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Commercialisation des produits piscicoles et de l'élevage

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par Malloum BRAHIM MALLOUM MBODOU
Adam Barka Tchad - article 2011
  

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- La commercialisation des produits de l'élevage

Trois principaux produits font l'objet de commerce dans le département : la viande, le lait et la peau. Ces produits ont donné lieu à une intense activité commerciale. Cette activité remonte dans le temps et dans l'espace.

Les éleveurs sont rarement des vendeurs jusqu'à une époque récente4(*), car le bétail était à leurs yeux une valeur autre que marchande. Ensuite, même si l'activité commerciale s'est accrue avec le temps, elle demeure géographiquement diluée dans l'espace à une centaine de points de ventes qui sont toujours des marchés. Nous pouvons d'ores et déjà affirmé que les interventions extérieures visant à récupérer le commerce de bétail rencontrent autant des difficultés que celles qui se sont intéressées au poisson.

La commercialisation des produits de l'élevage a connu deux phases successives. Une période d'activité peu intense, limitée plus ou moins au stade villageois, et une période d'appel des marchés nigérians et des marchés urbains intérieurs.

- De la période précoloniale à la période coloniale

Pendant cette période, les transactions portent essentiellement sur le lait qui pouvait être échangé contre du mil dans les villages de cultivateurs sédentaires, ou vendu sur les marchés locaux. Les produits laitiers se présentent sous forme de lait frais ou rance, de beurre frais ou fondu. Mais les produits se conservent mal et n'excédent que rarement l'équivalent de deux litres par vache et par jour.

Quant à la vente de bétail, elle est très occasionnelle. Du coté de l'offre, les éleveurs se séparent d'une vache quand est malade ou blessée, ou en cas de besoins financiers. Du coté de la demande, les acheteurs sont ceux qui veulent marquer un rite ou une cérémonie nécessitant un abattage familial ou villageois. Frechou soulignait l'harmonie du système : `'autres effets bénéfiques de ces fêtes, du point de vue de la valeur économique de l'élevage : elles étaient l'occasion d'éliminer les bêtes en surnombre (taureau et vache stériles5(*)).

L'achat ou la vente ne se déroule pas au campement ou au domicile de l'un des cocontractants. Le marché est le lieu par excellence des transactions de bétail. Le marché est un lieu sécurisant qui propose toute une panoplie de produits que le vendeur peut se procurer en échange de sa vache ou de son taureau. De cette première phase de l'évolution commerciale, la sécurité est prise dans sa dimension sociale. La présence des autorités coutumières donne aux opérateurs une sorte de caution, et garantit l'honnêteté du négoce, dans la mesure où l'animal vendu ne peut venir d'un vol ou d'un acte répréhensible.

Le commerce de peau s'exerce parallèlement aux abattages et alimente des circuits qui dépassent le cadre villageois. Les peaux présentent de nombreux trous dus aux tiques ou au mauvais dépeçage et elles sont facilement attaquées par les parasites.

Il n'existe pas de traditions commerciales pour les produits de l'élevage pendant cette période précoloniale. Il s'agit d'activités diffuses qui n'atteignaient pas le volume des échanges liés aux mouvements des troupeaux sur pied. Cette activité se limite à l'achat pour accroître le troupeau, pour payer la dot ou des dettes de sang (diya) ou autres.

Dès lors, la commercialisation des produits de l'élevage connaît un essor avec la colonisation française et la pacification du bassin tchadien. A la colonisation et la pacification s'ajoutent la monétarisation croissante de l'économie et l'urbanisation des marchés consommateurs de produits d'élevage.

La monétarisation de l'économie a placé les éleveurs dans une situation nouvelle. Il leur a fallu de l'argent pour payer le mil dont ils ont besoin. En fait, les vendeurs de mil préfèrent l'argent au lait. Devant payer l'impôt à l'administration coloniale, les éleveurs ont connu des objets qui ont fini part attiré leur convoitise6(*). A ce propos, il convient de remarquer qu'en cherchant à se soustraire à la nécessité de vendre du bétail pour acheter du mil, de nombreux éleveurs se sont mis à cultiver eux-mêmes. Cette aptitude nouvelle des éleveurs amorce un processus de sédentarisation qui, malgré tout, demeure tempéré par la continuation des pérégrinations des troupeaux sous la garde des enfants et des bergers. En dehors de l'approvisionnement en céréales, il existe quelques autres raisons de se procurer de l'argent par la vente des animaux.

L'urbanisation et la forte croissance démographique du Nigeria créent une demande en viande à la fois nouvelle et importante. Il est vrai que l'économie moderne a les moyens de répondre à cet appel, soit en développant sur place un élevage intensif, soit en créant des circuits d'importation de viandes congelées. De fait, des expériences de ces genres ont été tentées, mais elles n'ont jamais eu l'envergure suffisante pour couvrir les besoins.

En conséquence, il a fallu avoir recours à l'importation de bétail sur pied et à son achat là où il se trouve. C`est pourquoi, jusqu'à nos jours, les bétails sont vendus sur pied au Nigeria. Il est important de noter que c'est une nouvelle organisation commerciale qui s'est mise en place à partir des années cinquante7(*). Celle-ci est à la fois créée et animée par des autochtones appuyés par l'administration coloniale. Mais elle respecte les règles traditionnelles de l'économie et s'insère dans les structures sociales coutumières du bassin tchadien.

En dehors de Fort-Lamy et de Maiduguri où la consommation de viande s'est accrue avec la croissance urbaine, l'essentiel de la demande provient des grands marchés méridionaux, et surtout du sud du Nigeria. A partir de notre zone d'étude (département de Mamdi), les circuits d'évacuation du bétail sur pied s'inscrivent dans le sens est-ouest. Ces circuits passent soit par la corne nord du lac Tchad, soit par le sud avec le franchissement du Chari à gué ou à la nage. Les convoyeurs poussent devant eux 60 à 80 bêtes qui ont été achetées sur les marchés de Ngarangou ou de Bol. Ces marchés sont nombreux mais les principaux sont sur la frange de notre zone d'étude : Bol, Ngarangou, Baga-Sola et Dinentchi.

Sur ces marchés, et à l'occasion des négociations sur le bétail, il se trouve bon nombre des caractères relevés sur le banda. Les grands commerçants appartiennent plus ou moins aux mêmes groupes ethniques (Kanouri, Haoussa, Foulbé et Arabe). Il se remarque aussi et surtout que les intermédiaires sont indispensables dans les mécanismes d'achat et de vente. Sur les marchés de la zone de notre étude, on les appelle dalali. De la même manière que les fatoma au Nigeria qui fournissent des logements aux vendeurs. On en compte un par groupe ethnique d'éleveurs et par marché.

Ces intermédiaires jouent un rôle important et multiforme :

- d'abord ils assurent le gardiennage et l'entretien du bétail pendant la durée du marché ;

- puis, ils facilitent les contacts avec les acheteurs éventuels, dont ils sont connus, alors que l'éleveur qui n'est pas familier du marché à bétail est inconnu des négociants ;

- enfin, ils représentent une sorte de garantie morale et financière, car ils sont reconnus par la chefferie coutumière et ne peuvent se hasarder à laisser vendre des animaux volés ou bien laisser se conclure un marché de dupes. Bien entendu, ils touchent une commission sur chaque opération, et dans certains cas ils reversent une partie au chef local.

Il se trouve des dalalis sous le nom Peulh de didadjo au nord Cameroun. Ils jouent le même rôle de courtier au sens large du terme, assurant aussi assez souvent les logements des commerçants. Ils assurent également la surveillance, l'expertise et l'arbitrage pendant les transactions.

En fait, toute une organisation commerciale s'est mise en place de manière autochtone avec l'apparition d'une forte demande de viande dans les centres urbains, mais surtout au Bornou et le reste du Nigeria. Bien que la dépendance soit discrète, cette organisation est assez étroitement contrôlée par la chefferie coutumière qui maîtrise les marchés.

Il est bien évident que l'édifice mis en place pour assurer la vente ou l'évacuation du bétail sur pied vers les marchés de consommation ne peut convenir à l'administration coloniale8(*). Il y a eu donc un certain nombre d'interventions qui ont attaqué l'organisation locale du commerce et la production elle-même.

La première intervention remonte à 1937 au Nord - Cameroun, où l'administration coloniale française a décidé de définir des routes du bétail. L'esprit de cette décision est de contrôler les mouvements des troupeaux dans le bassin du lac Tchad. Mais la crainte de visées fiscales cachées amène les convoyeurs des animaux à emprunter des chemins de contrebande. Force est de reconnaître qu'ils conservent encore cette habitude. Ensuite, l'administration de la république du Tchad donne l'exemple d'une immixtion profonde dans les transactions animales.

* 4 Avant la crue de 1956 et la sècheresse de 1972-1973, pour les éleveurs le bétail n'est pas un capital fragile. En fait, une épidémie peut décimer tout un troupeau et, ils peuvent se retrouver sans aucun animal. Ces deux crises climatiques ont permis aux éleveurs de prendre conscience et de la fragilité du capital animal et de la nécessité de la modernisation de ces derniers.

* 5 Frechou, H., l'élevage et le commerce du bétail dans le nord-Cameroun, annales, faculté des lettres er sciences humaines, vol.1, n° 2, Yaoundé, p. 28.

* 6 Ancey, G., 1968, « Niveau de décision et fonction objective en milieu rural dans les pays en voie développement », t. IX, n° 34, Tiers- Monde, p. 61.

* 7 Loubens, G., 1972, Production de la pêche et peuplement ichtyologique d'u n bief du delta du Chari, ORSTOM, Fort-Lamy, Tchad, p. 20.

* 8 Le système n'intéresse pas l'administration coloniale parce qu'il est contrôlé par les chefs coutumiers. Et ces chefs prélèvent les taxes de transaction dont l'administration coloniale ne bénéficie pas de ces taxes. A cet effet, il fallait revoir les transactions commerciales du bétail pour renflouer les caisses de l'administration coloniale.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld