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Situation actuelle et perspectives d'avenir des exploitations familiales face à  un développement rapide de l'agro-business: diagnostic agraire, canton de Quininde ( Equateur )

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par Romain JAVAUX
Ecole supérieure d'agro-développement international Cergy, France - Ingénieur agronome international 2009
  

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3.2.5.COMPOSITION DU REVENU

Le seuil de survie de la province d'Esmeraldas est de 387,7 $/mois soit 4652 $/an, selon les valeurs du seuil de survie d'une famille de quatre membres donné par INEC en 2005. Or, de par notre étude, les familles de producteurs sont, en moyenne, au nombre de six. Nous augmentons donc, par soucis de réalité, le seuil de survie proportionnellement, soit 6978 $/an.

De plus, le revenu total d'un système de production est composé principalement par le revenu agricole (RAN) et par le revenu provenant d'activités économiques hors exploitation.

Grâce au seuil de survie du canton et aux revenus totaux générés qui donnent une bonne représentation des typologies de producteurs rencontrés via leur système de production, on peut évaluer leur durabilité, de repérer leur fragilité ou, à l'inverse, leur capacité à se maintenir, voire à se développer dans le futur (gestion de la fertilité des sols, des pâturages, des ressources en eau, etc.) dans la région.

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Tableau 12: Composition du revenu total (étude SIPAE, 2009)

Typologie

Producteur

RAN*

IOA**

Revenu Total

$

%

$

%

USD

%

Paysan sans terre

Paysan sans terre

338

8

4035

92

4 373

100

 

Paysan Semi-prolétaire

3 601

60

2496

40

6 097

100

Producteur
diversifié

Moyen Diversifié

11 212

77

2258

23

13 470

100

 

Grand Diversifié

28 934

95

900

5

29 834

100

 

Eleveur Traditionnel

10 931

59

5382

41

16 313

100

Eleveur

Eleveur Semi-technicisé

35 306

99

176

1

35 482

100

Palmiculteur

Petit Producteur

16 686

88

1993

12

18 679

100

éleveur

Grand Patronal

98 143

89

15725

11

113 868

100

Palmiculteur

Moyen Capitaliste

86 579

100

?***

?

86 579

100

Grand Capitaliste

555 360

100

?

?

555 360

100

 

*nous avons enlevé les salaires permanents de chaque système de production de la VAN totale

**ratio économique consacré à des activités hors UPA d'une année

*** il a été difficile d'obtenir des informations sur les autres activités que réalisent ces producteurs, c'est pourquoi il a été considéré que 100% des revenus proviennent de la RAN

Le revenu du paysan sans terre dépend du travaille disponible des propriétaires terriens (environ 10 à 11 mois par an selon les entretiens réalisés), étant principalement les Grands Capitalistes ou Grands patronaux. Lors de son temps libre, il cherchera à vendre sa force de travail (le paiement se fera généralement quotidiennement). Pour autant si ces familles paysannes sans terre travaillent toute l'année, elles n'obtiennent qu'un revenu total de 4373 $ par an : ce qui est en dessous du seuil de survie de la province.

La RAN du Paysan Semi-prolétaire est en dessous du seuil de survie : son système de production ne lui permet pas d'assurer une sécurité alimentaire. Il vend donc sa force de travail à l'extérieur de son exploitation, d'où plus de 40% de ses revenus sont hors exploitation. Pour autant, d'après INEC29, il y a 18 % de chômage au sein de la population du canton de Quininde. Il n'est donc pas si facile d'avoir du travail rapidement. De plus, en admettons qu'il arrive à avoir un emploi externe, son revenu total reste encore inférieur au seuil de survie du canton (voir annexe 2).

Du fait que ses exploitants sont en décapitalisation, étant dans un processus de concentration de terre, et n'ayant pas d'aides de l'état (majoritairement absent dans le canton) ni d'accès à des crédits légaux (pas de titre de propriété), cette faible rémunération peut être une des raisons pour nombreux de ces paysans de quitter leur terre (souvent racheté par de grandes firmes) pour migrer vers les villes ou devenir salarié de grandes exploitations (Paysans sans terre).

29 Selon le dernier recensement de INEC en 2005

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Ces deux systèmes sont donc vulnérables via leur capacité à se reproduire et à assurer leur pérennité dans le temps. De part la nouvelle constitution de 2008, l'Etat devrait intervenir en faveur de ces économies paysannes pour contrer cette dynamique d'exode rural, de paupérisation des campagnes.

Il est important de définir des lois protégeant ces exploitations familiales en termes d'accès à la terre, appuyer de meilleures filières de commercialisation pour une meilleure redistribution de revenu, ainsi que mettre à disposition des services agricoles pour une meilleure valorisation de leur effort de travail.

Au contraire du Semi Prolétaire, le Moyen et Grand Diversifié génèrent un revenu total, générée à plus de 77% par leur RAN, deux à quatre fois plus élevé (jusqu'à plus de 29 000$) que le seuil de survie. Néanmoins, leurs systèmes de culture peuvent être vulnérables aux fluctuations de marché, aux périodes de sécheresse, etc. Le fait d'avoir un titre de propriété donne accès à des lignes de crédits, donc à des opportunités, par manque de capital de départ, pour planter de nouvelles cultures.

De plus, pour ces types d'exploitation familiale, la SAU est un facteur essentielle de développement. Du fait d'une grande pression foncière dans le canton, il est important légaliser sa SAU afin de sécuriser son exploitation aux yeux de l'Etat. Dans le cas contraire, ces producteurs peuvent avoir tendance à fragmenter leur propriété foncière et donc devenir Paysan Semi-prolétaire.

Rappel : les titres de propriétés sont encore très peu présents chez ces économies paysannes (40% des producteurs du canton n'en ont pas).

Le Grand Diversifié est le type de producteur le plus adapté à la zone amont de notre étude. Bien que l'état devrait développer les réseaux de communication, ainsi qu'avoir une main mise sur les centre de commerce, afin de réguler les prix et de les développer, à l'heure d'aujourd'hui où cette zone est isolée de croissance économique, il est important que les économies paysannes puissent se suffire à elle-même en termes de travail à l'année dans l'exploitation, ce que fait ce système de production (son RAN est générée à plus de 93% par la force de travail familiale).

Dans un contexte d'une majorité de petites exploitations familiales en processus de fragmentation des terres, donc de fragilité de leur système de production dans le temps, il est important que l'Etat mette en place des manoeuvres politiques et institutionnelles permettant de légaliser plus aisément leur exploitation.

Ainsi, avec un accès à la terre et à des services, la tendance des Producteurs Diversifiés sera le

Grand Diversifié : son système de production permet de fixer les populations rurales (sa RAN représente 95% du revenu total). Il garantit un bon niveau de vie des familles paysannes dans le canton avec une SAU peu élevé (voir annexe 3). De plus, il alimente le marché local par une diversité de produits vivriers, jouant donc un rôle de sécurité alimentaire à l'échelle locale et de souveraineté alimentaire au niveau nationale.

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Grâce à un bon accès à la terre (44 ha), la stratégie de l'éleveur traditionnel repose en partie sur un système extensif (83% de sa SAU). Il obtient un revenu total de 16 313 $ (deux fois moindre qu'un Grand Diversifié ayant une SAU de 9 ha), provenant donc à plus de 41% de son travail hors exploitation. Son système de production alimente qu'une petite partie du marché locale par la vente de lait et de fromage frais et ne génère que peu d'emplois extérieurs. Pour autant, ce système fait bien travailler sa famille.

A l'inverse, l'éleveur Semi technicisé, ayant un plus grand accès à la terre (155 ha) et de meilleure qualité, a un revenu total de plus de 35 000 $ reposant à 88% sur son système d'élevage. De part une mécanisation du travail, il génère beaucoup moins de travail à l'hectare que l'éleveur traditionnel. Pour autant sa mains d'oeuvre est à 97% salariale. Son système de production assure une production de lait et de viande plus importante, vendue sur le marché local et national.

Remarque : à fur et à mesure, la tendance de cet éleveur pourra devenir un grand patronal, du fait qu'il remplace petit à petit son pâturage par de la palme.

Bien que ces Eleveurs produisent une quantité de lait et viande non négligeable pour la population rurale et nationale, leur système de production ne répond pas à la fonction sociale (ne génère que peu de travail comparé à d'autres type d'exploitation), économique (peu de valeur ajoutée à la terre) et environnementale (ces systèmes d'élevage concentre la terre et l'eau) de la terre supposé par l'Etat30.

Faut-il redistribuer une partie de leur terre à de petits paysans diversifiés ? Ou faut-il laisser perdurer ces systèmes d'élevage et se préoccuper des grands propriétaires terriens via la redistribution de terre et via les fronts de colonisation des terres en friche ?

Grâce à la présence de services, de crédits dans une zone à fort dynamisme économique, le Petit Producteur a eu un coût d'opportunité pour mettre en place ce système de production. Il génère un revenu totale moyen de 18 679 $ assurée à 88% par sa RAN. Ce type d'exploitation répond aux fonctions de la terre et aux problématiques du canton.

En effet, son système de production lui assurent un travail et un bon niveau de vie stable. De plus, il participe à réduire la pauvreté et le chômage dans le canton en employant des salariés permanents. Il contribue à la souveraineté alimentaire de part ses systèmes de cultures diversifiés, et il cultive pour moitié de superficie, la palme profitant à la stratégie économique de l'Etat, recevoir ses devises à l'exportation. De plus, sa SAU a une moyenne de 17 ha ce qui ne crée pas de pression foncière, et donc, il ne participe en aucun cas au problème de concentration de terre présent dans la zone (voir annexe 4).

Cet équilibre entre peu d'utilisation des ressources naturelles et richesse produite, entre autonomie et travail généré, entre sécurité alimentaire et profit de l'Etat, doit être un exemple d'exploitation type pour l'Etat, à le promouvoir, et à le fixer dans le temps pour les systèmes d'exploitations dans la zone avale du canton.

30 la fonction de la terre sera expliquée dans la partie suivante

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Le revenu total est très important chez le Grand Patronal, plus de 110 000 $ provenant à 89% de sa RAN (voir annexe 5). Le temps qui n'est pas consacré à l'administration et au contrôle de ses travailleurs est dédié à son propre négoce qui se trouve généralement dans la ville de Quininde. Sa stratégie actuelle est de remplacer, ses parcelles dédiées à l'élevage par de la palme. C'est pourquoi il a une RAN trois fois plus élevé que l'éleveur semi-technicisé. Sa vision future serait donc de devenir un Grand Capitaliste.

Les Palmiculteurs tirent leurs revenus totaux uniquement de leur RAN étant elle-même générée par un seul système de culture, la palme africaine (voir annexe 6). Du faite qu'ils ont les meilleures terres du canton, des accès à de grands investissements de départ (capital propre, crédit), ainsi que des services importants (semences améliorées, « package » agrochimiques de part les extracteurs, formation agricole), et une bonne filière de commercialisation, ces avantages les placent, d'un point de vue économique, dans les systèmes de production les plus performants.

De plus, de part leurs performances économiques, le Moyen et Grand Capitaliste, mais aussi le Grand Patronal, génèrent au total le plus d'emplois contractualisés du canton. A première vue, cette création de travail est un avantage pour absorber la population sans travail. Avec plus de recul, on se rend compte que la main d'oeuvre employée fut celle dépossédée de leur terre. En effet, pour la plupart, anciens Producteurs Diversifiés, par manque de sécurité foncière, ils durent vendre leur propriété et migrer lors de l'implantation massive de ces grandes propriétés « agro-business », créant cette pression foncière actuelle au niveau du canton.

Leurs impacts dans la zone provoquent des inégalités énormes au niveau du foncier (concentration des terres, dépossession et paupérisation des agricultures familiales). Leur impact environnemental n'en est pas moins important : il y a de plus en plus de pollution des rivières, du fait que les intrants chimiques pour ces cultures « extensives et intensives » sont énormes, contaminant les nappes phréatiques étant de plus en plus exploitées.

Bien que ces trois types de producteurs ont des exploitations durables, en pleine expansion économique et de superficie dans le temps. En rapport avec tous les problèmes que cette monoculture extensive engendre, l'Etat devrait mettre en place des restrictions et des contrôles réguliers pour limiter leur accès au foncier et à l'eau. Ces producteurs n'entrent pas dans une logique d'égale répartition des terres, des ressources naturelles ni d'un développement global pour tous. De plus, les grandes exploitations capitalistes ne participent en rien à la souveraineté alimentaire du pays, au contraire, elles la dégradent.

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De part les performances économiques, nous avons pu expliquer les typologies de producteurs dans la zone et ainsi, montrer leur stratégie de développement propre à chacune d'elle.

En contexte d'augmentation croissante des systèmes agro-entrepreneuriales, les systèmes diversifiés des économies familiales sont de plus en plus vulnérables, forcés de disparaître pour certains, à changer leur main d'oeuvre familiale par une force ouvrière dans des grandes exploitations.

Cette dynamique industrielle augmente donc les inégalités foncières, les répartitions des richesses provoquant un exode rural croissant et donc, une pauvreté des campagnes. On assiste à une perte de diversification des systèmes de culture au profit de la monoculture de la palme africaine au sein de ce canton :

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Figure 15: Evolution dans le temps de la situation du canton de Quininde (étude SIPAE, 2009)

Les systèmes diversifiés, pouvant valoriser au mieux la richesse de la terre ainsi que le temps de travail à l'hectare, participent pour beaucoup à l'alimentation des villes et des campagnes, ainsi qu'ils participent à une utilisation équitable et durable des ressources naturelles.

De part la prise de conscience récente de l'Etat via les problèmes socio-économiques et environnementales qu'engendre cette politique agro-exportatrice non réécrite depuis 1994, cette nouvelle constitution, qui est mise en place depuis 2008, doit réellement inverser la tendance, ou tout du moins trouver un équilibre entre l'agro-industrie et les exploitations familiales.

Dans le point suivant, nous allons montrer les opportunités, les alternatives qu'ont les économies paysannes à l'heure actuelle pour se développer, et aussi, insister sur les points importants de cette nouvelle constitution afin de créer réellement, un environnement de développement global et durable entre toutes les typologies de producteur dans le canton.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon