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Première alternance politique au Sénégal en 2000: Regard sur la démocratie sénégalaise

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par Abdou Khadre LO
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - DEA Science Politique (Sociologie Politique) 2001
  

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3. Le « multipartisme intégral » de Diouf

Sous la présidence de Senghor, le PS a plutôt fonctionné comme un parti unique de fait, et il faut attendre l'arrivée de Abdou Diouf au pouvoir, en 1981, pour que le Sénégal adopte le « multipartisme intégral ». En effet, le 31 décembre 1980, Senghor démissionna et en vertu de l'article 35 de la constitution, son Premier ministre, Abdou Diouf, lui succéda.

Dès son arrivée au pouvoir, Diouf décide, pour assainir, la vie politique du pays (à commencer par la transformation du PS plus en parti politique qu'en arène de rivalités entre barons et distribution des dépouilles) d'adopter et promulguer la loi numéro 81-16 du 6 mai 1981 relative aux partis politiques. L'innovation de cette réforme est que désormais le nombre de partis (dont la plupart existait déjà dans la clandestinité) n'est plus limité et qu'ils ne sont plus tenus de se référer à un courant de pensée déterminé. Mais pour éviter encore une fois l'anarchie, cette réforme met des garde-fous. Elle réitère le principe de la souveraineté nationale et de la démocratie et interdit de facto les partis monarchistes.

Par ailleurs, il est interdit aux partis de se réclamer de la défense d'une langue, d'une race, d'une ethnie, d'un sexe, d'une religion, d'une secte, d'une région etc. Depuis cette date, soixante cinq partis politiques ( nombre recensé aux législatives anticipées d'avril 2001) se sont crées et tout l'enjeu politique est d'arriver à faire fonctionner les institutions et à jouer la règle de l'alternance démocratique dans la transparence.

Ce qui a caractérisé le pouvoir de Diouf, c'est sa capacité à rebondir pour consolider l'héritage senghorien lorsqu'il y a péril en la demeure. Il aborde son pouvoir dans une position de faiblesse : une faiblesse politique car l'opposition dans son ensemble et son principal rival, maître Abdoulaye Wade en particulier, contestent sa légitimité ; une faiblesse économique car, la crise sans précédent renforcée par les effets pervers des plans d'ajustement structurel (chômage des diplômés, paupérisation croissante des populations urbaines et rurales avec la montée de mécontentements sociaux et du séparatisme casamançais au Sud du Sénégal...) accroît les attentes des sénégalais.

Abdou Diouf se révèle plutôt un habile politicien dans le contrôle de l'appareil d'Etat et le renouvellement de la classe politique. Malgré un contexte défavorable, il remporte les élections présidentielles de février 1983 avec 83,45% des voix. Le PS remporte les législatives avec 79,94% et 111 des 120 sièges que compte l'assemblée nationale.

Tableau des résultats des élections présidentielles et législatives de 1983 :

PRESIDENTIELLES

 

LEGISLATIVES

 

Abdou Diouf (PS)

83,45%

PS

79,94% : 111 sièges

Abdoulaye Wade (PDS)

14,79%

PDS

13,97% : 8 sièges

Mamadou Dia (MDP)

1,39%

MDP

1,21%

Oumar Wone (PPS)

0,20%

PPS

0,20%

Majhemout Diop (PAI)

0,17%

PAI

0,30%

 
 

RND

2,71% : 1 siège

 
 

LD/MPT

1,12%

 
 

PIT

0,55%

Diouf n'est plus le successeur du président Senghor, mais un président à part entière, légitimé par les urnes avec le soutien des puissantes confréries maraboutiques et face à une opposition de plus en plus fragmentée.

En 1988 alors qu'il sollicitait un second mandat, le Président Abdou Diouf est accueilli, lors d'un meeting à Thiès (deuxième ville du pays) par des cris de « sopi ! sopi ! » (changement ! changement !), le slogan de son éternel rival, et une pierre atteint son cortège. Très mécontent, le président traita les membres de l'opposition de « bandits de grand chemin » et les jeunes de « jeunesse malsaine ». Des mots qu'il traînera longtemps comme un boulet.

Si les présidentielles et les législatives de février 1988 lui donnent encore la victoire, c'est avec des scores effrités et surtout, selon l'opposition, grâce à de graves irrégularités qui loin d'apaiser la vie politique, l'ont plutôt exacerbée. Paradoxalement c'est le chef de file de l'opposition Abdoulaye Wade qui sort grandi de ces consultations électorales.

Résultat des élections de 1988 :

PRESIDENTIELLES

 

LEGISLATIVES

 

Abdou Diouf

73,20%

PS

71,30%

Abdoulaye Wade

25,80%

PDS

24,74%

Le climat post-électoral est si explosif qu'il va entraîner des émeutes et des violences urbaines structurées autour du slogan « Sopi ». La fermeté du pouvoir qui arrête et traduit en justice maître Wade rendu responsable des violences, ne fait que conférer une aura de victime et de héros à ce dernier. Pour décrisper la situation tendue, une table ronde est organisée entre le pouvoir et l'opposition dont une partie ( A. Wade en l'occurrence, contre toute attente) accepte de rentrer dans ce qui est appelé « un gouvernement élargi ».

En fait pour comprendre ces retrouvailles entre le pouvoir et l'opposition, il faut prendre en compte, ce qu'au Sénégal on appelle le sens du dialogue et du compromis : la démocratie sénégalaise est une « dissoocratie » (« dissoo » en Wolof=concertation), une démocratie d'arrangements, au fond un jeu de ruses. Ce jeu de ruse incarné dans la mythologie sénégalaise par Leuk-le-lièvre (rusé et manipulateur)) et Bouki-l'hyène (gourmand et crétin). Le mythe du dialogue et de la cohésion sociale !

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo