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Le processus électoral au Cameroun

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par Mbassi BEDJOKO
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master droit de l'Homme et Action Humanitaire 2004
  

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Paragraphe 2. Les limites conjoncturelles.

L'étude des limites conjoncturelles à l'exercice du droit de vote au Cameroun sera axée sur deux paramètres : l'analyse du financement de la vie politique et celle de l'accès aux médias publics.

A. Le financement de la vie politique

Le financement des partis politiques et des campagnes électorales est réglementé par la loi n° 2000/015 du 19 décembre 2000. Selon son article 3 : « il est inscrit chaque année dans la loi des finances une subvention destinée à contribuer à certaines dépenses de fonctionnement des partis politiques légalement reconnus ». Il s'agit d'une subvention78(*) servie par l'Etat pour concourir aux dépenses79(*) diverses de ces partis selon les modalités de répartition prévues par la loi précitée80(*). A ce titre, la subvention est repartie en deux tranches d'égale montant : une première tranche destinée aux partis politiques représentés à l'Assemblée nationale ; une deuxième tranche destinée aux partis politiques en fonction de leurs résultats à la dernière élection législative. Par ailleurs, la tranche destinée au financement des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale leur est allouée proportionnellement à leur nombre de sièges respectifs. Quant à la tranche destinée au financement des partis en fonction de leur résultat aux élections à l'Assemblée nationale, elle leur est servie à condition qu'ils aient obtenu au moins 5% des suffrages dans au moins une circonscription au cours de la dernière élection législative.

A bien lire ces dispositions, on constate quelles posent des limitations à l'exercice du droit de vote car elles ne favorisent pas l'égalité de chance des partis politiques et des candidats, comme l'illustre les différentes opinions des personnes enquêtées contenues dans le graphique suivant :

Graphique n°2 illustrant l'équité dans la répartition des fonds alloués aux partis politiques

(Source : graphique établi par l'auteur)

On peut comprendre que le législateur a posé ces balises pour empêcher l'émergence des micro-partis, sans véritable assise populaire et éviter à l'Etat d'engager des dépenses excessives. Mais, poser de telles conditions aux partis et aux candidats revient à légitimer les inégalités et la discrimination.

D'une part, tous les partis politiques n'ont pas été créés au même moment ni ne bénéficient des mêmes avantages. Il va donc sans dire que certains partis ont eu tout le temps nécessaire pour assurer leur implantation sur la majeure partie du territoire national. C'est le cas du Rdpc né des cendres de l'Unc. C'est aussi celui de l'Undp, du Sdf, de l'Udc ou encore de l'Upc à forte coloration régionale.

A l'exception du Sdf, ces partis ont à leur tête, d'anciens membres du gouvernement, ce qui implique leur moindre degré de vulnérabilité au plan matériel et financier.

D'autre part, les subventions dont il est question ne proviennent-elles pas du trésor public alimenté par l'effort collectif des citoyens, au titre des contributions directes ou indirectes. La juste distribution pourrait aussi bien se manifester par une répartition équitable des fonds concernés à l'ensemble des personnes engagées dans le domaine politique, sans quoi celle-ci est vidée de son sens.

Ce faisant l'accent devra être mis énergiquement sur le contrôle de leur utilisation pour décourager toute tentative de détournement qui hanterait certains présidents de partis. C'est pour cette raison que l'article 4 alinéa 2 du décret n° 2001/305 du 8 novembre 2001 confie le contrôle de l'utilisation des fonds destinés au financement public des partis politiques et des campagnes électorales à une Commission81(*).

Cette Commission est chargée de contrôler l'utilisation des fonds publics alloués aux partis politiques pour concourir aux dépenses couvrant leurs activités permanentes ou celles consacrées à l'organisation des campagnes électorales. Au terme de son travail, elle adopte un rapport annuel qu'il adresse ensuite au président de la République82(*).

A la première lecture, ce décret soulève deux principaux problèmes : la composition de la Commission ainsi que son indépendance.

Le premier point laisse en effet apparaître que le composition de la Commission de contrôle n'intègre pas dans ses rangs les représentants des partis politiques. De même, en parlant des représentants du parlement, le décret n'indique pas clairement les partis que ces députés représentent au sein de la Commission.

L'efficacité et la transparence de la Commission seraient en tout cas garanties si ces imprécisions sont levées afin de privilégier le principe du contradictoire dans la prise des décisions au moment d'arrêter le rapport final.

Il serait en tout cas profitable que les partis politiques et les personnalités indépendantes de la société civile siègent dans la Commission pour éviter l'arbitraire qui peut naître des décisions d'une structure au sein de laquelle l'Administration est sur-représentée.

En dépit de ses pouvoirs d'action83(*), le second élément qui hypothèque l'efficacité de cette structure est son absence d'indépendance. Ses membres sont nommés par le président de la République. Il s'en suit que ceux-ci lui doivent soumission et obéissance. N'est-ce pas d'ailleurs à cette haute autorité qu'ils adressent leur rapport annuel ? N'est-ce pas elle, également qui peut les démettre de leur fonction à tout moment puisque le décret qui constate leur existence n'indique pas la durée de leur mandat ?

Cette absence d'autonomie fonctionnelle est aggravée par la dépendance matérielle et financière. Non seulement les fonctions de ces membres sont gratuites comme le rappelle l'article 12 du décret, mais ceux-ci ne disposent ni des locaux propres, ni des autres moyens logistiques pouvant faciliter leur travail.

D'une manière générale, seule est prévue pour eux une indemnité de session et des frais de mission . On peut donc convenir, au regard de ces deux constatations, que l'efficacité de cette Commission est très limitée enfermée, qu'elle est, dans les fourches caudines du texte qui lui a donné le jour.

La première solution en vue de l'efficacité étant l'ouverture de la Commission, pas seulement aux partis politiques, objet du contrôle, mais aussi aux autres formations politiques suivant les critères de représentativité84(*) ainsi qu'à la société civile. La seconde commande que le rapport de la Commission soit publié. Le contrôle de l'utilisation des fonds qui est à sa base représente, en tout cas, les contributions des citoyens et doit faire l'objet d'un compte rendu à la Nation toute entière.

L'article 11 qui détermine le destinataire du rapport apparaît alors dangereux dès lors qu'il transforme celui-ci en une sorte « d'arme » à la disposition du président de la République dont l'exploitation dépendra du comportement du parti politique mis en cause par le détournement des fonds. Si le détournement des fonds est démontré, le destinataire du rapport peut décider de garder le silence. Dans ce cas, le parti en cause sera à sa merci et ne pourra plus jouer efficacement le rôle assigné à un parti politique d'opposition ; malgré tout, le parti contrôlé peut choisir de passer outre la menace présidentielle et mener ses activités normalement en refusant de se plier à toute forme de chantage, à ce moment il s'engage à affronter les rigueurs de la loi pénale et de la justice.

En outre, le travail de la Commission a un caractère permanent. Cela implique la nécessité d'un budget autonome dont le vote doit s'effectuer au sein du parlement, car l'activité de contrôle requiert beaucoup de temps ; en raison des enquêtes qui peuvent être menées et peut être le nombre de partis à contrôler, le délai d'un an peut s'avérer insuffisant.

L'autonomie financière peut par conséquent permettre à la Commission, en cas de nécessité, de s'attacher les services d'experts compétents pour faire aboutir rapidement ses travaux.

En dernier lieu, le problème de sanctions contre les membres de cette Commission reste imprécis. Dans l'exercice de leurs fonctions, ils peuvent poser des actes qui font griefs aux partis contrôlés à travers par exemple, l'inobservation des exigences de neutralité et d'impartialité. Dans ce cas, quelles sanctions encourent-ils ? Devant quelle autorité doivent-ils en répondre ? Cette imprécision réglementaire en matière répressive sur les actes des membres de la Commission constitue à ce point une limite supplémentaire qui vide cette structure de son efficacité.

* 78 Cf. la répartition de cette subvention en annexe n°2, p. 109.

* 79 Les dépenses des partis politiques dont il est question concernent : le fonctionnement de leur administration courante ; la diffusion de leur programme politique ; la coordination de l'action politique de leurs membres ; leur préparation aux consultations électorales ; leur participation aux différentes commissions électorales prévues par la législation en vigueur.

* 80 Cf. articles 6, 7 et 8 de la loi n°200/015 du 19 décembre 2000 réglementant le financement des partis politiques et des campagnes électorales.

* 81 C'est une Commission qui comprend les membres suivants :

- président . un représentant de l'Administration chargé du Conseil supérieur de l'Etat ;

- Membres : Un représentant des services du premier ministre, un représentant chargé de l'administration territoriale et de la décentralisation, un représentant du ministère chargé des finances, un représentant ministère chargé de la justice, 4 représentants du parlement.

* 82 Ces dispositions sont affirmées dans les articles 2 et 11 du décret n°2000/301 du 8 novembre 2000 relatif au financement public des partis politiques et des campagnes électorales.

* 83 A ce titre, elle : est habileté à vérifier, sur pièces, que l'utilisation des fonds destinés au financement public des partis politiques est conforme aux fins prévues par la loi n° 2000/015 du 19 décembre 2002 sur le financement des partis ; exige éventuellement, dans l'accomplissement de ses missions, tout document financier et comptable nécessaire à la justification des fonds alloués ; peut en cas de nécessité, faire constater les cas de détournement des fonds publics alloués aux partis politiques.

* 84 Ces critères peuvent être la représentativité au sein du parlement, le niveau d'implantation du parti à travers le territoire national...

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille