droit au retour », défini en 1948 par la résolution 194 de l'AGNU en termes individuels, comme une solution opérationnelle privilégiée au règlement de la question des réfugiés palestiniens, a pris une dimension collective depuis l'émergence de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP) dans les années 1960, et est devenu un des ferments de la construction nationale palestinienne sous la forme d'une « idéologie du retour ».

Le dilemme se précise encore avec l'adoption par l'OLP du principe d'un État limité aux territoires de Cisjordanie et de la bande de Gaza: ce renoncement à la libération de la Palestine entière inaugure-t-il une nouvelle acception de la notion de « retour », limité à ces territoires et définitivement déconnectée du lieu d'origine?

L'OLP a longtemps occulté ces questions fondamentales au nom du maintien de l'unité du peuple palestinien entre réfugiés et non-réfugiés, entre défenseurs de la conception originelle du « droit du retour », qui se focalise sur des territoires désormais situés en Israël, et militants d'un État palestinien érigé « sur toute partie du territoire palestinien qui sera libéré »328. Mais le rythme même de ces négociations illustre clairement la priorité accordée par l'AP à la récupération des territoires occupés de Cisjordanie et Gaza pour y instaurer une autorité politique palestinienne et édifier une entité nationale. Dès lors, la question des réfugiés est envisagée comme devant faire l'objet d'une solution complémentaire à celle des territoires occupés329.

Cette nouvelle conception « étatiste » de la mise en oeuvre du « droit au retour » a été reprise dans les divers plans de paix israélo-palestiniens informels qui ont vu le jour depuis la suspension du processus de paix en février 2001, des propositions de paix de Taba de janvier 2001 à l'initiative de Genève de 2003.

Cette double acception, individuelle et collective, du «droit au retour» n'est pas sans poser la question fondamentale de sa représentation politique: comment l'OLP pourrait-elle se prononcer sur des sujets qui relèvent avant tout du choix individuel des réfugiés, à commencer par le choix, préconisé dans la résolution 194 (III), entre le retour à la terre d'origine ou la réinstallation en pays d'accueil agrémentée d'une compensation.

327 Z. Clot, «Il n'y aura pas d'Etat Palestinien», Max Milo, (2010), p.189.

328 j al-Husseini « Visions palestiniennes du «droit au retour» des réfugiés, sept ans après le début de la seconde Intifada », a contrario, Vol. 5, No 2, (2008), p.43.

329 S. Akram - T. Rempel, «Recommendations for Durable Solutions for Palestinian Refugees: A Challenge to the Oslo Framework,» Palestine Yearbook of International Law, (2000-2001).

Les résolutions relatives à la question des refugiés palestiniens marquent la distinction que fait l'ONU entre, d'une part, les droits collectifs330 qui ne peuvent être exercés par aucune autre entité collective -en particulier le droit à l'autodétermination et à l'indépendance- et d'autre part, le droit inaliénable des Palestiniens au retour, droit individuel331 qui appartient a chaque individu et son exercice ne peut être négocié par personne.

Selon Salman Abu Sitta, cette option du négociateur est un gadget ; et chaque réfugié a le droit d'user de ce droit dès que possible car il n'a pas de date de péremption. L'article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme affirme le droit de chacun à quitter son pays et à y revenir ; il n'est soumis à aucun accord ou négociation internationaux et personne ne peut l'annuler.

Revenir aux racines du problème est devenue une urgente nécessité après 18 ans de tromperie d'Oslo et la perte de près d'un quart de siècle dans une lutte nationale qui a produit des institutions nationales qui n'ont pour le peuple aucune crédibilité.

Le premier axiome dans le coeur de chaque Palestinien, et dans le droit international, est que le « droit au retour » pour les Palestiniens n'est réalisé que par le retour des réfugiés « sur la terre ou dans les maisons ou dans les endroits d'où ils, ou leurs familles, ont été expulsés en 1948 et où ils n'ont pas été autorisés à revenir »332 .

Ilan Pappe fait remarquer que si les responsables politiques espèrent faire participer les réfugiés palestiniens à des futures opportunités dans leurs choix de retour, il n'y a pas de meilleurs moyens que de les connecter à ce nouvel Etat :

- en les impliquant dans le processus même du renforcement de la « future Palestine »,

- en les engageant ensemble avec les non-réfugiés, à participer au choix de la nature de l'Etat futur qu'ils veulent prendre part à créer et à habiter.

Selon ce même auteur, l'OLP/AP, doit être en mesure de représenter avant de conduire.

L'écart dans la représentation des positions de la population réfugiée a délégitimé le processus de paix, a créé une rupture dangereuse et inutile entre l'OLP et son peuple, et a conduit à la délégitimation de l'AP.

- Enfin, l'implication de la communauté des réfugiés est cruciale. La paix ne sera pas obtenue à moins que ceux qui sont intéressés pourraient effectivement être impliqués333.

La participation démocratique à son tour est fondamentale pour sauver le processus de paix.

Les réfugiés, en tant que détenteurs de droits, sont les seuls qui peuvent les compromettre: nul ne peut transiger sur leur nom.

330 Par exemple, le 22 novembre 1974, dans sa résolution 3236, et le 10 novembre 1975 dans sa résolution 3376, elle réaffirme : « a) l'exercice par le peuple palestinien de ses droits inaliénables en Palestine, y compris le droit à l'autodétermination sans ingérence extérieure et le droit à l'indépendance et à la souveraineté nationales ;

b) l'exercice par les Palestiniens de leur droit inaliénable de retourner dans leurs foyers et vers leurs biens, d'où ils ont été déplacés et déracinés. »

331 Surtout la résolution 194 de l'AGNU.

332 S. Abu Sitta, « Il est temps pour ceux qui ont les clés de leurs maisons de se lever », Middle East Monitor, (2011).

333 I. Pappe, «Were they Expelled? The History Historiography and Relevance of the Palestinian Refugee Problem», in «The Palestinian Exodus 1948-1998», G. Karmi - E. Cottran, London Ithaca Press, (1998).

Section II

Résoudre le Problème des Réfugiés Palestiniens.

§1- Le Rôle des Nations Unies dans la Résolution du Conflit Israélo-palestinien.

Conçue en 1945, l'Organisation des Nations Unies a fixé des normes élevées et épousé de nobles principes qui consacrent sa responsabilité principale: maintenir la paix et la sécurité. Pourtant, ses performances depuis sa création ont été faibles, et l'ONU a rarement été en mesure de faire appliquer les principes de sa Charte dans des actions souhaitées.

Cela a été le plus évident à l'égard du conflit au Moyen-Orient.

S'il y a une question qui engage la responsabilité directe de l'ONU, c'est bien le conflit israélopalestinien.

Nul ne peut nier qu'avec la décision de créer l'Etat d'Israël, l'ONU porte une responsabilité dans l'évolution de ce conflit. Mais cette organisation tient plus de responsabilités face à son incapacité à résoudre ce conflit âgé de plus de six décennies ; d'autant plus que certaines de ses résolutions sont le fondement de tout accord plausible.

Soixante trois ans plus tard, il n'y a toujours pas d'Etat palestinien, celui que l'on évoque devrait se satisfaire de 22% de la Palestine historique, et rien de sérieux n'est dit pour la question des réfugiés. A ce titre, les négociations apparaissent dans leur vraie fonction : donner un habillage juridique aux violations du droit334.

Le 24 novembre 2008 et à l'occasion de la « journée annuelle de solidarité avec le peuple palestinien », le Président de l'Assemblée générale Miguel d'Escoto Brockmann a estimé, que le fait de ne pas avoir créé d'Etat palestinien comme il avait été promis, est le plus grand échec dans l'histoire des Nations Unies ; et qu'il était honteux que l'on ne puisse toujours pas célébrer la naissance d'un Etat palestinien, 61 ans après l'adoption de la résolution 181.

Nous ne pouvons pas éviter l'amère ironie que le mois prochain (décembre 2008), nous célébrerons le 60e anniversaire de l'adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, qui consacre le droit à l'autodétermination de ces mêmes personnes, a dit Mr. Brockmann, ajoutant que « La communauté internationale ne devrait pas aujourd'hui ménager ses efforts pour aider à atteindre une solution conduisant à la coexistence de deux États ».

En fait, cette citation reflète une vérité amère. C'est vraiment ironique que l'institution qui a existé pour protéger les droits de l'homme, et qui prône le droit à l'autodétermination des peuples, est la même organisation qui a été responsable du déracinement d'une population entière et de la négligence de l'application des droits des Palestiniens pendant toutes ces années.

334 G. Devers, « Les réfugiés palestiniens et le droit au retour », ISM France (International Solidarity Movement), (7 septembre 2010).

Au cours des dernières décennies, au lieu de chercher à améliorer sa capacité de négociation, de médiation et de conciliation, l'Organisation des Nations Unies a trébuché, sans trop de conviction, d'un artifice à l'autre, et a rarement gagné la commande des événements ou capitalisé sur son potentiel de ramener la paix et la réconciliation dans la région, laissant les États-Unis guider le Processus de Paix au Proche-Orient en dehors du cadre des Nations Unies.

Ainsi, la question palestinienne a été retirée de son lieu naturel de traitement, l'Organisation des Nations Unies, pour être laissée entre les mains des États-Unis, qui en tant que superpuissance, bénéficient d'un monopole sur la dimension internationale.

Le processus de paix ouvert par la Conférence de Madrid a complètement marginalisé l'ONU, pour l'exclure totalement avec la Déclaration des Principes d'Oslo, qui a consacré les Etats-Unis comme unique médiateur, mettant ouvertement de côté toutes les résolutions onusiennes et les normes du droit international qui ont été remplacées par une négociation bilatérale ayant un rapport de force complètement défavorable aux Palestiniens.

L'exclusion de l'ONU du processus de paix signifiait à la fois sa marginalisation, et la suprématie de la force sur le droit ; plus grave encore a été la décision de mener des négociations de paix qui, ouvertement, mettaient entre parentheses non seulement l'ONU, comme institution, mais les règles du droit international et l'ensemble des résolutions onusiennes concernant le conflit. Pour la première fois depuis 1945, la communauté internationale donnait son aval à un processus négocié qui contredisait les résolutions de l'ONU et les normes du droit international. « Peu importe ce que disent les Nations Unies, ce qui compte c'est ce que fait Israël », a été l'un des slogans les plus populaires en Israël au cours des 15 dernières années ; c'est l'essence même de l'unilatéralisme335.

La conséquence de cette politique a été que l'Organisation des Nations Unies s'est vue divisée à cause du conflit israélo-palestinien ; on a eu d'un côté, les organismes et les commissions onusiens des Droits de l'Homme336 qui ont souligné à plusieurs reprises le droit des réfugiés palestiniens à retourner dans leurs foyers d'origine et à prendre repossession de leurs propriétés, comme ils ont aussi condamné les violations par Israël des Droits de l'Homme et du Droit Humanitaire ; quand de son côté, le Conseil de sécurité, pendant plus de soixante ans, n'a jamais cherché à prendre des mesures concrètes concernant ce conflit.

Malgré tous ses défauts et faiblesses, l'ONU offre toujours la meilleure chance de mener les parties au conflit dans le sens d'un règlement négocié ; c'est vrai qu'elle a reçu beaucoup de critiques pour son incapacité à apporter des solutions à certains des plus graves problèmes dans les relations internationales, mais cela ne signifie pas, toutefois, qu'elle est devenue inutile ou obsolète.

335 M.Warschawski, « L'ONU peut-elle sauver la Palestine ?», du « Droit pour tous ou loi du plus fort, regards militants sur les Nations Unies », CETIM, (2005).

336 Parmi eux le CESCR et le CERD.

Cette Organisation peut avoir échoué à apporter la paix dans la région, néanmoins, c'est aussi le cas de tous les autres acteurs engagés dans cet effort, mais en fin de compte, l'ONU seule apporte la légitimité internationale et la capacité de construire de vastes coalitions. L'Organisation des Nations Unies est mieux placée qu'elle ne l'était dans le passé pour remplir ce rôle, et cela pour des raisons politiques et pratiques.

Politiquement parlant, seule l'ONU comprend des Etats arabes, elle est donc la seule organisation qui peut fournir le plus large appui possible à partir de ce groupe important. En effet, le monde arabe - représentée par la Ligue arabe - a parcouru un long chemin depuis la Conférence de Khartoum en 1967337. En effet en 2002 puis en 2007, par le biais d'une initiative de paix338, les pays arabes ont tendu la main à Israël, en offrant ce que cette dernière a toujours souhaité et demandé: sa reconnaissance, sa normalisation et sa légitimité aux yeux du monde arabe. Cette initiative a été saluée par beaucoup de personnalités en Israël, par contre, même celles qui sont restées sceptiques, ont apprécié son importance comme un tournant dans l'attitude des pays arabes envers l'Etat hébreux.

Du côté pratique, aucune solution au conflit ne sera durable, si elle n'est pas largement soutenue sur le plan international ; et l'Organisation des Nations Unies est la seule à pouvoir apporter de l'ampleur et de la profondeur quant à l'appui qui est nécessaire, afin d'arriver à un accord. Pratiquement, toutes les autres possibilités ont été épuisées au cours des années.

Quelles sont les mesures à prendre par l'ONU afin de renforcer son rôle dans le conflit israélopalestinien ?

Il semble évident que les changements à la Charte des Nations Unies, comme tous les changements constitutionnels, sont souhaitables, mais il y a peu de chances qu'ils se produisent rapidement.

En dépit des déclarations publiques, les cinq membres permanents de l'ONU sont satisfaits des arrangements actuels et s'opposent à toute tentation d'élargir leur club. Selon nombreux critiques, le Conseil de sécurité reste inflexible, oligarchique et hors de contact avec le monde339. L'ONU ne peut espérer se développer et atteindre son but qu'a condition d'être en mesure de se soustraire aux pressions politiques qui l'entourent.

Cette Organisation doit «développer un esprit d'équité et d'objectivité et favoriser une
atmosphère d'honnêteté intellectuelle et d'intégrité, dans laquelle tous les gouvernements et tous

337 Où ils ont adopté les fameux «trois non» (pas de paix avec Israël, pas de reconnaissance d'Israël, pas de négociation avec Israël) comme leur politique envers le conflit israélo-arabe.

338 L'Initiative de paix arabe est une initiative pour la paix proposée au Sommet de la Ligue arabe 2002 de Beyrouth, et confirmée au Sommet de la Ligue arabe 2007 de Riyadh. Elle a pour objectif de résoudre le conflit israélo-arabe, en améliorant les relations entre Israël et le monde arabe, en échange du retrait total des Territoires occupés et d'une solution viable pour les réfugiés palestiniens.

339 http://www.globalpolicy.org/security/reform/2005/0713theses.htm

les peuples se voient placer leur confiance. Dans le cas contraire, elle ne peut pas espérer atteindre l'acceptation publique comme un acteur sérieux dans le façonnement de l'avenir»340.

Donc, pour atteindre son but, l'ONU doit puiser sa force non pas des superpuissances mondiales, mais de la société civile, c'est-à-dire l'ensemble des mouvements sociaux à travers notre planète, qui jour après jour se mobilisent pour réimposer le droit contre la force et la concertation internationale contre l'unilatéralisme.

« Là où il y a loi et principe il y a donc la force et la capacité de s'opposer », observe l'expert sur les réfugiés Guy Goodwin-Gill341.

§-2- Quelle Solution pour la Question des Réfugiés Palestiniens?

Sans aucun doute, la question des réfugiés palestiniens et leur « droit au retour » a été la plus obstinée des pierres d'achoppement qui empêchent la résolution du conflit entre Israël et les Palestiniens.

Il en est ainsi parce que pour les deux parties au conflit, le « droit de retour », plus que toute autre question, touche dans l'essence de leur histoire et de leur avenir.

L'échec des efforts de paix de se pencher sérieusement sur la question du « droit au retour » est un reflet d'une question plus large de justice historique qui a été évitée dans les diverses tentatives de résoudre le conflit israélo-palestinien.

Toutefois, le cadre des négociations établi à Oslo en 1993, qui a soigneusement évité les considérations de justice, a amené les parties à une impasse historique, résultant des dynamiques de violence sans précédents.

Les considérations de justice historique sont essentielles pour parvenir à la réconciliation dans le conflit israélo-palestinien, et cette base moralement et politiquement saine, pourrait et devrait être établie pour une solution viable à la question du « droit de retour »342. Cela pourrait être réalisé sur la base d'une conception de la justice non pas simplement corrective ni compensatoire, mais plutôt transformative. Cette conception, généralement appelée « justice transitionnelle », ne cherche pas à atteindre un équilibre entre les droits violés et les mesures compensatoires ; elle vise plutôt à établir les principes qui devraient régir la transition d'une société ou situation moralement déficientes, à une situation moralement supérieure.

De l'Afrique du Sud au Maroc, de la Bolivie au Rwanda, du Sierra Leone au Liberia et au Tchad,
ces mécanismes de justice transitionnelle, incluant des commissions dites « justice et vérité » et

340 O. Englander, «Converging for Peace: The United Nations and the Israel-Palestine Peace Process», The Atkin Paper Series, (June 2009).

341 G. Goodwin-Gill, «Refugee Identity and Protection's Fading Prospect,» Refugee Rights and Realities, Evolving International Concepts and Regimes» by F. Nicholson - P. Twomey, Cambridge University Press, (1999), p. 246.

342 Y. Peled, «The Right of Return & Transformative Justice», (2004).

des institutions similaires où victimes et bourreaux s'affrontent de façon pacifique, ont été créés343.

Et puisque les droits des réfugiés sont universels, les palestiniens doivent se voir offrir les mêmes solutions qui sont systématiquement à la disposition d'autres réfugiés dans le monde.

Ces solutions doivent s'inspirer du principe de la justice transitionnelle qui a prouvé son succès dans la résolution des conflits dont les parties, vivant côte à côte, avaient des différences fondamentales, sectaires, ethniques, raciales et religieuses etc.

Le thème de la justice transitionnelle est apparu ces dernières années comme une des disciplines en plein essor des champs plus vastes des Droits de l'Homme et de la résolution de conflits.

Alex Boraine considère que « la justice transitionnelle n'apparaît pas comme une contradiction de la justice pénale mais plutôt comme une vision plus riche, plus profonde et plus large de la notion de justice, cherchant à faire rendre des comptes aux criminels, à répondre aux besoins des victimes et à lancer un processus de réconciliation et de transformation qui donne naissance à une société plus juste et plus humaine »344.

Dans ces conditions, la justice transitionnelle se révèle comme une série d'approches adoptées par les sociétés pour résorber les conséquences des atteintes graves et systématiques aux Droits de l'Homme, lesquelles permettent de passer d'une période de conflit ou d'oppression à la paix, la démocratie, l'Etat de droit et le respect des droits individuels et collectifs345.

En théorie comme en pratique, l'objectif de la justice transitionnelle est de faire face au lourd héritage des abus, d'une manière large et holistique qui englobe la justice pénale, la justice restauratrice, la justice sociale et la justice économique. Cette justice transitionnelle est basée, de surcroît, sur l'idée qu'une politique de justice responsable doit avoir des mesures qui cherchent à la fois à établir la responsabilité pour les crimes commis dans le passé et à dissuader la commission de nouveaux crimes qui se produiraient, en tenant compte du caractère collectif de certaines formes de victimisation, ainsi que du caractère transnational de certaines autres346.

Même si la justice transitoire porte nécessairement les injustices du passé, elle est l'avenir, plutôt que le passé, elle est orientée vers tout ce qui relève du moral.

Cette justice vise à « affirmer et à restaurer la dignité des individus dont les droits relatifs à leur personne ont été violés et dont les propriétés ont étés volées. Elle vise aussi à tenir les agresseurs responsables, en insistant sur le préjudice qu'ils ont fait aux êtres humains et finalement à créer des conditions sociales dans lesquelles les Droits de l'Homme seront respectés347 ».

343 N. Odoukpe, «Reflexion sur la justice transitionnelle», (2009).

344 A. Boraine, « La justice transitionnelle », dans : « Les Ressources de la transition », Institut pour la Justice et la Réconciliation, (2005), p 19.

345 Source : Centre International pour la Justice Transitionnelle : www.ictj.org.

346 M. Freeman - D. Marotine, « Qu'est ce que la Justice Transitionnelle ? », International Center of transitional justice, (2007), p.2.

347 E. Kiss, «Moral Ambition Within and Beyond Political Constraints», in «Truth v. Justice: The Morality of Truth and Reconciliation Commissions», R. Rotberg - D. Thompson, Princeton University Press, (2000).

Ici donc, la pratique n'est pas une condition qui réduit la morale, mais plutôt c'est sa fondation.

Selon Christine Bell, les Processus de Paix en Afrique du Sud, en Israël-Palestine et en l'exYougoslavie sont parmi ceux qu'elle identifie comme étant les plus récemment traités dans la littérature de la justice transitionnelle. L'auteur a mis l'approche sud-africaine, comme première parmi ses études de cas, dans un classement sommaire des mesures des Droits de l'Homme inclus dans les différentes offres de paix. L'accord israélo-palestinien est venu en dernier. En fait, Bell soutient que « tant dans leur texte que dans leur mise en oeuvre, les accords de paix israélopalestiniens démontrent un divorce presque complet entre la notion de paix et la notion de justice348 ».

Ainsi, un nouveau processus de paix fondé sur les Droits de l'Homme et le droit international, est la seule base équitable et raisonnable pour une solution juste et durable du conflit israélopalestinien349.

Pour Mark Freeman, la justice transitionnelle, en tant que discipline professionnelle, est essentiellement axée autour de quatre mécanismes principaux :

- Les poursuites pénales (par des tribunaux nationaux, internationaux ou hybrides) ;

- Les enquêtes visant à établir la vérité sur les exactions passées (via les enquêtes nationales officielles telles que les commissions vérité, ou les commissions d'enquête internationales, les mécanismes des Nations Unies ou les efforts des ONG) ;

- Les réparations (compensatoires, symboliques, sous forme de restitution ou de réhabilitation) ;

- Les réformes institutionnelles (comprenant les réformes du système de la sécurité et les réformes judiciaires, la révocation des auteurs d'exactions des postes de la fonction publique et la formation en droits de l'homme des fonctionnaires).

La discipline englobe également plusieurs questions communes à ces mécanismes, dont en particulier, les thèmes de la mémoire et de la réconciliation350.

Pour parvenir à la réconciliation, la justice transitionnelle repose sur deux autres lettres R: La reconnaissance et la restitution.

D'une part, la reconnaissance du droit des réfugiés palestiniens au retour est aussi une reconnaissance de ce qui s'est passé pour eux, leur histoire individuelle et collective, et la reconnaissance de l'injustice qu'ils ont subi.

Depuis soixante trois ans, et les réfugiés palestiniens font savoir qu'ils ne seront pas en mesure d'accepter une compensation financière au lieu d'une réparation complete, qui inclut le « droit au retour » et à la restitution des biens.

348 C. Bell, «Peace Agreements and Human Rights», Oxford: Oxford University Press, (2000).

349 L. Welchman, «The Role of International Law and Human Rights in Peacemaking and Crafting Durable Solutions for Refugees» , BADIL, (2003)., p.6.

350 M. Freeman - D. Marotine, « Qu'est ce que la Justice Transitionnelle ? », International Center of transitional justice, (2007), p.2.

La création d'un Etat palestinien sans la pleine reconnaissance aux réfugiés du droit de retourner dans leurs foyers d'origine, ne leur offre pas des remèdes et des réparations, il limite plutôt l'autodétermination en réduisant la nation palestinienne et abandonnant de nombreux Palestiniens à un état d'exil permanent.

Par ailleurs, il est de l'intérêt d'Israël de reconnaître sa responsabilité directe dans l'expulsion massive de la population palestinienne afin de gagner une reconnaissance véritable : sa légitimité au niveau régional.

La clé d'une future paix israélo-palestinienne réside dans une réconciliation de fond qui verrait une reconnaissance de la part d'Israël de l'injustice grave qu'elle a commise envers les Palestiniens, et cela depuis 1948. Cette paix véritable ne peut naître par la force des armes, en exigeant que les réfugiés et leurs descendants qui croupissent depuis plus de six décennies dans des camps de réfugiés, acceptent que leur « droit au retour » soit simplement enterré dans les méandres de la négociation internationale. Car en définitive, comme l'exprime si justement Ilan Pappé351, politologue israélien post-sioniste: « Le «droit au retour» est la feuille de route vers la paix »352.

D'une autre part, l'option de retour ne peut être exercée sans aborder la question de l'indemnisation et la restitution des terres. La restitution est une façon d'accorder la reconnaissance aux victimes, de l'injustice historique qu'ils ont vécue, et de les indemniser pour leurs pertes matérielles réelles.

Une question importante à prendre en considération dans la discussion sur la restitution, est la forme de celle-ci. Il convient qu'elle prenne une ou plusieurs formes (parmi lesquelles les réfugiés sont libres de choisir) : restauration du statut de la citoyenneté, des biens expropriés, rapatriement et compensation monétaire, etc. 353

La restitution ouvre de nombreuses possibilités de choix pour les réfugiés :

- Le retour des refugiés dans leurs foyers d'origine et la restauration de leurs biens et propriétés, avec une indemnisation pour les dommages subis.

- Le retour dans un futur Etat palestinien, plus une indemnisation pour tous les biens laissés et dommages subis.

- L'intégration dans le pays hôte, et l'indemnisation pour tous les biens laissés et dommages subis.

- La réinstallation dans un pays tiers, et aussi l'indemnisation pour tous les biens laissés et dommages subis.

(Sans oublier les indemnités pour les souffrances vécues durant toutes ces années, et qui s'appliquent aux quatre catégories)

351 Voir, The Palestine Right to Return Coalition, Al Awda, Londres, (15 mai 2003).

352 « Le droit de retour du peuple palestinien », ( http://members.tripod.com/~PSC_McGill/refugees.html).

353Y. Peled - N. Rouhana, «Transitional Justice and the Right of Return of the Palestinian Refugees», in «Theoretical Inquiries in Law», Tel Aviv University, (2004), p.7.

En conclusion, pour comprendre l'importance de la question des réfugiés pour les Palestiniens, nous devons savoir que ce problème tel qu'il existe aujourd'hui, est né suite à l'expulsion de plus de la moitié de la population palestinienne de sa terre en 1948, et que l'un des aspects fondamentaux de la l'identité palestinienne est le « refugeehood »354. Une telle compréhension oblige toutes les parties à aborder le problème des réfugiés comme étant fondamental pour toute solution du conflit israélo-palestinien.

Il ya quatre raisons à cela355:

D'abord, aussi longtemps que les Israéliens ne prennent pas en considération ce qui est arrivé aux Palestiniens en 1948 et leur expulsion de la population autochtone de 78% des terres de la Palestine historique, ils vont continuer à négocier sur la propriété des autres 22%356.

Il n'y a pas de solution à la question foncière sans couplage avec la question des réfugiés. C'est peut-être la raison pour laquelle les accords d'Oslo ont échoué.

Ensuite, la résolution du problème des réfugiés n'est pas seulement une question technique d'absorption, ni une pure question de droit international ; il s'agit plutôt de déconstruire le conflit israélo-palestinien de ses prémisses pour bien comprendre comment ses causes ont conduit à un certain type de pratique coloniale, et à reconnaître la nécessité d'un débat pour admettre la responsabilité historique qui lui est inhérente. C'est la condition même d'une véritable réconciliation.

En outre, indépendamment du fait que la résolution finale du conflit israélo-palestinien prenne la forme d'un seul357 ou de deux Etats, la question des réfugiés ne peut pas être considérée comme secondaire ; les mesures prises par les ONG et la société civile palestinienne, ont révélé l'importance de cette question.

Enfin, et au-delà de la valeur morale et symbolique de la réalisation du retour, le droit est utile pour la création d'un cadre qui assurera aux réfugiés à choisir de rester dans leur pays d'accueil, de retourner à leurs foyers d'origine ou dans un futur Etat palestinien, ou d'être réinstallés dans un pays tiers.

Le droit de choisir est une nécessité pour ceux qui, pendant un demi-siècle, ont été forcés de vivre en tant qu'étrangers et sans droits fondamentaux dans des camps de réfugiés misérables.

Malgré tout, ces réfugiés n'ont jamais perdu l'espoir de revoir leur patrie. En effet, le penseur palestinien Edward Said a dit une fois qu'en dépit du long voyage des Palestiniens, il n'en avait jamais rencontré un seul qui ne soit optimiste sur l'avenir.

354 L'état d'être un réfugié.

355 Voir, S. Hanafi, «Why a `right of return' is necessary», Lebanon Daily Star, (7 October 2004).

356 Y compris, la Cisjordanie Jérusalem-Est et la bande de Gaza.

357 Un seul Etat binational ou fédéral.

Jusqu'à l'avènement de ce jour tant attendu, les palestiniens continuent à croire toujours et encore, et là le poète Mahmoud Darwich voit une maladie : L'espoir.

Mal palestinien par excellence, il est l'ultime remède à l'occupation :

« Nous souffrons d'un mal incurable qui s'appelle l'espoir. Espoir de libération et d'indépendance. Espoir d'une vie normale où nous ne serons ni héros, ni victimes. Espoir de voir nos enfants aller sans danger à l'école. Espoir pour une femme enceinte de donner naissance à un bébé vivant, dans un hôpital, et pas à un enfant mort devant un poste de contrôle militaire. Espoir que nos poètes verront la beauté de la couleur rouge dans les roses plutôt que dans le sang. Espoir que cette terre retrouvera son nom original : terre d'amour et de paix ».

CONCLUSION

CONCLUSION

Au cours des deux dernières décennies, les démarches adoptées pour trouver une solution au problème des réfugiés palestiniens, ont reposé entièrement sur une approche de realpolitik visant à mettre les droits à côté pour des raisons de dures réalités.

Le cadre d'Oslo pour résoudre le problème des réfugiés a été présenté comme la solution pragmatique réaliste, et ceux qui cherchaient à le critiquer étaient traités d'utopistes.

Dix-huit ans après ces accords, il n'y a toujours pas d'Etat palestinien, les guerres et les affrontements ont multiplié et les colonies israéliennes ont augmenté, mais surtout plus de six millions réfugiés palestiniens ont été abandonnés à leur sort.

Aujourd'hui, on évoque à l'unanimité l'échec de l'accord d'Oslo à trouver de vraies solutions au conflit israélo-palestinien. Cet échec, dü largement à l'absence d'un dénouement au problème des réfugiés, a renversé la théorie pragmatique reposant sur des concessions sans fin, pour consacrer « Le Droit " comme fondement de résolution des conflits.

La base de toute solution au conflit israélo-arabe passe par la question du « droit au retour " des réfugiés qui, eux, constituaient la pierre d'achoppement de toutes les négociations antérieures.

En vue de contourner le sujet sous tous ses aspects, il a été nécessaire d'étudier le « droit au retour " à la lumière du droit international.

L'existence d'un «droit au retour " est désormais un fait indéniable.

Consacré dans quatre sources du droit international coutumier : droit international humanitaire - droit international des droits de l'homme - droit de la nationalité - pratique des Etats -, le « droit au retour » des palestiniens constitue une norme contraignante pour Israël, puisque d'une part le droit international coutumier a un caractère coercitif, et d'autre part il forme une question d'obligation conventionnelle, surtout qu'Israël a déjà ratifié plusieurs conventions prônant ce droit -dont la quatrième convention de Genève-.

Dans une autre perspective, le droit collectif de toute entité de retourner dans son pays, fait partie d'un droit plus large : celui de la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes. Pour ceux qui ont rejeté ce principe sous prétexte de l'absence d'un Etat palestinien, la réponse catégorique a été donnée en 1969 par L'AGNU358 qui a reconnu le « peuple de Palestine », et en 2004 par l'avis consultatif de la CIJ qui a considéré que l'édification du mur dans les territoires palestiniens constitue une violation au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

L'Organisation des Nations Unies dont l'histoire est intimement liée au conflit israélo-
palestinien, a consacré au « droit au retour " des palestiniens un certain nombre de résolutions ;
la plus connue étant la résolution 194 de l'AGNU qui a stipulé dans son paragraphe 11 : « Il y a

358 Dans sa résolution 2535.

lieu de permettre aux réfugiés -palestiniens- qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible ».

Au fait, si les résolutions de l'AGNU sont généralement dénuées de toute force obligatoire, ce n'ai pas le cas de la résolution 194, qui, réaffirmée annuellement depuis 1948, a passé du statut d'une simple « recommandation » à une expression de la volonté internationale.

Vient s'ajouter à tout cela, le fait que le retour a été considéré par la pratique internationale comme la solution durable préférée de la communauté internationale.

Partout dans le monde, le retour des réfugiés est devenu une priorité. D'ailleurs, le problème des millions de personnes exilées a été traité dans les accords de paix, mettant fin aux conflits dans leurs pays.

Cette pratique internationale réussie qui a su intégrer les solutions durables au problème des réfugiés dans un règlement final de paix, constitue une expérience pertinente pour le cas palestinien.

A la lumière du droit international et de la pratique internationale, il est primordial qu'un futur accord sur la question des refugiés prenne en considération les éléments suivants :

- La consécration du droit international comme référence à tout accord futur.

- Le libre choix des réfugiés entre retour, rapatriement, intégration dans le pays hôte et réintégration dans un pays tiers.

En effet, le « droit au retour » ne consiste pas seulement à retourner dans son pays mais plutôt à choisir entre les diverses solutions durables (citées plus haut).

- Le lien étroit entre le retour, la réconciliation et la paix durable.

- L'adoption des principes de la justice transitionnelle. Cette justice ayant été appliquée avec succès dans des conflits similaires, a prouvé que justice et paix peuvent se concilier.

- L'inclusion des pays d'accueil dans un futur accord sur les refugiés, étant aussi concernés dans cette question que le pays d'origine.

- L'attribution à l'ONU du rôle de médiateur principal dans les négociations, qui, malgré certaines défaillances, reste la mieux habilitée à traiter du conflit du Moyen Orient.

Mais en fin de compte, les véritables succès des opérations de retour dépendent en définitive de la volonté concrète de la communauté internationale ; une communauté internationale qui prône le « droit au retour » partout dans le monde, mais qui semble oublier qu'il existe six millions de réfugiés palestiniens éparpillés à travers cette planète. Ce qui a incité Edward Said à commenter : « Il me semble indécent que Clinton soit parti en guerre, entraînant avec lui toute l'OTAN et détruisant la Serbie au nom du droit au retour des Albanais du Kosovo, et qu'il demande ensuite aux palestiniens de renoncer à leur propre droit au retour »359.

D'une part, cette citation traduit fidèlement la politique de deux poids, deux mesures adoptée à
l'égard des réfugiés palestiniens. Mais d'une autre part, elle laisse interroger sur l'étendue du

359 Le Monde, 18 Janvier 2001.

droit d'ingérence humanitaire. Cette opération de l'OTAN en Serbie, a marqué le début de la consécration d'une règle autorisant les interventions armées humanitaires.

Cependant, jusqu'à quel point les alliances stratégiques des superpuissances jouent-elles un rôle dans ce type d'interventions ?

Est-ce qu'on est devant une vision sélective où certains Etats violateurs des droits de l'homme et des droits humanitaires bénéficient d'une certaine immunité?

Sinon, de telles interventions pourraient-elles un jour être envisageables pour agir contre le blocus de Gaza qui contrevient directement aux lois internationales sur les droits de l'homme et le droit humanitaire? 360

360 Selon le communiqué du Haut commissaire de l'ONU aux Droits de l'Homme, la Sud-Africaine Navi Pillay, (novembre 2008).

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway