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L'incitation aux actes de terrorisme

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par Joseph Breham
Université Toulouse 1 - Master II Juriste International 2006
  

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·Un antagonisme entre Etat de droit et lutte antiterroriste ? :

Pour le Secrétaire général des Nations Unies, la lutte contre le terrorisme ne doit jamais

être menée au prix de nos valeurs ni nous rabaisser au niveau des terroristes148. Si cette assertion était évidente, aucun Etat ne « franchirait jamais la ligne jaune ». Or, ce franchissement est de plus en plus fréquent, que l'on pense aux « extraordinary rendition » (« remise extraordinaire »), c'estàdire l'interpellation sans mandat d'arrêt judiciaire de suspects n'importe où dans le monde pour les conduire dans des prisons secrètes149, à l'utilisation de méthodes d'interrogatoire qui se rapprochent de la torture,

au maintien en détention de prisonniers sans la moindre charge notifiée150 ou à l'institution (plus ou moins légale) de tribunaux militaires d'exception. Ainsi, l'idée qu'une lutte efficace contre le terrorisme passe par l'abandon de certains principes et par

le nonrespect du droit semble partagée par nombres d'Etat, même parmi les plus exemplaires.

Personne ne pourrait justifier le sacrifice de millions de vies pour épargner à un meurtrier psychopathe un moment bref d'intense douleur, qu'il peut arrêter par son propre choix. Quand la menace est si énorme et la solution si simple, nous sommes tous dans le camp du personnage de Shakespeare selon lequel il n'y a pas de vertu plus

148« S'unir contre le terrorisme »,ibidem.

149Giulietto Chiesa « L'archipel des prisons secrètes de la CIA » Le monde Diplomatique, août 2006, p4.

150Ainsi par exemple de la détention depuis 3 ans de M. Ali alMarri, sans que la moindre charge ne lui

ait été notifiée ou qu'il ne soit poursuivi. Dossier complet sur ce cas disponible sur :

http://web.amnesty.org/library/index/engamr510952006.

grande que la nécessité151. Voici en résumé l'idée majeure des discours qui soutiennent

un sacrifice progressif de nos droits et libertés pour la lutte contre le terrorisme. Au soutien de cette thèse une évidence s'impose : la Chine, la Corée du Nord et les dictatures les plus féroces ne sont pas connues pour le nombre d'attaques terroristes sur leur sol, alors que toutes les démocraties ont connu et connaissent de nombreuses attaques. Mais quelles libertés pourraient être limitées ou abandonnées pour lutter efficacement contre le terrorisme ?

Si l'on s'en tient au discours de certains, de nombreuses libertés mériteraient d'être abandonnées, tels que :

·La liberté d'expression : Pour atteindre ses buts, le terrorisme s'appuie généralement sur l'important écho qui est donné à ses actes. Ainsi, l'abandon de la liberté de la presse (modalité de la liberté d'expression) devrait pouvoir réduire l'impact des attentats terroristes et donc du message que leurs auteurs désirent délivrer. La liberté d'expression peut être mal utilisée : certains peuvent s'en servir pour inciter au terrorisme ou pour exprimer des idées qui pourraient éventuellement légitimer certains actes terroristes. L'abandon complet de la liberté d'expression serait alors probablement efficace.

·Le droit au respect de la vie privée et familiale : il inclut le respect des correspondances privées qui représente une vraie « gène » pour les forces de l'ordre.

Si ces dernières pouvaient écouter les conversations, lire les courriers (électronique

et papiers) et sonoriser les lieux d'habitation, les complots terroristes seraient alors beaucoup plus souvent déjoués.

·L'interdiction de la torture semble limiter l'efficacité des forces de l'ordre lorsqu'elles ont à faire à un terroriste (le classique exemple de la bombe à retardement). Ainsi, l'usage de la violence physique permettrait d'augmenter le

151Steve Chapman, Washington Times, cité par Alan M. Dershowitz, Why Terrorism works, Yale

University Press, p 105, traduction libre.

nombre d'informations obtenues par les forces de l'ordre et cela en raccourcissant le temps d'obtention de ces informations.

·La liberté de mouvement : Si on restreignait ou interdisait aux individus de quitter

le territoire national ou leur ville natale, chaque personne pourrait être retrouvée à chaque instant. En outre, cette limitation couplée avec l'abandon de la liberté d'expression empêcherait les idées terroristes de se répandre. On peut aller encore plus loin et imaginer de poser un bracelet électronique au poignet de chaque citoyen pour le suivre à tout moment et prévenir, éviter les attentats

·Les procès secrets : une des difficultés auxquelles les forces de l'ordre font face est

de devoir dévoiler leurs preuves en public et devant un jury. Ce faisant, elles peuvent perdre un avantage difficilement acquis (l'infiltration d'un agent par exemple) ou dévoiler des connaissances qu'elles désireraient garder secrètes. Il serait donc beaucoup plus simple de supprimer l'exigence de publicité des procès et d'avoir une confiance aveugle dans nos forces de l'ordre, juges et Procureurs.

·Les punitions collectives : une fois toutes les libertés cidessus brimées, seules les terroristes suicide seraient encore prêt à commettre des attaques. Pour les en empêcher, il conviendrait d'éliminer toute leur famille, leur voisins et leurs amis afin

de les dissuader de passer à l'acte.

·Les assassinats ciblés: Pour prévenir de futurs actes terroristes, il pourrait aussi être plus simple d'« éliminer » directement ceux dont on pense qu'ils peuvent avoir un rôle dans la planification, la préparation ou la justification morale de tels attentats.

·Les guerres préventives : si malgré tous ces abandons et tous ces sacrifices de nos sociétés libres, le terrorisme continue, alors cela signifie que d'autres Etat le soutiennent. Il devient alors légitime de faire la guerre à ces Etats qui soutiennent ou

L'incitation aux actes de terrorisme sponsorisent le terrorisme.

Cette énumération des libertés et droits qui pourraient être sacrifiés pour une lutte contre le terrorisme « efficace » est un exemple non exhaustif et théorique.

Cependant, nos démocraties prennent petit à petit des mesures qui tendent vers la limitation de ces libertés et cela en n'éradiquant pas le terrorisme. Certaines mesures ont dépassé le cadre légal qui s'impose aux Etats, posant de nombreux problèmes : une fois

la ligne rouge de la légalité franchie pour une « bonne cause »152 qu'estce qui empêchera de la franchir de nouveau pour une cause un peu moins « noble » ? Comment définiton la « bonne cause » ? Si les mesures sont illégales, les actions qui se déroulent hors cadre sont alors décidées dans la plus grande confidentialité et la plus stricte illégalité, sans contrepouvoir, ni vérification possible. Ainsi, progressivement et insidieusement, nous pourrions nous retrouver dans un Etat où certaines administrations

ne respecteront plus la loi, donc dans un Etat de non droit.

En d'autres termes, si certains estiment que le droit actuel n'est pas en adéquation avec une lutte efficace contre le terrorisme, ils doivent le dire, militer et utiliser le processus démocratique pour modifier le cadre légal, tel Dan Fried pour qui le système légal en place est incompatible avec la nouvelle bataille qu'exige cette guerre153. Il est particulièrement dangereux de juger inacceptable l'invocation des droits humains s'agissant de présumés terroristes154 comme le Viceprésident des EtatsUnis et son Ministre de la défense. A trop abandonner nos libertés, nous risquons de légitimer, après coup, le discours terroriste et donc de délégitimer notre lutte.

Il faut néanmoins se garder de l'angélisme et notre système juridique peut être modifié afin de lutter plus efficacement contre le terrorisme sans pour autant abandonner ou porter une atteinte à nos droits fondamentaux.

152 Se pose aussi le problème de la définition de la « bonne cause ».

153Dan Fried sousSecrétaire d'Etat américain cité par Giulietto Chiesa « L'archipel des prisons secrètes

de la CIA » ibidem.

154Cité par Giulietto Chiesa « L'archipel des prisons secrètes de la CIA »ibidem.

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