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Première alternance politique au Sénégal en 2000: Regard sur la démocratie sénégalaise

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par Abdou Khadre LO
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - DEA Science Politique (Sociologie Politique) 2001
  

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Le « Ndiguël » timoré et inefficace en 2000.

Aujourd'hui, au sénégal, le « Ndiguël » ne fonctionne plus comme par le passé. En dépit de la place importante de la religion dans leur vie quotidienne, les électeurs ne suivent plus aveuglement les consignes des marabouts, ce qui renforce inexorablement la laïcité de l'Etat. Le « Ndiguël » n'est donc plus ce qu'il était. Par exemple, les mots d'ordres lancés par quelques marabouts de moindre importance sont resté sans effet.

Néanmoins, Abdoulaye Wade qui a rendu visite au Khalife général des mourides à Touba (150 km à l'est de Dakar et ville sainte de la confrérie dont il est un disciple), le 30 Octobre 1999, soit à peine deux jours après son retour de France où il était resté plus d'une année, pouvait se féliciter. En effet, à l'issue du premier tour, il est arrivé en tête à Touba, ville longtemps considérée comme un bastion du PS alors qu'il n'a obtenu que 31% des voix dans l'ensemble du pays.

Les hommes politiques, dans leur ensemble, soignent particulièrement la confrérie mouride qui à l'occasion du « Magal » (commémoration du départ en exil du fondateur, Cheikh Ahmadou Bamba M'backé) rassemble chaque année, dans la ville sainte de Touba, environ deux millions de mourides. D'ailleurs, Abdoulaye Wade a annoncé en priorité des priorités du Sénégal, la construction d'un aéroport et d'un héliport pour la ville de Touba.

Pour sa part, ayant, semble-t-il, jugé que les mourides étaient décidés à prendre une certaine distance avec les vicissitudes de la politique politicienne nationale, le candidat Diouf a rendu visite, au cours de la campagne, à Cheikh Tidjane Sy, le numéro deux de la confrérie tidjane. Ce dernier s'est abstenu, lors de élections présidentielles, en disputant le leadership à son frère Serigne Mansour Sy qui est le khalife général, de toute consigne de vote. Au sein de la confrérie, il est le guide des moustarchidines, l'un des mouvements tidjanes, dirigé par son propre fils.

Cette visite impromptue, en vue d'établir une connexion avec ce deuxième grand groupe religieux du pays, a fait croire à un accord électoral entre les deux personnalités. Cependant, il n'en a rien été : après avoir longtemps tenu en haleine les sénégalais, les responsables du mouvement des moustarchidines ont fini par laisser leurs fidèles libres de voter selon leur conscience. Ce qui n'est pas anodin dans la mesure où le khalife général des tidjanes, lui-même, a donné un « Ndiguël » en faveur de Diouf. Une consigne qui d'après les résultats n'a pas été suivi en masse par les fidèles.

Du côté de la confrérie des niassènes, considérée comme la troisième du pays, deux consignes de vote contradictoires ont été lancées : l'une, émanant du khalife général, en faveur de Diouf, l'autre par le frère du khalife pour Moustapha Niasse (qui est disciple de cette confrérie) en faisant de Kaolack, la région niassène, le fief de ce dernier.

Lors de l'élection présidentielle, le Président Diouf a tenté par tous les moyens d'arracher des consignes de vote en sa faveur de la part des différentes confréries religieuses (le journal Sud Quotidien a noté qu'en l'espace de six mois, le Président a rendu visite à près d'une centaine de marabouts). Cela dénote de toute évidence que l'on a besoin d'autres relais que les cadres et les militants de son parti pour séduire l'opinion. Et cela dénote aussi, bien au-delà de l'échec d'une politique, l'échec même de la pratique politique.

Aussi un certain cafouillage, les hésitations des intéressés, qui furent aussi soucieux de ne pas se couper de leurs disciples, la plupart étant acquis à la cause du changement de régime, ont fait que le vote religieux n'a pu être véritablement décisif. De manière générale, le scrutin présidentiel de 2000 a constitué un désaveu cinglant pour les chefs religieux, habitués, dans un pays profondément croyant, à indiquer le « bon choix » à leurs « talibés » (fidèles). De même, les candidats qui avaient choisi de placer leur campagne « sous le signe de Dieu » ont enregistré de cuisants revers. Ousseynou Fall, frère du khalife général des Baye Fall, l'une des composantes de la confrérie mouride, candidat aux élections présidentielles n'a recueilli que 1,1% des suffrages. On peut aussi citer le cas de Abdoulaye Dièye, également issu de cette famille maraboutique.

Si auparavant, les « talibés » ou disciples respectaient davantage les mots d'ordre de leurs guides spirituels que ceux des partis, l'alternance politique a démontré une certaine détermination des électeurs de faire la distinction entre leurs « rôle » de « talibés » (disciples), à l'écoute de leurs guides religieux dans leur vie spirituelle et leur « rôle » de citoyens lorsqu'il s'agit de la gestion politique du Sénégal.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry