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L'impact des décisions administratives sur le suivi éducatif des mineurs étrangers isolés et des jeunes majeurs en France

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par Roland TCHOUAGA
Institut national de formation et d'application - Diplome d'état d'éducateur spécialisé 2006
  

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7) Positionnement de l'éducateur dans sa relation

Dans le cadre du travail auprès du mineur étranger, l'éducateur endosse plusieurs rôles : celui de travailleur social, de médiateur et quelquefois celui d'interprète.

La position de neutralité, d'empathie, le rôle de médiateur souvent portés par l'éducateur à certains moments de sa fonction, risque de voir celui-ci envahi par une certaine subjectivité de son regard et de son positionnement. Les pouvoirs publics se fient au regard de l'éducateur chargé d'évaluer la situation du mineur.

Pour la plupart de ces mineurs, le danger est avéré. Ils sont en rupture, souvent victimes et traumatisés.

L'éducateur doit estimer la parole de l'enfant, en se basant sur ses déclarations. La vérité de l'enfant peut quelquefois dépendre de la possession ou non de ses papiers.

Si un jeune se présente à l'Aide Sociale à l'Enfance et se déclare mineur étranger isolé, et qu'il n'a pas ses papiers, toute aide lui sera refusée. Sauf s'il accepte d'être soumis à un test osseux pour la détermination de l'âge.

Qu'est ce qui motive un tel refus ?

La décision d'aider un mineur en danger dépend de l'authenticité de ses papiers ou de son histoire, du point de vue du travailleur social.

Quand un jeune se présente avec ses papiers en règle, son histoire peut être fausse; de même qu'un autre jeune peut se présenter sans papiers ou avec des papiers contestable, avec une authentique histoire de violences, de rupture,de traumatismes.

L'éducateur est tenté de se fier qu'à l'aspect administratif. En effet, nous sommes soumis à devoir prouver l'âge du jeune en plus de devoir évaluer la situation de danger que connaît le jeune afin qu'il puisse bénéficier d'une prise en charge administrative ou judiciaire. Cette spécificité ne concerne que les MIE qui doivent prouver leur identité,

L'éducateur face à cette réalité ne serait-il pas plus enclin à aider les MIE pouvant apporter la preuve de leu âge, leur origine voir de leur histoire ? Alors que nous savons que les parcours les plus traumatiques, les plus difficiles ont souvent entraînés la perte de pièce d'identité, de membres de famille....Comme c'est le cas pour les jeunes issus de la catégorie des exploitées.

Cette obligation de devoir prouver l'âge du jeune est due au fait que notre système social et juridique n'accorde pas les mêmes droits si l'on est majeur ou mineur. Cette suspicion que le demandeur cherche à instrumentaliser le système (en mentant sur son âge) a un impact direct sur la qualité de l'accueil de ces MIE. Car avant même de prendre en compte leur état de souffrance, la priorité sera qu'il réponde au critère français qui désigne un mineur en dessous de 18 ans.

L''enjeux sera donc de prouver l'âge du jeune avant de mettre en place un soutien socio-éducatif.

Cas pratique

Je me suis présenté avec une jeune fille qui venait d'un pays en guerre et suite à la mort de ses parents, a du quitter son pays. Cette visiblement traumatisée, dans un état déplorable, après avoir dormi pendant deux jours sur un pont. Un particulier l'a trouvé sous un pont et l'orient vers une l'association à qui l'ase a refusé son admission. Cette jeune fille est restée au centre pendant 4 jours le temps de chercher ses papier d'identité. Cette avait besoin d'un suivi psychologique et de soins spécifiques, mais elle a du attendre soit réglée pour pouvoir bénéficier de soins adéquats.

Il s'avère que le mineur étranger isolé et en danger ne l'est que par preuve ou par compassion, alors l'administratif apparaît comme une béquille pour l'éducateur. La décision d'admettre ou non un jeune dans les dispositifs de protection de l'enfance ne devrait pas être confié uniquement au seul regard de l'éducateur. En principe lorsque le mineur est pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, le procureur doit être saisi dans les trois jours, et celui-ci saisit le juge pour enfants, s'il le danger est avéré. Mais tous ne bénéficient pas de telles dispositions, cela dépend du regard, de la manière dont le travailleur social se représente l'histoire du jeune. La question est de savoir pourquoi un système aussi bien fait présente autant de failles et de dysfonctionnement ?

Comme nous l'avons vu précédemment, les outils de travail à notre disposition servent et parfois desservent, notre pratique.

Cela implique l'accueil d'un jeune, le choix et la priorité dans les démarches à effectuer.

Qu'est ce qui est prioritaire  dans la prise en charge, quel accompagnement et quelle démarche éducative ?

Un mineur de moins de 16 ans a le droit d'aller à l'école. Par contre, une administration permet l'inscription du mineur sans que celui-ci n'ait à prouver la véracité de son histoire, ou la forme dans laquelle sont usitées se papiers d'identité, ou son isolement L'école publique et laïque est gratuite et ouverte à tous.

Les primo arrivants peuvent être pris en charge, à condition de donner leur identité. Il est même arrivé que des mineurs passent des test d'aptitudes scolaires et soient inscrit à l'école sans documents d'identité, juste en tenant compte de la parole du jeune comme faisant foi.

Pourquoi l'Education Nationale semble prendre conscience du phénomène et de la nécessité de respecter la loi, alors que dans les champs de l'éducation spécialisée, il semblerait que la loi ne soit appliquée comme il conviendrait ?

Il parait que c'est une question de coût. Un enfant pris en charge par l'Education Nationale n'a pas le même coût que celui pris en charge par l'Aide Sociale à l'Enfance.

Nécessité de déclarer la situation administrative du mineur.

Je vais signaler sa situation au parquet, en lui fournissant les premiers éléments concernant l'identité du jeune et sa situation générale. Le travail de mise en confiance en tant que référent du jeune permettra, à travers les entretiens et les activités qui sont organisées dans le centre, d'évaluer sa situation de manière plus approfondie. Il s'agira de l'orienter vers une structure de droit commun adaptée à sa problématique. En accord avec l'éducateur référent de l'Aide Sociale à l'Enfance, je mettrai en place les premiers jalons d'une amorce d'insertion du jeune. Pour cela je mets en place une évaluation médicale de la santé du jeune afin de traiter toute affection ou des maladies infectieuses qu'il aurait contractées dans son pays ou durant son parcours.

Je contacte aussi les services de l'Education Nationale pour qu'ils mettent en place une évaluation du niveau scolaire du mineur.

C'est à partir de ce que je sais du jeune, de son vécu et de son passé, que je vais pouvoir proposer des orientations, des actions, ou un suivi thérapeutique qui peut être un préalable à la reconstruction et la restauration de soi. Il m'appartiendra de convaincre les pouvoirs publics de la nécessité d'aider les mineurs étrangers, afin d'aider à stabiliser leurs situations. Il est donc nécessaire d'éclairer la situation administrative des mineurs isolés étrangers. Je prendrai deux cas de figures pour décrire la situation du mineur isolé.

-Le mineur· reconnu :

Le mineur reconnu comme tel, parce qu'il possède des papiers d'identité officiels qui prouvent sa minorité va bénéficier des protections à plusieurs niveaux administratifs et juridiques.

Il est confié par l'Aide Sociale à l'Enfance qui va mettre en place une protection administrative au titre de l'article L223.2 du code de l'action sociale et de la famille. Le jeune nous est confié pour une évaluation de sa situation administrative, en vue de lui proposer une orientation qui répond à la réalité de ses besoins.

-Le mineur non reconnu :

Le jeune se dit mineur, mais certaines autorités contestent cette minorité et lui proposent un examen d'âge osseux qu'il accepte. Après avoir fait une évaluation de sa situation, lorsque nous sommes convaincus de sa minorité, je l'informe de la possibilité pour lui d'écrire au juge pour enfants pour lui demander de se saisir de sa situation. Le juge va apprécier par les éléments fournis par le jeune de la minorité et du danger, et ordonner une mesure de placement provisoire. J'ai pu remarquer que le juge pour enfants est saisi lorsque que le jeune conteste les résultats de l'expertise d'âge osseux. Alors qu'il pourrait être saisi dès que le danger est avéré.

Si le jeune est arrivé sans aucun document d'identité ou bien si les documents qu'il présente sont contestés, s'il a accepté de passer un examen d'age osseux, et qu'il est déclaré majeur, plusieurs possibilité s'offrent au jeune ; le jeune doit quitter le centre, et je l'oriente vers les dispositifs d'urgence sociale tels que le 115. S'il conteste les résultats de l'examen osseux, j'en informe le parquet et une contre-expertise aura lieu. Parallèlement, je l'aiderai dans ses démarches auprès du juge pour enfants.

Mon rôle est d'assister le jeune dans toutes ses démarches. Il arrive que les jeunes, sur la base de la relation de confiance qu'ils ont mis en place avec l'éducateur, me sollicitent pour des renseignements administratifs. Le service où il est placé peut aussi solliciter l'éducateur pour une médiation.

C'est ainsi que j'ai été appelé pour une médiation concernant un jeune dont j'ai assuré le suivi. Le centre où il était placé devait déterminer une orientation définitive pour celui-ci. Un incident a failli provoquer comme orientation le retour dans son pays, or ce retour aurait mis en danger la vie de ce jeune. Un quiproquo lié à la barrière de la langue avait généré cette décision au sein de cette équipe éducative. Mon rôle consistait à être un intermédiaire entre la culture du jeune, que je connais, et notre culture. J'ai contribué, le temps de cette médiation à abolir les frontières, expliquant les malentendus. J'étais comme la courroie de transmission par qui passait à la fois la parole du jeune et celle de l'équipe. Je la reformulais et la restituais à chacun. Même lorsqu'il est placé, le jeune peut garder un lien avec le centre, car au fil du temps de sa présence au centre, une relation de confiance mutuelle se construit entre le jeune et les éducateurs. Cette relation peut durer au-delà du temps de l'accompagnement. Certains jeunes viennent au centre et participent à des activités, soit pour rencontrer « leur éducateur ». En tant qu'éducateur, il m'appartient de savoir passer le relais à d'autres professionnels ou être présent pour le jeune quand ils ont besoin de me rencontrer pour une évaluation, d'un médiateur, voire d'un interprète.

Le recueil de l'histoire du jeune.

C'est en accédant à l'histoire du jeune que l'on peut réfléchir aux possibilités pour lui venir en aide. Recueillir l'histoire du jeune suppose plusieurs préalables importants : ne pas travailler dans l'urgence, répondre aux besoins les plus urgent (soins, alimentaires, sommeil), ne pas avoir d'idée préconçue, et postuler que cette histoire appartient toujours au jeune. Parfois c'est le jeune qui veut me raconter son histoire. Même si mon souci c'est de ne pas juger le jeune, la frontière est souvent mince entre l'objectivité que m'impose ma fonction et la subjectivité à laquelle je peux être sujet.

Au regard de certaines histoires qui paraissent invraisemblables, on a vite fait de considérer les mineurs étrangers comme des menteurs, au pire comme de enfants qui par le biais de certains adultes du pays, cherchent à instrumentaliser le dispositif de protection de l'enfance. Ce qui fait que certains enfants, issus d'une zone géographique bien déterminé raconte tous une histoire « standard ».j'avais remarqué ces enfants arrivaient par dizaine par mois, d'un même continent, et racontait le même parcours, avec des histoire similaires. Dans ce cas, un travail qui s'inscrit dans la durée va permettre de démanteler le discours des adultes. Je vais tenter de regagner la confiance du mineur afin de l'aider à reconstruire sa propre histoire personnelle.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld