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Thomas Sankara et la condition féminine: un discours révolutionnaire?

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par Poussi SAWADOGO
Université de Ouagadougou - Maà®trise sciences et techniques de l'information et de la communication 1999
  

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CHAPITRE I :

AUX SOURCES DU DISCOURS FÉMINISTE DE SANKARA

Le discours féministe de Sankara n'apparaît pas dans l'évolution de la pensée politique africaine ex nihilo. Le leader burkinabé est l'héritier de théoriciens qui l'ont précédé dans la voie de l'émancipation féminine « ouverts à tous les vents de la volonté des peuples et de leurs révolutions, nous instruisant aussi de certains terribles échecs qui ont conduit à de tragiques manquements aux droits de l'homme, nous ne voulons conserver de chaque révolution que le noyau de pureté »66(*).

Les références sont autant tirées de la Révolution russe de 1917 que de la Révolution française. Retrouver les sources de la pensée sankariste est une recherche très ample, puisqu'il est possible d'identifier à la fois des traditions politiques dans laquelle s'inscrit Sankara de manière implicite et des textes précis dont le leader avoue s'inspirer sur le plan idéologique.

1.1 LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

Que la Révolution française ait été un point de référence pour les Révolutionnaires des XIXe et XXe siècle est incontestable.

L'ouvrage, Les Chaînes de l'esclavage de Marat, incitant le peuple à une radicalisation de la révolution, n'a-t-il pas inspiré plus d'un ? Dans le domaine des revendications féministes, Condorcet et Olympe de Gouges restent des figures emblématiques qui ont marqué les esprits révolutionnaires.

Pour Condorcet, les femmes représentent la moitié de l'humanité. Aucun progrès politique, aucune régénération de la société ne sont possibles sans elles. Il s'attaque à l'ordre ancien pour transformer la société radicalement. Conscient que la loi peut transformer les mentalités, Condorcet s'investit dès 1789 pour la mise en place d'une structure législative appropriée. De telles mesures devaient rendre justice aux femmes. Il réclame l'égalité des droits entre les sexes. « N'est ce pas en qualité d'être sensibles capables de raison, ayant des idées morales que les hommes ont des droits ? »67(*).

L'exclusion, selon lui, est obscurantiste. L'argumentation fondée sur des raisons d'ordre physiologique est ridiculisée. Condorcet précise que la femme n'a pas de comportement ou de capacité qui la distingueraient de l'ensemble de l'humanité. Il affirme qu'on a tiré parti d'arguments anatomiques et physiologiques pour masquer la prise de pouvoir des hommes sur les femmes. Les limites que l'on peut observer sur le plan intellectuel ne sont pas imputables à leur intelligence, à leur mode de raisonnement mais bien à des données éducatives, sociales et culturelles.

L'instruction est le mot clé de Condorcet. Dans Mémoires sur l'instruction publique (790), il pose comme principe : « le défaut d'instruction des femmes introduit dans les familles une inégalité contraire à leur bonheur »68(*). L'instruction est donc la voie d'accès à l'égalité future.

Olympe de Gouges, dès 1791, emprunte la même voie que Condorcet. Elle revendique l'égalité politique pour les femmes au nom de la nature, donc des principes de la révolution69(*).

Olympe de Gouges élabore en la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » qui s'articule comme la Déclaration des droits de l'homme70(*). Elle lutte pour l'accès des femmes à la gestion de la chose publique à côté de l'homme. Sa Déclaration est un instrument pour atteindre ce but : « J'offre un moyen invincible pour élever l'âme des femmes, c'est de les joindre à tous les exercices de l'homme, si l'homme s'obstine à trouver ce moyen impraticable, qu'il partage sa fortune avec la femme, non à son caprice, mais par la sagesse des lois. Le préjugé tombe, les moeurs s'épurent »71(*)

Cette révolutionnaire construit sa déclaration en seize articles qui mettent en avant le rôle incontestable de la femme dans la gestion de la cité. La femme doit bénéficier, comme l'homme, de la protection de la loi. L'article I porte sur l'égalité entre les sexes : « La femme naît libre et demeure égale à l'homme en droits »72(*). L'article IV exige une réforme des lois pour rendre justice aux femmes : « La liberté et la justice consistent à rendre tout ce qui appartient à autrui, ainsi l'exercice des droits naturels de la femme n'a de bornes que la tyrannie perpétuelle que l'homme lui oppose : Ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison.  ». Seuls les vertus et les talents de la citoyenne ou du citoyen doivent expliquer son accès aux places et aux emplois publics. L'article XI rompt avec l'ordre ancien. Il aborde la liberté d'expression des pensées et des opinions et proclame le droit de la femme à faire connaître que l'enfant est aussi le sien. « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de la femme, puisque cette liberté assure la légitimité des pères envers les enfants. Toute citoyenne peut donc dire librement, je suis mère d'un enfant qui vous appartient, sans qu'un préjugé barbare force à dissimuler la vérité, ». Olympe de Gouges revendique la participation de toutes les composantes de la société à l'élaboration de la constitution. Elle conclut sa déclaration en ces termes : « La constitution est nulle, si la majorité des individus qui composent la nation, n'a pas coopéré à la rédaction. »

Instruction, émancipation politique, volonté d'inscrire la femme dans le processus révolutionnaire qui s'amorce sont autant de thèmes majeurs que l'on retrouve dans la pensée de Sankara et dans son programme politique.

* 66 MARTENS (L), op. cit., p. 250.

* 67 CONDORCET, Lettre d'un bourgeois de Newhaven, 1789, Cité par KRIEF (H) dans un cours destiné aux étudiants de MAST1 (Licence) du département d'Arts et Communication (FLASHS-U.O). Le cours est intitulé : Discours romanesque et idéologies, année académique 1997-1998.

* 68 Cité par KRIEF (H) dans le cours Discours romanesque et idéologies, indiqué plus haut.

* 69 GENGEMBRE (G), A vos plumes citoyens ! Ecrivains, journalistes orateurs et poètes, de la Bastille à Waterloo Paris. Gallimard, 1988, p. 171.

* 70 GENGEMBRE (G), op. cit., p.172

* 71 GENGEMBRE (G), op., cit., p. 171.

* 72 GENGEMBRE (G), op., cit., p. 172.

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