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Le droit à la guerre préventive: essai de réflexion sur la légalité et la légitimité du concept

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par Tohouindji G. Christian HESSOU
Université d'ABOMEY CALAVI - Cycle I de l'ENAM 2005
  

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Paragraphe 2 : L'interprétation extensive de la Charte

Elle est élaborée par d'éminents juristes tels que : Waldock, Stone, Bowett, Schwebel, McDougall, Kaplan et Katzenbach1. Ceux-ci ne réfutent pas entièrement toutes les idées émises par l'autre camp. Ils reconnaissent l'esprit initial de la Charte mais soutiennent

néanmoins, que cet esprit doit être actualisé. Ils basent toute leur argumentation sur le -

1 Chacun de ces auteurs a exposé ses idées dans les ouvrages suivants: Waldock. The regulation of the use of force by

individual states in international law. RCADI, Tome II, vol 81, 1952; Stone. Aggression and world order. Londres : Stevens and sons, 1958 ; Bowett. Self defense in international law. New York: Frederick A. Prager, 1958; Schebel. Aggression,

intervention and self-defense in Modern international Law. RCADI, Tome II, vol 136, 1972; McDougall. The soviet-cuban

Quarantine and self defense. AJIL, vol 57, 1963; Kaplan, Katzenbach The political foundations of international law. New

York: John Wiley and sons,1961

(Cité par Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Op cit, p. 770)

contexte actuel de la Charte (A) qui nécessite d'après eux, que l'agression imminente soit prise en compte comme condition à la LD (B), au même titre que l'agression préalable.

A- Le fondement : le contexte actuel de la Charte

La Charte avait en effet été rédigée à une époque où l'industrie de l'armement n'avait

pas encore atteint l'évolution actuelle. Depuis lors, plusieurs changements ont eu lieu et la vision originelle qui a inspiré la rédaction de la Charte n'est plus forcément la même. L'esprit

de la Charte doit pouvoir se recadrer sur les nouvelles réalités et évolutions.

C'est ainsi que l'ex Secrétaire Général des Nations Unies, Javier Pérez de Cuellar, déclarait ce qui suit quarante ans après l'entrée en vigueur de la Charte: « les changements qui

se sont produits dans les relations internationales depuis 1945 ont, en effet, profondément influencé la manière dont il est fait application de la Charte. Parmi ces transformations je citerai notamment l'avènement de l'âge nucléaire, les progrès scientifiques et techniques qui

ont ouvert aux relations interétatiques, des perspectives naguère inimaginables... »1.

Selon l'internationaliste américain McDougall, un des partisans les plus farouches de cette thèse, ne pas interpréter la Charte dans son contexte actuel, serait « transformer en une farce, soit sous l'aspect de son acceptabilité, soit sous l'aspect de ses applications potentielles, le but principal de la Charte qui est de réduire les hypothèses d'emploi illicite de

la force et de violence entre Etats »2. Ce serait réellement une comédie si les Etats

continuaient à se plier à la Charte telle que rédigée dans son contexte d'origine alors que ce dernier a connu des évolutions de toutes sortes que les dirigeants eux-mêmes reconnaissent.

La Charte ne peut donc être strictement interprétée dans son contexte initial, sous peine d'être en déphasage avec la réalité. A défaut de la réécrire il faut l'actualiser dans sa lecture pour ne pas handicaper le droit international. Car le droit international serait inopérant

s'il interdisait sans nuance aux Etats de prendre des mesures raisonnablement nécessaires en

cas de menaces graves et pressantes. C'est pourquoi l'agression imminente est requise comme une nouvelle condition de la légitime défense.

1Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Op cit, Préface de l'ouvrage.

2 Cité par Jean-Pierre Cot et Alain Pellet. Ibidem, p.775

B- Le problème de la condition : une agression imminente

Comme nous l'avons dit, l'article 51 de la Charte ne précise pas s'il s'agit seulement

d'une agression qui a déjà lieu ou bien s'il s'agit aussi des agressions en cours de préparation

qui s'exécuteront prochainement. Plusieurs raisons sous-tendent qu'il s'agirait aussi des agressions imminentes.

La première s'inspire du droit interne de la légitime défense. A ce titre, rappelons encore une fois les conditions requises pour cela : il faut une violence grave en cours d'exécution, l'impossibilité de recourir à un autre moyen en dehors de la violence pour répondre à la violence subie et enfin la proportionnalité des moyens utilisés.Il est évident qu'en droit interne la condition indispensable pour la légitime défense est celle d'une agression en cours. Cela peut se justifier aisément car, sur le plan interne il y a un pouvoir pour prévenir l'agression. Il n'appartient donc plus à l'individu d'oeuvrer pour une légitime défense préventive en prétextant d'une agression imminente. Si une agression est en cours de préparation contre lui, le seul moyen à sa disposition est de requérir l'autorité publique pour prévenir l'exécution d'un tel acte. Mais sur le plan international c'est tout le contraire.

Il n'y a pas un ``super Etat'' pour assurer à chaque Etat la sécurité dont il a besoin. On dira peut être de l'ONU qu'elle est détentrice de ce rôle. Mais avec toutes les failles qu'on lui connaît, notamment l'usage subjectif et arbitraire du droit de veto, une telle prévention a toutes les chances de ne pas aboutir et d'être calamiteuse pour l'Etat qui s'en est remis à elle.

La sécurité de chaque Etat est en définitive confiée à ses propres dirigeants puisqu'il n'y a pas

de gouvernement mondial. Et cette position ne changera que lorsque les Etats auront fait concession entière de leur souveraineté à une administration mondiale. Une telle hypothèse étant à l'heure actuelle très loin de se réaliser, il paraît insensé de conformer le droit international aux conditions du droit interne qui prescrivent une agression en cours d'exécution. Sur le plan international toutes les conditions ne sont pas remplies afin que la défense préventive soit illégale comme en droit interne.

La deuxième raison est une prolongation de la première. Il serait contre la nature rationnelle de l'homme qu'un Etat doive attendre de subir une agression sans réagir alors même qu'il est conscient que ce complot est dangereux pour sa survie, mettant ainsi à nu sa souveraineté et la sécurité de ses sujets. A l'époque des missiles et des armes nucléaires, la

portée de la légitime défense s'est considérablement élargie. Soutenant cette thèse, le délégué

israélien au Conseil de Sécurité en 1981 déclarait : « le concept a assumé une application nouvelle et plus ample avec l'arrivée de l'ère nucléaire. Quiconque est d'un avis contraire

n'a jamais vu l'horrible réalité du monde dans lequel nous vivons, en particulier pour les petits Etats si vulnérables et si peu capables de survivre à une attaque nucléaire »1.

Enfin, la dernière raison qu'on puisse évoquer pour justifier la thèse extensive est la position de l'actuel Secrétaire Général des Nations Unies (Kofi Annan). Il affirme dans un rapport que « Les menaces imminentes sont pleinement couvertes par l'article 51 de la Charte, qui garantit le droit naturel de légitime défense de tout Etat souverain, dans le cas où

il est l'objet d'une agression armée. » Il ajoute que « Les juristes ont depuis longtemps établi

que cette disposition couvre les attaques imminentes, ainsi que celles qui ont déjà eu lieu »2

En définitive, il y a du vrai dans les arguments énoncés dans les deux hypothèses

(interprétation extensive et interprétation restrictive), mais il ne faut pas les pousser trop loin.

La lecture restrictive correspond au souci fondamental des rédacteurs de la Charte, de restreindre autant que possible le pouvoir discrétionnaire des Etats et de rendre exceptionnel

le recours à la légitime défense. Cette interprétation est cohérente avec la longue histoire des efforts tendant à interdire le recours à la force. Séduisante par son sens du réalisme, la lecture extensive est encore un peu plus difficile à admettre car elle se fonde plus sur la morale que

sur le droit. C'est d'ailleurs pourquoi elle embrasse quelques aspects qui seront beaucoup plus développés dans la deuxième partie. Le droit international est, en dépit de tout, encore un peu réticent vis-à-vis du concept de la guerre préventive.

Mais, dans l'une ou l'autre des hypothèses, il faudra conjuguer nécessairement avec le droit interne car, il comporte des éléments d'éclairage sur la position définitive à adopter. Ainsi, nous traiterons des dispositions constitutionnelles de certains Etats (Bénin, Afrique du

sud, Allemagne et Etats-Unis) comme source éventuelle de légalité pour la guerre préventive.

1 Jean -Pierre Cot, Alain Pellet. Op. cit. p. 775

2Kofi Annan (Secrétaire Général des Nations Unies). Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des

droits de l'homme pour tous : rapport. New York, 2005, p. 39 [En ligne]. Disponible sur :

http://www.un.org/french/largerfreedom/toc.html (page consultée le 31 août 2005)

Nous étudierons plus largement ce rapport dans la deuxième partie de notre travail et plus précisément dans le chapitre 2 où nous parlerons de la reconnaissance par l'ONU du concept de la guerre préventive.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard