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Des identités de papier à  l'identité biométrique

( Télécharger le fichier original )
par David Samson
Ecole des hautes études en sciences sociales - Master 2 de théorie et analyse du droit 2009
  

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4. Une vérification biométrique de l'identité?

Que ce soit dans le cadre du contrôle judiciaire ou administratif, le sujet contrôlé est tenu de faire la preuve de son identité « par tout moyen » (art. 78-2, al. 1), ce qui inclut tout justificatif d'identité, au sens large, que ce soit par un document comportant, ou non, une photographie (carte d'identité, passeport, permis de conduire, de chasse, carte d'étudiant, mais aussi carte Vitale, carte d'électeur, carte de donneur de sang, etc.) ainsi que la possibilité de faire appel à des témoins extérieurs.

Certes, en cas d'insuffisance des preuves, une « vérification d'identité » peut être effectuée, sur place ou au commissariat. La carte d'identité n'étant pas obligatoire, l'appréciation de la nécessité de cette vérification est laissée à l'appréciation des forces de l'ordre. En droit, la possibilité même du contrôle pouvant être conditionnée au fait qu'il soit « déjà connu », circonstance qui fournit une « raison plausible », la procédure d'identification, a fortiori celle de vérification d'identité, peut être largement fictive. Depuis 1983, et surtout 1986, cette procédure peut inclure la prise d'une photographie de la personne et le relevé des empreintes digitale « après autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction », et ce « si la personne interpellée maintient son refus de justifier de son identité ou fournit des éléments d'identité manifestement inexacts (...) lorsque [ce relevé] constitue l'unique moyen d'établir l'identité de l'intéressé8 » (art. 78-3 CPP).

875 Nous soulignons. Ce faisant, la loi n°86-1004 « relative aux contrôles et vérification d'identité » alourdit notamment les procédures prévues par la loi n°83-466 du 10 juin 1983, qui avait posé comme principe général : « Les opérations de vérification d'identité ne peuvent donner lieu à la prise d'empreintes digitales ou de photographies. »

La loi de 1983 avait admis comme seule exception à ce principe les cas où ce relevé anthropométrique était « impérativement nécessaire à l'établissement de l'identité de la personne interpellée » et était pratiqué « dans le cadre d'une enquête pour crime ou délit flagrant ou d'une enquête préliminaire ou d'une commission rogatoire ou de l'exécution d'un ordre de recherche délivré par une autorité judiciaire », et la soumettait à l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction (selon le cadre).

La loi de 1986 a été entérinée par le Conseil constitutionnel, qui a précisé qu'elle n'était pas « contraire à la conciliation qui doit être opérée entre l'exercice des libertés constitutionnellement reconnue et les besoins de la recherche des auteurs d'infraction et de la prévention d'atteintes à l'ordre public, nécessaires, l'une et l'autre, à la sauvegarde de droits de valeur constitutionnelle. » (décision n°86-211 DC du 26 août 1986)

Chapitre V:La sécurisation biométrique des documents de voyage et d'identité p. 312

A quoi ces empreintes sont-elles donc comparées? Depuis 1987876, avec le FNAED (Fichier automatique des empreintes digitales), où sont enregistrées les traces, et les empreintes dans certaines circonstances, lors d'enquêtes877, ainsi que les empreintes des prisonniers; depuis 2005, le FNAED comporte aussi empreintes palmaires et clichés anthropométriques$'$. Les officiers de police judiciaire (OPJ) ou l'autorité judiciaire doivent pour cela se référer au service d'identité judiciaire879. Par ailleurs, les empreintes relevées depuis 1987 lors d'une demande de carte d'identité peuvent aussi être comparées à celles relevées lors du contrôle s'il s'agit d'un contrôle judiciaire88°. Toutefois, lors de l'établissement de ce relevé en 1987, aucun fichier n'avait été constitué: ces empreintes sont donc conservées dans les dossiers individuels des demandeurs, ce qui complique leur utilisation à des fins d'identification judiciaire.

Par ailleurs, la loi Debré a introduit la possibilité, en cas de contrôle réglementaire, de comparer les empreintes de l'étranger appréhendé au FNAED (L611-4 CESEDA). A partir de 2006, l'accès de BIODEV II, qui enregistre les empreintes de toute personne ayant demandé un visa (qu'elle l'ait reçu ou non), est aussi étendu aux OPJ des services de la Préfecture de police, des commissariats centraux de Lille, Lyon et Marseille, « individuellement désignés et spécialement habilités (...) pour des missions de vérification d'identité » dans le cadre de l'art. 78-2

876 Décret n°87-249 du 8 avril 1987 (FNAED).

877 Les traces sont relevées dans le cadre d'enquêtes pour « crime ou délit flagrant »; « enquête préliminaire »; « commission rogatoire » ou « exécution d'un ordre de recherche délivré par une autorité judiciaire » (art. 1); pour le relevé d'empreintes, pris dans un cadre identique, il faut des « indices graves et concordants » de « nature à motiver l'inculpation » ou celui-ci doit concerner une personne mise en cause dans une procédure pénale « dont l'identification certaine s'avère

nécessaire »; le relevé des empreintes des détenus est aussi effectué pour « s'assurer » de leur « identité certaine » et « établir les cas de récidive » (art. 3). Depuis le décret n°21305-585, le FNAED comprend aussi les « empreintes palmaires ». De plus, l'art. 1 a été élargi aux enquêtes ou instructions pour « disparition inquiétante ou suspecte », tandis que l'art. 3 a été modifié pour autoriser, dans le cadre d'enquêtes précité, le relevé d'empreintes de personnes « à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission d'un crime ou d'un délit ». Conformément à l'art. 24 de la loi de sécurité intérieure de 2003, le FNAED comprend aussi « les traces et les empreintes digitales et palmaires transmises par des organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire ou des services de police étrangers en application d'engagements internationaux. »

878 Décret n°21305-585 précité. Conservées 25 ans, les empreintes relevées lors d'enquêtes « peuvent être effacées à la demande de l'intéressé, lorsque leur conservation n'apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité du fichier. » (art. 8)

879 Décret n°87-249, art. 8.

88° Décret n°87-179, art. 2-al. 2 (transféré à l'art. 6 du décret n°55-1397 instituant une carte d'identité, par le décret n°99-973)

Chapitre V:La sécurisation biométrique des documents de voyage et d'identité p. 313

et 78-3$$1. Rebaptisé VISABIO en 2007, l'accès à ce fichier est permis afin de

« faciliter » les vérifications d'identité menées dans le cadre de l'art. 78-3, ainsi que

« l'authenticité des visas et de la régularité du séjour » (en ce cas, toutefois, la consultation des empreintes digitales est exclue)882.

L'art. 78-5 prévoit en outre une peine d'emprisonnement en cas de refus de se soumettre à cette procédure, un précédent qui sera réitéré lors de l'instauration du Fichier national des empreintes génétiques (FNAEG). Le relevé anthropométrique effectué à cette occasion doit toutefois être détruit si l'identification n'est suivie

« d'aucune procédure d'enquête ou d'exécution adressée à l'autorité judiciaire » (art. 78-3). Après quatre heures de rétention, la personne doit être libérée, qu'elle ait été ou non identifiée, sauf s'il y a « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction », la rétention étant alors prolongée en garde à vue (art. 77 CPP883), ce qui peut être le cas si l'étranger est en situation irrégulière (arrêt Mpinga, 1985884). La garde à vue peut aussi être prolongée par une rétention administrative (ou une rétention en zone d'attente885) si l'irrégularité du séjour ou de l'entrée est découverte au cours de celle-ci, le juge judiciaire contrôlant la régularité de la garde à vue886.

881 Décret n°2006-470 du 25 avril 2006 (art. 4)

882 Décret n°2007-1560 du 2 nov. 2007

883 Avant la loi n°2002-307 du 4 mars 2002, cela n'était possible que s' « il existe des indices faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. »

a84 Civ. 2, 28 juin 1995, Bull. n° 212, p.122, Mme Mpinga Mesu c/ préfet du Calvados.

88 S'il est contrôlé aux frontières avec des documents falsifiés ou usurpés.

886 Trassoudaine (2001): arrêt Mpinga précité; et, transposé à la zone d'attente, Civ. 2, 24 févr. 2000, pourvoi n° 99-50.002, M. Kamyntankeu Peteiam c/ ministre de l'Intérieur ; 24 févr. 2000, pourvoi n° 99-50.001, Mlle Akueson c/ ministre de l'Intérieur (inédits).

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams