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Première alternance politique au Sénégal en 2000: Regard sur la démocratie sénégalaise

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par Abdou Khadre LO
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - DEA Science Politique (Sociologie Politique) 2001
  

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2. La guerre des chefs

La guerre des chefs et des tendances se poursuit d'un congrès à l'autre. En 1995 l'une de ses principales victimes est Djibo KA. Il sort du gouvernement et, dans le parti, se livre alors un combat peu feutré à la tête des « légitimistes », face aux « rénovateurs » qui se sont trouvés un leader en la personne d'Ousmane Tanor Dieng.

Resté discret jusqu'ici, le directeur de cabinet de Diouf, devenu ministre d'Etat, est ouvertement poussé au devant de la scène, depuis 1993 par Abdou Diouf, selon un processus qui fait penser à sa succession de Senghor. Désormais, Ousmane Tanor Dieng sera l'homme à abattre. Le départ, cette fois-ci du PS, de Djibo KA, en 1997, après sa tentative de formation d'un courant interne, étant largement analysé comme la conséquence de cette guerre de succession. Ou bien, comme le dit Momar Seyni N'diaye (du quotidien Le Soleil) : « Le PS a implosé parce qu'on a imposé à des cadres et des militants du parti, des dirigeants politiques qui ne correspondaient pas à leur choix. Le cas de Ousmane Tanor Dieng, de même que celui de toute une bande qui sont sortis du néant ; des gens dont on avait jamais entendu parler dans le parti est éloquent. Ce sont des gens qui n'avaient aucun passé militant et qui du jour au lendemain se sont retrouvés au premier plan. C'est frustrant pour les militants historiques. C'est une pratique qui s'est vu ailleurs mais pas à ce point.»

Les démissions et passages à l'opposition sont restés relativement rares jusqu'à cette période. Les observateurs constatent simplement que les combats sur le terrain deviennent de plus en plus violents. La vie du parti est ainsi émaillée de règlements de compte et d'échauffourées dont se délecte la presse privée. Le départ de Djibo KA et le recul sensible du PS aux élections législatives de 1998 accélèrent la dégradation. La crise est donc ouverte et la belle machine électorale semble, à l'approche des élections de l'an 2000, à bout de souffle.

Selon les interviewés, les « largesses » des dirigeants régionaux du parti, qui sont souvent à la tête de sociétés nationales, et en tant que tels disposent de leviers importants, ont eu souvent raison des états d'âme des électeurs dans le passé. Or cette fois-ci le quadrillage du pays et la distribution de cadeaux n'ont plus suffi, et l'ont voit des bastions entiers du PS passer dans le camp adverse, principalement dans les régions de Thiès, Kaolack, Kolda, voire Saint Louis.

3. L'épreuve du deuxième tour : un tournant.

Malgré les quelques contestations liées aux préparatifs que nous avons déjà soulignées (notamment le nettoyage du fichier électoral et les cartes imprimées en Israël), le scrutin présidentiel du dimanche 27 février 2000 se déroulera dans le calme. Abdoulaye Wade réitère dès le lundi qu'il est certain de contraindre Abdou Diouf au ballottage : « selon les résultats que nous avons à Dakar, Ziguinchor, Kaolack, Bignona ou à Kolda, je suis en tête »26(*). C'est surtout dans la région de Dakar, qui représente le quart de l'électorat et vote traditionnellement pour l'opposition, que Wade a remporté le plus de suffrage. Selon les chiffres officiels, il y a recueilli 45% des voix contre 20% pour Abdou Diouf et Moustapha Niasse. Le président sortant a pour sa part confirmé son bon score traditionnel chez les ruraux. (Nous reviendrons sur ce découpage plus loin avec la présence des médias dans les centres urbains). Il faut souligner la mise en garde de Me Wade à son adversaire, le lendemain du premier tour, « contre l'annonce d'une victoire prématurée de sa part » lui demandant de se retirer « pour éviter une humiliation au deuxième tour »27(*)

Donc, au premier tour, le Président Abdou Diouf du Parti socialiste, malgré une campagne organisée par le publicitaire français Jacques Séguéla, ne recueille que 41,3% se trouvant ainsi pour la première fois, à un second tour contre son rival de toujours Abdoulaye Wade, arrivé second avec 30,1% des voix.

Ces deux candidats sont suivis par Moustapha Niasse de l'Alliance des Forces du Progrès, Djibo Leyti KA de l'Union du Renouveau Démocratique, le professeur Iba Der Thiam de la CDP, Ousseynou Fall du PRS, Cheikh Abdoulaye Dièye du (FSD/BJ) 28(*) et le syndicaliste Mademba Sock.

Résultats du premier tour de 2000:

CANDIDAT

SCORE

Abdou DIOUF

41,3%

Abdoulaye WADE

30,1%

Moustapha NIASSE

16,8%

Djibo Leyti KA

7,1%

Iba Der THIAM

1,2%

Serigne Ousseynou FALL

1,1%

Cheikh Abdoulaye DIEYE

1,0%

Mademba SOCK

0,1%

Le Président sortant Abdou Diouf et Me Abdoulaye Wade devaient donc s'affronter pour la première fois de l'histoire du pays, dans un second tour ; les résultats du premier tour confirmant un net effritement de l'audience électorale du parti socialiste sénégalais.

Moustapha Niasse et Djibo KA (dans une moindre mesure) ont drainé beaucoup de militants et sympathisants du PS. Mais ce qui rendait encore plus incertaine l'issue du second tour est la déclaration, à la veille du premier tour, de Moustapha Niasse disant qu'il demanderait à ses partisans de ne pas voter pour le président sortant, quel que soit son adversaire.

L'un des principaux constats qui s'imposaient au soir de ce premier tour était le taux exceptionnel de participation, supérieur à 60% alors qu'il n'était que de 39% pour les législatives de 1998. Ce qui, selon l'ONEL confirme la maturité de l'électorat sénégalais, ainsi que sa détermination.

Aussi l'Observatoire National des Elections a souhaité que « le scrutin du 27 février qui s'est passé dans le calme fasse tache d'huile jusqu'à la fin du processus »29(*).

Le deuxième tour organisé le 19 mars 2000 voit le jeu des alliances qui sera décisif dans l'issu du scrutin. Djibo KA rejoint Diouf, espérant lui apporter ses 7,1% au second tour mais cela crée une scission au sein de son parti, beaucoup de cadres voulant suivre la logique de l'alternance jusqu'au bout. Aussi grâce au ralliement de plusieurs candidats dont Moustapha Niasse avec ses 16,8%, Abdoulaye Wade est élu Président de La République avec 58,5% des voix contre 41,5% pour Abdou Diouf. C'est la première fois depuis l'indépendance du Sénégal que l'on assiste à une alternance démocratique grâce une coalition dénommée Front de l'Alternance (FAL)30(*).

Le Président Wade nomme Moustapha Niasse au poste de Premier ministre et approuve un gouvernement composé de tous les partis qui lui ont apporté leur soutien électoral. Le « Sopi » (changement) était enfin réalisé.

Résultats du second tour 2000 :

CANDIDAT

SCORE

Abdoulaye WADE

58,5%

Abdou DIOUF

41,5%

* 26 Propos recuiellis dans le quotidien Sud Quotidien du 28 février 2000.

* 27 Ibid.

* 28 Ce parti dont le discours est souvent proche de l'Islam, (d'ailleurs son slogan est « Allahou Wahidoune » (Dieu est unique) a pour objectif « la conquête du pouvoir pour gérer autrement ».

* 29 Le Soleil daté du 30 février 2000.

* 30 FAL signifiant aussi « élire » en Wolof.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon