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Le trafic international de faux documents d'identité


par Jean-Michel HAZIZA
Université de Pau et des Pays de l'Adour - M2 Police et sécurité intérieure  2019
  

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Conclusion du Titre I

335. Qualifications prospectives. La matière juridique n'appréhende pas, en apparence, le trafic de faux documents d'identité. En réalité, des propositions de qualifications juridiques du phénomène se dégagent grâce à l'emploi d'une analyse prospective. Le caractère inédit de cette qualification prospective réside dans le fait d'avoir intégré les éléments constitutifs des infractions de faux et d'usage de faux dans un milieu criminel non encore étudié par les juristes : une organisation criminelle internationale de trafiquants. Or, puisque le trafic de faux documents d'identité représente une telle menace internationale, notamment en s'incorporant dans d'autres organisations criminelles, il a été nécessaire de qualifier tous les mécanismes internes de la structure, pour trouver des solutions adaptées. Grâce au découpage des éléments constitutifs des infractions de faux et d'usage de faux documents d'identité - conditions préalables, élément matériel et élément moral - il a été possible de les relier entre eux par des liens de connexité et d'indivisibilité, permettant de mieux comprendre les mécanismes juridiques internes au trafic de faux documents d'identité.

336. Intérêts de politique criminelle. Deux intérêts majeurs de politique criminelle se sont dégagés de ce travail de qualification prospective, provenant de l'existence de liens indivisibles entre les infractions et les trafiquants. En qualifiant les liens d'indivisibles de l'ensemble des infractions de faux documents d'identité, lorsque l'un des éléments constitutifs a été commis en France, le juge français aura l'obligation de proroger sa compétence judiciaire et législative. En plus, la vente secrète du faux document d'identité produit une coaction par le rouage d'un lien causal étroit entre les trafiquants. Ainsi, il est admis de contracter l'ensemble des qualifications pénales ayant affaire au trafic uniquement autour de la seule opération de vente. Cet acte de vente entre dans la catégorie des « infractions continuées ». Le but de contracter l'ensemble des qualifications des infractions commises au sein du trafic de faux documents d'identité au point culminant de la vente secrète du faux support d'identité est de pouvoir démanteler des filières de trafiquants.

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337. Transition. Pour que cet objectif soit réalisable, les instances pénales doivent avoir les possibilités et les moyens de rapporter les preuves matérielles relevant des infractions de faux et d'usage de faux commises au sein de l'organisation criminelle de trafiquants. Pour révéler le secret du commerce illicite des faux documents d'identité, qui est sans nul doute le leitmotiv des trafiquants, il faut proposer une surveillance policière inédite applicable à ces infractions pour récolter un maximum d'indices matériels.

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Titre II : Proposition d'une surveillance policière inédite au sein d'une organisation criminelle internationale de trafiquants de faux documents d'identité

338. Réponse pénale inédite dérogatoire au droit commun. Pour lutter contre le trafic illicite de faux documents d'identité, la réponse pénale doit être inédite, en harmonie avec les nouvelles formes de criminalité et les nouveaux types de criminels. Or, que l'organisation criminelle internationale de trafiquants soit qualifiée d'association de malfaiteurs ou de bande organisée, le fondement juridique qui se dégage de ces deux types d'associations de criminels spécialisés dans le commerce des faux documents d'identité reste le même, celui de la criminalité et de la délinquance organisées. En ce sens, l'application d'un droit pénal relevant du droit commun doit être évincée au profit de l'application d'un droit pénal exorbitant du droit commun, fondé sur les articles 70673 et suivants du CPP. Grâce à l'existence d'un cadre d'enquête dérogatoire au droit commun, les forces de police disposent nécessairement de plus de prérogatives pour contrôler les faits délictueux internes au trafic de faux documents d'identité, pour ainsi révéler tous les indices matériels graves et concordants prouvant la culpabilité des trafiquants. En effet, des « procédés probatoires dérogatoires du droit commun tendent à scinder la procédure pénale et à l'orienter vers un recours accru à l'exception »393. C'est alors qu'une approche inédite entre en jeu pour résorber progressivement la lucrativité du trafic de faux documents d'identité et sauvegarder les intérêts fondamentaux de la Nation : la surveillance policière.

339. Définition de la surveillance. Par définition, la surveillance est « une action policière consistant à surveiller des personnes suspectes ou des milieux à risques, pour prévenir des actions délictueuses ou criminelles, pour garantir la sécurité publique »394. C'est par cette simple définition qu'il sera possible de récolter un maximum d'indices matériels prélevés au sein de l'organisation criminelle internationale de trafiquants de faux documents d'identité, afin d'assurer la sécurité des biens et des personnes sur le territoire de la République, et en dehors.

393 LAZERGES (C.), « La dérive de la procédure pénale », RSC, 2003, p. 644.

394 http://www.cnrtl.fr/definition/surveillance

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340. Plan inédit. Deux méthodes inédites de surveillance policière seront proposées : une surveillance policière matérielle du parcours international des documents d'identité falsifiés par une organisation criminelle internationale de trafiquants (Chapitre I) ; une surveillance policière personnelle du parcours international des trafiquants de faux documents d'identité (Chapitre II).

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Chapitre I : Proposition d'une surveillance policière inédite sur l'acheminement international des documents d'identité falsifiés par une organisation criminelle internationale de trafiquants

341. Régime spécialisé de la surveillance policière sur l'objet du trafic. La surveillance policière à l'étude relève de « l'activité du renseignement »395 prévue aux articles L.811-1 et suivant du livre VIII du Code de la sécurité intérieure (CSI). Concrètement, « l'activité de renseignements est définie comme une politique publique concourant à la stratégie de sécurité nationale ainsi qu'à la défense et à la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation. Elle relève de la compétence exclusive de l'État »396. L'article 811-2 du CSI dispose que l'activité du renseignement est confiée à des « services spécialisés ayant pour mission en France et à l'étranger, la recherche, la collecte, l'exploitation et la mise à disposition du gouvernement des renseignements relatifs aux enjeux géopolitiques et stratégiques ainsi qu'aux menaces et aux risques susceptibles d'affecter la vie de la Nation. Ils contribuent à la connaissance et à l'anticipation de ces enjeux ainsi qu'à la prévention et à l'entrave de ces risques et de ces menaces »397. Or, le vocable « services spécialisés » sous-entend les services de police, de gendarmerie et de douane qui sont mandatés par le gouvernement398 sur le territoire national ou en dehors du territoire national par des mécanismes d'entraides policières internationales pour rechercher les potentielles atteintes à la Nation, où il est possible de faire entrer la menace du trafic international de faux documents d'identité399.

395 CATELAN (N.), « Les nouveaux textes relatifs au renseignement : un moindre mal », RSC, 2015, n° 922.

396 Ibid.

397 Ibid.

398 Ibid : « Conformément à l'article L. 811-2, les services spécialisés de renseignement sont désignés par décret en Conseil d'État. En vertu du nouvel article R. 811-1 CSI, il s'agit de la direction générale de la sécurité extérieure, de la direction de la protection et de la sécurité de la défense, de la direction du renseignement militaire, de la direction générale de la sécurité intérieure, du service à compétence nationale dénommé « direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières », et du service à compétence nationale dénommé « traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins ».

399 Le trafic international de faux documents d'identité, considéré comme une association de malfaiteurs et/ou une bande organisée, entre dans le champ d'application de l'article L.811-3 6° du CSI, qui dispose que les services de renseignements peuvent utiliser des méthodes d'investigation spéciales prévues au Titre V du CSI dans le cadre de « la prévention de la criminalité et de la délinquance organisée ».

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342. Plan. Ainsi, des services de renseignements opérationnels et/ou non opérationnels sont en mesure de tenter une surveillance policière sur l'acheminement matériel des faux documents d'identité (Section I) et sur l'acheminement intellectuel de ces derniers (Section II).

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Section I. Une surveillance policière inédite sur l'acheminement matériel des faux documents d'identité

343. Utilisation des outils de la haute police. « Détecter et comprendre les formes de criminalité, notamment organisées, qui sont impliquées dans la fabrication, la diffusion et/ou l'utilisation de faux documents d'identité est un enjeu complexe et persistant, mais une nécessité pour soutenir l'action de sécurité et l'étude des phénomènes criminels »400. Traditionnellement, « les différents outils proactifs de surveillance relèvent plus de la haute police, la police politique et le renseignement, que de la basse police, la police judiciaire »401. Ces outils proactifs consistent à voir un possible suspect dans toute personne innocente. Désormais le législateur français, ayant intégré les techniques de la haute police au sein de la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement, confie indirectement à la police judiciaire « une mission de renseignement dont la finalité n'est pas la manifestation de la vérité pénale, même si elle n'est pas incompatible avec celle-ci »402. Cette mission de renseignement concerne précisément des actes de « surveillance des personnes et des biens »403 sur l'association et/ou le groupement organisé de trafiquants de faux documents d'identité. En ce sens, les OPJ sont habilités à surveiller tout le territoire national, sur le fondement de l'article 706-80 du CPP, voire au-delà grâce aux accords Schengen, à propos de « l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission »404 des infractions de faux, de détention et d'usage de faux documents d'identité « ou servant à les commettre »405. En l'occurrence, les actes opérationnels des services de police spécialisés concernent l'acheminement matériel du support d'identité falsifié par-delà les frontières, support servant à commettre les autres infractions de faux.

400 BAECHLER (S.), BOIVIN (R.), MARGOT (P.) « Analyse systématique des faux documents d'identité à des fins de renseignement criminel: vers la construction de connaissances sur la criminalité par l'étude de trace matérielle », RICPTS, Vol. LXVIII, n° 3, juillet-septembre 2015. p. 315.

401 BRODEUR (J.-P), Les visages de la police. Pratiques et perceptions, Presses universitaires de Montréal, 2003, p. 20.

402 ROUSSEL (G.), « Police judiciaire », Rép. pén., septembre 2014 (actualisation : janvier 2018), n° 15.

403 BUISSON (J.), « Enquête préliminaire », Rép. pén., avril 2018 (actualisation : janvier 2019), n° 187.

404 Ibid., n° 196.

405 Ibid.

344.

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Plan. Les services de renseignement peuvent tenter une surveillance de la trace matérielle de la marque de fabrique à l'origine de la falsification du document d'identité (I), et une surveillance de la trace matérielle des voies de circulation transfrontalières de la marchandise falsifiée (II).

I. Une surveillance policière sur l'origine de la trace matérielle de la marque de fabrique du faux document d'identité

345. Méthodes discrètes. Deux méthodes de surveillances policières discrètes sont envisageables pour trouver l'origine de la trace matérielle de la marque de fabrique du faux document d'identité : soit par la méthode du profilage (A) soit à l'aide d'experts documentaires à l'échelle de l'Union européenne (B).

A) Une surveillance policière sur la marque de fabrique du faux document d'identité par la méthode du profilage

346. Décomposition. La méthode du profilage se découpe en deux phases : la première consiste à récolter les sources matérielles des faux documents d'identité résultant de la combinaison du savoir, de l'avoir et de l'être des faussaires (1), avant de pouvoir envisager le modus operandi propre à chaque faussaire apportant la preuve de l'existence d'une marque de fabrique (2).

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams