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La convention de l'OUA contre le terrorisme

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par Djiby NDIAYE
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - DEA 2011
  

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PARAGRAPHE 2: LA PÉNALISATION DES ACTES

La pénalisation des actes définis ci-dessus est une logique juridique. Elle a favorisé une révision des législations des États afin d'atteindre un tel objectif28(*). Ainsi les conditions de poursuite doivent être spécifiées dans les textes. Si la Convention renvoie la tâche de pénaliser les actes terroristes, c'est parce que les États renoncent difficilement à leur souveraineté en matière pénale. Mais avant de réviser les législations il faut d'abord un acte reconnaissant l'adhésion à la convention. Au Sénégal, la loi n° 2001-12 du 20 décembre 2001 autorise le Président de la République29(*) à ratifier la Convention de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, adoptée à Alger le 14 juillet 1999. Par cet acte le Sénégal a marqué sa détermination à combattre le terrorisme et à l'éliminer dans toutes ses formes et manifestations. En plus de la ratification, la modification du code Pénal semblait nécessaire sur ce point. C'est ainsi que par une loi n° 2007/01 du 12 février 2007 modifiant le code pénal, le Sénégal a décidé de pénaliser les actes terroristes visés dans la Convention de l'OUA. Cette loi répond positivement à l'engagement prescrit par l'article 2 paragraphe (a) de la convention de l'OUA. Selon ce texte « les États parties s'engagent à en réviser leur législation nationale et à établir comme crimes, les actes terroristes, tels que définis dans la présente convention et pénaliser ces actes en tenant compte de leur gravité ».

Bien que la définition du terrorisme demeure toujours un sujet très controversé, cela ne peut cependant pas affranchir notre législation de combler le dispositif juridique mis en place pour l'identification d'actes qui, sans aucun doute, participent à la réalisation du terrorisme. Dans cette logique de pénaliser les actes terroristes, la loi dispose30(*) «il est inséré, après l'article 279 du code Pénal, une section VII au chapitre IV du titre I du livre 3e intitulé « des actes de terrorisme » et comportant des dispositions suivantes. Cet article confirme la révision du Code pénal sénégalais qui, désormais, érige certains actes en actes de terrorismes. La lecture de l'article 279-1 nous permet de saisir les actes terroristes lorsqu'il dispose «  constituent des actes de terrorismes, lorsqu'elles sont commises intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler l'ordre public ou le fonctionnement normal des institutions nationales ou internationales, par l'intimidation ou la terreur, les infractions suivantes ». Le caractère intentionnel apparait à première vue avant de citer les actes qualifiés de terroristes.

Dans l'énumération, sont réputés actes terroristes « les attentats et complots visés par les articles 72 à 76 et 84 du présent code, les crimes commis par participation à un mouvement insurrectionnel visés par les articles 85,86 et 87 du présent code, les violences ou voies de fait commises contre les personnes et les destructions ou dégradations commises lors de rassemblements et visés par l'article 98 du présent code etc... ». On dénombre douze (12) actes que le Sénégal considère comme des actes terroristes dans le présent article.

Toujours dans le cadre de la pénalisation des actes, l'article 29-2 considère comme acte de terrorisme « le fait d'introduire dans l'atmosphère, sur le sol, dans le sous sol ou dans les eaux une substance de nature à mettre en péril la santé de l'homme ou des animaux ou le milieu naturel ». Si on observe bien cette disposition elle nous rappelle les actes ou menaces d'actes en violation des lois pénales qui occasionnent ou peuvent occasionner des dommages « aux ressources naturelles, à l'environnement », prévus dans le paragraphe (a) de la Convention de l'OUA. Il s'agit d'un souci de ne pas entrer en contradiction avec la convention, ce qui peut générer un véritable problème de qualification des actes terroristes.

Cependant c'est dans l'article 279-3 que la loi Sénégalaise fait intervenir les actes posés par les acteurs indirects qui favorisent le terrorisme. Ce texte dispose « constitue un acte de terrorisme, le fait de financer directement ou indirectement une entreprise terroriste en fournissant, en réunissant ou en gérant des fonds, des valeurs ou biens quelconques ou en donnant des conseils à cette fin, dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou biens utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés en tout ou partie en vue de commettre un acte terroriste ».Il est question ici de lancer un défi contre les bailleurs de fonds qui favorisent la promotion du terrorisme. Dans cette sillage l'UEMOA n'est pas en marge. Elle a adopté la directive n° 04/2007/ sur la lutte contre le financement du terrorisme31(*). Son article 6 dispose que « les États membres prennent les mesures nécessaires pour ériger en infraction pénale au regard de leur droit interne les actes visés aux articles 4 et 5 ci-dessous ». Ainsi la pénalisation de tels actes est un bienvenu dans le corpus juridique des États membres de l'OUA. Lutter contre le financement du terrorisme, qu'il provienne d'activités légales (commerciales, industrielles ou caritatives) ou illégal (racket, trafic de drogues, proxénétisme, hold up) constitue un objectif prioritaire pour les services engagés dans la lutte opérationnelle contre le terrorisme. En effet c'est en fonction de leurs sources de financement que les groupes terroristes tirent leurs capacités de projection, la possibilité de se fournir en armement puissant et leur possibilité de se faire connaitre, de recruter et d'entrainer leurs membres.

Si l'incrimination du financement du terrorisme figure dans presque toutes les conventions et les ordres juridiques des États, c'est parce qu'elle fait partie des moyens de lutte efficace contre le terrorisme. Lorsque la lutte est effective, on pourra sur ce point, gagner en partie la lutte contre le terrorisme. Mais le problème est que le financement a pris une autre tournure difficile à combattre et, pose un problème juridique. En effet l'octroi d'une rançon pour obtenir la libération d'un otage enlevé par les terroristes est une source de financement. La rançon permettra aux terroristes de mieux s'armer financièrement et enfin mieux se doter d'armes sophistiquées. Voilà un obstacle dont les juristes sont interpellés. La rançon est une motivation à enlever d'autres personnes. Et si elle n'est pas versée, les otages sont exécutés purement et simplement. Dans ce cas peut-on parler d'une  « non assistance à une personne en danger »?.

A la lumière de ce qui précède on peut dire que la pénalisation des actes terroristes est une démarche noble parce qu'elle tend à protéger les peuples africains, mais l'équation du financement est toujours source de débat. Outre l'énumération des actes terroristes incriminés, il y a une disposition qui concrétise la nature criminelle des actes accomplis. Dans cette perspective, l'article 279-4 de la loi 2007/01 du 12 février 2007 modifiant le Code pénal sénégalais dispose « toute personne coupable d'actes de terrorisme au sens des articles 279-1 ; 279-2 et 279-3 du présent Code est passible de la peine des travaux forcés à perpétuité ».

Lorsque le coupable assure la direction ou le contrôle d'une personne morale et agit en cette qualité; la licence, l'autorisation ou l'agrément de la personne est définitivement retiré. En appréciant ces articles figurant dans la loi de 2007, on peut soutenir que le Sénégal a fourni un effort qualitatif dans l'exécution des obligations résultantes de l'article 2 paragraphe (a) de la Convention. Cet effort est beaucoup plus admirable lorsqu'on a procédé à définir de nouvelles règles dérogatoires au droit commun de la procédure pénale32(*). Ainsi le dispositif de lutte contre le terrorisme introduit dans le Code pénal nécessite des modifications à la procédure pénale de manière à apporter le maximum possible d'efficacité aux moyens juridiques mis en oeuvres. Dans ce souci de répondre aux règles posées par la Convention la loi n° 2007-04 du 12 février modifiant le CPP relatif à la lutte contre les actes de terrorismes est votée. L'article 677-26 alinéa 1 de cette loi dispose que «les visites et les perquisitions peuvent être effectuées à toutes heures de jour et de nuit sur autorisation écrite du juge saisi ou du procureur de la république même sans le consentement de la personne au domicile de laquelle elles ont lieu ».

Lorsqu'il y a crime flagrant, lorsqu'il existe un risque sérieux de disparitions de preuves des indices, lorsqu'il existe des présomptions qu'une ou plusieurs personnes se trouvant dans les locaux ou la visite ou la perquisition doit avoir lieu se préparent à commettre des actes de terrorismes. Cette procédure décrite est de nature à mieux déceler les auteurs. Concernant la procédure, le Protocole à la Convention de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme en son article 3, paragraphe 1 prévoit la saisine immédiate du conseil de paix et de sécurité de tous les actes terroristes perpétrés33(*) sur le territoire de l'un des États membres. C'est dire par là que le conseil de paix sera associé aux poursuites enclenchées contre les auteurs. On est allé jusqu'à étendre le champ d'application des règles relatives à la garde à vue concernant les crimes et délits contre la sûreté de l'État. Ces règles sont désormais applicables en matière de lutte contre les actes de terroristes (article 677-27 du CPP).

Par ailleurs la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar est la seule juridiction d'instruction du second degré compétente pour les infractions rentrant dans l'une des catégories visées aux articles 279-1 à 279-3 du code pénal (article 677-31 CPP), le tribunal régional reste compétent au premier degré.

La pénalisation des actes de terrorismes à travers respectivement le code pénal et le code de procédure pénale, témoigne d'une élégance textuelle. Cependant, la modification des textes susvisés en vue d'incriminer les actes de terrorismes est intervenue tardivement. Il a fallut attendre les attentas du 11 septembre 2001 , pour que les africains prennent conscience de l'urgence de pénaliser les actes de terroristes. Pourtant, c'est depuis 1999 que la Convention de l'OUA a ordonné la révision des législations nationales en cas de ratification. On a l'impression que les africains ne prenaient pas au sérieux la réalité du terrorisme.

D'ailleurs la Convention de l'OUA a même vu le jour après les attaques contre les ambassades des Américains à Dar es Salam (Tanzanie) Nairobi (Kenya) en août 199834(*). L'Afrique ne manque pas de dispositif juridique tendant à la lutte contre le terrorisme mais toujours elle accuse du retard dans la mise en oeuvre. La pénalisation des actes terroristes dans les législations nationales s'avère nécessaire car c'est une condition préalable à la mise en oeuvre de la convention. Cette démarche entreprise par les États parties n'est que décisive. Il reste qu'il faut des experts dans la qualification de l'acte de terrorisme puisque celui-ci nourrit jusqu'à présent des controverses au sujet de sa définition. C'est un autre problème qui surgit, outre celui de la définition. En effet, les auteurs du terrorisme peuvent être nombreux. S'il s'agit de groupes de personnes ou d'un individu leur répression peut être prise en charge par un État membre. Il en est autrement si un État accompli un acte de terrorisme sur un groupe de personnes ou sur un individu. Les conditions de la pénalisation et de la répression restent obscures, aussi bien dans la convention que dans le code pénal sénégalais. On tente de justifier cela du fait qu'avec la promotion de la démocratie, les États se concurrencent en matière de bonne gouvernance et de respect de l'état de droit.

La pénalisation étant un acte fort dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, mais la prévision des pouvoirs de chaque État dans la prévention et la lutte contre ce fléau, contribue largement à sa réussite. Par conséquent, la compétence des États parties ne pouvait être escamotée par la Convention.

* 28 Le CP sénégalais a été modifié pour atteindre l'objectif affiché par la convention (loi N° 2007-01 du 12 février 2007).

* 29 Loi N° 2001-12 du 20 décembre 2001 autorisant le Président de la République à ratifier la Convention.

* 30 Art. 1 Loi N° 2007-01 du 12 février 2007 modifiant le CP.

* 31 Directive n°04/2007/CM,relative à la lutte contre le terrorisme dans les États membres de l'UEMOA adoptée à Dakar le 04 juillet 2007.

* 32 Exposé des motifs de la loi N° 2007-04 du 12 février 2007.

* 33 Art. 3 para. I du Protocole additionnel à la Convention de1999.

* 34 Jeune Afrique Eco mai-juin 2010, N° 380, page 185.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984