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Des identités de papier à  l'identité biométrique

( Télécharger le fichier original )
par David Samson
Ecole des hautes études en sciences sociales - Master 2 de théorie et analyse du droit 2009
  

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Chapitre III:La CNIL, texte réglementaire et doctrine

p. 97

B/ LA RÉFORME DE 2004: QUELLES

CONSÉQUENCES VIS-À-VIS DE LA

BIOMÉTRIE?

La loi n°2oo4-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel, qui modifie la loi de 1978, a effectivement innové en introduisant explicitement la notion de « données biométriques », et en subordonnant tout traitement automatisé privé ou public de ces dernières à une autorisation préalable de la CNIL, au lieu de se satisfaire, pour ce qui concerne le secteur privé ne remplissant aucune mission de service public, d'une simple déclaration du responsable du système de traitement de données. Secteur privé et secteur public sont désormais assujettis au même traitement, et si le régime de contrôle est assoupli pour ce qui concerne la majorité des traitements de données personnelles, le régime de l'autorisation a priori est maintenu (et renforcé pour ce qui concerne le privé) dès lors qu'il concerne, selon les mots de la directive 95/46/CE que cette loi a transposée en droit français, « les traitements susceptibles de présenter des risques particuliers au regard des droits et libertés des personnes concernées » (dir. 95/46, art. 20).

Chapitre III:La CNIL, texte réglementaire et doctrine p. 98

1. Le régime des déclarations et l'autorisation unique

L'article 25 de la loi (modifiée) de 1978, qui détaille l'ensemble des « traitements automatisés de données » soumis au régime de l'autorisation, inclut en effet « les traitements automatisés comportant des données biométriques nécessaires au contrôle de l'identité des personnes. » (art. 25, I-8°). Les « traitements automatisés portant sur des données génétiques », hors cadre médical, sont soumis au même régime (art. 25, I-2°). Le domaine de la recherche scientifique et de l'examen des caractéristiques génétiques à des fins médicales est traité à part, de manière spécifique, par l'art. 56 ainsi que par la loi de bioéthique promulguée le même jour.

De même, l'article 27 soumet « les traitements de données à caractère personnel mis en oeuvre pour le compte de l'Etat qui portent sur des données biométriques nécessaires à l'authentification ou au contrôle de l'identité des personnes » à une autorisation « par décret en Conseil d'Etat, pris après avis motivé et publié » de la CNIL (art. 27, I-2°). Le critère de « l'authentification », absent pour le régime général régi par l'art. 25, est ici introduit. On verra que c'est au nom de ce critère que la CNIL avalise l'usage de dispositifs biométriques reposant sur les empreintes digitales, stockées sur support individuel, pour les passeports; dans le privé, de tels dispositifs ne sont autorisés que pour le contrôle d'accès des personnes, justifié eu égard d'impératifs de sécurité.

On pourrait penser que la loi du 6 août 2004, par ses ajouts importants à la loi de 1978 ainsi que par l'introduction de la mention expresse des « données biométriques » dans celle-ci, aurait modifié de façon importante l'attitude de la CNIL. C'est bien ce que laisse entendre son 29e rapport d'activité, qui affirme que la loi de 2004 « lui a confié le soin d'autoriser, préalablement à leur mise en oeuvre, la création des fichiers les plus sensibles (biométrie, profilage, interconnexion ou transferts internationaux hors de l'Union européenne) » et que « la loi de 2004 a donc profondément modifié les missions de notre Commission » 232.

232 CNIL, 29e rapport d'activité 2008, p.9 (La Documentation française, 2009)

Chapitre III:La CNIL, texte réglementaire et doctrine

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Cependant, la loi de 1978, préalablement à sa modification en 2004, assujettissait tous les traitements de données personnelles mis en oeuvre par des organismes publics ou des organismes privés remplissant une mission de service public au régime de l'autorisation préalable de la Commission, tandis que seuls les traitements de données relevant du secteur privé relevaient du régime de la simple déclaration233. Aussi, en matière de données biométriques, la loi de 2004 n'a augmenté le contrôle de la CNIL que vis-à-vis du secteur privé, et l'a au contraire diminué en ce qui concerne les fichiers de « souveraineté », l'avis de la CNIL n'étant plus que consultatif (cf. chap. V).

De plus une disposition particulière de la réforme de 2004 permet à la CNIL de rétablir un régime simplifié, le responsable du traitement se contentant d'un simple « engagement de conformité ». Prévue à l'art. 25 (II) de la loi de 1978, ce dispositif d'« autorisation unique » vise en particulier à éviter un « engorgement » de la CNIL, mais il permet aussi de rétablir le régime simple de déclaration qui régissait auparavant les utilisations privées de la biométrie. Une autorisation unique ne peut concerner que des traitements poursuivant la même finalité, ayant trait à des catégories de données identiques, et s'adressant à des destinataires ou catégories de destinataires identiques. La CNIL a ainsi émis quatre autorisations uniques concernant la biométrie, l'AU-oo7 et o09 concernant des dispositifs de reconnaissance du contour de la main; l'AU-oo8 concernant des dispositifs de reconnaissance de l'empreinte digitale enregistrée sur support individuel ; et l'AU-019 concernant des dispositifs de reconnaissance du réseau veineux de la main. Il va de soi que, ce faisant, la CNIL délègue au « correspondant informatique et libertés » (art. 22) et au responsable du traitement le soin d'évaluer le bien-fondé de l'installation du système, et en particulier l'évaluation concrète de la proportionnalité des mesures de sécurité à prendre. Ces autorisations uniques excluent à chaque fois les traitements visant des mineurs, ainsi que ceux menés « pour le compte de l'Etat »,

233 Bensoussan (2008), §800. La loi de 1978, avant la réforme de 2004, prévoyait deux procédures pour le secteur public. La première permettait de passer outre à un avis défavorable de la CNIL, par décret pris après avis conforme du Conseil d'Etat. La seconde prévoyait l'avis conforme de la CNIL lorsque, pour des motifs d'intérêt public, un traitement de données faisait apparaître des données sensibles (origines raciales, opinions politiques, philosophiques ou religieuses, appartenances syndicales ou encore les moeurs des personnes). En pratique, la CNIL n'émettait en général pas d'avis non conforme, mais des avis conformes, assortis de réserves. Le législateur devait alors soit intégrer ces réserves au texte, soit les refuser et susciter un avis conforme du Conseil d'Etat (arrêt du CE du 26 juillet 1996). Cf. Herbert Maisl, « Changer la CNIL? Pourquoi faire? », in Expertises n°2oo (décembre 1996).

Chapitre III:La CNIL, texte réglementaire et doctrine p. 100

c'est-à-dire « qui intéressent la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique » « ou qui ont pour objet la prévention, la recherche, la constatation ou la poursuite des infractions pénales ou l'exécution des condamnations pénales ou des mesures de sûreté. » (L. 1978, art. 26).

Ce régime simplifié demeure toutefois exposé à d'éventuels contrôles a posteriori de la CNIL, qui peuvent conduire à un avertissement234, une mise en demeure voire à d'éventuelles sanctions pécuniaires ou encore à une dénonciation au parquet (art. 11, et art. 43 et sq.235). La CNIL a ainsi effectué 45 contrôles en 2004, 96 en 2005 et 127 en 2006236

234 Voir par ex. la délib. n°2009-002 du 20 janvier 2009 de la formation restreinte prononçant un avertissement à l'encontre de la société KEOLIS RENNES, au sujet notamment du passe Korrigo (similaire au passe Navigo).

235 Cf. aussi décret n°2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour l'application de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, titre IV « Des pouvoirs de la commission ».

236 CNIL, 27e rapport d'activité, p.32. * Et environ 270 contrôles physiques en 2009. Le Conseil d'Etat a d'ailleurs restreint ces pouvoirs de contrôle , qui doivent désormais être « préalablement autorisés par un juge » à moins que le responsable de l'entreprise ait été « préalablement informé de son droit de s'opposer. » (cf. « Le Conseil d'Etat limite les pouvoirs de contrôle de la CNIL », Le Monde, 3 décembre 2009, et communiqué de la CNIL, « Annulation de deux sanctions par le Conseil d'Etat : la CNIL prend acte et réaffirme son ambition en matière de contrôle sur place », 2 décembre 2009, et décisions n°304 300 et 304 301 du Conseil d'Etat du 6 novembre 2009).

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