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Les recours individuels dans le système inter-africain de contrôle: la coexistence de la cour africaine et des juridictions des communautés économiques régionales

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par Christian BAHATI BAHALAOKWIBUYE
Université Catholique de Bukavu - Licence 2011
  

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O. INTRODUCTION

O. 1 PROBLEMATIQUE

 Nous sommes aujourd'hui en présence d'un véritable clavier des droits de l'homme qui raisonne quelle que soit la partie du monde concernée, et dont l'existence participe du caractère sacré de la personne humaine.1(*)

Le droit international relatif aux droits de l'homme vise à protéger l'ensemble des droits dont chacun a besoin pour mener une vie pleine, sûre et saine en toute liberté et sécurité. Ces droits nous confèrent, dignité et égalité, ils garantissent la possibilité de répondre à nos besoins fondamentaux que sont l'alimentation, la santé, l'éducation, le travail...La procédure de garantie des droits fondamentaux joue à ce titre un rôle majeur pour veiller au respect de ces droits. Celle-ci se résume à un ensemble de dispositions, et procédés visant à empêcher les violations des droits humains, à les sanctionner par la réparation des dommages subis du fait de ces atteintes.2(*)

Il importe donc que l'application des droits de l'homme (droits civils et politiques, droits économiques, sociaux et culturels, droits de solidarité) déclarés indivisibles par ailleurs et des libertés fondamentales soit garantie par un système de protection efficace, dans le cadre des organisations universelles et régionales, les Etats ayant l'obligation « erga omnes » de les respecter.3(*)

L'universalisation des droits de l'homme postule également l'universalisation des procédures : on ne peut pas prétendre adhérer à un système des valeurs en y soustrayant ce qui apparait en définitive comme la plus grande conquête en matière de défense des Droits de l'homme à savoir la soumission des Etats à des juridictions internationales.4(*)

Ce dernier aspect mérite de retenir l'attention. Il implique également qu'on s'y attarde en raison du fait qu'aussi importants et étendus que soient les droits de l'homme, ce sont les garanties de leur respect ou les réparations qu'impliqueraient leurs violations qui sont déterminantes.

Ainsi, la définition conventionnelle des droits de l'homme, aussi bien sur le plan universel que sur un terrain régional, appelle un système de mise en oeuvre satisfaisant.

Les auteurs conscients de cette nécessité, paraissent unanimes à reconnaitre le besoin d'établir, en même temps que des pactes ou des conventions définissants les droits de l'homme, un système garantissant leur mise oeuvre au moyen de procédures internationales appropriées.

Puis si l'on passe du terrain doctrinal à celui de la pratique, on retrouve en dernière étape, après quelques flottements ou réactions de la part de certains Etats, ce même souci de mise en oeuvre5(*).

L'on sait qu'au plan international, le système de protection des droits de l'homme repose dans son aspect normatif sur la charte internationale des droits de l'homme. La charte se compose respectivement de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 12 décembre 1948, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté en 1966, entré en vigueur en 1976 ; du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels adopté et entré en vigueur au même moment que le précédent ; du premier protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques portant sur le recours individuel ; du deuxième protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques , entré en vigueur en 1988 et portant sur l'abolition de la peine de mort. Ces instruments juridiques qui consacrent les normes générales relatives aux droits de l'homme ont été à l'origine de plusieurs autres textes internationaux. Dans son aspect institutionnel, l'on relève le rôle majeur de l'ONU avec ses différentes composantes. Les organes juridictionnels à vocation universelle, s'inscrivent également dans cette logique. Il s'agit précisément de la cour pénale internationale6(*).

Au plan régional, il conviendra de présenter le système de protection des droits fondamentaux dans le continent européen, américain et africain. En Europe, le noyau dur de ce système s'arrime autour de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de septembre 1950 ; de la commission et de la cour européenne des droits de l'homme. En Amérique, le système repose sur la convention américaine relative aux droits de l'homme de juillet 1978 ; de la commission et de la cour inter américaine des droits de l'homme. En Afrique, le système de protection des droits fondamentaux reposait avant janvier 20047(*) sur la charte africaine des droits de l'homme et des peuples d'octobre 1981 ; la commission africaine des droits de l'homme et des peuples ; la conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) devenue l' Union africaine (UA).

Au plan sous-régional africain, la Cour africaine n'est pas le seul organe judiciaire supra étatique susceptible de veiller au respect des droits garantis par la Charte africaine et de condamner un Etat pour la violation de ces droits. C'est aussi le cas de certaines Cours de justice des Communautés économiques régionales (CER). Trois des cours de ces CER sur les huit reconnues par l'union africaine (UA) disposent implicitement ou explicitement d'un mandat de systèmes de promotion et de protection des droits de l'homme.

Il s'agit du Tribunal de la SADC et de la Cour de justice de la CEA qui ont compétence pour tous litiges concernant l'application des Traités constitutifs des Communautés, ces derniers engageant les Etats au respect des droits garantis par la Charte africaine. La Cour de justice de la CEDEAO a, elle, une compétence explicite quand au respect des droits de l'Homme. L'article 9(4) de son Protocole supplémentaire (adopté en 2005) donne à la Cour compétence pour connaître des cas de violations des droits de l'Homme commises par un Etat Partie. Tous ces organes judiciaires des CER africaines garantissent le droit de recours individuel.8(*)

D'une manière générale, toutes ces procédures sont identiques : elles ne peuvent être utilisées que dans des cas où les moyens légaux, au niveau national, ont été épuisés. Elles ne peuvent pas être effectuées anonymement et doivent présenter des informations exactes et objectives etc.9(*)

Par ailleurs, il sied de noter que cette justice internationale étant déjà en place, il fallait attendre une période encore plus récente pour que les États acceptent la compétence d'un juge international pour des litiges les opposant à des particuliers. Mais, le système international de protection des droits de l'homme ne fait pas exception à la restriction du droit procédural international en ce qui concerne l'accès des individus à la justice internationale. Que ce soit au niveau des mécanismes de l'Organisation des Nations Unies (ONU) ou des autres systèmes régionaux des droits de l'homme, le droit de recours individuel fait généralement l'objet d'une clause facultative, la compétence de ces organes à examiner des requêtes individuelles étant soumise à la déclaration de la reconnaissance de cette compétence par les Etats concernés.

C'est ainsi que les requêtes ou communications individuelles adressées à la commission africaine des droits de l'homme et des peuples, à la défunte commission européenne des droits de l'homme, à la commission interaméricaine des droits de l'homme, au comité des droits de l'homme de l'ONU ou à la Cour internationale de justice10(*), par exemple, font l'objet d'un filtrage avant leur enregistrement ou leur notification aux Etats contre lesquels elles sont introduites.

Ayant remporté la bataille pour l'entrée en vigueur de la Cour, celle pour son effectivité commence. Elle implique plusieurs facteurs notamment la ratification du Protocole par le plus grand nombre d'Etats et l'acceptation du droit de recours individuel.11(*)

Au cours de cette étude, nous allons nous appesantir essentiellement sur la manière dont le Protocole créant la Cour africaine aborde la question de l'accès des individus à la Cour africaine. Il nous faudra ensuite faire un aperçu de l'application de la Charte africaine par les juridictions sous-régionales et entrevoir les relations qui existeront entre celles-ci et la Cour africaine.

En effet, le Protocole créant la Cour prévoit la compétence obligatoire de la Cour pour toutes les affaires portées devant celle-ci par la Commission africaine, les Etats parties ou une organisation intergouvernementale africaine, et une compétence facultative de la Cour en ce qui concerne les affaires soumises par un individu ou une organisation non gouvernementale. On pourrait bien entendu regretter le caractère purement facultatif de la compétence de la Cour concernant les requêtes individuelles.

Cette compétence n'étant que facultative, elle est soumise à la volonté préalable de l'Etat accusé de violations des droits de l'Homme. En fait, les individus et ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine peuvent saisir directement la Cour si et seulement si l'Etat en cause, partie au Protocole, a fait une déclaration au titre de l'article 34.6 du Protocole autorisant une telle démarche.

Il s'agit ici d'une des limitations principales du système africain de protection des droits de l'Homme. En effet, l'expérience de la Commission africaine et celle des autres cours régionales, nous a montré que les Etats sont peu enclins à déposer des plaintes contre d'autres Etats. Cette possibilité n'a été que très peu utilisée par les Etats, ceux-ci hésitant à s'attaquer à leurs homologues par peur d'effet boomerang. Un exemple : en 1999, la République démocratique du Congo a porté une communication devant la Commission contre le Burundi, l'Ouganda et le Rwanda pour dénoncer les violations graves et massives des droits de l'Homme et des peuples commises par les forces armées de ces trois pays dans les provinces congolaises de l'est touchées par un mouvement de rébellion depuis août 1998. Elle n'a jamais été utilisée dans le système interaméricain et seulement une vingtaine de fois contre 57100 plaintes individuelles devant la Cour européenne12(*). En d'autres termes, si les Etats parties au Protocole ne font pas la déclaration au titre de l'article 34.6, l'activité de la Cour sera fortement réduite. Et la cour a fait bon usage de cette disposition de l'article 34.6 lors de son premier arrêt et a conclu à son incompétence parce que le Sénégal n'avait pas encore fait la déclaration en vertu de l'article que nous venons de citer13(*).

Or, la capacité de la Cour de recevoir des communications individuelles est fondamentale pour sa crédibilité dans son rôle de lutte contre l'impunité et de protection des droits de l'Homme sur le continent. Pourtant, parmi les Etats ayant ratifié le Protocole, seuls le Burkina Faso, le Mali, le Malawi, la Tanzanie et le Ghana ont fait une déclaration au titre de l'article 34.6.

Alors, à l'aune de toutes ces considérations et notant d'une part, que le principe de création de cette instance judiciaire continentale constitue une avancée relative en matière de protection des droits de l'homme et qu'il est loin d'avoir réglé tous les problèmes liés à l'effectivité de l'autorité et à l'étendue des compétences de celle-ci. D'autre part, que les Cours de justice des CER africaines que ce soit la CJCEDEAO14(*) , la CJCAE15(*) ou le Tribunal de la SADC16(*)se fondent sur les droits garantis par la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples pour rendre leurs arrêts et que plusieurs pays africains étant simultanément membres de plusieurs CER, une possibilité de chevauchement et de conflit de compétences existe, plusieurs questionnement surgissent.

En premier lieu, le droit de saisine des individus et des ONG, étant limité aux Etats l'ayant explicitement accepté, il s'agit ici d'une des limites majeures de la Cour, même si les individus et les Organisations non gouvernementales (ONG) peuvent tenter de contourner cet obstacle par le biais de la Commission africaine en faisant bon usage de l'article 5.2 du Protocole pour les Etats ayant au moins ratifié le Protocole. La capacité de la Cour de recevoir des communications individuelles est fondamentale pour sa crédibilité. Or, il ne faut surtout pas compter sur la bonne foi des Etats. Nous constatons avec l'Association pour la prévention de la torture17(*) qu'avec cette disposition de l'article 34.6 nous ne pensons pas que les Etats vont déborder d'enthousiasme pour se bousculer à faire la déclaration de reconnaissance de la cour à recevoir des requêtes individuelles. En plus, on ne peut non plus s'imaginer que d'un coup les Etats vont sortir de leur léthargie voire de leur complicité passive pour s'indigner devant des violations qui se commettent chez leurs voisins et les dénoncer devant la cour.

En second lieu, à présent, il est difficile d'entrevoir les relations qui existeront entre les Cours de justice des CER et la Cour africaine. La concurrence de ces juridictions pourrait amener des différences d'interprétation de la Charte africaine et ainsi entraîner une protection différente de ces droits.

Sur la base de tous ces développements qui précèdent, nous soulevons les questions suivantes :

- Sous quelles conditions les personnes physiques ou morales africaines et les organisations non-gouvernementales peuvent porter le cas d'une violation d'un droit de l'Homme directement devant la Cour africaine et devant les juridictions des CER?

- Un Etat ne pourrait-il pas accepter la compétence de la Cour pour une affaire donnée. En d'autres termes, l'article 34.6 du Protocole admet-il l'acceptation ad hoc de la compétence de la Cour ?

- Le glissement des juridictions sous-régionales du champ économique vers le champ de la protection des droits de l'homme ne risque-t-il pas de placer les individus dans un désarroi ou de placer la Cour africaine et ces juridictions dans un forum shopping ?

En réalité, affirmons-le, c'est à ces questions que le présent travail se propose de répondre, et eu égard à ces interrogations, quelques hypothèses sont envisageables.

0.2 HYPOTHESES

- Les personnes physiques et les organisations non-gouvernementales peuvent, sous certaines conditions, porter le cas d'une violation d'un droit de l'Homme directement devant la Cour ou indirectement via la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples.

Pour décider du respect ou non de ces conditions - étape obligatoire avant l'examen au fond de l'affaire, la Cour peut s'inspirer des décisions pertinentes de la Commission africaine qui applique depuis le début de ses travaux les mêmes exigences pour la recevabilité des communications portées devant elle. Seule différence, pour qu'une requête soit directement reçue par la Cour, l'Etat contre lequel un individu ou une ONG porte plainte doit avoir fait la déclaration au titre de l'article 34.6 du Protocole. Les juridictions des CER prévoient des conditions d'accès moins rigoureuses et permettent aux individus d'accéder directement à la Cour. La CJCEDEAO apparait comme une juridiction de première instance en supprimant la règle de l'épuisement des recours internes pour accès à services.

- Conforment au Protocole, la Cour peut permettre aux individus de la saisir directement à condition que l'Etat en cause ait fait la déclaration de l'article 34.6 du Protocole. Cette condition risque de placer la Cour dans un rôle de figurant où les nobles objectifs qui ont guidé l'adoption même du Protocole seraient compromis.

Eu égard à cela, seule la saisine indirecte via la Commission reste possible aux individus et aux ONG pour saisir la Cour. En plus de ce seul moyen qui reste aux particuliers nous avons envisagé, en ayant en face le principe de consensualisme qui caractérise la justice internationale lui-même dérivé de celui de la souveraineté des Etats18(*), certains mécanismes par lesquels les individus pourraient accéder directement à la Cour. C'est ainsi qu'après lecture combinée des articles 5.3 et 34.6 du Protocole nous avons proposé une bonne solution de compromis pour les Etats réticents à déposer une telle déclaration. Il s'agit du forum prorogatum ou juridiction de la Cour au cas par cas sans que l'Etat en cause n'ait à se lier pour l'avenir comme ils le feraient avec le dépôt d'une déclaration d'acceptation facultative. Ayant beaucoup d'honneur à la souveraineté des Etats nous avons proposé une révision partielle du Protocole qui porterait suppression de l'article 34.6 qui est contraire aux droits de l'homme.

- Les chevauchements des compétences entre la Cour africaine et les juridictions des CER doivent être compris comme une avancée dans la protection des droits de l'homme et un dialogue en amont doit exister entre ces juridictions afin d'éviter des interprétations et des applications dissonantes des droits protégés par la Charte africaine. Pour enfin aboutir à la coexistence matérielle des instruments que protègent ces différentes juridictions et ainsi prévenir autant que faire ce peu la fragmentation du droit africain des droits de l'homme en construction.

Les hypothèses étant des réponses provisoires aux questions de recherche, elles seront soit confirmées, nuancées ou rejetées à la conclusion du travail. Mais avant cela, elles doivent faire l'objet d'une vérification.

L'analyse des recours individuels dans le système africain de protection des droits de l'homme est un sujet qui revêt un intérêt indéniable.

0.3 INTERET DU TRAVAIL

Ce travail a l'insigne vertu de servir de référence au citoyen en général et au juriste. Il présente de ce fait un intérêt à la fois social (A) et scientifique (B).

A. Intérêt social

L'intérêt social dans le cadre de ce travail est manifeste dans le sens où, la société est considérée comme étant l'azur de toutes les implications qui peuvent découler des décisions des Etats, des organisations internationales et des juridictions internationales notamment ici la Cour internationale de justice.

La vie et les activités des populations restent donc liées au prononcé du juge international face aux droits de l'homme.

B. Intérêt scientifique

L'intérêt scientifique ici suppose l'apport de cette étude dans le monde de la science et de la recherche, en ce qui concerne la problématique du droit de recours individuel devant la Cour africaine et l'application de la Charte africaine par les juridictions sous-régionales des CER. Cette étude en fait se propose d'envisager, dans un premier temps, l'accès direct des individus à la Cour. Il s'agit pour nous d'examiner d'abord la démarche scientifique, ensuite le raisonnement juridique et enfin l'appréciation juridique de la Cour lorsqu'elle est amenée à se prononcer sur sa saisine et les modalités de sa saisine telles qu'organisées par les articles 5.3 et 34.6 du protocole.

En effet, il ressort de la lecture combinée des articles 5.3 et 34.6 du Protocole que la saisine directe de la Cour par un individu est subordonnée au dépôt par l'Etat défendeur d'une déclaration spéciale autorisant une telle saisine. Or, en plus su fait que les Etats africains ne se pressent pas à faire une telle déclaration, ils sont peu enclins à saisir la Cour contre les violations commises par leurs pairs alors que ce ne sont pas des occasions qui manquent.

Face au danger que court la Cour

0.4 METHODOLOGIE DE TRAVAIL

A. METHODES DE TRAVAIL

Le processus méthodologique que nous avons choisi dans l'élaboration de ce travail est la recherche-action. Cette méthode n'est pas un simple avatar méthodologique de sociologie classique, elle exprime au contraire une véritable transformation de la manière de concevoir et de faire de la recherche en sciences humaines. Il s'agit là d'une recherche à l'intérieur de la quelle il y a une action délibérée de la transformation de la réalité, mais aussi et surtout de produire des connaissances pour réaliser ces transformations.

B. La recherche documentaire

Les techniques d'enquête renvoient aux conditions pratiques de collecte d'informations. Nous avons opté dans l'élaboration de ce travail à la recherche documentaire.

La recherche documentaire consiste à fouiller dans les ouvrages et dans différentes publications comme les revues ou les journaux : les textes de loi, les éléments de doctrine et de jurisprudence qui permettent de cerner et d'apprivoiser l'objet d'une étude. Ce type de recherche est réalisable dans les bibliothèques et dans les centres d'études et de recherches. Nous avons choisi cette technique, parce qu'elle cadre parfaitement avec l'objet de notre étude. Il s'agit simplement pour nous d'examiner le raisonnement et la contribution de la Cour lorsque celle-ci est confrontée aux problèmes des droits de l'homme. Ainsi, pour mieux cerner l'objet de cette étude, notre attention sera focalisée sur les textes, la doctrine et la jurisprudence de la Cour en matière des droits de l'homme. La recherche documentaire s'est déroulée dans les bibliothèques de l'Institut Catholique de Yaoundé et de l'APDHAC39( *), lesquelles ensemble disposent d'à peu près dix mille ouvrages dans leur fonds documentaire.

PLAN SOMMAIRE

En plus de l'introduction et de la conclusion, le présent travail est subdivisé en trois chapitres. La justice internationale étant Nous avons trouvé nécessaire d'aborder le premier sous l'angle des exigences qui rendent difficile l'accès des personnes physiques et des ONG à la Cour africaine et aux trois cours régionales. Ce chapitre est intitulé : les conditions de recevabilité des recours individuels dans le système interafricain de protection des droits de l'homme.

Chapitre I. CONDITIONS DE RECEVABILITE DES RECOURS INDIVIDUELS DANS LE SYSTEME INTERAFRICAIN DE CONTROLE JUDICIARE DES DROITS DE L'HOMME

Nous examinerons dès l'abord les conditions de recevabilité pour qu'une requête individuelle soit recevable devant la Cour africaine qui est le préalable à toute demande en justice (section Ière). Nous ferons également une analyse succincte des conditions de recevabilité des recours individuels devant les Cours de justice des CER (section II).

Section Ière : les conditions de recevabilité des requêtes devant la Cour

Avant d'apprécier le contenu substantiel de toute requête, la Cour doit vérifier que les exigences formelles requises pour la mise en oeuvre de sa juridiction sont satisfaites.

Le protocole ne consacre que trois courts paragraphes à la question de la recevabilité des requêtes et le moins que l'on puisse dire est que la manière dont il traite de cette question importante n'est pas très satisfaisante en raison de son manque de clarté.

Pour décider du respect ou non des ces exigences, la Cour se fonde sur le Protocole, la Charte ou même son Règlement intérieur final adopté la 07 septembre 2010.19(*) Elle peut s'inspirer de la jurisprudence de la Commission mais avec plus d'attention à l'article 34.6 du Protocole qui n'a pas de correspondant que ce soit dans la Charte ou dans le Règlement intérieur de la Commission de tel que révisé par la 47ème session de la commission africaine du 12 au 26 mai 2010 entré en vigueur la 18 août 2010.

Elle pourra aussi se servir de l'expérience précieuse de ses devancières régionales à savoir la cour européenne et la cour interaméricaine.

Il sera question dans cette section d'analyser d'abord les conditions générales qui ont trait à la compétence (§1), ensuite les conditions spécifiques qui ont trait à la recevabilité (§2) en nous appuyant surtout sur le Protocole, la Charte et la jurisprudence de la commission. Un regard sera jeté sur la manière dont les autres mécanismes de protection examinent ces exigences quant ils sont devant un recours individuel.

§1: Les conditions générales de recevabilité

Sous cette section nous traiterons en premier lieu des conditions relatives à la compétence de la Cour (§1) et en second lieu des autres conditions générales (§2)

I. Conditions relatives à la compétence de la Cour

A. La requête doit émaner d'un individu ou d'une ONG ou de leurs représentants

Cette question est celle de la compétence de la personnelle ou compétence ratione personae de la cour en matière des requêtes individuelles ; elle est régie par l'article 5.3 du Protocole.

Selon l'article 5.3 du Protocole : « La Cour peut permettre aux individus ainsi qu'aux organisations non gouvernementales (ONG) dotées du statut d'observateur auprès de la Commission d'introduire des requêtes directement devant elle, conformément à l'article 34(6) de ce Protocole ». 

La requête peut être portée par tout individu ou peuple20(*). Il n'est pas forcément la victime ou un membre de la famille de la victime de la violation des droits de l'Homme portée à la connaissance de la Cour.

Le plaignant ne doit pas forcément être de la nationalité de l'Etat contre qui l'affaire est portée devant la Cour.

La requête peut être portée par toute ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine. L'ONG ne doit pas nécessairement avoir un intérêt spécifique dans l'affaire : elle n'est pas obligée d'être victime de la violation alléguée devant la Cour pour être recevable.

Il s'agit ici de l'actio popularis. En d'autres termes, à la différence des autres cours régionales, la faculté donnée aux individus et aux ONG de saisir la Cour n'est pas limitée à un intérêt à agir particulier, comme celui d'être une victime directe de la violation des droits de l'Homme. Une fois l'autorisation donnée par un Etat Partie, conformément à l'article 34.6 du Protocole, tout individu ou ONG ayant le statut d'observateur à la Commission africaine, quelle que soit sa nationalité civile ou juridique, peut accéder à la Cour pour contester les violations des droits de l'Homme commises par cet Etat21(*).

B. La requête doit être dirigée contre un Etat partie qui a fait une déclaration spéciale

Cette condition est relative aux modalités d'acceptation de cette compétence par un Etat et sont prévues à l'article 34.6 du Protocole.

La requête doit être dirigée contre un Etat partie qui a fait une déclaration au titre de l'article 34.6 du Protocole autorisant une saisine directe des individus et des ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine.

Cet article 34.6 se lit : « A tout moment, à partir de la ratification du présent Protocole, l'Etat doit faire une déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes énoncées à l'article 5(3) du présent Protocole. La Cour ne reçoit aucune requête en application de l'article 5(3) intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration. »

Cette disposition pose les modalités d'acceptation de compétence de la cour par un Etat en matière de requêtes individuelles.

Cette question de compétence a été spécifiée et distinguée de la question de recevabilité dans l'arrêt son tout premier arrêt, où la Cour a affirmé que la condition exigée à l'article 34(6) avait bien trait à la compétence et non à la recevabilité en ces termes : «  La cour rappelle que la seconde phrase de l'article 34(6) Protocole prévoit qu'elle ne « ne reçoit aucune requête en application de l'article 5(3) intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration ». Le terme « reçoit » ne doit cependant être entendu ni dans son sens littéral, comme renvoyant au concept de « réception », ni dans son sens technique, comme renvoyant au concept de « recevabilité ». Il doit plutôt être interprété à la lumière tant de l'esprit que de la lettre de l'article 34(6) pris dans son intégralité et en particulier de l'expression « déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes individuelles » figurant dans la première phrase de cette disposition.de « pouvoir » de la cour de «  connaitre de cette requête. Il ressort donc clairement de la lecture de cette lecture que l'objectif de l'article 34.6 susmentionné est de régler les conditions pour que la cour puisse connaître de telles requêtes, à savoir l'exigence du dépôt d'une déclaration spéciale par l'Etat concerné, et de tirer les conséquences de l'absence de d'un tel dépôt par cet Etat ».22(*)

En nous référant à ces deux disposition à savoir les articles 5.3 et 34.6 on peut dire que la compétence de la cour quant aux recours individuels n'est subordonnée qu'à ces deux conditions analysées ci-haut.

Le juge Fatsah OUGUERGOUZ fait remarquer dans l'exposé de son opinion individuelle joint à l'arrêt de la Cour susmentionné, que le paragraphe 31 de l'arrêt énonce cependant, non sans ambiguïté, que pour que la Cour « puisse connaître d'une requête contre un Etat partie émanant directement d'un individu, il faut qu'il y ait conformité avec, entre autres, de l'article 5 et 34.6 du Protocole. Il estime que si la question ici était celle de la compétence de la cour, l'expression « entre autres » porte à confusion car elle laisse entendre que cette compétence est subordonnée à une ou plusieurs autres conditions qui ne sont pas précisées. Or, il n'y a pas d'autres conditions à la compétence en la matière que celle posée par l'article 34.6 et 5.3 estime le Juge.

Le juge ajoute que si toutefois l'expression « entre autres » visait également les conditions de recevabilité de la requête, il n'existerait plus de lien logique entre le paragraphe 31 et le paragraphe 29 de l'arrêt dans lequel la Cour se propose d'examiner en premier lieu la question de sa compétence. Il serait surtout difficile de comprendre le sens du paragraphe 39 dans lequel la Cour donne son interprétation du verbe « recevoir » utilisé à l'article 34.6 du Protocole. Ainsi, sauf à préciser le sens de l'expression « entre autres », la cour aurait en conséquence dû faire l'économie de cet ajout.

Le juge dit en définitive que les articles 5.3 et 34.6 doivent être lus dans leur contexte, c'est-à-dire, en particulier, à la lumière de l'article 3 du même Protocole, intitulé « compétence de la cour » et dit que cette compétence doit être distinguée de la saisine et c'est cette distinction qui explique pourquoi la cour n'a pas rejeté de plano la requête sur la base d'une absence manifeste de compétence, et ce, par la voie d'une simple lettre du Greffe, et qu'elle a pris le temps de se prononcer solennellement par la voie d'un arrêt.23(*)

Sur ce point nous avons fait une analyse de l'expression « entre autres » et nous avons trouvé qu'il est prévu dans le Protocole une disposition qui limite la temporellement la compétence de la Cour que nous examinons dans le point C.

C. La condition de l'article 34.3 du Protocole

La requête doit concerner des faits qui relèvent de la juridiction de l'Etat en cause et qui sont postérieurs à la date du dépôt de l'instrument de ratification du Protocole par ledit Etat. Ainsi, si un Etat a ratifié le Protocole le 1er janvier 2006 en faisant la déclaration au titre de l'article 34.6, le plaignant ne peut porter une affaire devant la Cour que pour dénoncer une violation des droits de l'Homme commise par cet Etat après le 1er janvier 2006.

Ici exception doit être faite des disparitions forcées des personnes constitutif de crime contre l'humanité, qui ont un caractère continu et donc imprescriptibles car il est admis en droit international que les disparitions forcées sont des violations continues.24(*)

II. Les autres conditions

Il faut que la ou les violations alléguées dans la requête portent sur l'un des droits garantis par la Charte africaine ou tout autre instrument régional ou international pertinent relatif à la protection des droits de l'Homme ratifié par l'Etat en question.

Cette condition a trait à la recevabilité des requêtes devant la cour et est déduite de la lecture des dispositions des articles 3 et 7 du Protocole et 60 et 61 de la Charte et l'article 34 du Règlement de la cour.

Toute requête qui déroge à l'une de ces conditions sera déclarée irrecevable par la Cour

§2. Les conditions spécifiques de l'article 6. 2 du Protocole

Outre les conditions générales de recevabilité, la requête doit remplir certaines conditions particulières pour être examinée par la Cour. Celles-ci sont prévues par l'article 6 du Protocole qui renvoie aux dispositions de l'article 56 de la Charte, relatives aux conditions de recevabilité des communications devant la Commission africaine.

Puisque l'article 6.2 du Protocole renvoie à l'article 56 de la Charte, les conditions spécifiques de recevabilité d'une requête d'un individu ou d'une ONG sont les mêmes devant la Commission et la Cour. Ces conditions de recevabilité de l'article 56 qui correspond à l'article 40 du Règlement intérieur de la Cour, sont destinées à servir de crible, afin d'assurer que la Commision consacre son précieux temps à l'examen de violations importantes conformes aux directives prescrites.

Plus récemment, le non épuisement des recours internes est devenu la première cause des décisions d'irrecevabilité25(*).

Ainsi, pour connaître les conditions de recevabilité des requêtes devant la Cour africaine, il est nécessaire de se référer à la jurisprudence de la Commission (présentée ci-après) si toutefois la Cour décide de la suivre. Disons que la Cour n'est pas obligée de la suivre. Elle a été créée par un traité différent de celui qui a crée la Commission à savoir respectivement le Protocole et la Charte.

En conformité avec les dispositions de l'article 56 de la Charte auxquelles renvoie l'article 6.2 du Protocole et auxquelles fait référence l'article 40 du Règlement intérieur de la Cour, pour être examinées, les requêtes doivent remplir les conditions ci-après :

§1. La requête est recevable si elle indique l'identité de son auteur

Aux termes du premier paragraphe de l'article 56 de la Charte africaine et de l'article 40.1 du règlement de la Cour, la requête doit indiquer l'identité de son auteur même si celui-ci demande à la commission de conserver l'anonymat de l'auteur de la requête sera garanti par la

Cette exigence est commune à tous les systèmes régionaux de protection des droits de l'homme. Elle a été prévue par l'article 3...(1) littera a de la convention européenne, l'article 46.1 littera d de la Convention interaméricaine et l'article 3 du Protocole facultatif au PIDCP.

L'obligation de décliner l'identité peut être mal interprétée. On a fait valoir, à tort, que c'est l'identité de la victime ou des victimes, véritables requérants, qui doit être déclinée. La jurisprudence européenne va dans ce sens. (...) En revanche, la jurisprudence du système Africain, par une approche libérale de la disposition sous examen, fournit une interprétation plus conforme à l'objet et au but de la Charte. Ce qui est recherché au stade de la recevabilité, c'est moins l'identité des victimes que celle des personnes par lesquelles les victimes agissent ; identité indispensable en effet, pour le déroulement de la procédure et le suivi du dossier. Ainsi, à l'occasion de l'examen groupé de plusieurs communications concernant les violations des droits de l'homme en Mauritanie la Commission a précisé que si les auteurs des communications doivent décliner leur identité, il n'est pas requis qu'ils soient personnellement victimes ou que des membres de leur famille le soient. (...) 26(*)

Il n'est donc pas nécessaire que les noms des victimes soient indiqués, l'identité de la personne physique ou morale agissant en leur nom suffit. D'ailleurs, la Commission a innové dans son règlement actuel, plus particulièrement l'article 93.2 littera b et 3, tel que révisé par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples lors de sa 47e session ordinaire tenue à Banjul (Gambie) du 12 au 26 mai 2010 et entré en vigueur le 18 août 201027(*) .On observera que selon une certaine jurisprudence de la défunte commission européenne, n'est pas anonyme la requête dont le dossier contient des éléments dont le dossier contient des éléments permettant d'identifier le requérant28(*).

L'obligation d'indiquer l'identité du requérant vise à faciliter la correspondance entre la Commission et le requérant en vue du suivi de la procédure pour une protection effective des droits de l'homme et des peuples.

§2. La requête est recevable si elle est compatible avec l'Acte constitutif de l'UA et la Charte

Pour être recevable selon l'article 56.2 de la Charte, la requête doit se référer aux dispositions de la Charte africaine ou de la Charte de l'OUA supposées avoir été violées. Cette condition est posée dans des termes sensiblement différents par le paragraphe 2 de l'article 40 du Règlement de la Cour qui exige en effet que la requête soit compatible non seulement avec la Charte mais également l'acte constitutif de l'UA. Dans ces conditions il est semble que cette compatibilité doive être appréciée à l'égard de ces deux instruments.

Soulignons que le Protocole de la Cour admet également comme recevable les requêtes fondées sur la violation d'un instrument international ou régional de protection des droits de l'Homme ratifié par l'Etat en cause. Les deux autres systèmes régionaux prévoient cette condition presque dans les mêmes termes.29(*)

On peut observer quant à ce que pour être compatible avec la Charte toute communication doit simplement rentrer dans le cadre de la compétence rationae materiae, rationae personae, rationae loci et rationae temporis de la commission ; dans le cas présent, de la Cour ; en r&alité c'est principalement la compétence matérielle et personnelle de cette dernière qui risque de soulever les plus sérieuses contestations30(*).

La compétence matérielle de la Cour n'est donc pas « liée » à celle de la Commission qui ne peut pour sa part connaître que de l'interprétation et de l'application des droits garantis par la charte africaine (article 45, § 2). L'originalité de l'article 3 du protocole réside dans le fait que la Cour pourra connaître de l'interprétation et de l'application non seulement du protocole lui-même, ce qui paraît aller de soi, bien que celui-ci ne consacre aucun droit de l'homme, mais également et surtout de tout autre instrument conventionnel relatif aux droits de l'homme « ratifié par l'État concerné »31(*).

La commission en traitant de la question a montré que les allégations portées dans les communications doivent renseigner prima facie sur la disposition de la Charte qui a été violée. La Commission a déclaré irrecevable la communication Korvah C. Libéria en considérant que les cinq affaires relatées dans cette communication ne constituent pas des violations des droits de l'homme aux termes des dispositions de la Charte.32(*)

Cette condition l'article 56.2 donne à la Cour un important pouvoir de filtrage des requêtes en intégrant - de manière conceptuellement discutable comme on vient de le démontrer- à la recevabilité des considérations tenant au fond. Dans le système européen, il est également donné à la Cour européenne l'occasion de connaitre des questions du fond abordées dans les décisions de recevabilité33(*).

En témoigne par exemple la décision d'irrecevabilité rendue sur base de cette disposition dans l'affaire Katangese People's Congress C. Zaire. La demande d'indépendance du Katanga n'avait aucun fondement au regard de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.34(*)

Dans cette affaire la question de la sécession du Katanga ne put franchir ce premier obstacle. Le Congrès du peuple Katangais demanda à la commission de reconnaître le droit du « peuple katangais » à une indépendance souveraine, qui lui permettrait ainsi de faire sécession de l'Etat du Zaire. Cette demande était fondée sur l'article 20.1 qui prévoit que tous les peuples ont droit à l'autodétermination. La commission déclara que cette revendication ne pouvait être considérée comme une affirmation de la violation de l'article 20. Les raisons soulevées par la Commission sont entre autre qu'elle est tenue de défendre l'intégrité territoriale et la souveraineté de tous les Etats de l'OUA ; que le trame « peuples n'est pas défini dans la Charte et la commission s'est abstenue d'en donner une définition... la conséquence de cette décision est que le terme « peuples » se voit conférer un sens articulé autour de l'Etat. Par ailleurs, bien que la commission ait déclaré la demande katangaise irrecevable, le raisonnement adopté implique que ce droit pourrait être étendu à des groupes de personnes, se trouvant au sein d'un Etat, qui sont persécutés, dont les droits sont constamment violés et à qui on refus une participation réelle au gouvernement. Dans ces conditions le peuple Katangais pourrait être considéré comme « des peuples »35(*).

Rappelons que la position de la Commission dans cette affaire n'a pas échappé aux critiques. Non seulement le congrès pouvait être considéré comme « peuple » mais aussi son droit dont se prévalait le Congrès du peuple katangais, à savoir son droit à l'autodétermination, était bel et bien reconnu et protégé par la Charte. Mais, la Commission maintient que le Katanga est tenu d'user d'une forme d'autodétermination qui soit compatible avec la souveraineté et l'intégrité territoriale du Zaïre. Nous pensons qu'avec la naissance de la cour africaine des droits de l'homme et des peuples, il y aura une volonté de rompre avec le passé. Que Halidou OUEDRAOGO considère comme une époque où la vie politique du continent était dominée par les Etats autocratiques à parti unique et où l'OUA estimait que les droits de l'homme relevaient des affaires intérieures des Etats.36(*)

Nous pensons enfin que sur ce point la Commission a interprété de manière restrictive la Charte africaine. La commission a profité ainsi de l'équivocité de la Charte en matière de l'étendue de la Compétence matérielle de la Commission. Comme la question de compatibilité a trait à la compétence ratione materiae de la Commission, il serait juste qu'elle se réfère non seulement aux dispositions des articles 45-2,3 et 56-237(*) qui confinent sa compétence aux seules dispositions de la Charte mais aussi aux dispositions des articles, 60 et 61 qui prévoient une compétence de la Commission ouverte à sur le droit international relatif aux droits de l'homme et des peuples. La commission peut aussi prendre en considération comme moyens auxiliaires de détermination des règles de droit les autres conventions...

Les articles 60 et 61 de la Charte relatifs aux principes applicables ont déjà fait objet d'une précision par la Commission. Ceci d'autant que la Commission africaine lors de ses 28e et 29e sessions a adopté une méthode d'« interprétation enrichie » de la Charte en s'inspirant explicitement de la jurisprudence du Comité des droits de l'homme de l'O.N.U.38(*), des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et pratiques39(*) et de la jurisprudence relative à la Convention européenne des droits de l'homme dans une affaire Huri-Laws c. Nigeria du 6 novembre 200040(*).

Nous estimons que la Cour disposant d'une compétence universelle lui permettant d'appliquer tous les instruments de droits de l'homme pertinents en vertu des articles 3 et 7 du Protocole de Ouagadougou, dont on ne sait pas encore si l'on doit s'en réjouir ou s'en alarmer41(*) , ne profitera pas de cette équivocité sur sa compétence déduite de l'article 56-2 de la Charte.

§3. La requête est recevable si elle ne contient pas des termes outrageants à l'égard de l'Etat mis en cause, de ses institutions ou de l'UA

Conformément à l'article 56.3 de la Charte, l'auteur de la requête doit indiquer les éléments de son dossier sans insulter quiconque. Cette condition est qualifiée d'obligation de courtoisie par certains doctrinaires africains.42(*)

C'est une condition qui ne s'intéresse qu'au seul aspect formel de la requête ; celle-ci dans son libellé devra être respectueuse à la fois de l'Etat mis en cause ou de ses institutions et de l'UA.

Dans la Communication 65/92 - Ligue camerounaise des droits de l'Homme c/ Cameroun, la Commission africaine a déclaré l'affaire irrecevable en raison de l'usage d'expressions telles que « régime de la torture » et « gouvernement de barbarisme ». Le langage insultant rend une communication irrecevable, indépendamment de la gravité des faits dénoncés.

Cette condition telle qu'apportée par le Règlement de la Cour est plus imprécise.

§4. La Requête doit être documentée

La requête est recevable si elle ne se limite pas exclusivement à rassembler des informations diffusées par des moyens de communication de masse. Cette exigence est visée à l'article 56.4 de la Charte. Elle tend à éviter que certains plaignants ne se fondent sur de simples allégations voire de fausses informations sans en vérifier la véracité43(*).

Cette condition a trait à la réalité des faits rapportés par la communication ; elle est trop singulière mais trouve semble-t-il sa raison d'être dans l'existence dans le système africain d'une actio popularis. ... il s'agit donc d'éviter que de telles dénonciations ne reposent sur des simples rumeurs publiques ou sur des informations écrites ou radiodiffusées qui en pareilles situations proviennent le plus souvent de l'étranger. La même disposition prend d'ailleurs soin de préciser que toute allégation en la matière doit être faite preuve à l'appui.

Cette condition de recevabilité est en définitive peu sévère dans la mesure où il est rare qu'une communication, quelque soit son objet, ne contienne pas au moins un élément propre à établir la véracité des faits allégués, comme par exemple la copie d'un jugement ou des extraits de la correspondance échangée lors des différents recours internes ou encore, dans la pire des hypothèses, des témoignages dont celui de la ou des victimes44(*). Cette condition ne figure que dans les instruments africains.

Dans la Communication 147/95 et 149/96 - Sir Dawda K. Jawara c/ Gambie, le gouvernement soutenait que la communication devrait être déclarée irrecevable parce qu'elle était basée exclusivement sur des informations diffusées par les médias. Selon la Commission : « tout en étant peu commode de se fier exclusivement aux nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse, il serait tout aussi préjudiciable que la Commission rejette une communication parce que certains des aspects qu'elle contient sont basés sur des informations ayant été relayées par les moyens de communication de masse. Cela provient du fait que la Charte utilise l'expression « exclusivement ». Il ne fait point de doute que les moyens de communication de masse restent la plus importante, voire l'unique source d'information. Le génocide au Rwanda, les violations des droits de l'homme au Burundi, au Zaïre et au Congo pour n'en citer que quelques uns, ont été révélés par les moyens de communication de masse. La question ne devrait donc pas être de savoir si l'information provient des moyens de communication de masse, mais plutôt si cette information est correcte. Il s'agit de voir si le requérant a vérifié la véracité de ses allégations et s'il a pu le faire étant donné les circonstances dans lesquelles il se trouve ». La commission a conclu à la satisfaction à cette condition par le requérant en ces termes : « L'on ne peut dire que la communication sous examen est exclusivement basée sur des nouvelles diffusées par les moyens de communication de masse dans la mesure où elle n'est pas uniquement basée sur la lettre du Capitaine Ebou Jallow. Le plaignant allègue des exécutions extra judiciaires et a joint à la communication une liste de certaines des victimes alléguées. La lettre du Capitaine Ebou Jallow ne fait pas état de cette information. »45(*)

§5. Condition de l'épuisement des préalable des voies de recours

La requête est recevable si toutes les voies de recours internes sont épuisées :

A. Le principe

Cette condition prévue à l'article 56.5 de la Charte est celle qui pose le plus de difficultés. L'épuisement des voies de recours internes suppose qu'une affaire concernant la violation d'un droit de l'Homme doit passer par tous les niveaux de juridiction nationaux avant de pouvoir être portée devant la Cour.46(*)

L'obligation d'épuiser les voies de recours internes fait partie du droit international coutumier, reconnu en tant que tel par la jurisprudence de la Cour internationale de justice47(*). Elle se rencontre aussi dans d'autres traités internationaux relatifs aux droits de l'homme : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques48(*) et son protocole facultatif49(*), la Convention américaine des droits de l'homme50(*).

Justification du principe

La commission trouve plusieurs justifications à la règle de l'épuisement des voies des recours.

Selon la commission :

- Elle est « fondée sur le principe qu'un gouvernement devrait être informé des violations des droits de l'Homme afin d'avoir l'opportunité d'y remédier avant d'être appelé devant une instance internationale. »51(*)

- La justification de la règle de l'épuisement des recours internes tant dans la Charte que dans les autres instruments internationaux des droits de l'homme est de s'assurer qu'avant que le cas ne soit examiné par un organe international, l'Etat visé a eu l'opportunité de remédier à la situation par son propre système national52(*).

- (...) la condition relative à l'épuisement des recours internes avant toute saisine d'une instance internationale est fondée sur le principe selon lequel, l'Etat défendeur devrait avoir eu l'opportunité de réparer les torts causés à la victime par ses propres moyens, dans le cadre de son propre système judiciaire53(*)

- (...) l'une des justifications de cette exigence est que l'Etat mis en cause doit être informé des violations des droits de l'homme dont il est accusé afin d'avoir l'opportunité de pouvoir les redresser et sauver sa réputation qui serait inévitablement ternie s'il était appelé devant une instance internationale54(*)

La Commission - qui pratique les mêmes critères de recevabilité que la Cour - s'est prononcée à plusieurs reprises sur la condition d'épuisement des voies de recours internes et en a clarifié la portée.

Définition du recours interne

La Commission a précisé que les recours internes dont fait mention l'article 56 de la Charte comprennent les « recours introduits devant les tribunaux d'ordre judiciaire », y compris toutes les possibilités d'appel.

Dans la Communication- 221/98 Alfred B. Cudjoe c/ Ghana , le requérant invoquait la résiliation abusive de son contrat de travail à l'ambassade du Ghana en Guinée. La Commission a considéré qu'il n'était pas suffisant que le requérant ait déposé une plainte devant la Commission ghanéenne des droits de l'Homme. La saisine de cette instance non judiciaire aurait dû se prolonger par une action devant les tribunaux, et puisque cela n'avait pas été fait, la communication portée devant la Commission a été jugée irrecevable.

Ainsi, Si une affaire est portée devant les juridictions internes, et que la procédure est toujours en cours au moment de l'examen de la requête par la Cour, les recours internes ne sont pas épuisés55(*). Et toute requête n'ayant pas été préalablement portée à la connaissance des juridictions internes, ne peut-elle faire l'objet d'un examen par une juridiction internationale56(*).

La FIDH57(*) ajoute pour sa part que si le plaignant n'a pas fait appel d'une décision dans les délais fixés par les lois, la Commission considère que la communication est irrecevable, en faisant référence à la jurisprudence des organes européens de protection des droits de l'Homme58(*).

Il en découle que les Etats n'ont pas à répondre de leurs actes devant un organisme international avant d'avoir eu la possibilité de redresser la situation dans leur ordre juridique interne.

L'épuisement des recours non-judiciaires n'est pas nécessaire59(*)

La Commission n'exige pas l'épuisement des recours internes quand ceux-ci sont d'une nature non-judiciaire. Dans la Communication- 60/91 Constitutional Rights Project c/ Nigeria la commission a déclaré que, la décision - en l'occurrence la condamnation à mort - rendue par un tribunal spécial pouvait être confirmée ou annulée par le gouverneur militaire. Considérant que le pouvoir du gouverneur était « une voie de recours discrétionnaire et extraordinaire d'une nature non-judiciaire » et que « l'objectif du recours est d'obtenir une faveur et non de réclamer un droit », la Commission a décidé qu' « il serait incorrect d'obliger les plaignants à user des voies de recours qui ne fonctionnent pas de façon impartiale et qui ne sont pas tenus de statuer conformément aux principes de droit. »

La preuve de l'épuisement des voies de recours

C'est au requérant de mettre à la disposition de la Cour toute information concernant l'épuisement des recours internes Le requérant a la charge de la preuve initiale, c'est à dire qu'il doit mettre à la disposition de la Cour les informations nécessaires pour prouver que les voies de recours internes ont été épuisées. A plusieurs reprises, des communications portées devant la Commission ont été déclarées irrecevables quand les plaignants ont omis de répondre aux questions concernant l'épuisement des voies de recours internes.

D'un point de vue pratique, il est recommandé aux plaignants de toujours joindre aux requêtes les copies des décisions des juridictions nationales. Comme par exemple la copie d'un jugement ou des extraits de la correspondance échangée lors des différents recours internes.

C'est dans ce sens que, saisie par N°005/2011 Daniel Amare et Mulugeta Amare c/ Mozambique Airlines et République du Mozambique, la Cour a écrit aux requérants pour faire observer que la requête ne comportait pas d'indication attestant de l'épuisement des voies de recours internes.

B. Exceptions ou tempéraments à la règle de l'épuisement des voies de recours internes

La requête est recevable même si les voies de recours internes ne sont pas épuisées dans les cas qui suivent.

1er tempérament : Lorsque la Cour africaine considère que les recours internes sont inapplicables ou inefficaces (s'ils n'offrent pas des perspectives de réussite), indisponibles (lorsqu'ils ne peuvent être utilisés sans obstacle par le requérant) ou discrétionnaires, la condition de leur épuisement n'est plus nécessaire pour que la requête soit jugée recevable.

La Commission s'est appuyée sur de nombreuses situations particulières pour recevoir sur ces fondements de multiples communications.60(*)

Mais attention, pour considérer positivement ces exceptions, la Commission ne se fie pas uniquement à des affirmations gratuites des plaignants accompagnées d'une absence d'effort concret en vue de l'épuisement des dits recours. Il faut pouvoir prouver la véracité des faits allégués permettant une exception. La preuve peut être amenée soit par une tentative de saisine des tribunaux nationaux, soit par la présentation d'un cas précis analogue pour lequel les actions en justice s'étaient révélées, en fin de compte, ineffectives.61(*)

2ème tempérament : ... les violations sont graves et massives

Le premier type de cas soumis à cette exception concerne les violations graves et massives des droits de l'Homme. Les quatre communications introduites par plusieurs ONG contre le Zaïre (aujourd'hui République démocratique du Congo) entre 1989 et 1993 faisaient état de très nombreux cas d'arrestations arbitraires, de tortures, d'exécutions extrajudiciaires et de restrictions aux libertés fondamentales.

La commission a déclaré les communications recevables :

« La Commission n'a jamais considéré que la condition d'épuisement des voies de recours internes s'appliquait à la lettre lorsqu'il n'est ni pratique ni souhaitable que le plaignant saisisse les tribunaux nationaux dans le cas de chaque violation. Cela est le cas dans les présentes communications étant données l'ampleur et la diversité des violations des droits de l'Homme ».62(*)

Cela implique que dans des cas de violations graves et massives des droits de l'Homme, l'épuisement des voies de recours internes peut être considéré comme inapplicable.63(*)

Mais, contre exemple, dans l'Affaire 299/05 Anuak Justice Council c/ Ethiopie, alors que le plaignant alléguaient la perpétration de meurtres en masse et l'incapacité des juridictions éthiopiennes d'octroyer des réparations effectives, la Commission n'a pas hésité à qualifier cette description de « calomnieuse » et à déclaré l'affaire irrecevable pour défaut d'épuisement des voies de recours internes.

3ème tempérament : l'état d'urgence entrave l'administration de la justice

Dans la Communication- 129/94 Civil Liberties Organisation c/ Nigeria Le plaignant soutenait que l'application normale de la loi avait été rendue difficile à cause de l'état d'urgence décrété dans le pays. Du fait de la situation politique qui prévalait au Nigeria, la Commission a jugé recevable la communication estimant qu'en pareil cas, « la procédure de recours internes serait trop longue, mais aussi qu'elle ne produirait aucun résultat. »

Là encore, l'application de cette exception peut être assortie de la condition d'une tentative de saisine des tribunaux, comme cela a été exigée dans l'affaire 220/98 Law Office of Ghazi Suleiman c/ Soudan.

4ème tempérament : l'existence de clauses dérogatoires empêche tout recours

Dans le cas de l'existence de clauses dérogatoires qui interdisent aux tribunaux d'examiner des décrets et des décisions de la branche exécutive, la Commission a considéré que ces clauses rendent les recours internes « inexistants, inefficaces ou illégaux. »64(*) C'était notamment le cas au Nigeria dans les années 1990, où le gouvernement militaire a adopté une série de clauses dérogatoires.

5ème tempérament : l'épuisement des recours internes n'est pas « logique »

Le plaignant n'est pas obligé d'épuiser les recours internes quand cela ne parait pas logique. Par exemple, la Commission a considéré qu'un plaignant qui s'était évadé d'une prison du Ghana et réfugié en Côte d'Ivoire et qui prétendait que sa détention était illégale, n'avait pas, compte tenu de la nature de la plainte, à retourner dans son pays d'origine pour porter son cas devant les tribunaux ghanéens. La communication a ainsi été jugée recevable.65(*)

6ème tempérament : l'accès à la justice est inéquitable

Communication- 241/01 Purohit et Moore c/ Gambie

La Commission africaine a estimé dans cette affaire que :« les dispositions générales prévues par la loi qui pourraient offrir un recours à toute personne lésée par la faute d'autrui, sont accessibles aux riches et à ceux qui peuvent se payer les services d'un avocat privé. L'on ne peut toutefois pas affirmer comme une vérité générale qu'il n'existe pas dans le pays les voies de recours internes mais elles existent pour ceux qui ont les moyens de les utiliser ».

La Commission africaine a considéré que dans l'affaire en question, qui concernait les conditions de détention et de traitement des malades mentaux en Gambie, les recours existant n'étaient pas « réalistes » et étaient donc inefficaces pour cette catégorie de personnes. La communication a donc été jugée recevable.

7ème tempérament : les recours internes sont inefficaces ou inaccessibles

Dans les affaires où la victime d'une violation des droits de l'Homme a été contrainte à fuir son pays, la Commission considère qu'elle n'est pas obligée d'épuiser les voies de recours internes. Dans la Communication Rights International c/ Nigeria, un étudiant avait été arrêté et torturé dans un camp de détention militaire au Nigeria.

La Commission a estimé que :

« Dans ce cas particulier, l'étudiant était dans l'incapacité de faire usage d'une quelconque voie de recours interne, suite à sa fuite en République du Bénin par peur pour sa vie et à l'octroi du statut de réfugié par les Etats-Unis d'Amérique. »66(*)

Pourtant, la Commission a pris une décision contraire dans l'Affaire 247/02 Institut des droits humains et développement en Afrique c/ République démocratique du Congo, en estimant qu'un réfugié congolais aurait du épuiser les voies de recours en République démocratique du Congo à travers un conseil.

8ème tempérament : La requête est recevable si les procédures internes sont anormalement prolongées

Selon l'article 56.5 de la Charte africaine, l'exigence d'épuisement des recours internes ne s'applique pas si ceux-ci se prolongent d'une façon anormale. La Commission n'a pas défini le délai qui constitue une « prolongation anormale ».

Cela lui permet de garder une certaine flexibilité pour considérer chaque situation dans ses spécificités. Dans l'affaire Kenya Human Rights Commission c/ Kenya, un délai d'un an et 10 mois n'a pas été considéré comme une prolongation anormale.67(*)

En revanche, dans l'affaire 199/97 Odjouoriby Cossi Paul c/ Bénin, le fait qu'un appel au niveau national est pendant depuis 3 ans a été considéré comme une prolongation anormale de procédure. De même dans la communication 250/02 Liesbeth Zegveld et Mussie Ephrem c/ Erythrée, la Commission a déclaré une affaire recevable après 18 mois de détention sans poursuite formelle.

§6. La requête est recevable si elle est transmise à la Cour dans un délai raisonnable à compter de l'épuisement des voies de recours internes

Cette condition doit s'entendre en relation avec la précédente : le point de départ du délai est « la dernière décision qui a épuisé les voies de recours adéquates et efficaces offertes par le système juridictionnel d'un Etat.

En cas d'absence de tels recours, il faut prendre en compte la date de l'acte juridique ou matériel incriminé68(*).

Jusqu'en 2010 la Commission africaine ne s'est pas prononcée sur cette condition de recevabilité prévue à l'article 56.6 de la Charte. Les décisions de la Cour européenne sur ce point peuvent éclairer la position future de la Cour africaine : la requête doit être présentée dans un délai de six mois à compter de la décision interne définitive.

Mais, faisant preuve de pragmatisme, le système européen fait courir ce délai à partir du rendu public de la décision ou au jour de la notification de la décision à la personne intéressée.

Les décisions de la Cour européenne sur ce point peuvent éclairer la position future de la Cour africaine : la requête doit être présentée dans un délai de six mois à compter de la décision interne définitive.69(*) Or, L'article 35.1 de la Convention EDH exige du requérant qu'il introduise sa requête auprès de la Cour dans un délai de six mois à compter de la date de la décision interne définitive rendue sur la question litigieuse. La Cour européenne reconnait : « Un simple courrier d'un requérant sera considéré comme une «requête» aux fins de la règle des six mois si l'objet de la requête est suffisamment clair ».70(*)

§7. La requête est recevable si la prétendue violation n'a pas été réglée conformément aux principes de la Charte africaine et autres instruments internationaux

1. La requête est recevable si la même affaire n'a pas été réglée par une autre instance internationale

Cette condition renvoie au concept de la chose jugée et suggère que les règlements intervenus sur la base de la Charte africaine sont revêtues de la force y relative.

Pour utiliser un vocabulaire proprement juridique, la communication ne sera déclarée irrecevable sur la base de l'article 56.7 que si il y a à la fois identité de parties, de cause et d'objet entre la cas rapporté et un cas déjà réglé conformément à ce même article.

La Cour aura l'occasion de nous éclairer sur ce point dans l'affaire lui soumise par Requête N°011/2011 Révérend Christopher Mtikila c/ République unie de Tanzanie qui a déjà fait objet d'une décision auprès de la Cour de justice de l'EAC.

2. La requête est recevable même si la violation a été réglée par l'amélioration de la situation

S'appuyant sur sa jurisprudence, la Commission a toujours traité les communications en statuant sur les faits présentés au moment de la requête.71(*)

Par conséquent, même si la situation s'est améliorée depuis le dépôt de la communication, la communication reste recevable.

Sur ce même fondement, la Commission, dans sa communication 62/92, 68/92 et 78/92 Krishna Achutan et Amnesty International c/ Malawi, a estimé qu'un nouveau gouvernement hérite des engagements internationaux du gouvernement qui l'a précédé, y compris de la responsabilité de ses méfaits.

3. La requête est recevable même si l'affaire a été soumise devant une autre instance

On observera d'emblée que l'article 56.7 de la Charte et 40.7 du Règlement de la Cour ne visent que les cas déjà réglés par les voies qu'il mentionne et non pas ceux simplement déjà soumis à celles-ci. Une telle formulation n'interdit donc pas la litispendance et ne permet à l'Etat mis en cause de soulever l'exception y relative pour décliner la compétence de la commission, ni à celle-ci de se déclarer motu proprio incompétente sur cette base72(*).

On peut toutefois observer que la saisine concomitante sur une même affaire d'une autre instance internationale, comme le Comité des droits de l'Homme des Nations unies ou le Comité contre la torture, a rendu irrecevable une requête portée devant la Commission africaine. Le cumul des procédures ne peut être admis en ce qu'il transformerait l'un des instruments internationaux de protection des droits de l'Homme en instance de réexamen ou d'appel d'un autre. Ainsi la communication 69/92 Amnesty international c/ Tunisie a été déclarée irrecevable par la Commission africaine, celle-ci étant déjà en cours d'examen conformément à la procédure 1503 du Règlement des Nations unies. Nous pensons que la Commission s'est exclusivement référée à son Règlement intérieur son article 114.3 littera f actuel article 39.2 littera j.

Cette condition ne pouvait être valablement exigée dans la mesure où elle n'est pas mentionnée dans le texte de la Charte qui seul doit prévaloir ici. Une solution contraire peut néanmoins prévaloir si une disposition prévue par le seul Règlement profitait à l'individu.

Elle aurait pu connaitre de cette affaire bien que cette dernière soit en cours devant le comité des nations unies. Un ouf de soulagement a été apporté dans ce sens par la décision de la Cour de justice de la CEDEAO rendue dans l'affaire Hissen Habré le 14 mai 2010. Nous aborderons avec plus de détails cette décision dans la section 2 sous ce chapitre.

Pour autant, la Commission africaine considère que la médiation par les institutions politiques telles que l'Union européenne ou l'OUA ne s'appliquait pas en l'occurrence à l'article 56.7 de la Charte.73(*)

La Cour a une affaire qui est pendante devant sa juridiction qui exigera l'examen de cette question de duplication de procédure. En effet, la Cour a été saisie le 03 mars 2011 par la Commission africaine sur demande des ONG de la FIDH parmi lesquelles la Ligue libyenne des droits de l'homme74(*). Au moment de l'enregistrement de cette requête le 21 mars 2011 par la Cour africaine, la Cour pénale internationale (CPI) connaissait d'une autre action portant sur les mêmes faits. A ce sujet Hossam Bahgat dit : « La plainte déposée par la CADHP n'est pas incompatible ni ne duplique l'action menée par la Cour pénale internationale (CPI) sur la Libye. Une plainte devant la Cour africaine vise à établir la responsabilité de l'Etat pour la violation des droits de l'Homme et non la responsabilité des individus auteurs des crimes les plus graves comme pourrait le faire la CPI ».75(*)

§8. La Cour rejette la requête si elle est manifestement mal fondée

C'est ce que prévoit l'article 38 du Règlement intérieur final de la Cour.

Ainsi, avant même l'engagement d'une procédure, dès le premier examen de la requête, la Cour peut estimer que celle-ci ne repose manifestement sur aucun fondement. Dans ce cas, la Cour peut rejeter la requête en motivant sa décision sans devoir citer les parties à comparaître. Simplement, sa décision et les raisons qui la fondent doivent être communiquées à toutes les parties. Cette possibilité de rejeter une requête dès sa réception répond à un besoin de ne pas engorger la Cour par des procédures qui de toute façon ne connaîtront pas de suite car ne répondant en rien aux champs de compétence de la Cour.

Nous pensons que c'est sur cette disposition que la Cour se serait basée pour rejeter sommairement deux requêtes à lui soumise en 2011. Il s'agit des requêtes N°006/2011 Juristes de la bonne gouvernance C/ Cote d'Ivoire et N°005/2011 Daniel Amare et Mulugeta Amare c/ Mozambique Airlines et République du Mozambique. Nous aurons l'occasion d'aller plus en détail dans le second chapitre de ce travail.

Section II : les conditions de recevabilité des requêtes devant les Cour de justices des CER

Introduction

Le phénomène de la juridictionnalisation du droit international due à la prolifération des tribunaux internationaux, n'a pas épargné le régionalisme africain. L'espace judiciaire africain est actuellement parsemé de plus d'une douzaine des juridictions à caractère régional ou sous-régional.76(*)

L' Union africaine a reconnu huit communautés économiques régionales (CER) en tant qu'associations régionales d'Etats africains officiellement représentatives. Ces huit CER ont été fondées conformément au Traité instituant la Communauté économique africaine de 1991. Bien qu'ils soient actuellement encore plus nombreux, seuls les cadres de coopération régionaux suivants ont été reconnus par une décision de l'Assemblée des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UA:

· Union du Maghreb arabe (UMA)

· Marché commun de l'Afrique orientale et australe (MCAOA, en anglais COMESA)

· Communauté des Etats Sahélo-Sahariens (CEN-SAD)

· Communauté d'Afrique de l'Est (CAE, en anglais EAC)

· Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC)

· Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)

· Autorité intergouvernementale pour le développement (AIGD, en anglais IGAD)

· Communauté de développement de l'Afrique australe (CDAA, en anglais SADC)

Plusieurs pays africains sont simultanément membres de plusieurs CER. Par conséquent, une possibilité de chevauchement et de conflit de compétences existe. Toutefois, les CER telles que la CEDEAO et la SADC jouent un rôle clé en matière de promotion de l'intégration régionale en Afrique.

Sur les huit CER officielles, trois disposent de systèmes destinés à promouvoir et à protéger les droits de l'homme. La CEDEAO, la CAE et la SADC ont (ou auront bientôt) des cours de justice sous-régionales expressément ou implicitement investies d'une juridiction pour prononcer des violations des droits de l'homme:

- Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CJCEDEAO) ;77(*)

- Cour de justice de la Communauté de l'Afrique de l'Est (CJEAC) ;78(*)

- Tribunal de la Communauté de développement de l'Afrique australe (TSADC).79(*)

§1. Recevabilité des requêtes individuelles devant la Cour de Justice de la CEDEAO

A. Conditions résultant des traités de la CJEDEAO

Les citoyens des Etats membres de la CEDEAO peuvent déposer plainte, contre des violations des droits de l'homme perpétuées par des acteurs étatiques, auprès de la Cour régionale de justice. Les Etats membres de la CEDEAO ont décidé de donner à la cour, qui existe formellement depuis 1991 et qui, dans les faits, a seulement été mise en place en 2001, un mandat spécifique à cet égard. Des dispositions de l'article 4 littera g du Traité révisé, il résulte que la cour, qui siège à Abuja, Nigéria, statuera conformément aux clauses de la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples. Les décisions sont légalement contraignantes pour les Etats membres de la CEDEAO.

C'est l'arrêt « Olajide Afolabi vs Federal Republic of Nigeria » qui a mis en exergue la nécessité d'élargir la saisine de la Cour aux requérants individuels. La Cour peut donc être saisie depuis 2005 par tout ressortissant d'un des États-membres, en cas de violation des protocoles, décisions, traités ou conventions adoptés par la CEDEAO.

Depuis 2005, la cour est investie de la compétence de statuer sur les violations des droits de l'homme par le biais d'une procédure de plainte individuelle. Fait notable, les recours locaux ne doivent pas nécessairement avoir été épuisés avant que des cas ne soient portés devant la Cour de justice de la CEDEAO (1). Ainsi, chaque victime d'une violation des droits de l'homme peut directement faire appel à la cour, y compris pendant que l'affaire est soumise à une procédure nationale.

Pour ce faire, il ressort de l'article 10 du Protocole additionnel (A/SP.1/01/05) du 19 janvier 200580(*) que les requêtes des individus victimes (2) des violations des droits à cet effet ne seront pas anonymes (3) et ne seront pas portée devant la Cour de Justice de la Communauté lorsqu'elle ont déjà été portée devant une autre Cour internationale compétente (4).

I. sur le non-épuisement des voies de recours internes:

La CJCEDEAO reconnait le caractère subsidiaire de sa juridiction en tant qu'ordre international mais ne fait pas de cette règle de l'épuisement des voies des recours internes une condition pour la recevabilité des requêtes individuelles. La CJCEDEAO a eu à le déclarer dans l'affaire Mani HADIDJATOU C. L'Etat du Niger81(*) en faisant une interprétation souple de cette règle.

Dans cet arrêt, la Cour place son raisonnement sur deux terrains : d'abord sur la distinction entre les juridictions internes et internationales, ensuite sur l'autonomie de son utilisation de la Charte.

L'État du Niger contestait le fait que d'une part la procédure civile concernant le divorce était toujours pendante après un second pourvoi formé par le défendeur, et que d'autre part la reprise de la procédure pénale était suspendue à l'échéance de cette procédure civile.

La CJCEDEAO vise les dispositions de l'article 10 d. ii du protocole additionnel de 2005 pour évacuer l'argument tiré de la règle de l'épuisement préalable des voies de recours internes devant elle. En effet, aux termes de cet article, il ne s'agit que d'interdire de porter devant la Cour un contentieux qui serait déjà porté devant une autre cour internationale compétente, afin d'exclure le cumul de procédures internationales.

Puis la République du Niger, tout en reconnaissant que la condition d'épuisement des voies de recours internes ne figure pas au nombre des conditions de recevabilité des cas de violation des droits de l'Homme devant la Cour de justice de la CEDEAO, fait valoir que cette absence est une lacune que la pratique de la Cour devrait combler.

La Cour affirme que la règle de l'épuisement des voies de recours internes est encadrée par le principe de la protection des droits au principal par le droit interne et au subsidiaire par les mécanismes internationaux. La Cour fait donc valoir une interprétation souple de la règle de l'épuisement des voies de recours internes, en se fondant sur la jurisprudence de la CEDH « De Wilde, Ooms et Versyp c/Belgique ». Elle affirme que le législateur CEDEAO ne fait d'ailleurs pas de cette règle une condition de recevabilité devant la Cour.

II. la qualité pour agir du requérant

Ceci désigne l'importance qui, s'attachant pour le demandeur à ce qu'il demande, le rend recevable à le demander en justice (si cette importance est assez personnelle, directe et légitime) et à défaut de laquelle le demandeur est sans droit pour agir (pas d'intérêt, pas d'action).

Aux termes de l'article 10-d i du Protocole additionnel à la CJCEDEAO, la Cour peut être saisie par toute personne victime de violations des droits de l'Homme.82(*)

La CJCEDEAO saisie d'une plainte d'une esclave affranchie dans l'affaire Mani HADIDJATOU C. L'Etat du Niger a interprété cette condition de la manière qui suit.

La République du Niger arguait que Hadijatou Mani Koraou étant une wahiya affranchie au moment de sa requête, elle n'était donc plus esclave, et n'avait donc plus qualité pour agir, d'autant qu'elle ne l'avait pas fait avant son affranchissement alors qu'elle aurait pu. Argument particulièrement lamentable selon lequel la requérante ayant été affranchie au moment de sa requête aurait de ce fait perdu qualité pour agir à raison de sa situation d'esclave.83(*)

La CJCEDEAO, après avoir joint les exceptions au fond conformément à l'article 87 al. 5 de son Règlement de procédure, rejette ce moyen comme irrecevable, en se fondant sur les articles 9-4 et 10-d de son Protocole additionnel, aux termes desquels « la Cour est compétente pour connaître des cas de violation des droits de l'Homme dans tout État-membre », « peuvent saisir la Cour (...) toute personne victime de violations des droits de l'Homme ». À cela, la Cour ajoute que « les droits de l'Homme étant inhérents à la personne humaine, ils sont inaliénables, imprescriptibles et sacrés et ne peuvent donc souffrir d'aucune limitation quelconque ».84(*)

III. la requête ne doit pas être anonyme

L'article 10 littera d i Protocole additionnel de 2005 se lit comme suit : «...Toute personne victime de violations des droits de l'homme ; la demande soumise a cet effet ... Ne sera pas anonyme... »

Dans la pratique chaque demande doit spécifier :

· le nom et l'adresse du demandeur

· la désignation de la partie contre laquelle la demande est effectuée

· le sujet des poursuites et un résumé des allégations en droit sur lesquelles la demande est fondée

· la forme d'injonction sollicitée par le demandeur

· si approprié, la nature de toute preuve produite en soutien de la demande

· une adresse de service à l'endroit où la cour a son siège et le nom de la personne qui est autorisée et a exprimé la volonté d'accepter de rendre service

· En sus ou en remplacement de la spécification d'une adresse de service, la demande peut mentionner que le juriste ou l'agent consent à ce que ce service soit effectué pour lui par télécopie ou tout autre moyen technique de communication.

IV. principe non bis in idem et litispendance

Aux termes de l'article 10 littera d ii du Protocole additionnel, la demande soumise par une personne victime des violations des droits de l'homme ne sera portée devant la CJCEDEAO lorsqu'elle a déjà été portée devant une autre Cour internationale compétente.

Ces dispositions visent essentiellement que les individus n'abusent des possibilités de recours qui leur sont offertes, et qu'une affaire soit examinée en même temps par plusieurs organes. La doctrine largement reconnue admet que cette condition a été expressément posée pour « exclure le cumul de procédures internationales »85(*)

La CJCEDEAO a eu à éclairer l'opinion sur cette condition par sa décision en date du 14 mai 2010. Dans cette importante décision, la juridiction communautaire a, de manière ferme, posé deux grands principes qui feront désormais date dans les annales judiciaires. De prime à bord, la Cour dit l'UA n'est pas une Cour de justice internationale au sens de la loi, et par conséquent, son rôle n'est pas d'administrer la justice ou de dire le droit. Ensuite, cette affaire étant déjà sous examen devant le comité des Nations unies contre la Torture, la Haute juridiction communautaire aborde la condition posée par l'article sous analyse en posant que ce Comité n'est pas non plus une juridiction. Son rôle se limite à la surveillance de la mise en oeuvre par les Etats signataires, des dispositions issues de la Convention contre la torture. En tant que tel, il est un simple organe d'alerte dont les « recommandations » et autres « injonctions » restent dénuées de toute force exécutoire.

Rappelons que les « ONG-Défenseurs des droits de l'homme » avaient volontairement semé la confusion auprès de l'opinion publique. Avec une parfaite mauvaise foi, ces dernières n'ont pas hésité à affirmer que les « recommandations » du Comité des Nations Unies contre la torture étaient constitutives d'«injonction de l'ONU au Sénégal ».

Pour ce qui est du mandat de l'Union Africaine que du rôle du Comité des Nations Unies contre la torture, la Cour de Justice de la CEDEAO a battu en brèche tous les arguments développés par l'Etat du Sénégal à l'appui de l'intrusion de ces deux institutions dans l'affaire Hissein Habré.

La Cour de Justice de la CEDEAO a expliqué dans des considérants clairs, avec fine pédagogie et force argumentation juridique, qu'elle est non seulement compétente pour connaître du contenu de la requête formulée par le Président Hissein HABRE mais aussi, que le contenu de cette demande concerne bel et bien des cas de violation des droits de l'homme86(*).

B. Conditions résultant de la Charte africaine

D'après les articles 4 littera g du traité révisé et 9. 4 du Protocole additionnel de 2005, la CJCEDEAO fait de la Charte africaine une partie intégrante de son droit applicable en statuant conformément à ses clauses. D'ailleurs, dans sa décision dans l'Affaire Dame Hadijatou Mani Koraou contre la République du Niger, rendue le 27 octobre 2008, la Cour confirme que l'article 4(g) du Traité révisé qui précise que les Etats membres adhèrent aux principes fondamentaux de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, est le souhait du législateur communautaire d'intégrer cet instrument dans le droit applicable devant la Cour.

Par ailleurs il sied de préciser que cette juridiction n'applique pas les conditions de recevabilité des communications telles que portées par l'article 56 de la Charte jouissant ainsi d'une autonomie dans l'utilisation des modalités de la Charte. Dans son arrêt de principe par lequel la CJCEDEAO est entrée dans l'histoire dans la protection des droits de l'homme sur le continent africain, la CJCEDEAO statue sur l'autonomie de son utilisation de la Charte87(*).

En effet, la CEDEAO affirme l'intégration de la Charte africaine dans le droit qu'elle applique (et ce d'autant que tous les États membres de la CEDEAO ont aussi ratifié la Charte africaine), mais elle affirme également l'autonomie de la CJCEDEAO dans les modalités d'utilisation (partie I de la Charte), qu'elle distingue des principes fondamentaux (partie II de la Charte). En effet, dès lors que cette seconde partie concerne les modalités d'application de la Charte par la Commission africaine, qui en outre, n'est pas une juridiction, il est logique qu'elles ne trouvent pas à s'appliquer à la CJCEDEAO. Ainsi, la République du Niger affirme que la CJCEDEAO doit se référer à l'article 4(g)[3] du traité révisé de la CEDEAO pour appliquer l'article 56-7[4] de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples. Il s'agit bien d'une utilisation pragmatique de la Charte africaine, texte qui ne saurait en revanche ajouter des contraintes procédurales à celles du système de la CJCEDEAO.88(*)

bien que si cette CJCEDEAO n'applique pas à la lettre les conditions de recevabilité prévues ) l'article 56 de la Charte, il reste à relever que cette Cour s'est fondée sur les droits garantis par la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples dans deux affaires importantes, concernant la détention arbitraire d'un journaliste gambien et la condition de servilité d'une nigérienne.

Ainsi, L'Affaire Chief Ebrimah Manneh c/ la République de Gambie, portait sur l'arrestation le 11 juillet 2006 et la détention d'un journaliste gambien du Daily Observer par les services secrets. Les avocats du requérant fondaient leur saisine sur le caractère arbitraire de l'arrestation et de la détention de leur client (art. 6 et 7 de la Charte africaine). La Cour a jugé que la Gambie était responsable de l'arrestation et de la détention arbitraire du requérant, enfermé in communicado sans jugement.

§2. Les conditions de recevabilité devant le Tribunal de la SADC

Introduction

Le Tribunal du Southern African Development Community (TSADC) est un des organes du SADC établie conformément à l'article 9 du traité de la SADC. La composition, les pouvoirs, fonctions, procédures et les questions liées au Tribunal sont contenues dans le protocole de la SADC signé le 7 aout 2000 à Windhoek, Namibie.  Le protocole fait présentement partie intégrante du traité de la SADC et par conséquent n'a pas besoin d'une ratification séparée. La principale mission du Tribunal est d'assurer le respect et l'interprétation adéquate du traité de la SADC et des traités qui lui sont subsidiaires ainsi que le règlement des différends entre les Etats membres de la SADC. Le siège du Tribunal se trouve à Windhoek, toutefois l'article 13 du protocole de la SADC autorise le Tribunal à siéger dans des endroits autres que celui où se trouve le siège du Tribunal, mais situés dans le territoire de la SADC. Le tribunal est composé de cinq juges permanent et de cinq autres servant de manière temporaire et qui peuvent être appelés à siéger s'il arrivait que l'un des juges permanent n'est pas disponible. Les premiers juges du Tribunal ont prêté serment le 18 novembre 2005.

Le tribunal de la SADC est compétent pour traiter de tous les différends qui surgissent de l'interprétation et de l'application du traité de la SADC, son protocole ainsi que des autres instruments subsidiaires. Il est aussi compétent pour traiter de toute question en rapport avec tout traité ou accord conclu par les membres de la SADC entre eux ou dans le cadre de la communauté et dont la compétence est reconnue au tribunal.

Le tribunal n'a pas une compétence spécifique sur les questions des droits humains mais certaines dispositions du traité de la SADC font référence aux droits de l'homme accordant ainsi la compétence au Tribunal dans le domaine. En avril 2003, les membres de la SADC ont signé la Charte sur les droits sociaux fondamentaux (Charter of Fundamental Social Rights) qui n'est pas encore entrée en vigueur. Au-delà du fait que des arguments ont été avancés sur la justiciabilité des dispositions de la Charte et qu'une mention explicite du Tribunal a été faite dans ladite Charte, il existe deux possibilités à travers lesquelles le Tribunal pourrait être saisi pour violation de la Charte. Premièrement, à l'article 3.2 de la Charte, les Etats membres « s'engagent à observer les droits fondamentaux dont allusion a été faite dans la Charte ». Bien que l'engagement lie les Etats, la Charte ne donne pas une définition précise des droits fondamentaux auxquels elle fait référence. Ensuite, le Tribunal pourrait exercer sa compétence sur la Charte si celle-ci est considérée comme « instrument subsidiaire adopté dans le cadre de la Communauté ». Ces possibilités restent encore à être testées au plan juridique.

Les décisions du Tribunal sont définitives, obligatoires et peuvent être mises en oeuvre. Les Etats membres du SADC sont mandatés à prendre toutes les mesures pour assurer la mise en oeuvre des décisions du Tribunal. Les jugements du Tribunal sont mises en oeuvre dans les Etats membres de la même manière que le sont les décisions des tribunaux étrangers. Le Tribunal peut aussi ordonner des mesures temporaires.89(*)

Il n'y a pas de disposition explicite dans le traité de la SADC ou son protocole sur l'accès au Tribunal par les personnes physiques et morales à part les Etats parties. De la lecture faite de l'article 4 du traité créant la SADC, la SADC et ses Etats membres sont tenus d'agir selon les principes des droits de l'homme, de la démocratie et des règles de droit. Ces préceptes constituent la base de l'interprétation du tribunal de la SADC de son propre rôle.

En sus, le sentiment est lorsqu'un Etat membre viole les dispositions du traité ou son Protocole qui touchent aux droits humains, il doit être possible aux personnes physiques et ainsi que morales d'approcher le Tribunal.  Ces dispositions aussi restent à être testées au plan juridique.

L'Article 15 du Protocole prévoit la saisine par toute personne physique et morale.

A. Epuisement des voies de recours internes


Le TSADC dispose d'une juridiction pour les conflits entre les Etats membres de la SADC et les conflits entre les personnes morales ou physiques et les Etats membres. Cependant, pour qu'une personne puisse porter une affaire devant la cour, tous les recours juridiques internes de l'Etat membre concerné doivent avoir été épuisés.

Par ailleurs, une personne peut directement porter une affaire devant le tribunal contre une autre personne aux termes du droit communautaire (article 15 précité) si l'autre partie consent à procéder de la sorte. Les personnes peuvent poursuivre la communauté sur la légalité, l'interprétation ou l'application du droit communautaire. Une personne peut également faire traduire un Etat membre en justice eu égard au droit communautaire ou aux obligations de l'Etat en vertu d'un tel droit une fois que les recours nationaux ont été épuisés, faisant ainsi du tribunal une cour d'appel «finale» pour les litiges relatifs au droit communautaire.

B. Les autres conditions d'admissibilité

Les poursuites devant le tribunal doivent être intentées par le biais d'une demande ou d'un accord spécial entre les parties concernées par lesdites poursuites. Les conditions d'admissibilité sont les suivantes:

1. La demande doit mentionner:
(a) le nom et l'adresse du demandeur
(b) le nom, la désignation et l'adresse du défendeur
(c) la nature précise de la plainte avec une déclaration succincte des faits
(d) la forme de réparation ou d'injonction sollicitée par le demandeur

2. La demande doit indiquer le nom et l'adresse de l'agent du demandeur auxquels les communications relatives à l'affaire, y compris les conclusions et autres documents, doivent être adressées.

3. Toute demande non-conforme aux exigences des sous-points 1 et 2 entraînera l'inadmissibilité de la demande.

4. L'original de la demande doit être signé par l'agent de la partie qui la soumet.

5. L'original de la demande accompagné de toutes les annexes auxquelles elle fait référence doit être rempli avec le greffier en produisant cinq copies pour le tribunal et une copie pour chaque autre partie concernée par les poursuites. Toutes les copies doivent être certifiées par la partie qui les remplit.

6. Si la demande sollicite l'annulation d'une décision, elle doit être accompagnée d'une preuve documentaire de la décision pour laquelle l'annulation est sollicitée.

7. Une demande effectuée par une personne morale doit être accompagnée de:
(a) l'instrument édictant les règles relatives à la personne morale ou un extrait récent du registre des sociétés, entreprises ou associations ou toute autre preuve de son existence en matière de droit;
(b) la preuve que l'autorité octroyée à l'agent du demandeur lui a été conférée en bonne et due forme par une personne autorisée à le faire.

8. (a) Si une demande n'est pas conforme aux exigences des sous-points 4 à 7, le greffier doit prescrire une période raisonnable durant laquelle le demandeur est tenu de s'y conformer, en mettant lui-même la demande en ordre ou en produisant tous les documents requis.
(b) Si le demandeur ne met pas la demande en ordre durant la période prescrite, le tribunal doit, après avoir entendu les agents, décider si la non-conformité rend la demande formellement inadmissible.

§3. La recevabilité des requêtes individuelles devant la cour de justice de l'EACJ

La Cour est l'instance judiciaire de la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC). Elle associe les rôles d'une cour de justice pour l'EAC ainsi que celui d'une cour des droits de l'homme et d'appel (reste à déterminer de manière définitive). La cour dispose d'une juridiction pour l'interprétation et l'application du Traité de la Communauté d'Afrique de l'Est de 1999 prévue par les articles 23 à 27 du traité instituant l'EAC tel qu'amendé à ce jour. Elle peut disposer d'une juridiction étendue pour la conclusion d'un protocole à cette fin comme d'autres juridictions originales, d'appel ou des droits de l'homme comme le prévoit l'article 27.2 du traité. Le protocole pour objet d'étendre la juridiction de l'EACJ aux droits de l'homme doit encore être conclu90(*). Jusqu'au 31 décembre 2010, aucun Protocole n'avait pas encore été adopté pour élargir la compétence de la Cour.

Jusqu'en 2010, cette même dénuée d'un mandat sur les droits de l'homme aussi clair que celui de la cour de la CEDEAO, la Cour de justice d'Afrique de l'Est a cependant un jugement très progressif des droits de l'homme à son crédit dans l'affaire Katabazi and others ContreThe secretary-general of EAC and others. Au courant de l'année 2010, bien que la juridiction explicite en droits de l'homme de la cour reste à mettre en oeuvre, cette dernière a été suffisamment courageuse pour garantir le respect des droits fondamentaux des individus au titre du traité91(*).

Les renvois à la cour peuvent être effectués par des personnes morales et physiques résidant dans tous les Etats membres, par les Etats membres de l'EAC et par le Secrétaire général de l'EAC. La cour siège temporairement à Arusha, Tanzanie.

A. Conditions de recevabilité des requêtes devant la cour de justice de l'EAC

L'activité judiciaire de l'EACJ est très réduite dans le domaine des droits de l'homme est due à la non adoption du Protocole devant étendre la compétence de la EACJ à cet effet et au manque d'allusion aux droits de l'homme dans le plan stratégique quinquennal de l'EACJ qui ne fait que se référer aussi à l'éventuel Protocole. La cour ne disposant pas ainsi d'un mandat explicite, Il appert difficile de dégager les conditions auxquelles doivent satisfaire les requêtes individuelles pour être recevables devant l'EACJ. Les Magistrats de cette dernière n'étant pas collés aux textes à cause de l'influence du système common law qui prévaut dans les quatre des cinq pays qui composent l'espace communautaire, l'EACJ est arrivée à dégager quelques conditions dans les quelques rares affaires dont elle a eu à connaitre en matière des droits de l'homme. Entre autres conditions on peut citer le respect de la chosée jugée qui porte la formule latine de res judicata.

I. Respect de la Chose jugée

Dans l'affaire Katabazi and Others v Secretary-General of the East African Community and Another (2007) AHRLR 119 (EAC 2007) aux paragraphes 30-32 de l'arrêt la cour fait une analyse de cette condition en se référant à la doctrine. La cour résume concentre ses analyses sur le respect de la chose jugée et sur sa compétence à reconnaitre des litiges relatifs aux droits de l'homme.

Un des défendeurs à savoir l'Attorney general of Uganda soulevait que cette même affaire avait déjà fait l'objet d'un jugement par la cour constitutionnelle de l'Ouganda et que par conséquent l'EACJ était incompétente d'y statuer si on faisait application de la doctrine de la res judicata. Se référant au cas sous examen, l'Attorney general of Uganda arguait que la règle res judicata doit s'appliquer parce que même si les parties ne sont plus les mêmes que dans l'affaire portée devant la Cour constitutionnelle ougandaise, les faits sont substantiellement les mêmes92(*). Cette partie soulève ensuite la non pertinence de la requête de Katabazi et csrts par rapport au mandat de la cour en se fondant sur l'article 27.1 du traité de l'EAC.

Pour répondre à la question qui nous préoccupe ici à savoir si l'EACJ peut se déclarer incompétente en faisant application de la théorie de res judicata, la cour se réfère à la définition qui en est faite dans la doctrine largement admise dans les procédures civiles de ses pays membres. Selon cette doctrine, aucune Cour ne tentera de donner suite à un litige qui oppose les mêmes parties pour les mêmes faits et qui aura déjà été reçu jugement définitif d'une autre cour compétente.

Après présentation de cette doctrine la Cour dégage trois conditions dégagées de la définition ci-dessus pour que la res judicata s'applique. La cour parvient à la conclusion que la res judicata ne s'appliquera pas parce que la décision prise par la cour constitutionnelle ougandaise était contraire à la constitution ougandaise et violait pour cela une règle de droit et par conséquent le traité qu'applique le traité de l'EACJ93(*).

TABLEAU COMPARATIF DES CES TROIS COURS SOUS REGIONALES

 

COUR DE JUSTICE DE LA CEDEAO

TRIBUNAL DE LA SADC

COUR DE JUSTICE DE L'EAC

ETATS MEMRES

Bénin ; Burkina Faso ; Cape Vert ; Côte d'Ivoire ; Gambie ; Ghana ; Guinée ; Guinée Bissau ; Liberia ; Mali ; Niger ; Nigeria ; Sénégal ; Sierra Léone ; Togo

Afrique du Sud ; Angola ; Botswana ;Lesotho; Malawi ;Maurice ; Mozambique ; Namibie ; République démocratique du Congo ; Seychelles ; Swaziland ; Tanzanie ; Zambie ; Zimbabwe.

Burundi ; Kenya ; Tanzanie ; Ouganda ; Rwanda.

ACTE FONDATEUR

La Cour de Justice est prévue aux Articles 6 et 15 du Traité Révisé de la CEDEAO. Le protocole relatif à la Cour de justice (signé le 6 juillet 1991) est entré en vigueur le 5 novembre1996. En janvier 2005, un Protocole supplémentaire a été adopté amendant plusieurs dispositions du Protocole de la Cour.

Le Tribunal est prévu par l'Article 9(f) du Traité de la SADC. Le Protocole portant création du Tribunal et ses Règles de Procédures ont été adoptés en 2000 et sont entrés en vigueur en 2001.Le Tribunal est devenu opérationnel en Novembre 2005 et prêt à recevoir des affaires en mars 2007.

L'Article 9 du Traité établissant la Communauté de l'Afrique de l'est prévoit la mise en place de la Cour. Celle-ci est devenue opérationnelle en novembre 2001. Les Règles de Procédures ont été adoptées en 2004.

SIEGE

Abuja (Nigeria)

Windhoek (Namibie)

Arusha (Tanzanie)

COMPETENCE EN MATIERE DES DH

Explicite. L'Article 9(4) du Protocole additionnel donne à la Cour compétence pour connaître des cas de violations des droits de l'Homme commises par un Etat Partie.

Implicite Le Tribunal a compétence pour connaître des cas relatifs à l'interprétation et l'application du Traité (art. 14 du Protocole). Le Traité ne fait pas référence à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, mais il engage les parties au respect des droits de l'Homme, à la démocratie, à l'Etat de droit, à la non discrimination.

Implicite. Le Tribunal a compétence pour connaître des cas relatifs à l'interprétation et l'application du Traité (art. 23 du Traité) qui engage (art. 6(d)) les Etats

à respecter les principes fondamentaux, parmi lesquels les droits garantis par la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples. L'Article 27(2) prévoit qu'un Protocole pourrait être adopté pour donner une plus large compétence à la Cour, notamment en matière de droits de l'Homme.

SAISINE PAR LES INDIVIDUS

L'Article 10 (d) donne accès à la Cour aux individus pour demander réparation d'une violation des droits de l'Homme

L'Article 15 du Protocole prévoit la saisine par toute personne physique et morale

La Cour peut être saisie par toute personne physique et morale résidant dans la communauté

Conclusion partielle

En guise de conclusion de ce chapitre, nous disons que les conditions de recevabilité des requêtes individuelles devant la Cour africaine sont moins rigoureuses que celles requises par les Cours européenne et interaméricaine. Au niveau africain ces conditions sont adaptées et moins rigides dans la mesure où elles n'exigent pas que la requête soit présentée dans les six mois à cause de difficulté de transport que connait l'Afrique, ou que son objet ne soit pas en cours d'examen devant une autre instance internationale. Si vis-à-vis de conditions exigées par ses paires le Protocole créant la cour africaine exige des conditions souples, on ne peut manquer de souligner qu'elle soumet des requêtes étatiques à des conditions moins rigoureuses que pour celles émanant des individus et des ONG. De la lecture de l'article 40 de son Règlement final de 2010 et des paragraphes premier et deuxième de l'article 6.2 que les conditions qu'il pose ne concernent que les seules affaires portées devant la Cour par un individu ou une ONG. La question qui reste à résoudre est celle de savoir si les requêtes interétatiques ne sont soumises à aucun barrage de recevabilité pour que la Cour en connaisse.

Comparativement aux conditions prévues par les juridictions sous-régionales, la cour est difficilement accessible. Non seulement ces cours des CER ne prévoient pas la déclaration facultative, la compatibilité des demandes aux instruments de protection, les conditions de délai, elles vont jusqu'à admettre des requérants sans qu'ils n'aient saisi une seule instance interne. C'est la règle pour toutes ces CER concernant les litiges entre particuliers ; et la CJCEDEAO ne prévoit pas cette condition pour toute affaire dont elle pourra connaitre.

Chapitre deuxième : L'ACCES DES INDIVIDUS A LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L'HOMME ET DES PEUPLES

Introduction

Pendant très longtemps, une conception absolue de la souveraineté a prévalu et a entraîné deux conséquences majeures, notamment en matière de droits de l'homme : d'une part, la justice est une prérogative de l'État qui est seul habilité à l'exercer à propos de tout événement survenant sur son territoire ; d'autre part, un État ne peut être soumis à aucune autre juridiction à moins qu'il ne donne son accord. Cet accord a d'abord commencé pour les litiges opposant des États entre eux ; pour éviter de recourir à la guerre on a eu tendance à faire appel à des moyens plus pacifiques dont la justice internationale. C'est déjà un progrès notable consacré par les conventions de la Haye du 29 juillet 1899 et du 18 octobre 1907 relatives au règlement pacifique des différends et confirmé par d'autres conventions qui introduisent l'arbitre ou le juge ; il faut attendre une période encore plus récente pour que les États acceptent la compétence d'un juge international pour des litiges les opposant à des particuliers.94(*)

Que ce soit au niveau de la CIJ ou des autres systèmes régionaux de droits de l'homme, le droit de recours individuel fait généralement l'objet d'une clause facultative, la compétence de ces organes d'examiner les requêtes individuelles étant soumise à la condition de la déclaration de la reconnaissance de cette compétence par les Etats concernés (section I). D'entrée de jeu, disons que l'Afrique ne fait pas exception à la restriction actuelle du droit procédural des droits de l'homme. Cette restriction a pour base l'article 34.6 du Protocole (section II).

Aux fins de garantir un accès direct aux individus malgré l'absence de la déclaration de l'article 34.6, la question se pose de savoir si un État peut malgré tout accepter d'être attrait devant la Cour en exprimant son consentement au cas par cas, autrement que par le dépôt préalable de la déclaration prévue à l'article 34. 6 rendant ainsi possible un éventuel forum prorogatum (section III). D'autres possibilités pourraient s'offrir comme sur le plan organique avec la suppression de la Commission africaine comme c'était le cas en 1998 dans le système européen ou comme il le sera dans le système interaméricain (section IV). Aussi, entrevoir une révision de la Charte qui porterait sur la suppression de l'article 34.6 (section V). En outre, sensibiliser les Etats à ratifier la Charte car nous n'avons pas un seul autre mécanisme juridique par lequel les individus peuvent attraire directement les Etats en devant la Cour africaine (VI). Ensuite et enfin, la cour africaine ayant été créée à coté d'autres organes judiciaires ayant compétence en matière des droits de l'homme (section VII), nous examinerons la coexistence de ce qu'on appelle aujourd'hui les cours africaines des droits de l'homme (section IX).il nous sera donné par ce travail d'examiner certaines requêtes individuelles soumises à la Cour (section II).

Section I : Les recours individuels devant la CIJ et les autres systèmes régionaux de droits de l'homme

§1. Les allégations des individus devant la CIJ

L'actuelle Cour internationale de justice (CIJ), dont le siège est à La Haye (Pays-Bas), a remplacé l'ancienne CPJI pour devenir l'organe judiciaire principal des Nations Unies.

Composée de 15 juges élus par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l'ONU, elle est une juridiction réservée aux seuls États pour résoudre leurs litiges en rendant des arrêts et, accessoirement, aux institutions des Nations Unies en rendant des avis.

Elle n'est pas ouverte aux individus et ceux-ci ne peuvent faire valoir leurs droits devant elle que par l'intermédiaire de leur État d'origine ; en effet, chaque État peut exercer la protection diplomatique en faveur de ses ressortissants qui lui permet d'endosser leur requête et de mettre en cause, devant la CIJ, tout autre État qui aurait porté atteinte à leurs droits. Par cette démarche, l'affaire de l'individu devient une affaire d'État qui permet d'invoquer le droit international et les recours ouverts aux États. C'est dans ce cadre que la CPJI et la CIJ ont eu à connaître d'affaires touchant directement ou indirectement aux droits de l'homme bien que ces affaires ne soient pas nombreuses. Il convient, cependant, de noter un regain de faveur de ces recours comme le montrent quelques affaires récentes mettant notamment en cause les jugements et condamnations à mort prononcées contre des étrangers par les juridictions des Etats-Unis d'Amérique : dans l'affaire LaGrand, un ressortissant allemand a été arrêté, détenu, jugé, condamné à mort et exécuté ; dans l'affaire Avena et autres, ce sont 52 ressortissants mexicains qui ont été condamnés à mort dans les mêmes conditions, mais n'ont pas encore été exécutés. Dans ces affaires, l'Allemagne et le Mexique ont exercé des recours devant la CIJ pour lui demander de constater que les procédures avaient eu lieu dans des conditions contestables qui n'avaient pas respecté les droits de la défense et, surtout , sans que les États concernés aient été informés des procédures entamées contre leurs ressortissants afin de leur apporter l'assistance nécessaire. Dans le cas LaGrand, la CIJ a condamné les États-Unis en 1999 et, dans le cas Avena et autres, après avoir ordonné à titre conservatoire, en 2003, le sursis pour les exécutions, elle vient de se prononcer sur le fond pour condamner les Etats-Unis et demander un réexamen des verdicts prononcés contre les ressortissants mexicains. dans le même sens, la Cour vient de rendre son arrêt dans l'affaire Diallo par lequel elle est parvenue à la conclusion suivant laquelle la République démocratique du Congo a violé les obligations lui incombant en vertu des articles 9 et 13 du Pacte international relatif aux droits civils et politique, des articles 6 et 12 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi que de l'alinéa b) du paragraphe 1 de l'article 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires95(*).

La base de ces recours se trouve dans la convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963 que la Cour a interprétée de manière extensive pour dire qu'un État qui juge pénalement un étranger doit faire en sorte que l'État d'origine puisse intervenir dès le début des poursuites.

§2. Les recours individuels devant la Cour européenne

La première cour des droits de l'homme est née dans le cadre du Conseil de l'Europe et elle a été instituée par la convention du 4 novembre 1950. La particularité et la nouveauté de cette initiative résident dans plusieurs éléments dont l'acceptation de l'accès direct des individus à une juridiction internationale en permettant l'introduction directe des requêtes devant la Cour.

A. La cour européenne avant le Protocole N°11

En effet, dans le système qui prévalait avant l'adoption du Protocole no 11 en Europe, les affaires tirant leur origine de requêtes introduites par des personnes physiques ou des organisations non gouvernementales ne pouvaient être présentées que si l'Etat intéressé avait déclaré accepter la compétence de la Commission en la matière. Elles ne pouvaient être tranchées par la Cour que si l'Etat avait de surcroît déclaré reconnaître la juridiction de la Cour.

Cependant, on peut noter que la Cour africaine reproduit ce qui était aussi la réalité dans le système européen au moment de sa création, où toute requête individuelle devait nécessairement passer devant la Commission avant, éventuellement, d'être portée à la connaissance de la Cour si, et seulement si, l'Etat en cause avait fait une déclaration préalable d'acceptation. Quand la Convention européenne a été adoptée en 1950, la disposition entrouvrant la voie aux requêtes individuelles représentait une nouveauté en droit international, et plusieurs pays européens ont été réticents à les accepter. Au moment de l'entrée en vigueur de la Convention en 1953, seuls 3 des 10 pays ayant ratifié avaient fait une déclaration acceptant les requêtes individuelles. En 1960, ils étaient 10 sur un total de 15 pays liés par la Convention. Par la suite, les Etats réfractaires sont devenus de plus en plus marginalisés, les nouveaux membres du Conseil de l'Europe acceptant rapidement tous les engagements de la Convention. Face à ce renversement de tendance, le Conseil de l'Europe a finalement adopté le Protocole n°11, entrée en vigueur en novembre 1998, imposant le recours individuel à tous les Etats parti.

B. La cour européenne après les Protocoles N°11 et 14

Aujourd'hui la reconnaissance du droit de requête individuel est obligatoire pour toutes les parties contractantes et la Cour a automatiquement compétence juridictionnelle à l'égard de toutes les affaires interétatiques dont elle est saisie.

En Europe, une solution similaire à celle qui est consacrée par, le protocole créant la Cour africaine était consacrée par la Convention européenne  avant que celle-ci ne soit amendée par le Protocole No. 9 puis par le Protocole No.11. Depuis l'entrée en vigueur de ce dernier protocole, tant les Etats parties, que les individus ou organisations non gouvernementales peuvent porter une affaire devant la Cour et ce, sans qu'il soit nécessaire que les Etats parties concernés aient au préalable accepté sa compétence par le dépôt d'une déclaration spéciale; cette compétence est en effet désormais obligatoire.

La Cour européenne souffre depuis quelque temps de son succès : de plus en plus de citoyens la saisissent pour faire valoir leurs droits. Le nombre de requêtes a atteint 57100 en 2009, une augmentation de plus de 500 % par rapport à 2000. L'examen des requêtes prend souvent des années. Afin de remédier à ce problème, le Conseil des ministres a adopté en 2004 le Protocole 14, qui amende la Convention européenne. La réforme prévoit une simplification de la procédure, avec la possibilité qu'une requête soit déclarée irrecevable par un juge unique, au lieu du comité de trois juges. Le comité de trois juges aura la compétence de statuer sur le fond dans des affaires « répétitives ».

Le but de cette reforme- comme on peut lire au préambule- est de maintenir et renforcer l'efficacité à long terme du système... en raison principalement de l'augmentation de travail de la Cour européenne (cinquième considérant), tout en sauvegardant le « rôle prééminent » de la Cour « dans la protection des droits de l'homme en Europe » (sixième considérant).

Il ressort des objectifs ci-avant que la refonte mise en oeuvre par le Protocole N°11 n'a pas suffit à faire face à la hausse, très marquée, du nombre de requêtes individuelles présentées à la Cour. Le Protocole N°14 poursuit ces objectifs par l'adoption de mesures touchant au fonctionnement du système, dont le but est de simplifier la procédure se déroulant devant la Cour en lui assurant notamment une rapidité.96(*)

Ces réformes sont nécessaires et bienvenues. La disposition la plus discutée crée une nouvelle condition de recevabilité permettant d'écarter une requête quand son auteur n'a pas subi de « préjudice important qui porte la formule latine d'exception de minimis ».97(*)

§3. La cour interaméricaine des droits de l'homme

Si le continent américain a précédé l'Europe dans la reconnaissance des droits de l'homme grâce à la Charte constitutive de l'Organisation des États américains du 30 avril 1948, en revanche, il faut attendre la convention du 22 novembre 1969 pour instituer une Cour interaméricaine habilitée à recevoir les requêtes des personnes pour violation des droits de l'homme. Cette Cour n'est entrée en fonction qu'en 1978 et elle a eu un démarrage laborieux dans un continent où ont longtemps prédominé des régimes autoritaires ; elle est devenue plus active avec la démocratisation de ces régimes et, sans avoir l'autorité de son homologue européenne, elle a commencé à prendre place parmi les institutions fiables de protection des droits de l'homme.

Afin de protéger les individus contre les violations des droits garantis, la Convention américaine a instauré un mécanisme de plainte individuelle. En raison de la particularité du système interaméricain de protection des droits de l'homme, la contrôle sur plaintes individuelles est un mécanisme à double vitesse qui peut se matérialiser par un contrôle juridictionnel effectué par la Cour ou se limiter à un contrôle quasi juridictionnel assuré par la Commission, soit parce que ni la Commission ni l'Etat en cause ne souhaitent saisir la Cour, soit, car l'Etat défendeur n'a pas accepté la compétence contentieuse de la Cour98(*).

D'aucun n'hésite à affirmer que dans le système inter américain, seul la commission et les Etats parties ont la compétence pour saisir la cour. La victime n'a pas de droit de saisine (directe). Pour contourner ce vide juridique, une pratique s'est créée, la commission inter américaine joue le rôle de représentant de la victime auprès de la cour99(*).

Les pétitions individuelles qui allèguent la violation d'une disposition de la Convention américaine doivent être déposées auprès de la Commission interaméricaine. Cette dernière examine la recevabilité de la requête et peut adopter une décision sur le fond de l'affaire. Si l'Etat en cause a accepté la compétence contentieuse de la Cour, la Commission ou l'Etat lui-même, peut saisir la Cour interaméricaine.

Il faut dire aussi que la compétence ratione personae des organes de contrôle de la Convention dans le cadre des pétitions individuelles s'analyse non seulement par rapport à l'Etat en cause (compétence passive), mais également à la lumière de la qualité de la victime et de la qualité du pétitionnaire.

Voulant transposer le modèle européen dans leur système, des praticiens du droit communautaire américain estiment que la suppression de la commission européenne a contribué à garantir le droit de recours des individus d'ester directement devant la Cour européenne. C'est dans ce sens qu'Antônio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme estime que sur un plan purement organique, la suppression de la Commission et l'adoption de la Cour unique ont marqué en Europe un pas de plus vers la juridictionnalisation. Il dit que l'article 62 du Pacte de San José de 1969 ainsi que le règlement actuel de la Cour (entré en vigueur le 1er juin 2001) confèrent aux individus, le locus standi, c'est-à-dire la capacité d'ester en justice, grâce à laquelle ils peuvent participer directement à toutes les phases de la procédure devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme. On pense que telle sera aussi la tendance dans le système interaméricain de protection des droits de l'homme si l'on en croit les projections et recommandations de M. Antonio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme.100(*)

Section II : Les recours individuels devant la cour africaine des droits de l'homme et des peuples

La compétence juridictionnelle de la Cour africaine est quant à elle toujours subordonnée à l'acceptation préalable des Etats parties au Protocole. On remarquera spécialement la prudence extrême des Etats africains quant à la saisine de la Cour. Ne pourront en effet saisir la Cour que l'Etat (signataire), l'Etat mis en cause, l'Etat dont le ressortissant est victime d'une violation des droits de l'homme ou des organisations intergouvernementales africaines. Il est pour l'instant impossible à un individu de saisir directement cette Cour, à moins que son pays n'ait déposé déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour à examiner les requêtes des particuliers. De ce point de vue, les Burkinabè, les Maliens, les malawites, les Tanzaniens et les Ghanéens sont encore en avance. Le mécanisme africain a encore quelques pas à faire vers l'adoption de ce que M. Antônio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme considère comme un « mécanisme émancipateur de l'individu à l'égard de son propre Etat »101(*).

Le texte de référence en Afrique c'est le Protocole à ses articles 5.3 et 34.6. Le Protocole organise le droit de saisine directe de la Cour par les individus et ONG à une double condition : la reconnaissance par l'Etat défendeur de la compétence de la Cour africaine pour

§1. L'accès des individus et ONG à la Cour africaine

L'exercice effectif du droit de recours individuel devant la Cour africaine est lié à l'adoption de mesures dans les domaines politique, procédural et financier. Ces mesures concernent la reconnaissance de la compétence de la Cour pour recevoir des requêtes individuelles, l'adoption par la Cour d'un règlement intérieur favorisant celles-ci...102(*)

C'est dans ce sens que l'article 5.3 du Protocole prévoit : « la Cour peut permettre aux individus ainsi qu'aux ONG dotées du statut d'observateur auprès de la Commission africaine d'introduire des requêtes directement devant elle ».

Le protocole créant la Cour africaine ainsi prévoit d'une part une compétence obligatoire à l'égard des requêtes émanant des Etats africains, de la Commission africaine et des organisations intergouvernementales africaines. D'une autre part le même Protocole prévoit une compétence facultative de la Cour de recevoir des requêtes émanant des individus ou des ONG ayant statut d'observateur devant la Commission africaine.

Au cours de ce travail nous allons plus nous attarder sur la compétence facultative de la Cour africaine à recevoir des requêtes émanant des individus et des ONG ayant statut d'observateur auprès de la Commission africaine.

La compétence facultative suppose en réalité, que les parties, avant tout débat au fond, acceptent par un consentement tacite, à reconnaître la compétence de la cour. C'est dire que celle-ci ne peut exercer sa compétence qu'avec le consentement des parties103(*).

Cette compétence facultative permet aux individus et ONG de saisir la Cour soit directement (B) soit indirectement en contournant par la commission africaine (A).

A. Saisine indirecte

Il existe un moyen ou du moins une astuce pour les individus de saisir indirectement la Cour. Les individus et les organisations non gouvernementales ayant le statut d'observateur auprès de la commission africaine peuvent faire entendre leur cause devant la Cour bien que l'Etat en cause n'ait pas fait la déclaration au titre de l'article 34.6 du protocole. Ceux-ci peuvent présenter des communications devant la commission africaine sans qu'un Etat partie puisse s'y opposer. La commission peut décider de porter l'affaire devant la Cour tout dépendra largement de la volonté de la Commission africaine.104(*) On peut espérer que celle-ci utilise cette faculté en accord avec la partie requérante notamment lorsque cette dernière n'a pas la possibilité de saisir directement la cour.

Saisie par un individu ou une ONG ayant le statut d'observateur, la Commission peut décider de porter l'affaire devant la Cour africaine de deux manières :

- La Commission peut décider de saisir la Cour (avant même l'examen de la recevabilité de la communication) si la situation portée à sa connaissance présente des violations graves et massives des droits de l'Homme commises par un Etat partie au Protocole de la Cour ;

- La Commission peut décider de saisir la Cour en cas d'inexécution de ses décisions (mesure provisoire ou décision au fond) par un Etat partie au Protocole de la Cour105(*).

Dans ces cas, les individus et ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine pourront devenir des parties à la procédure portée par la Commission devant la Cour comme l'a décidé la troisième réunion de la Cour et de la commission du 31 août 2010 comme vient de le confirmer l'article 28.3 du nouveau Règlement intérieur final de la Cour adopté le 07 septembre 2010.

Evidement, la Commission africaine ne pourra saisir la Cour que si l'Etat en cause devant la Commission est partie au Protocole de la Cour.

Cette première possibilité n'est pas restée purement textuelle. Pour la toute première fois, la Cour africaine a été saisie par la Commission africaine. Les ONG de la FIDH ont saisi la Commission africaine, en vue de saisir la Cour africaine d'une plainte contre la Libye. Cette plainte répond aux communications transmises par ces organisations à la Commission requérant une telle action. En effet, cette affaire désormais connue sous le nom Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples (requérant) c/ Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste (défendeur) a été initiée par Requête N° 004/2011. Se fondant sur des informations recueillies par nos organisations, la CADHP a déposé une plainte auprès de la Cour africaine contre la Libye portant sur la violation grave et massive des dispositions de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples ratifiée par la Libye en 1986. La Libye aussi ratifié le Protocole créant la Cour le 19 novembre 2003. Notamment, la CADHP dénonce la répression par les forces de sécurité des manifestations pacifiques de février 2011, l'utilisation excessive d'armes lourdes contre la population, ainsi que les arrestations et détentions de manifestants. De l'avis du Requérant, ces actions sont constitutives de violations graves et généralisées des droits garantis par les articles 1, 2, 4, 5, 9, 11, 12, 13 et 23 de la Charte africaine. Le requérant demande à la Cour d'appliquer à l'encontre du défendeur certaines mesures coercitives106(*). Tenant compte de la gravité de la situation qui prévalait en Libye, la Cour en vertu de l'article 27 de son Règlement intérieur intériméraire.

Face à une telle pratique, on se demande si la commission africaine peut valablement garantir les intérêts des individus et ONG lors de la procédure devant la cour africaine ? Des éléments de réponses peuvent être apportés par l'illustration du système inter américain où toute affaire doit passer obligatoirement par la commission avant une éventuelle recevabilité devant la cour inter américaine. La solution adoptée par le système africain pose une limite à l'efficacité de la cour. Cependant on peut noter qu'elle reproduit ce qui était aussi la réalité dans le système européen. Au moment de sa création, toute requête adressée devant la cour européenne devait nécessairement passer devant la commission avant éventuellement d'être portée devant la cour si et seulement si, l'Etat en cause avait fait une déclaration préalable d'acceptation.

La Cour africaine a adopté une solution similaire à la pratique de la Commission interaméricaine. En effet, la Cour africaine consultera la Commission africaine sur les amendements touchant au règlement intérieur. Autre fait important, les deux juridictions ont convenu que, dans le cas d'une affaire trouvant son origine au niveau de la Commission africaine, la Cour africaine pourrait entendre l'individu ou l'ONG à l'initiative de la requête en vertu de l'article 55 de la Charte africaine (il s'agit des communications soumises par des individus ou des ONG)107(*). Elle l'a confirmé dans son Règlement intérieur final à l'article 28.3 littera c. cet article se lit comme suit : « La Cour peut également, si elle le juge nécessaire, entendre, sur la base de l'article 45 du Règlement intérieur, l'individu ou l'ONG qui a saisi la Commission en vertu de l'article 55 de la Charte africaine ».

C'est dans cette optique, que la Commission de toute évidence donnera à la Cour l'occasion d'exercer sa fonction juridictionnelle. Il n'est pas réaliste d'espérer que par des recours étatiques, la jurisprudence de la Cour s'étoffe quand l'on constate que depuis l'existence de la Commission, celle-ci n'a connu aucune communication d'un Etat contre un autre, alors que ce ne sont pas les occasions qui ont manqué.

La compétence facultative de la Cour se traduit aussi par la saisine directe de la Cour par les individus mais cet accès fait l'objet d'une restriction posée à l'article 34.6 du Protocole.

B. La saisine directe de la Cour par les individus et ONG

Cette saisine se base sur les articles 5.3 et 34.6 du Protocole.

Selon l'article 5.3 du Protocole, «la Cour peut permettre aux individus ainsi qu'aux ONG dotées du statut d'observateur auprès de la Commission africaine d'introduire des requêtes directement devant elle».

L'article 34.6 prévoit : « A tout moment à partir de la ratification du présent Protocole, l'Etat doit faire une déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes énoncées à l'article 5(3) du présent Protocole. La Cour ne reçoit aucune requête en application de l'article 5(3) intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration ».

A ce titre, les parties ci-après désignées peuvent valablement déposer un recours devant la dite cour :

- Les individus personnes physiques qui réunissent les conditions pour ester en justice.

- Les organisations non gouvernementales ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples.

A la différence des autres cours régionales, la faculté donnée aux individus et aux ONG de saisir la Cour n'est pas limitée à un intérêt à agir particulier, comme celui d'être une victime directe de la violation des droits de l'Homme.

Une fois l'autorisation donnée par un Etat partie, conformément à l'article 34.6 du Protocole, tout individu ou ONG ayant le statut d'observateur à la Commission africaine, quelle que soit sa nationalité civile ou juridique, peut accéder à la Cour pour contester les violations des droits de l'Homme commises par cet Etat. Dans le même ordre d'idées, le Batonnier MATADI considère la consécration de cette actio popularis comme une arme importante dans un continent où les citoyens ne sont pas toujours informés de leurs droits et devoirs. Ainsi les ONG vont agir en leurs lieu et place108(*).

En ce sens, la Cour devrait rejoindre la jurisprudence de la Commission africaine qui a expliqué dans une décision (Malawi African Association et autres c/ Mauritanie) : « Les auteurs d'une communication ne doivent pas forcément être les victimes ou des membres de leurs familles. Cette caractéristique reflète une sensibilité aux difficultés pratiques que peuvent rencontrer les individus dans les pays où les droits de l'Homme sont violés. Les voies de recours nationales ou internationales peuvent ne pas être accessibles aux victimes elles-mêmes ou peuvent s'avérer dangereuses à suivre ».109(*)

Cependant, cette compétence n'est que facultative car soumise à la volonté préalable de l'Etat accusé de violations des droits de l'Homme. En fait, les individus et ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine peuvent saisir directement la Cour si et seulement si l'Etat en cause, partie au Protocole, a fait une déclaration (ci-après déclaration facultative) au titre de l'article 34.6 du Protocole autorisant une telle démarche.

Relevons que cette limitation du droit d'accès des particuliers au prétoire de la justice internationale des droits de l'homme soulève quelques observations ; cette tendance peut présenter bien des avantages que des inconvénients.

I. Avantages, inconvénients et critiques de la déclaration facultative

En termes d'avantages, cette restriction a pour objectif d'éviter l'engorgement de dossiers à la Cour africaine. Par ailleurs, l'institution d'une clause facultative permettra d'assurer un meilleur suivi pour toutes les affaires pendantes devant la cour.

Sur un autre registre, cette clause constitue une atteinte grave au droit d'accès à la justice des particuliers. Il aurait été plus respectueux des droits de l'individu si au moins, si c'était à l'Etat qui ne reconnaît pas à la Cour, cette compétence, qu'il revenait de faire une déclaration en ce sens. La juridictionnalisation du système africain des droits de l'homme aurait été optimale si l'individu pouvait accéder facilement à la justice de la Cour. Les rédacteurs du protocole auraient amorcé une évolution notable du droit procédural international des droits de l'homme, s'ils avaient pu rendre le système africain progressiste en ce sens.110(*) Avec l'article 34 paragraphe 6, nous ne pensons pas que les Etats vont déborder d'enthousiasme pour se bousculer à faire la déclaration de reconnaissance de la compétence de la cour à examiner les requêtes des particuliers. Par conséquent, à défaut d'un nombre significatif de déclarations, la cour sera essentiellement réduite au seul examen des communications.111(*) A ce stade de l'entrée en vigueur du protocole, seuls le Burkina-Faso, Mali, Malawi, Tanzanie et Ghana (le 5 avril 2011) se sont conformés aux dispositions de l'article 34-6.

II. Portée de l'article 34.6 du Protocole

L'article 34.6 stipule qu' « [A] tout moment à partir de la ratification du présent Protocole, l'Etat doit faire une déclaration acceptant la compétence de la Cour pour recevoir les requêtes énoncées à l'article 5(3) du présent Protocole. La Cour ne reçoit aucune requête en application de l'article 5(3) intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration ». Disons d'emblée que la version française de cet article est différente des versions anglaise, arabe et portugaise dans la formulation.

Il s'git ici du genre de requêtes soumises directement à la Cour par un individu ou une organisation non gouvernementale sans qu'aucune procédure n'ait été engagée devant la Commission.

Il s'agit ici d'une des limitations principales du système africain de protection des droits de l'Homme : la capacité de la Cour de recevoir des communications individuelles est fondamentale pour sa crédibilité dans son rôle de lutte contre l'impunité et de protection des droits de l'Homme sur le continent. Pourtant, parmi les Etats ayant ratifié le Protocole à savoir 26 Etats africains112(*), seuls le Burkina Faso, le Mali, le Malawi, la Tanzanie et le Ghana ont fait une déclaration au titre de l'article 34.6 à la date de du dépôt de ce travail113(*).

Ainsi formulée, cette disposition soulève deux questions114(*).

La première est celle du sens à donner au verbe « doit » utilisé dans la première phrase, celui-ci suggérant que le dépôt de la déclaration par l'Etat partie est pour celui-ci une « obligation » et non pas une « faculté ».

Ainsi compris, l'article 34.6, obligerait les Etats parties à faire une telle déclaration après le dépôt de leur acte de ratification (ou adhésion). Cette prescription n'a toutefois pas de véritable portée juridique dans la mesure où aucun délai n'est spécifié. Elle n'a pas non plus beaucoup de sens quand on la lit à la lumière de son contexte et en particulier de l'article 5.3, et de la seconde phrase de l'article 34.6 qui précise que « La Cour ne reçoit aucune requête en application de l'article 5(3) intéressant un Etat partie qui n'a pas fait une telle déclaration ». il convient donc de conclure que le dépôt de la déclaration est facultatif ; cette conclusion est corroborée par un examen des travaux préparatoires du Protocole.

La deuxième soulevée par le §6 de l'article 34 est celle de savoir si le dépôt de la déclaration facultative par les Etats parties est le seul moyen par lequel ceux-ci peuvent exprimer leur consentement à la compétence de la Cour pour connaitre d'une requête individuelle dirigée contre eux.

A cet égard on relèvera tout d'abord que l'article 34.6, n'exige pas que le dépôt de la déclaration facultative soit « préalable » au dépôt de la requête ; il prévoit simplement que la déclaration peut être faite à tout moment à partir de la ratification ». Rien n'empêche ainsi un Etat partie de faire cette déclaration « après » qu'une requête ait été introduite contre lui. En application du §4 de l'article 34 du Protocole, la déclaration, à l'instar des actes de ratification ou d'adhésion, entre en vigueur au moment de son dépôt et déploie ses effets à cette date.

Il ressort de cette analyse qu'un État partie au protocole ne peut être attrait directement devant la Cour par un individu ou une organisation non gouvernementale que s'il a au préalable fait la déclaration prévue à l'article 34. 6, et par laquelle il accepte la compétence de la Cour pour connaître de telles affaires. En d'autres termes, l'individu ne dispose pas d'un accès direct devant la Cour si l'Etat défendeur n'a pas encore fait la déclaration de l'article 34.6.

Section III : La juridiction de la Cour africaine au cas par cas

La Cour n'a pas prévu une telle faculté que ce soit dans son règlement intérieur intériméraire de juin 2008 ou son Règlement intérieur final du 07 septembre 2010 en ce qui concerne sa saisine par un individu ou une organisation non gouvernementale, rendant ainsi possible un éventuel forum prorogatum.

La convention américaine à son article 62.3, ainsi que la convention européenne à son article 48 avant qu'elle ne soit amendée, prévoyaient pareille possibilité.

Le consentement de l'Etat est la seule condition de la Cour en matière des requêtes individuelles. Ce consentement peut être exprimé préalablement à l'introduction d'une requête dirigée contre lui, par le dépôt de la déclaration visée au §6 de l'article 36. Il peut se manifester postérieurement, soit de manière formelle par le dépôt d'une telle déclaration, soit de manière informelle ou implicite par la voie du forum prorogatum. Cette dernière n'est pas aussi étrangère à la Cour (b) mais elle peut bien l'appliquer en se référant à la doctrine du forum prorogatum et à la pratique qui en est faite par les autres juridictions internationales principalement la CIJ (a).

§1. Le forum prorogatum en droit international

A. Doctrine du forum prorogatum

Forum prorgatum c'est une formule latine habituellement traduite par l'expression « juridiction prorogée ». Il s'agit du fait pour l'Etat d'accepter la compétence d'une juridiction internationale institutionnalisée, telle la CIJ, postérieurement à la saisine, soit par une déclaration expresse à cet effet, soit par des actes concluants impliquant une acceptation tacite. Ces actes concluants peuvent consister en la participation effective à l'instance, en plaidant sur le fond, ou par des conclusions au fond ou tout autre acte impliquant absence d'objection contre une future décision au fond. Un tel comportement vaut, selon l'opinion de la Cour, acceptation tacite de sa compétence, qui ne peut plus être révoquée ensuite, en vertu du principe de la bonne foi ou de l'estoppel115(*).

En effet, le concept original de forum prorogatum, qui nous vient du droit romain, correspond strictement parlant à une « prorogation de compétence » : c'est-à-dire l'extension de la compétence d'un tribunal, qui lui permet de statuer sur un litige qui n'aurait pas dû être porté devant lui. En droit international, l'acceptation postérieure de la compétence de la CIJ par un État a pour effet stricto sensu de créer, d'établir, la compétence de la Cour116(*).

M. Lauterpacht, juge ad hoc dans l'affaire du Génocide, a fourni dans son opinion individuelle du 13 septembre 1993, une définition particulièrement claire du forum prorogatum devant la CIJ en ces termes : « si un État, 1'État A, introduit une instance contre un autre État, 1'État B, sur une base de compétence inexistante ou défectueuse, le forum prorogatum consiste en la possibilité pour 1'État B d'y remédier en adoptant un comportement valant acceptation de la compétence de la Cour »117(*).

C'est à la Cour permanente de Justice internationale (CPJI), l'ancêtre de la CIJ, qu'il revient d'attribuer la paternité de la transposition du forum prorogatum en droit international. À l'occasion de la révision, en 1934, de l'article 35 du règlement de la CPJI relatif aux mentions que devrait contenir une requête introductive d'instance, plusieurs juges avaient insisté sur le fait que l'institution du forum prorogatum était dans l'intérêt de la justice internationale, dans la mesure où elle permettait une certaine souplesse quant aux conditions à remplir par un État qui voudrait s'adresser à la Cour pour régler un différend118(*). C'est ainsi que dans la CPJI a déclaré : « il ne semble point douteux que la volonté d'un État de soumettre un différend à la Cour puisse résulter, non seulement d'une déclaration expresse, mais aussi d'actes concluants. Il paraît difficile de nier que le fait de plaider le fond, sans faire de réserve sur la compétence, ne doive être regardé comme une manifestation non équivoque de la volonté de l'État d'obtenir une décision sur le fond de l'affaire » (Droits de minorités en Haute-Silésie (écoles minoritaires)).

B. Le forum prorogatum devant la Cour internationale de Justice

La compétence du juge international repose uniquement sur le consentement des États. Pour autant, la déclaration d'acceptation de la compétence obligatoire de la Cour, en vertu de l'article 36, paragraphe 2 de son statut, n'est qu'un moyen parmi d'autres d'expression du consentement d'un État à la compétence de la CIJ. Mais de toutes ces formes de consentement, l'institution du forum prorogatum est de loin la plus souple119(*).

Sous l'empire de l'ancien Règlement de la CIJ (antérieurement au 1er juillet 1978), lorsqu'une instance était introduite contre un Etat n'ayant pas au préalable accepté la compétence de la Cour au moyen de la déclaration facultative et que cet Etat n'acceptait pas la juridiction de la cour aux fins de ladite instance après y avoir été invité par le demandeur, il était mis fin à celle-ci par la voie d'une ordonnance succinte. C'est ce qui été fait pour les affaires du traitement en Hongrie d'un avion des Etats-Unis d'Amérique et incident aérien du 7 octobre 1952120(*).

L'article 38.5 du nouveau Règlement de la CIJ a apporté un vin nouveau dans les vieilles outres. En effet, cet article prévoit : « Lorsque le demandeur entend fonder la compétence de la Cour sur un consentement non encore donné ou manifesté par l'Etat contre lequel la requête est formée, la requête est transmise à cet Etat. Toutefois, elle n'est pas inscrite au rôle général de la Cour et aucun acte de procédure n'est effectué tant que l'Etat contre lequel la requête est formée n'a pas accepté la compétence de la Cour aux fins de l'affaire ».

La CIJ ne tardera pas, dès 1948 avec l'affaire du Détroit de Corfou entre le Royaume-Uni et l'Albanie, à reprendre à son compte cette institution pratique, dans des formes tout à fait identiques à la jurisprudence de la CPJI. De 1948 à 1952, une série d'arrêts vient ainsi confirmer les caractéristiques principales du forum prorogatum devant la CIJ :

- D'abord, l'expression du consentement des parties n'est soumise à aucune condition de forme. Dans l'affaire du Détroit de Corfou, la CIJ a déduit le consentement de l'Albanie à sa compétence d'une simple lettre adressée à la Cour121(*).

- Plus encore, ce consentement peut être exprès ou implicite. Il peut notamment être déduit de l'attitude des Parties. Dans l'affaire Haya de la Torre, par exemple, la Cour avait estimé que plaider sur le fond valait acceptation tacite de sa compétence122(*).

- A contrario, le simple fait de participer à l'instance ne saurait constituer une « manifestation non équivoque », a fortiori lorsque l'objet même de la participation à la procédure est de contester la compétence. L'une des contreparties à la souplesse de l'expression du consentement est bien que ce consentement ne saurait être équivoque. C'est ce qu'on peut dans l'arrêt sur les exceptions préliminaires in re Anglo-Iranian Oil Co.123(*).

- Enfin, une fois le consentement des Parties donné à la Cour, il ne saurait lui être retiré de manière unilatérale. L'affaire du Détroit de Corfou est très significative à cet égard et reprend les termes de l'arrêt de la CPJI dans l'affaire des Droits de minorités en Haute-Silésie (écoles minoritaires)124(*).

Pour la première fois depuis longtemps, la CIJ a donc eu l'occasion de réaffirmer, avec l'affaire Djibouti c. France, les modalités d'application de la doctrine du forum prorogatum. Dans l'arrêt du 4 juin, les juges de la CIJ ont donc notamment rappelé que « la compétence de la Cour peut être fondée sur le forum prorogatum selon des modalités diverses »125(*) à cela près que l'attitude de l'État défendeur doit « pouvoir être regardée comme une «manifestation non équivoque» de la volonté de cet État d'accepter de manière «volontaire, indiscutable» la compétence de la Cour »126(*). Dans la présente affaire, le consentement de la France avait été donné en des termes pour le moins explicites, par une lettre en date du 25 juillet 2006 et adressée au greffe de la CIJ : « la République française accepte la compétence de la Cour pour connaître de la requête »127(*).

a. Le forum prorogatum devant la cour africaine

Il s'agit ici de répondre à la deuxième question soulevée par le paragraphe 6 de l' article 34 qui est celle de savoir si le dépôt de la déclaration facultative par les Etats parties est le seul moyen par lequel ceux-ci peuvent exprimer leur consentement à la compétence de la Cour pour connaitre d'une requête individuelle dirigée directement contre eux.

Une courant doctrinal auquel fait partie MUTOY Mubiala soutient que l'interprétation exacte de l'article 5.3 exclut l'autorisation au cas par cas128(*).

Cette disposition ne prévoit la compétence de la cour mais n'en règle pas les modalités telles que prévues à l'article 34.6. Pour savoir si la cour admet une telle possibilité il convient de faire une lecture combinée de ces deux dispositions et non une lecture exclusive de l'une ou de l'autre.

Rappelons tout d'abord que l'article 34.6, n'exige pas que le dépôt de la déclaration facultative soit « préalable » au dépôt de la requête ; il prévoit simplement que la déclaration peut être faite à tout moment à partir de la ratification ». Rien n'empêche ainsi un Etat partie de faire cette déclaration « après » qu'une requête ait été introduite contre lui. En application du §4 de l'article 34 du Protocole, la déclaration, à l'instar des actes de ratification ou d'adhésion, entre en vigueur au moment de son dépôt et déploie ses effets à cette date.

Si un Etat partie peut consentir à la compétence de la Cour en déposant « à tout moment » une déclaration facultative, rien dans le protocole ne s'oppose non plus à ce qu'il puisse, après le dépôt de la requête, exprimer son consentement d'une autre manière que par le biais de la déclaration facultative129(*).

Dans son tout premier arrêt la Cour a éclairé l'opinion sur la question.

Le 15 décembre 2009, la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples a rendu son premier arrêt, en l'affaire Michelot Yogogombaye c. République du Sénégal. La Cour se déclare incompétente pour statuer sur la requête, le Sénégal n'ayant pas fait la déclaration acceptant sa compétence à connaître des requêtes directement portées devant elle par les individus.

Parlant de cet affaire, le Sénégal ayant formellement déposé des exceptions préliminaires dans son « mémoire en réponse » du 9 avril 2009, la Cour a estimé devoir se conformer aux prescriptions de l'article 52.7 de son Règlement qui prévoit que « la Cour statue sur l'exception préliminaire par un arrêt motivé ».

L'examen par la Cour des exceptions préliminaires du Sénégal, dans un arrêt, commandait cependant qu'elle traite la question de sa compétence de manière plus complète en consacrant notamment des développements à l'éventualité d'un forum prorogatum. Cette éventualité est tout au plus évoquée au paragraphe 37 de l'arrêt où la Cour, partant du constat que le Sénégal n'a pas fait la déclaration facultative, conclut que cet Etat « n'a pas accepté la compétence de la Cour pour connaitre sur cette base de requêtes dirigées contre lui et émanant directement d'individus ou d'ONG », suggérant ainsi que le Sénégal aurait pu accepter sa compétence sur une autre base.

C'est pourtant cette prospective d'un forum prorogatum, si mince soit-elle, qui explique pourquoi la requête de Monsieur Yogogmbaye n'a pas été rejetée au lendemain du 10 février 2009 et c'est le dépôt d'exceptions préliminaires par le Sénégal qui explique pourquoi la Cour n'a pas mis fin à l'instance par le biais moins solennel d'une ordonnance ou d'une simple lettre du Greffe130(*).

Section IV. Eventuelle suppression de la Commission africaine

D'aucun pense qu'avec la suppression de la Commission africaine les individus auront le jus standi judicio c'est-à-dire un accès direct à la Cour africaine131(*). En effet, sur un plan purement organique, la suppression de la Commission et l'adoption de la Cour unique ont marqué en Europe un pas de plus vers la juridictionnalisation. Entré en vigueur le 1er novembre 1998, ce Protocole a remplacé les anciennes Cour et Commission qui fonctionnaient à temps partiel par une Cour unique et permanente. La Commission continua pendant une période transitoire d'une année (jusqu'au 31 octobre 1999) de traiter les affaires qu'elle avait déclarées recevables avant cette date132(*). Dans le système de Strasbourg, le Protocole N° 11 à la Convention européenne ... a reconnu aux individus le jus standi judicio, droit d'accès direct à la Cour européenne des Droits de l'Homme133(*).

Telle sera aussi la tendance dans le système interaméricain de protection des droits de l'homme si l'on en croit les projections et recommandations de M. Antonio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme134(*). Dans le système de San José, au Costa Rica, les individus se sont vu conférer en vertu de la Convention américaine relative aux droits de l'homme, par l'adoption - étape historique - du règlement actuel de la Cour (article 62 du Pacte de San José de 1969 entré en vigueur le 1er juin 2001), le locus standi judicio, c'est-à-dire la capacité d'ester en justice, grâce à laquelle ils peuvent participer directement à toutes les phases de la procédure devant la Cour interaméricaine des droits de l'homme.

Ce pas, l'Afrique se garde bien de le franchir. Nous n'en voudrons pas trop à l'Afrique pour cette léthargie car la jeune Cour africaine a encore besoin de l'expertise de la Commission africaine pour bien interpréter les divers instruments des droits de l'homme qu'elle est appelée à appliquer.

Section V. La sensibilisation des Etats africains au dépôt de la déclaration facultative

Nous venons de relever les possibilités offertes aux individus pour avoir accès à la Cour africaine. Parmi ces possibilités on peut rappeler la saisine indirecte par la Commission africaine et l'hypothèse de la théorie du forum prorogatum. Pour que, d'un côté, une requête soit recevable devant la Cour et de l'autre, l'activité juridictionnelle de la Cour ne soit pas seulement conventionnelle, on doit s'assurer que chaque Etat africain en cause devant la Cour africaine a bien fait la déclaration au titre de l'article 34.6.

Nous nous retrouvons en face d'aucun mécanisme juridique contraignant pouvant permettre d'obtenir les ratifications du Protocole et les déclarations des Etats en en vertu de l'article 34.6 excepté leur propre volonté qui, dans ce cas se traduit juridiquement par la ratification.

Nous invitons donc tous les Etats africains qui n'ont pas encore ratifié le Protocole à suivre l'exemple des leurs pairs qui l'ont déjà fait à savoir : Afrique du sud, Algérie, Burkina Faso, Burundi, Congo Brazza, Côte d'Ivoire, Gabon, Gambie, Ghana, Kenya, Lesotho, Libye, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Ile Maurice, Niger, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Tanzanie, Togo, Tunisie et l'Union des Comores.

Pour les vingt et un de ces vingt-six pays cités qui n'ont pas encore fait la déclaration reconnaissant à la cour la compétence de connaitre des recours individuels, nous leur adressons nos encouragements pour les ratification concédées et nous les encourageons à faire plus en déposant la déclaration visée par l'article 34.6 comme l'ont déjà fait le Burkina Faso, la Tanzanie, le Mali, le Malawi et tout récemment en avril 2011, le Ghana.

Les ONG quant à elles doivent faire un travail de sensibilisation auprès de la population et des autorités nationales afin d'encourager tous les Etats africains à ratifier sans réserve le Protocole et ainsi respecter leurs obligations internationales relatives à la protection des droits de l'Homme. Permettant une saisine directe des individus et des ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine.

Section VI. Révision du Protocole et par là suppression de son 34.6

A défaut pour certains Etats de ratifier le Protocole et de faire la déclaration en vertu de l'article 34.6, nous proposons que des actions soient menées en vue de la révision du Protocole encore que celui-ci attende sa mort prochaine avec la création de la Cour africaine de justice et des droits de l'homme.

Cette révision pourra ainsi consister plus spécialement à l'abrogation partielle du Protocole en supprimant du Protocole l'article 34.6. Ainsi, l'UA pourra, à travers ses Etats membres, procéder à la révision du Protocole.

Ici encore c'est à la volonté des Etats africains que nous faisons recours.

Des actions ont déjà vu le jour dans ce sens. C'est dans cette perspective qu'un africain a actionné l'UA devant la Cour africaine pour demander la suppression de l'article 34.6 du Protocole.

Il s'agit cette fois d'une requête initiée par un avocat nigérian en la personne de Femi FOULANA contre l'UA. Cette requête présente beaucoup d'intérêt pour ce travail d'autant plus qu'elle vise la reforme du système procédural africain en matière des droits de l'homme et plus spécialement la suppression de l'article 34.6 qui a fait coulé pas mal d'encre dans ce travail.

On se souviendra que par lettre datée du 14 février 2011, le requérant, un avocat nigérian, spécialiste des droits humains, a introduit une requête dans laquelle il explique qu'il avait à plusieurs reprises tenté d'amener le Gouvernement du Nigeria à faire la déclaration prévue par l'article 34(6) du Protocole. Ces efforts n'ayant pas abouti, il avait décidé d'initier une requête contre l'UA en tant que représentant de ses cinquante-trois (53) membres afin de demander à la Cour de constater l'existence d'une contradiction entre l'article 34(6) du Protocole portant création de la Cour et les articles 1, 2, 7, 13, 26 et 66 de la Charte africaine. Selon le requérant, le fait de subordonner le droit de saisine de la Cour à une déclaration est constitutif d'une violation de son droit de faire entendre sa cause garanti par l'article 7 de la Charte africaine.

Le requérant souhaite les mesures correctives suivantes :

- UNE DECLARATION constatant que l'article 34(6) du Protocole portant création de la Cour africaine est illégal, nul et non avenu, car il est en contradiction avec les articles1, 2, 7, 13, 26 et 66 de la Chartre africaine.

- UNE DECLARATION affirmant que la Requérant est habilité à saisir la Cour africaine de plaintes relatives aux droits humains en vertu de l'article 7 de la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.

- UNE ORDONNANCE abrogeant sans délai l'article 34(6) du Protocole portant création de la Cour africaine.

Conformément aux dispositions de l'article 35 (3) du Règlement intérieur de la Cour, par lettre datée du 28 mars 2011 adressée au Président de la CUA, la requête a été notifiée au Conseil exécutif de l'UA et aux Etats Parties au Protocole portant création de la Cour.

Dans sa réponse, le Défendeur (UA) maintient que la Cour n'a pas compétence pour connaître de l'affaire, que la requête est irrecevable, le requérant n'ayant pas qualité pour agir devant la Cour, et qu'il (le Défendeur) n'est pas partie à la Charte africaine et au Protocole portant création de la Cour. Le Défendeur maintient également que le requérant n'a pas épuisé les voies de recours internes et que les obligations des Etats Parties à la Charte africaine et au Protocole portant création de la Cour en vertu de ces deux instruments ne sauraient transférées au Défendeur.

Dans sa réponse au mémoire de défense, le requérant affirme que c'est le Défendeur qui a adopté la Charte africaine et le Protocole portant création de la Cour et que le Défendeur est poursuivi en tant qu'entité communautaire représentant ses Etats Membres. La requête se rapporte à la validité juridique du pouvoir du Défendeur de mettre en oeuvre l'article 34(6) du Protocole portant création de la Cour, jugé contraire aux dispositions de la Charte africaine, ainsi qu'aux dispositions de l'Acte constitutif de l'UA, son propre instrument constitutif, qui lui impose de respecter les droits humains.

Le requérant affirme que sa requête est conforme aux dispositions de la Charte africaine, qui lui commande d'assumer ses devoirs envers sa famille, la société, l'Etat et les autres communautés légalement reconnues ainsi qu'envers la communauté internationale. Le requérant estime, en outre, qu'étant donné que le défendeur ne peut être poursuivi devant une juridiction interne, la question de l'épuisement des voies de recours internes ne se pose pas et que, en conséquence, la requête ne devrait pas être examinée en tant qu'exception au principe posé. Il a ajouté que l'insertion de la Charte africaine et de l'Acte constitutif de l'UA dans l'arsenal juridique du Nigeria doit être considérée comme garantissant au requérant le droit de saisine directe de la Cour. . L'examen de l'affaire est programmé au cours de la 22ème Session ordinaire de la Cour, prévue du 12 au 23 septembre 2011135(*).

Section VII. Étude pratique de quelques affaires soumises directement par les individus à la cour africaine

Au mois de juin 2011, la Cour africaine avait été saisie de 11 requêtes, soumises, pour l'essentiel, par des individus contre des gouvernements et dont l'une se rapporte à une demande d'avis consultatif.

La Cour africaine a été saisie des affaires suivantes :

- Requête N° 001/2011 : Femi Falana c/ Union africaine

- Requête N° 002/2011 : Soufiane Ababou c/ République d'Algérie

- Requête N° 003/2011 : Urban Mkandawire c/ République du Malawi

- Requête N° 004/2011 : Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples c/ Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste

- Requête N° 005/2011 : Daniel Amare & Mulugeta Amare c/ Mozambique Airline & Mozambique

- Requête N° 006/2011 : Association des Juristes d'Afrique pour la Bonne Gouvernance c/ Côte d'Ivoire

- Requête N° 007/2011: Youssef Ababou c/ Royaume du Maroc

- Requête N° 008/2011: Ekollo Moundi Alexandre c/ Cameroun et Nigeria

- Requête N° 009/2011 : Tanganyika Law Society & Legal and Human Rights Centre c/ République unie de Tanzanie

- Requête N° 011/2011 : Révérend Christopher R. Mutikila c/ République unie de Tanzanie

Bien avant c'est-à-dire en 2008, la Cour avait déjà réceptionné la requête N°001/2008 de Monsieur Michelot Yogogombaye C/ République du Sénégal. Ceci après cinq ans d'existence136(*).

§1. Requêtes ayant fait l'objet d'arrêt ou d'ordonnance de la Cour africaine

A. Requête N° 001/2008

L'instance a été introduite par M. Michelot Yogogombaye, de nationalité tchadienne, contre la République du Sénégal, en date du 18 août 2008, « en vue du retrait de la procédure actuellement diligentée par la République et l'Etat du Sénégal en vue d'inculper, juger et condamner le sieur Hissein Habré, ex-chef d'Etat tchadien actuellement réfugié à Dakar au Sénégal ».

Le requérant, dans son exposé des faits, a soutenu sa demande en arguant notamment que les deux chambres du Parlement sénégalais en adoptant une loi portant modification de la Constitution et «autorisant la rétroactivité des lois pénale en vue de juger uniquement et seulement le sieur Hissein Habré avaient violé le sacro-saint principe de non-rétroactivité de la loi pénale, par ailleurs consacré, non seulement par la Constitution sénégalaise mais aussi par l'article 7 (2), de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

Dans son mémoire en réponse, le Sénégal a d'emblée souligné « avec force n'avoir pas fait la déclaration de reconnaissance de compétence de la Cour africaine (...) pour connaître des requêtes individuelles »4 ; avant de contester subsidiairement au requérant toute légitimité à agir.

Conformément à son règlement, la Cour africaine a procédé à un examen préliminaire de sa compétence. Elle « (...) a fait observer que, pour qu'elle puisse connaître d'une requête contre un Etat Partie émanant directement d'un individu, il faut qu'il y ait conformité avec, entre autres l'article 5 (3) et l'article 34 (6) du Protocole »7 Et la lecture combinée de ces deux articles fait conclure à la Cour africaine que « sa saisine directe (...) par un individu est subordonnée au dépôt par l'Etat défendeur d'une déclaration spéciale autorisant une telle saisine. » Cette conclusion acquise, la Cour africaine s'est attelée à trancher la contestation sur l'existence ou pas d'une pareille déclaration. Après consultation du Président de la Commission de l'UA, dépositaire du Protocole, la Cour africaine a été convaincue que le Sénégal ne figure pas au nombre des Etats ayant fait une telle déclaration.

La Cour, dans cette affaire conclut donc logiquement à son incompétence, laissant dès lors confirmer les limites à sa compétence, longtemps échafaudées durant sa période hibernale. Toutefois, la Cour africaine a, autant que faire se peut, éclairci plusieurs aspects de la procédure applicable devant elle137(*).

B. Requête N° 004/2011

La requête est initiée par la Commission africaine (le Requérant) contre la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste (le Défendeur).

Le requérant dans son exposé des faits, a soutenu sa demande en arguant notamment que, suite à la mise en détention d'un avocat de l'opposition, des manifestations pacifiques avaient eu lieu le 16 février 2011, dans la ville de Benghazi, située dans l'est de la Libye, et que d'autres manifestations avaient également été organisées le 19 février 2011 à Benghazi, Al Baida, Ajdabiya, Zayiwa et Derna, manifestations qui avaient été violemment réprimées par les forces de sécurité, qui avaient ouvert le feu à l'aveuglette sur les manifestants, tuant et blessant de nombreux individus, que les forces de sécurité du Défendeur avaient fait un usage exagéré des armes lourdes et des mitrailleuses contre la population, notamment par des bombardements aériens ciblés et tous types d'attaque et que ces actions sont constitutives de graves violations du droit à la vie et à l'intégrité des personnes ainsi que de la liberté d'expression, de manifestation et de réunion. De l'avis du Requérant, ces actions sont constitutives de violations graves et généralisées des droits garantis par les articles 1, 2, 4, 5, 9, 11, 12, 13 et 23 de la Charte africaine.

Le 25 mars 2011, la Cour africaine a reconnu prima facie sa compétence pour connaître de la plainte, conformément aux articles 3 et 5 du Protocole établissant la Court africaine ratifié par la Libye en 2003. Par ailleurs, invoquant de sa propre initiative l'Article 27(2) du Protocole qui se réfère à « des cas d'extrême gravité ou d'urgence et lorsqu'il s'avère nécessaire d'éviter des dommages irréparables à des personnes », la Cour a ordonné des mesures provisoires. La Cour a demandé à la Libye de s'abstenir immédiatement de toute action qui aurait pour conséquence la perte de vies humaines ou des violations de l'intégrité physique des personnes. Elle a également demandé à la Libye de lui faire état de toutes mesures prises pour mettre en oeuvre cette ordonnance dans les 15 jours à compter de la réception de celle-ci. La date de réception de l'ordonnance par les autorités libyennes demeure inconnue mais on peut considérer que, 21 jours après la décision de la Cour, la Libye a failli aux obligations énoncées dans l'ordonnance de mesures provisoires138(*).

Le défendeur, dans sa réponse résume ses moyens de la manière qui suit. . Dans sa réponse, le Répondeur a réfuté toutes les allégations de violation des droits humains, notamment celles se rapportant à des attaques menées sans discernement contre des civils. Selon le Défendeur, il aurait pris toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils des attaques menées par des groupes armés qui s'étaient emparés des armes et munitions trouvées dans des casernes militaires. Selon le Défendeur, ces groupes armés ont reçu de l'aide d'Al Qaeda et d'autres organisations militaires étrangères et il (le Défendeur) avait été contraint d'exercer son droit à la légitime défense, conformément à l'article 51 de la Charte des Nations Unies.

Le Défendeur ajoute que ces perturbations avaient provoqué la mobilisation de nombreux jeunes qui avaient attaqué les casernes, les aéroports et les prisons et, après avoir libéré les prisonniers, les jeunes avaient déclenché des affrontements armés avec les autorités étatiques, ce qui avait contraint l'Etat à mettre en oeuvre la Loi N° 38, qui autorise les autorités à faire appel aux forces armées en cas d'attaques armées contre les biens et les personnes.

Selon le Défendeur, les événements susmentionnés n'avaient pas été couverts par les médias, mais les stations satellites diffusent des informations incorrectes ou fausses et, conscient du danger auquel ces mensonges et rumeurs peuvent exposer la situation politique et juridique du pays au sein de la communauté internationale, il avait, dès l'entame, pris l'initiative de saisir le Conseil des Droits de l'Homme, le Conseil de Sécurité des Nations Unies, l'Union africaine ... pour demander la création de commissions d'enquête régionales et internationales mais, à son grande consternation, seule l'Union africaine avait réagi favorablement.

Le Requérant invite la Cour à réexaminer sa décision, à procéder à ses propres investigations et à mettre le requérant en examen pour propagation de contrevérités et diffusion de déclarations mensongères139(*).

Cette affaire est donc à suivre car le requérant a sollicité une prorogation du délai de notification de sa réponse jusqu'au 30 septembre 2011.

§2. Requêtes rejetées de plano

Des requêtes citées ci-haut, il y a des requêtes individuelles qui ont été portées directement à la Cour contre des Etats qui ont seulement ratifié le Protocole mais n'ont pas encore fait la déclaration prescrite à l'article 34.6.

Il s'agit de la Requête N° 005/2011 : Daniel Amare & Mulugeta Amare c/ Mozambique Airline & Mozambique (qui a ratifié le Protocole le 17 juillet 2004140(*)). L'affaire concerne deux individus. Par cette requête les requérants allèguent qu'en ou vers novembre 2008, après s'être procuré les passeports, visas et billets d'avion requis, ils avaient entrepris un voyage vers Maputo, au Mozambique, via Nairobi, au Kenya. A l'escale de Nairobi ils ont quitté l'avion d'Ethiopian Airlines pour emprunte un vol de Mozambique Airline vers Maputo. Cependant, ce vol ne les a pas conduits à Maputo, mais il a atterri à Pemba au Mozambique, où ils sont restés bloqués pendant vingt-six (26) jours. Les requérants allèguent, en outre qu'au cours de cette période, ils ont été soumis, par les fonctionnaires des services mozambicains de l'immigration, à diverses situations difficiles, notamment des demandes de pots-de-vin, auxquels ils ont résisté, la confiscation de leurs passeports et visas, les 1.000 dollars US dont ils ont été délestés, des tortures et l'expulsion vers Dar-es-Salaam, en Tanzanie. Suite à l'intervention des fonctionnaires des services tanzaniens de l'immigration, les requérants ont été retournés à Pemba, mais les responsables des services mozambicains de l'immigration les avaient ensuite rapatriés en Ethiopie.

Après que le Greffier ait écrit aux requérants pour accuser réception de la requête et faire observer que la requête ne comportait pas d'indication attestant de l'épuisement des voies de recours internes, au cours de sa 21ème Session ordinaire, la Cour a pris la décision de rejeter sommairement la requête141(*).

§3. Requête renvoyées devant la Commission africaine

Requête N° 006/2011 : Association des Juristes d'Afrique pour la Bonne Gouvernance c/ Côte d'Ivoire (qui a ratifié le Protocole le 07 janvier 2003).

Le requérant, une ONG des droits humains basée à Douala, au Cameroun, allègue de violations graves et massives, par les autorités ivoiriennes, des droits de l'homme fondamentaux du président légal et légitime de la Côte d'ivoire, Son Excellence Laurent Gbagbo, depuis son enlèvement, le 11 avril 2011, à sa résidence officielle d'Abidjan, ainsi que de ceux de sa femme, Mme Simone Ehivet Gbagbo, et de quelques-uns de ses collaborateurs142(*).

Dans sa décision rendue le 16 juin 2011, la Cour africaine déclare qu'elle n'a pas compétence pour connaitre de la requête de l'ONG demanderesse car ne jouissant pas du statut d'observateur devant la Commission africaine.

La Cour décide enfin de renvoyer l'affaire à la Commission africaine en application de l'article 6.3 du Protocole en notant que c'est au vu des allégations contenues dans la requête qu'elle procède ainsi.

§4. Requêtes offrant perspective d'examen par la Cour

Parmi ces requêtes il y a celles qui sont initiées contre des Etats qui ont ratifié le Protocole et ont fait la déclaration en vertu de l'article 34.6 du Protocole. Il s'agit des requêtes Requête N° 003/2011 : Urban Mkandawire c/ République du Malawi ( a ratifié la Protocole le 09 septembre 2008 et a fait la déclaration requise par l'article 34.6), Requête N° 009/2011 : Tanganyika Law Society & Legal and Human Rights Centre c/ République unie de Tanzanie et de la Requête N° 011/2011 : Révérend Christopher R. Mutikila c/ République unie de Tanzanie ( a ratifié le Protocole le 07 février 2006 et a fait la déclaration).

Ces trois requêtes ont alors le privilège de franchir la difficile phase de l'examen préliminaire par la Cour de sa compétence143(*) parce que les Etats en causes ont débordé d'enthousiasme et se sont bousculés à faire la déclaration de la reconnaissance de la Cour à examiner les requêtes des individus. Nous saluons le courage de ces Etats et nous incitons les autres Etats africains à suivre leur exemple.

En jetant un coup d'oeil à celles adressées contre la Tanzanie, particulièrement pour son importance à cause de sa pertinence avec les éléments procéduraux à savoir le principe non bis in idem144(*) nous avons constaté que ces deux affaires pourront être jointes en une seule parce que portant sur un même objet et opposant les mêmes parties afin d'éviter à la Cour un double emploi.

Ces deux affaires décrient la violation du droit à une candidature indépendante.

Dans ces deux affaires The Tanganyika Law Society (TLS) et Legal and Human Rights Centre of Tanzania (LHRC Tz) les requérants visent à dénoncer les dispositions des articles 39, 67 et 77 de la Constitution de la République unie de Tanzanie, telle qu'amendée par le Huitième (8ème) Amendement constitutionnel (de 1992) et le Onzième (11ème) Amendement constitutionnel (de 1994). Ces amendements consacrent une totale négation du droit des citoyens ordinaires de la Tanzanie d'être candidats aux fonctions électives de Président, de Parlementaire ou de Conseiller dans une circonscription locale, à moins qu'ils ne soient membres d'un parti politique. En d'autres termes, contrairement à la pratique qui prévaut dans la majeure partie des pays africains, un Tanzanien ne peut pas briguer une fonction élective en qualité de candidat indépendant. Ces amendements forcent tous les Tanzaniens souhaitant participer à la gestion des affaires de leur pays à adhérer à un parti politique, même lorsqu'ils ne souscrivent pas aux manifestes, principes, politiques ou pratiques d'un des partis politiques existants.

Ces dispositions de la Constitution de la Tanzanie violent les articles 13 (Droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leur pays) et 2 (Droit d'être protégé contre toute forme de discrimination) de la Charte africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Ils violent aussi les articles 3 et 25 du Pacte international relatif aux Droits civils et politiques. La Tanzanie est partie à ces deux instruments internationaux des droits humains.

Le droit des Tanzaniens à briguer une fonction élective en qualité de candidat indépendant a fait l'objet de procédures judiciaires jusqu'au niveau de la plus haute juridiction du pays. Le Révérend Christopher Mtikila fut le premier à tenter de faire appliquer ce droit dans le cadre de l'affaire High Court Miscellaneous Civil Cause No. 5, de 1993. La Haute Cour avait tranché en faveur du requérant dans une décision datée du 24 octobre 1994. Le gouvernement de l'époque avait alors tenté de contourner la décision de la Haute Cour en procédant au 11ème Amendement constitutionnel du 2 décembre 1994. Le Révérend Mtikila avait dénoncé ces Amendements à la Constitution dans l'affaire High Court Miscellaneous Civil Cause No. 10, 2005. Le 5 mai 2005, la Haute Cour avait tranché en faveur de Mtikila, affirmant que le 11ème Amendement constitutionnel violait les valeurs et principes démocratiques garantis par la Constitution de la République unie de Tanzanie et violait également la doctrine des structures fondamentales, prévue par la Constitution. Cette doctrine garantit l'existence, consacrée par la Constitution nationale, de certaines particularités essentielles et fondamentales que le Parlement n'a pas le pouvoir d'amender.

En 2009, le Procureur général de la Tanzanie, Johnson Mwanyika, avait relevé appel de la Décision susmentionnée de la Haute Cour (Civil Appeal No. 45 of 2009). C'est le 17 juin 2010 (l'année dernière) que la Cour d'Appel de Tanzanie (la juridiction suprême du pays) a rendu sa décision, prenant le contre-pied de la Décision de la Haute en déclarant ce qui suit :

1. La Doctrine des Structures fondamentales ne s'applique pas à la Constitution de la République unie de Tanzanie

2. Le droit à la candidature indépendante n'existe pas en Tanzanie.

Il ressort manifestement de la décision susvisée de la Cour d'Appel que les voies de recours relatives au droit de tout Tanzanien de briguer une fonction politique en qualité de candidat indépendant ont été épuisées. La seule autre option légale ou juridique pour garantir la jouissance de ce droit consisterait à faire appel aux tribunaux internationaux auxquels la Tanzanie est partie. C'est pour cette raison que TLS, LHRC Tz et plusieurs citoyens tanzaniens ont décidé de s'adresser à la Cour africaine des Droits de l'Homme et des Peuples pour faire appliquer ce droit au profit de tous les citoyens tanzaniens145(*).

Au regard de ce qui précède, ces requêtes pourront être les premières dans laquelle les requérants ont des chances raisonnables d'obtenir satisfaction auprès de la Cour.

C. Requête sui generis

Une autre requête enfin, a été adressée à la Cour contre le Royaume du Maroc qui n'a pas ratifié le Protocole ni fait la déclaration, non plus n'a pas ratifié la Charte africaine moins encore n'est pas membre de l'union africaine. Il s'agit de la Requête N° 007/2011: Youssef Ababou c/ Royaume du Maroc. Par cette requête que nous qualifions de sui generis, le raquerant de nationalité marocaine affirme que le Maroc a refusé de lui délivrer une Carte d'Identité nationale et un passeport. Il fait également valoir que cela fait plusieurs années qu'il tente d'obtenir ces documents auprès du Consulat du Maroc en Algérie et que ce dernier refuse systématiquement de ses demandes. Il soutient, par ailleurs, qu'il a en sa possession toutes les preuves nécessaires pour démontrer qu'il a effectué toutes les démarches requises sans succès. Par lettre datée du 15 juin 2011, le Greffe de la Cour le Greffe a demandé au Bureau du Conseiller juridique d'indiquer si le Royaume du Maroc est membre de l'Union africaine et, si tel est le cas, s'il a ratifié le Protocole portant création de la Cour. La Cour attend la réponse du requérant ainsi que les informations demandées au Bureau du Conseiller juridique de l'Union africaine146(*).

Pour cette affaire nous estimons que la Cour devra rejeter de plano la requête de Monsieur Youssef Ababou parce que l'Etat défendeur n'a pas qualité pour être attrait devant la Cour, à défaut de sa part, d'avoir ratifié la Charte africaine et d'être membre de l'UA. Car, comme dit ci-avant concernant les conditions générales de recevabilité des requêtes, une requête doit être dirigée contre un Etat partie qui a fait une déclaration au titre de l'article 34.6 du Protocole autorisant une saisine directe des individus et des ONG ayant le statut d'observateur auprès de la Commission africaine.

Conclusion partielle

Si certaines plûmes autorisées et exercées considèrent que le droit de recours individuel a été perçu comme distorsion de l'ordre juridique international indûment réduit à une dimension purement interétatique, afin de rétablir la position centrale réservée à la personne humaine dans le droit des gens147(*) , le mécanisme africain a encore quelques pas à faire vers l'adoption de ce que M. Antônio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme considère comme un « mécanisme émancipateur de l'individu à l'égard de son propre Etat »148(*).

Le recours individuel semble de ce point de vue procéder d'une sorte « d'atout incompressible » du système européen des droits de l'homme149(*).

Le droit de requête individuelle, assorti toutefois de garanties contre les abus, est le moyen le efficace d'assurer le respect des droits de l'homme.

C'est ainsi que reconnaissant l'importance de ce droit pour l'effectivité de la garantie des droits de l'homme certaines plumes autorisées et exercées n'ont pas hésitées de s'inquiéter de l'avenir réservé à leur système une fois si ce droit était en péril. Dans ce sens certains praticiens expriment leur crainte de voir le droit de recours individuel devenir « largement illusoire »150(*) ; d'autres encore s'insurgeant contre le système procédural dominant, vont jusqu'à dire que l'idée même de la restriction du droit au recours individuel paraît contraire à celle des droit de l'homme. Il ne saurait y avoir gradation dans les atteintes à sanctionner151(*).

Chapitre III : LE GLISSEMENT DES CER AFRICAINES DU CHAMP ECONOMIQUEE VERS LE CHAMP DELA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

L'encrage de la Charte dans les esprits est de plus en plus frappant. En témoigne par exemple l'invasion progressive du domaine de la protection des droits de l'homme, jadis considéré comme la citadelle imprenable des juridictions ou quasi-juridictions spécialisées, par les juges des communautés économiques régionales. Cet appétit grandissant pour le contentieux des droits humains est fort à propos dans la mesure où, par le jeu du droit de pétition individuel, il favorise la consolidation d'une jurisprudence africaine des droits fondamentaux152(*).

La diffusion de l'influence de la Charte africaine dans le cadre et dans les activités des communautés régionales d'Afrique est l'une des réussites les plus remarquables dans le système africain des droits de l'homme.

La diffusion de l'influence de la Charte dans le cadre et les activités dans l'organisation sous-régionale est un phénomène devenu commun dans la seconde moitié du 20ème siècle suivi du renouveau de l'intégration régionale. La reconnaissance grandissante de la Charte dans le traité fondateur et dans les autres instruments des organisations sous-régionales et internationales est un bel exemple qui illustre la diffusion de l'influence de la Charte ; en procédant à partir de l'hypothèse que l'application de la Charte africaine est destinée à durer et que cela entraine à la fois des conséquences négatives et positives153(*).

Ces conséquences se traduisent d'une part, dans leur volet positif, par le glissement des CER du terrain économique à celui des droits de l'homme (section 1) et d'autre part, dans leur volet négatif, par un risque de différence d'interprétation dont la réalisation entrainerait la fragmentation de la Charte (section 2).

Section Ière : Les litiges des droits de l'homme devant les Cours de justice des CER traitant des DH

La Cour africaine est établie dans le sillage d'une demi-douzaine de cours régionales dont l'Afrique peut se targuer d'abriter le plus grand nombre et qui ne sont pas sans posséder certaines attributions en matière de protection des droits de la personne humaine : la Cour de justice de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), la Cour de justice de la communauté des Etats de l'Afrique de l'Est (EAC), le Tribunal de la South African Development Community (SADC)154(*).

La création et le renforcement des CER, ainsi que l'harmonisation de leurs politiques, répondent à la première étape vers la mise en oeuvre de la Communauté économique africaine, conformément au Traité d'Abuja (1991), avec dans la ligne de mire l'instauration des Etats unis d'Afrique. Plusieurs de ces CER ont mis en place des Cours de justice pour régler des différends relatifs aux violations des traités et actes des CER (principalement aux portées économiques et monétaires) par un Etat partie.

Ces Cours de justice peuvent être amenées à connaître des violations des droits de l'Homme commises par un Etat partie. En effet, certaines d'entre elles ont une compétence implicite à cet égard. Pour exemple, les Cours de justice de la SADC (§3) et de l'EAC (§2) ont compétence pour tous litiges concernant l'application des Traités constitutifs des Communautés, ces derniers engageant les Etats au respect des droits garantis par la Charte africaine155(*). La cour de justice de la CEDEAO elle, a un mandat clair et explicite en matière des droits de l'homme. (§1)

§1. Le mandat en matière des droits de l'homme de la CJCEDEAO

La CJCEDEAO dispose d'un mandat clair et explicite en matière de droits de l'homme comme on a eu à le démonter dans les lignes qui précédent. C'est d ans ce sens que l'article 3 littera d du Protocole additionnel (A/SP.1/01/05) du 19 janvier 2005 qui amende l'article 9 de l'ancien Protocole dispose : « La Cour est compétente pour connaître des cas de violation des droits de l'Homme dans tout Etat membre ».

En tant que cour des droits de l'homme, la CJCEDEAO n'a pas hésité de recevoir des requêtes émanant des individus à des conditions même plus souples que celles retenues par la Cour africaine quant à ce.

On remarque que la CJCEDEAO est plus ouvertes aux individus ouverte et que les conditions de leur recevabilité tiennent moins à la qualité de leur auteur de même qu'à la qualité du défendeur ainsi qu'à l'épuisement des recours internes.

Dans ce sens, l'article 4 du Protocole additionnel de 2005 amendant l'article 10 de l'ancien Protocole dispose : « peuvent saisir la cour...1. Tout Etat membre et, a moins que le Protocole n'en dispose autrement, le Secrétaire Exécutif, pour les recours en manquement aux obligations des Etats membres ; 2. Tout Etat membre, le Conseil des Ministres et le Secrétaire Exécutif pour les recours en appréciation de la légalité d'une action par rapport aux textes de la Communauté ; 3. Toute personne physique ou morale pour les recours en appréciation de la légalité centre tout acte de la Communauté lui faisant grief ; 4. Toute personne victime de violations des droits de l'homme... 5. Tout membre du personnel des institutions de la Communauté après épuisement sans des recours prévus par le Statut et le Règlement du personnel de la Communauté ; 6. Les juridictions nationales ou les parties concernées, lorsque la Cour doit statuer a titre préjudiciel sur l'interprétation du Traite, des Protocoles et Règlements ; les juridictions nationales peuvent décider elles-mêmes, ou a la demande d'une des parties au différend, de porter la question devant la Cour de Justice de la Communauté pour interprétation ».

Dans la perspective de cette disposition la Cour a eu à recevoir des requêtes opposant des individus à des Etats156(*), opposant des individus à d'autres individus157(*) et d'autres encore opposant des individus à des organisations internationales ou à leurs institutions158(*).

Dans les lignes qui suivent nous allons analyser ces différentes affaires seulement au fond parce qu'une analyse quant à la procédure à déjà été faite sous la deuxième section du premier chapitre de ce travail.

A. Affaire Hissein Habre C. Sénégal

Monsieur Hissein Habré, ancien Président de la République du Tchad, a saisi la Cour de céans aux fins de voir constater que l'Etat du Sénégal, a commis des violations des droits de l'homme  à son égard à travers le non respect des certains principes juridiques fondamentaux.

Sur les violations des droits de l'homme liées à l'existence d'une procédure contre Monsieur Hissein Habré la Cour constate qu'en substance ces violations alléguées par le Requérant sont liées à une hypothèse et permettent à la Cour de dire qu'elles ne sont que potentielles159(*).

Sur la violation liée à l'interprétation du Protocole sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance, la Cour estime que s'agissant de manquement à une obligation communautaire par un Etat membre, le Requérant étant une personne physique, n'est pas habilité à saisir la Cour au terme de l'article 10 du Protocole Additionnel; qu'il échet de rejeter le grief allégué par Monsieur Hissein Habré160(*).

Sur la violation liée au recours effectif, La Cour conclut que la privation alléguée par Monsieur Hissein Habré de n'avoir pas pu bénéficier de la possibilité du contrôle de constitutionnalité de la loi dont il estime être la source de la violation de ses droits de l'homme, ne peut s'analyser comme un droit au recours effectif ; car le droit au recours effectif tel qu'envisagé par le Requérant ne peut prospérer dans la présente action et la Cour rejette ce grief161(*).

Sur la violation liée à la séparation des pouvoirs et à l'indépendance de la justice, La Cour est d'avis que le principe de la non séparation des pouvoirs n'est pas en lui-même  une violation des droits de l'homme si aucune conséquence de cette non séparation des pouvoirs ne porte atteinte à un droit spécifique de l'homme protégé par les instruments internationaux et elle estime qu'en l'espèce la simple allégation de l'immixtion des pouvoirs exécutif et législatif dans le pouvoir judiciaire de l'Etat du Sénégal tirée de la modification de sa Constitution et de sa loi pénale n'est pas constitutive d'une violation d'un droit de l'homme spécifique de Monsieur Hissein Habré si cela ne présente aucun caractère de violation de l'indépendance de la justice, auquel cas la Cour conclut que cet argument ne peut prospérer162(*).

Sur la violation tirée du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale, la Cour après avoir analysé la mandat confié au Sénégal par l'UA et particulièrement l'expression juridiction complète contenu dans ce mandat, la Cour ordonne au Sénégal le respect du principe absolu de non rétroactivité163(*);

La CJCEDEAO rejette toutes autres demandes de Monsieur Hissein Habré comme étant inopérantes à l'exception de la demande sur la non rétroactivité, l'existence des procédures de nature à porte des griefs aux droits de Monsieur Habré et appelle pour cela la Sénégal à se conformer au principe de chose jugée, enfin la Cour dit que le mandat reçu par le Sénégal de l'Union Africaine lui confère plutôt une mission de conception et de suggestion de toutes modalités propres à poursuivre et faire juger dans le cadre stricte d'une procédure spéciale ad hoc à caractère international telle que pratiquée en Droit International par toutes les Nations civilisées164(*).

B. Affaire Mani Hadidjatou C. Niger

La requérante fait grief à la République du Niger d'avoir violé l'article premier de la Charte africaine, aux termes duquel « Les États membres de l'Organisation de l'Unités Africaine, parties à la présente Charte, reconnaissent les droits, devoirs et libertés énoncés dans cette Charte et s'engagent à adopter des mesures législatives ou autres pour les appliquer. ». De ce que le Niger n'a pas pris les mesures visées supra, alors que l'article premier revêt un caractère obligatoire à l'endroit des États membres, découlent toutes les autres violations invoquées. En effet, les dispositions de l'article 1er de la Charte signifient que les États parties reconnaissent les droits par elle proclamés et entreprendront d'adopter les lois ou toutes autres mesures afin de leur donner plein effet.

- sur l'existence d'une discrimination sur le sexe et la condition sociale

Ce grief tiré de la discrimination n'est, selon la Cour, "pas imputable à la République du Niger puisqu'elle émane plutôt de El Hadj Souleymane Naroua qui n'est pas partie à la présente procédure. Par conséquent, la Cour conclut que ce moyen est inopérant" (§71).

Pourtant, dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme peut être appréhendée à l'aune du principe de non-discrimination de l'article 14 CEDH dès lors que l'Etat est passif face à cette situation.

- sur l'existence de l'esclavage subi par la requérante:

Le grief était fondé sur la violation de l'article 5 de la Charte africaine, ainsi que d'autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'Homme, lesquels édictent une interdiction absolue de l'esclavage. En effet, « la prohibition de l'esclavage est l'un des rares exemples de norme universellement considérée comme faisant partie de l'ordre public international contemporain, voire comme norme de jus cogens ».

La CJCEDEAO rappelle la définition de l'esclavage donnée par la Convention SDN relative à l'esclavage, et elle énonce les différents instruments internationaux qui font de l'esclavage une violation grave de la dignité humaine, pour l'interdire formellement : « la Convention européenne des droits de l'Homme (art. 4), la Convention interaméricaine (art. 6), le Pacte international sur les droits civils et politiques de 1966, ratifié par la République du Niger (art. 8) font de l'interdiction de l'esclavage un droit intangible, i.e. un droit intangible et absolu ».

À cela on peut rajouter l'article 4 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948 (en dépit de son absence de valeur conventionnelle, mais qui a fortement inspiré notamment les pactes de 1966 et la Conv.EDH), et l'article 7§2, c du statut de la Cour pénale internationale, qui fait figurer depuis 1998 l'esclavage au nombre des crimes contre l'humanité.

Enfin et surtout, la Cour rappelle que l'esclavage est une infraction au sens du code pénal nigérien, depuis une loi du 13 juin 2003. Face aux arguments développés par l'État du Niger, selon lequel l'esclavage dans ce pays serait réduit au statut de survivance, et que les vicissitudes inhérentes au mariage entre la requérante et son maître prévaudraient sur sa condition servile, la Cour oppose une affirmation forte : « l'esclavage peut exister sans qu'il y ait torture ; même bien nourri, bien vêtu et confortablement logé, un esclave reste un esclave, s'il est illégalement privé de sa liberté par la force ou la contrainte. On pourrait éliminer toute preuve de mauvais traitement, oublier la faim, les coups et autres actes de cruauté, le fait reconnu de l'esclavage, i.e. du travail obligatoire sans contrepartie demeurerait. Il n'y a pas d'esclavage bienveillant. Même tempérée par un traitement humain, la servitude involontaire reste de l'esclavage. Et la question de savoir la nature du lien entre l'accusé et la victime est essentielle ». La CJCEDEAO, par cette référence adopte une conception plus large de l'esclavage que ne l'ont fait d'autres juridictions internationales165(*).

§2. La compétence de la CJEAC à connaitre des droits de l'homme

En matière des droits de l'homme, la cour de justice l'EAC ne dispose pas d'un mandat aussi clair que celui de la cour de la CEDEAO. La Cour de justice d'Afrique de l'Est a cependant un jugement très progressif des droits de l'homme à son crédit. Bien que la juridiction explicite en droits de l'homme de la cour reste à mettre en oeuvre, cette dernière a été suffisamment courageuse pour garantir le respect des droits fondamentaux des individus au titre du traité.
C'est ainsi que dans des affaires comme Katabazi and others C. Secratary General of EAC, Attorney General of Uganda and Another, Ariviza C. Kenya, la Cour a été appelée à se prononcer sur les droits de l'homme.

Dans la première affaire l'EACJ a été saisie d'une requête contre le Secrétaire général de l'EAC. Cette requête alléguait la violation des articles 6(d), 7(2) and 8(1)(c) du Traité de l'EAC. A l'appui de ces dispositions le requérant a glissé un argument tiré de l'affaire Constitutionnal Rights Project and Another C. Nigeria. La question fondamentale soulevée dans cette affaire était de savoir si la Cour avait compétence de statuer sur cette requête parce qu'elle allègue des droits de l'homme.

L'EACJ commence par rappeler que bien qu'elle ne dispose pas d'une compétence de statuer sur des allégations des violations des droits de l'homme, elle ne peut certes se priver du rôle d'interprétation qui lui accordé par l'article 27.1 du Traité de l'EAC. C'est ainsi qu'elle va tout d'abord procéder à l'examen de certaines dispositions du Traité notamment les articles 5(1) (d), 6(d), 7(2) and 8(1)(c) et relever que leur contenu portait respectivement sur la rule of law, les principes et objectifs de la communauté est africaine, et l'obligation qui est faite aux Etats de s'abstenir de toutes mesures qui entraverait la réalisation de ces objectifs.

La Cour adjoint à ces éléments la jurisprudence telle que suivie devant la Cour d'appel du Kenya et la Chambre des Lords.

Dans la deuxième affaire, les requérants demandaient à la Cour de constater que la procédure de referendum et la promulgation de la nouvelle constitution Kenyane violaient le traité de l'EAC.

De l'avis des requérants, leurs allégations se fondaient sur les articles 5.1, 6.c et d, 7.2, 8.1.C, 27.1 et 29 du traité de l'EAC, aussi les articles 1, 3, 7.1 et 9.2 de la Charte africaine.

En sus de leur demande, les requérants sollicitent à la Cour de faire injonction au Kenya afin qu'il s'abstienne de tout acte qui entraverait la bonne marche de la présente procédure.

Comme dans l'affaire Katabazi, l'Etat défendeur clamait l'incompétence de la Cour à statuer sur des allégations des droits de l'homme. De l'avis du défendeur, l'EACJ doit se déclarer incompétente parce qu'elle ne peut agir en dehors de la sphère de compétence lui tracée par l'article 27.1.

Après analyse des dispositions de son Règlement intérieur et du Traité de l'EAC, elle parvient à la conclusion qu'elle compétente de connaitre d'une question lui soumise par des ressortissants établi sur le territoire communautaire de l'EAC qui allègue la violation qu'un Etat membre de la communauté a commis des actes ayant violé le traité de l'EAC.

Il est à noter que par rapport à l'affaire Katabazi, dans la présente affaire le requérant s'est basé à la fois sur les dispositions du traité de l'EAC et sur les dispositions de la Charte africaine.

La Cour n'ayant pas encore rendu sa décision quant au fond de cette affaire, nous attendons qu'elle nous éclaircisse sur sa compétence à interpréter la Charte africaine.

Pour clore, nous saluons encore une fois le courage de l'EACJ qui sans mandat clair s'est lancé que le terrain des droits de l'homme et ce en prenant des décisions qui incriminent tantôt les Etats tantôt les institutions de l'EAC. Nous pensons qu'avec l'adoption du futur protocole, la cour verra son rôle accru jusqu'à devenir plus qu'une juridiction à caractère économique et d'intégration, une juridiction des droits de l'homme.

§3. La compétence du TSADC à connaitre des droits de l'homme

Le TSADC attend toujours l'adoption de la Charte devant élargir sa compétence pour connaitre des litiges relatifs aux droits de l'homme. Bien que ce Protocole tarde à venir, le TSADC a déjà eu à se prononcer sur les droits de l'homme dans quelques affaires dont notamment opposant certains ressortissants Zimbabwéen au Zimbabwe. C'est l'affaire Fick and Four Others v Zimbabwe166(*).

Cette affaire porte devant le TSADC le refus du gouvernement zimbabwéen, comme dans tant d'autres affaires contre cet Etat, de donner effet aux décisions prises à son encontre par le TSADC en date du 28 novembre 2008. Les demandeurs avaient requis du tribunal qu'il intime au gouvernement du Zimbabwe l'ordre de protéger les droits de propriété et de possession foncière et de lui interdire de procéder à de nouvelles expulsions de propriétaires fonciers. Les requérants demandent aussi au TSADC de constater la défaillance du Zimbabwe et de faire rapport de cette défaillance au sommet de la SADC. Les requérants se basent ainsi sur l'article 32.4 du Protocole établissant le Tribunal.

Le TSADC après avoir constaté le défaut du gouvernement en cause de donner effet à ses décisions, décide de faire rapport au prochain sommet de la SADC. On pense que comme ce sera le deuxième rapport adressé à ce seul Etat, une certaine pression s'exercera sur le sommet afin qu'il prenne des actions visant le gouvernement zimbabwéen167(*).

Notons que ce rapport n'est pas resté stérile. C'est ainsi que le 25 février 2011, une Haute Cour de l'Afrique du Sud a officiellement reconnu l'applicabilité des décisions du Tribunal de la SADC prononcées en faveur des fermiers dépossédés de leurs terres en vertu de la politique de réforme foncière mise en oeuvre dans le pays.

L'affaire avait été initiée par les fermiers Louis Fick, William Campbell et autres contre le gouvernement du Zimbabwe pour non respect des décisions rendues par le Tribunal de la SADC les 28 novembre 2008 et 5 juin 2009. Le jugement du 5 juin 2009 constatait le refus du gouvernement du Zimbabwe de respecter et d'observer la décision rendue par le Tribunal en date du 28 novembre 2008. Les demandeurs avaient requis du tribunal qu'il intime au gouvernement du Zimbabwe l'ordre de protéger les droits de propriété et de possession foncière et de lui interdire de procéder à de nouvelles expulsions de propriétaires fonciers.

Il s'agit d'une évolution positive tendant à garantir l'application des décisions des cours régionales par les juridictions nationales168(*).

Les droits de l'homme tels qu'appliqués par ces juridictions sous régionales méritent donc une attention toute particulière. Il est à prévoir un éventuel conflit de compétences entre ces juridictions sous régionales avec la jeune cour africaine qui a vocation continentale en matière des droits de l'homme.

Section II : La coexistence des « cours africaines » des droits de l'homme

A priori, la concurrence entre systèmes, et partant entre juridictions ne devrait pas exister. En effet, « chaque juridiction créée est censée opérer dans un espace géographique limité aux contours territoriaux des Etats membres de la Communauté ou de l'Organisation dont elle est l'organe de contrôle juridictionnel ». Mais c'est sans compter avec les chevauchements entre organisations qui génèrent une concurrence territoriale, ainsi qu'avec le processus inexorable d'accroissement des compétences ratione materiae des juridictions qui engendre une concurrence matérielle169(*).

La juridictionnalisation du droit international et l'accroissement sensible du nombre des tribunaux internationaux au cours des quinze dernières années se sont accompagnés d'un essor préoccupant du forum shopping et, au-delà, d'une augmentation des phénomènes de concurrence de procédures contentieuses dans l'ordre juridique international.

La prolifération des juridictions internationales nuit à la cohérence du droit international. Avec l'expansion des juridictions internationales, il y a certes des avantages, mais nous devrons aussi nous interroger sur le risque d'un chevauchement des compétences de ces instances pouvant mener à une possible contrariété de jugements et au forum shopping.

La concurrence matérielle inter-systémique également concerne la capacité des organisations régionales de type économique et de leurs juridictions à intervenir sur le terrain de la protection des droits de l'homme.

§1. La coexistence matérielle des juridictions en droit international

Ainsi, quand on sait que ces organisations ont ou auront à intervenir et à adopter des actes sur des matières identiques, on imagine sans peine le désarroi du justiciable confronté à des législations concurrentes et potentiellement dissonantes. On imagine également sans peine le désarroi du juge national devant lequel deux ou trois obligations internationales s'entrechoqueront. Quel droit fera-t-il primer et quel juge régional saisira-t-il ? Ici, il est patent que la nature des compétences des Cours pourra influer sur ce dilemme170(*). Au niveau européen la prolifération des juridictions s'est traduite en concurrence entre la cour de justice des communautés européennes et la Cour de Strasbourg. L'Afrique n'est pas en reste avec ce phénomène car il remporte la palme de la prolifération avec plus d'une demi-douzaine d'institutions régionales et sous-régionales.

Ces chevauchements se traduisent par une appropriation subreptice par les Cours des systèmes économiques, de compétences en matière de droits de l'homme. Si on garde à l'esprit le fil rouge que constitue le précédent européen, on réalise que toute juridiction qui organise, de façon plus ou moins élaborée, l'accès des particuliers à son prétoire, peut, à terme, être amenée à se prononcer sur une question de protection des droits de l'homme car « nulle cloison étanche » ne sépare la sphère économique (i.e. libre circulation des personnes, liberté d'établissement, égalité de traitement et principe de non discrimination) de la sphère de la protection des droits. La jurisprudence des Cours de Justice des ensembles régionaux peut à terme toucher cette question d'autant, qu'en réalité, rares sont aujourd'hui les traités institutifs des organisations de type économique qui n'opèrent pas de renvois plus ou moins précis aux droits de l'homme. A signaler toutefois qu'un seul système, le centraméricain, prohibe tout empiètement de la Cour SICA sur les compétences de la CIDH selon l'article 25 de l'Accord de Panamá : la précision n'est pas inutile quand l'amplitude des compétences de la Cour centraméricaine laissait au contraire présager un empiètement inévitable de sa jurisprudence sur celle de la CIDH (article 22 f) notamment). Ce texte symbolique est la démonstration éclatante qu'aujourd'hui, au regard d'un contexte marqué depuis le Sommet de Vienne (1993) par la « prégnance des droits de l'homme » dans la rhétorique internationale, les ensembles économiques ne peuvent pas rester rivés sur la seule donne mercantile. Pour reprendre l'heureuse formule de Guy Braibant, ils aspirent tous, tôt ou tard, à devenir des « fonds communs de valeurs », après n'avoir été que de simples « fonds communs de placement »171(*).

§2. La coexistence matérielle des cours africaines des droits de l'homme

Le glissement jurisprudentiel du champ économique vers le champ de la protection des droits pourrait également se réaliser suite à une extension significative de compétences de l'organisation régionale. Le cas de la CEDEAO, de la SADC et de l'EAC est significatif à cet égard.

D'aucun affirme que les compétences des Cours de justice des CER en matière de protection des droits de l'Homme ont été acquises à un moment où la mise en place de la Cour africaine était encore hypothétique. Il s'agissait donc de permettre à des instances supra nationales de palier les déficiences de certaines juridictions nationales en l'absence d'un mécanisme continental de protection des droits de l'Homme. A présent, il est difficile d'entrevoir les relations qui existeront entre les Cours de justice des CER et la Cour africaine.

La coexistence de ces juridictions pourrait amener des différences d'interprétation de la Charte africaine et ainsi entraîner une protection différente de ces droits. Cette situation amènera-t-elle les individus et ONG à choisir leur recours supra national en fonction des jurisprudences des différentes juridictions?

A cette question il faut dire qu'aucun lien organique ne relie la Cour africaine aux autres cours régionales. Les cours de justice sont ainsi amenées à connaitre des litiges en matière des droits de l'homme en même temps que la Cour africaine.

On peut à cet égard se demander, si saisie d'un litige en matière de protection des droits de l'Homme, les Cours de justice des CER auront la volonté de se dé-saisir au profit de la Cour africaine. La Cour africaine autorisera-t-elle une procédure, en se fondant sur l'article 56 du Protocole qui permet aux organisations internationales africaines de saisir la Cour? Par ailleurs, un individu ou une ONG pourraient-ils saisir la Cour africaine d'une décision prise en leur défaveur par une Cour de justice d'une CER, ou bien la Cour considérera-t-elle qu'une telle procédure est contraire au principe ne bis in idem qui empêche un tribunal de se prononcer sur une affaire qui a déjà été jugée sur les mêmes fondements?

Autant de questions qui ne pourront trouver de réponses que par des décisions jurisprudentielles172(*).

Disons d'emblée que l'égocentrisme juridictionnel concerne l'attitude instinctive des juridictions à défendre leur « pré-carré », tant institutionnel que matériel. Cette logique, consubstantielle au phénomène institutionnel -- y compris judiciaire -- est, à mon sens, démultipliée s'agissant des juridictions régionales. Elle est poussée à son paroxysme à l'intérieur d'ensembles régionaux où la tension est perceptible, le rapprochement géographique donnant un relief particulier à l' « affrontement » : le cas européen est topique sur le sujet173(*).

Dans le cadre africain, toutes ces trois juridictions sous régionales ayant vocation, dans le cadre de leurs compétences matérielles et territoriales respectives, à connaitre des affaires touchant directement ou indirectement à la protection des droits de l'homme, il se posera inévitablement le problème de comptabilité de leurs procédures et jurisprudences respectives avec celles de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples.174(*) C'est notamment le cas avec l'affaire Habré qui était pendant à la fois devant la Cour africaine et devant la CJCEDEAO. On peut ajouter à cela le fait que ces différentes juridictions statuent conformément aux clauses de la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples.

on s'imagine sans peine le désarroi du justiciable confronté à des législations concurrentes et potentiellement dissonantes. On imagine également sans peine le désarroi du juge national devant lequel deux ou trois obligations internationales s'entrechoqueront. Quel droit fera-t-il primer et quel juge régional saisira-t-il ?

Ce problème se résoud en droit international par la coordination qui passe par la coopération de ces différentes juridictions. En effet, un certain courant doctrinal estime que la création d'une culture judiciaire de coopération a fini par émerger, le juge national prenant à coeur son office de juge communautaire de droit commun. Cette culture nécessite l'existence d'un système marqué par un minimum de centralisation. Celle-ci existe dans les systèmes d'intégration ; elle fait cependant cruellement défaut à l'échelle universelle. Tant que le système international ne sera pas marqué, de jure, par un plus fort degré de centralisation, tant que la CIJ ne s'extirpera pas d'une politique judiciaire marquée par une frilosité symptomatique d'un droit international révolu, il n'y a aucune raison, d'un point de vue institutionnel, pour que les autres juridictions internationales, régionales et universelles spécialisées, doivent révérence et allégeance à la CIJ175(*).

Par ailleurs, Ces chevauchements matériels ne sont cependant pas synonymes ipso facto de divergences. Surtout, sur la base du phénomène de cross fertilization, ils peuvent constituer un puissant point de dialogue entre les juges.

Si les dialogues des juges ont toujours été occasionnées par des renvois préjudiciels, intervenant ainsi en aval, en Afrique, la rencontre est intervenue en aval afin de préserver, sans paraphraser la Charte des NU, les futurs justiciables africains du fléau du forum shopping qui en l'espace d'une vie humaine a placé autant de justiciables européens dans le désarroi confrontés à des législations concurrentes instituant la cour de Luxembourg et celle de Strasbourg.

C'est ainsi qu'à l'initiative de la Cour africaine, il s'est tenu à Arusha le 06 octobre 2010 le Colloque sur les Cours africaines des droits de l'homme et des institutions similaires avec pour objectif général d'initier le dialogue judiciaire entre ces organisations, en vue d'explorer les voies et moyens d'assurer la coopération et la coordination, notamment l'échange d'informations et d'expertise entre tous les organismes judiciaires et quasi-judiciaires continentaux et sous-régionaux chargés de la promotion et de la protection des droits de l'homme en Afrique.

Outre la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, le Comité africain des experts sur les droits et le bien-être de l'enfant , et des institutions judiciaires et quasi-judiciaires de droits de l'homme créées au niveau continental par l'Union africaine, le Colloque a vu la participation de représentants de haut niveau de la Cour de justice de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, du Tribunal de la Communauté de développement de l'Afrique austral et de la Cour de justice de l'Afrique de l'Est. Le Forum des Présidents des Cours suprêmes de la Communauté de l'Afrique de l'Est a été également représenté à ce colloque.

Après trois journées de discussions approfondies et constructives, les participants ont élaboré un communiqué final où ils ont convenus de ce qui suit :

- Les participants ont réitéré leur engagement en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme et des peuples dans le contexte de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (la Charte africaine), le principal instrument continental de droits de l'homme et d'autres instruments régionaux et internationaux pertinents de droits de l'homme.

- Étant donné l'influence du droit international en matière de droits de l'homme sur l'application à l'échelon national des droits de l'homme et au regard du fait que les normes et décisions internationales ne deviennent véritablement pertinentes qu'une fois qu'elles sont acceptées et mises en oeuvre à l'échelon national, les participants ont souligné l'importance d'associer les institutions judiciaires nationales au dialogue sur la promotion et la protection des droits de l'homme sur le continent. A cet effet, les participants ont; aux fins d'élargir le dialogue; recommandé l'organisation de rencontres similaires auxquelles seront invitées toutes les institutions judiciaires sous-régionales et nationales.

- Les participants reconnaissent que leurs différentes institutions sont partie intégrante du système de protection des droits de l'homme en Afrique et que leur coexistence aux niveaux continental, sous-régional et national constitue une condition sine qua non pour la coordination et le renforcement de la promotion et de la protection des droits de l'homme et des peuples sur le continent. À cet égard, les participants se sont engagés à partager les informations sur les décisions pouvant être utilisées par les autres dans le cadre de leur travail en vue de constituer une riche jurisprudence africaine sur les droits de l'homme. Ils ont également souligné la nécessité de mettre en place des mécanismes pour l'échange approprié d'informations pour faciliter l'élaboration d'une jurisprudence et approche cohérentes de droits de l'homme, de façon à éviter qu'une même affaire fasse l'objet d'examen par deux ou plusieurs juridictions en même temps.

- Les participants se sont félicités de ce que le Colloque ait offert un cadre utile pour le partage d'expériences et d'informations, et encouragent la coopération entre les institutions de droits de l'homme en Afrique afin d'élaborer une jurisprudence cohérente de droits de l'homme, ainsi que pour examiner les défis qui se posent aux juges, aux commissaires et autres experts de droits de l'homme dans la protection des droits de l'homme en Afrique. À cette fin, il a été convenu d'institutionnaliser le colloque et de le tenir tous les deux ans.

- Les participants ont exprimé leur préoccupation quant aux difficultés que rencontrent les citoyens africains ordinaires dans les efforts qu'ils déploient pour accéder à la justice tant au niveau national qu'international. À cet effet, les participants ont souligné la nécessité de mettre en place des systèmes adéquats et durables d'assistance juridique à tous les niveaux.

- Les participants ont exprimé leur préoccupation quant aux difficultés que rencontrent les citoyens africains ordinaires dans les efforts qu'ils déploient pour accéder à la justice tant au niveau national qu'international. À cet effet, les participants ont souligné la nécessité de mettre en place des systèmes adéquats et durables d'assistance juridique à tous les niveaux. décisions, la Cour africaine, la Commission africaine, le Comité africain sur les droits et le bien-être de l'enfant, la Cour de justice de la CEDEAO et le Tribunal de la SADC se sont engagés à collaborer afin de renforcer l'exécution de leurs décisions et de partager des informations sur les bonnes pratiques dans ce domaine.

- Aux fins de renforcer la coopération et la constitution de réseaux ainsi que de préparer le prochain colloque, les participants ont convenu que les bureaux des institutions participantes se rencontrent au moins une fois par an. La Cour africaine s'est vu confier le rôle de secrétariat temporaire avec pour mission, notamment d'explorer la possibilité d'abriter une base de données, un portail de communication et un site Internet pour le partage d'informations, et de préparer le prochain colloque.

- Tout en reconnaissant la nécessité des échanges de personnel, les participants ont souligné que ces échanges devraient être dictés par les besoins et la pertinence. A cette fin, les participants ont convenu que chaque institution établisse ses priorités en matière d'échange et les communique aux autres. Les participants ont également souligné l'importance du partage d'informations, et à cet égard, exhorté les institutions participantes à améliorer davantage leur site internet et à établir des liens avec les autres institutions177(*).

CONCLUSION GENERALE

Les individus jouissent du droit de saisine devant la Cour africaine mais cela doit se faire en respectant les prescrits de l'article 6.2 du Protocole. Ces conditions sont moins rigides que celles prévues dans les systèmes européen et américain de contrôle mais plus rigoureuses que celles prévues dans la Charte pour les requêtes étatiques. Elles apparaissent encore plus difficiles que celles prévues pour les cours sous régionales africaines ; celles-ci permettant un accès direct même sans avoir épuisé les recours interne.

Après s'être rassuré que sa requête remplissait les conditions requises pour sa recevabilité, l'individu ou l'ONG doit se poser la question sur les possibilités lui offertes pour saisir la Cour africaine. Pour cela, le Protocole lui donne un accès direct si l'Etat qu'il met en cause est partie au protocole et par là a fait la déclaration facultative prévue qui reconnait à la Cour de connaitre des requêtes individuelles adressées à son égard.

Ce sont les Etats qui décident de souscrire ou non à la déclaration d'acceptation de juridiction obligatoire des Cours de protection des droits de l'homme. La déclaration facultative, révolue du système européen, est toujours le vestige puissant des souverainetés américaines et souverainetés africaines. Des citoyens africains ne tardent pas à la qualifier de contraire aux droits que la Cour est appelée à protéger.

Les citoyens africains ne pouvant pas saisir directement la Cour il leur est offert une possibilité organisée par le Protocole pour accéder à la Cour. Il s'agit du contour par la commission africaine à la seule condition que l'Etat en cause ait ratifié le Protocole.

En dehors de ces deux mécanismes prévus par le Protocole, nous avons envisagé d'autres qui peuvent être compatibles avec l'esprit du Protocole. C'est le cas de la juridiction de la Cour au cas par cas sans que l'Etat en cause n'ait à se lier pour l'avenir que comme il déposerait la déclaration facultative. C'est seulement à l'échec de ce moyen que nous avons proposé qu'on peut sensibiliser les Etats à la ratification du Protocole et au dépôt de la déclaration de l'article 34.6 mais aussi à la révision du Protocole portant suppression de l'article 34.6.

Bien qu'en vigueur, la Cour africaine ne jouit pas du monopole de protection des droits de l'homme sur le continent.

Il n'existe plus de doute sur le rôle joué par les cours de justice des CER dans la protection des droits de l'homme. Leur présence à côté de la Cour africaine doit être conçue plus comme un apport de taille seulement si la Cour africaine qui a plus de notoriété sur le plan continental continue à prendre le devant en développant un dialogue permanent avec ces Cours sous-régionales. Ainsi, une coexistence matérielle est indiquée pour préserver des désarrois aux justiciables et aux juges internes qui ne sauront plus, en cas de concurrence matérielle, à quelle législation se confier.

BIBLIOGRAPHIE

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10. Le Règlement intérieur final de la Cour africaine, Septembre 2010

11. Protocole portant création de la Cour Africaine de justice et des droits de l'homme

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13. Protocole portant création du Tribunal de la SADC et ses Règles de Procédures

14. le Traité établissant la Communauté de l'Afrique de l'est

II. OUVRAGES, ARTICLES, REVUES

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2. ALLIVY KELLY Delphine d', « Le juge africain est entré dans l'Histoire (Cour de justice de la CEDEAO, 27 octobre 2008, Hadijatou Mani Koraou c/ Niger) » in CPDH, publié le 10 mai 2009.

3. Association pour la prévention de la torture, La Cour africaine des droits de l'Homme et des peuples : présentation, analyse et commentaire du Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples créant la Cour, Genève : Association pour la prévention de la torture, 2000, 28 p.

4. BAKER DJOUMESSI KENFACK Sofie, « L'application de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples par les juridictions sous-régionales : regards croisés sur les affaires Koraou C. République du Niger et Hissein Habre C. République du Sénégal devant la Cour de justice de la CEDEAO » Institut des relations internationales du Cameroun

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9. Centre for Human Rights (Pretoria)/Institut pour les droits humains et le développement en Afrique (Banjul), Recueil africain des décisions des droits humains, 2003, Pretoria : P. University Law Press, 2010, 203 P.

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III. THESES DE DOCTORAT, MEMOIRES DES ET LICENCE

1. ETOA Laurence-Herve, L'avènement de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples : enjeux et défis ?, mémoire de recherche pour l'obtention du diplôme d'université de 3ème cycle en Droit public, université de paris II, Panthéon Assas, 2004-2005

2. OUGUERGOUZ F., La charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Portée historique, Thèse de doctorat, 1999, Institut des hautes études de Genève, Genève

3. WALUPAKAH P., La cour africaine des droits de l'homme et des peuples : le problème du contrôle juridictionnel des droits de l'homme en Afrique, U.C.B., Mémoire de Licence en Droit public, 2007-2008

IV. DISCOURS, RAPPORTS, CONFERENCES ET AUTRES DOCUMENTS

1. http://www.echr.coe.int/Fr/discours/Wildhaberdiscours.htm. Discours de M. Luzius Wildhaber, Président de la cour européenne des droits de l'homme à l'audience solennelle de la cour européenne à l'occasion de l'ouverture de l'année judiciaire le jeudi 22 janvier 2004

2. http://www.echr.coe.int/Fr/discours/Cancado Trindadediscours.htm. discours de Antonio Cancado Trindade Augusto, président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme; «le développement du droit international des droits de l'homme à travers l'activité et les jurisprudences des cours européenne et interaméricaine des droits de l'homme, Strasbourg, le 22 janvier 2004

3. Cour européenne des Droits de l'Homme, « Rapport annuel de 2003, conseil de l'Europe : évolution ultérieure de la Convention européenne de 1950 », Greffe de la Cour européenne des Droits de l'Homme, Strasbourg, 2004.

4. EBOBRAH Solomon, « L'application de la Charte africaine par les organisations africaines sous-régionales : des gains, des peines et le futur », thème exposé en marge de la conférence 30 ans de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples : Retro perspective, Auditorium, Faculté de Droit, Université de Pretoria, 11 juillet 2011, Panel 2, 10h 45 - 11h 20

V. SITES INTERNET OU WEBOGRAPHIE

1. www.africancourtcoalition.org

2. www.african-court.org

3. www.apt.org

4. www.Droishumains.org

5. www.Droits-fondamentaux.org

6. www.Echr.coe.Int/FR

7. www.fidh.org

8. www.google.fr

9. www.revue.df.org

10. www.coe.int

11. www.claiminghumanrights.org

12. www.icj-cij.org

13. www.sadc.int

14. www.eac.int

15. www.eccjecowas.int

TABLE DES MATIERES

O. INTRODUCTION 1

O. 1 PROBLEMATIQUE 1

0.2 HYPOTHESES 8

PLAN SOMMAIRE 11

Chapitre I. CONDITIONS DE RECEVABILITE DES RECOURS INDIVIDUELS DANS LE SYSTEME INTERAFRICAIN DE CONTROLE JUDICIARE DES DROITS DE L'HOMME 11

Section Ière : les conditions de recevabilité des requêtes devant la Cour 11

§1: Les conditions générales de recevabilité 12

I. Conditions relatives à la compétence de la Cour 12

A. La requête doit émaner d'un individu ou d'une ONG ou de leurs représentants 12

B. La requête doit être dirigée contre un Etat partie qui a fait une déclaration spéciale 13

II. Les autres conditions 16

section 2. Les conditions spécifiques de l'article 6. 2 du Protocole 16

§1. La requête est recevable si elle indique l'identité de son auteur 17

§2. La requête est recevable si elle est compatible avec l'Acte constitutif de l'UA et la Charte 18

§3. La requête est recevable si elle ne contient pas des termes outrageants à l'égard de l'Etat mis en cause, de ses institutions ou de l'UA 22

§4. La Requête doit être documentée 23

§5. Condition de l'épuisement des préalable des voies de recours 24

A. Le principe 24

B. Exceptions ou tempéraments à la règle de l'épuisement des voies de recours internes.........................................................................................................25

1er tempérament : Lorsque la Cour africaine considère que les recours internes sont inapplicables ou inefficaces 28

2ème tempérament : ... les violations sont graves et massives 28

3ème tempérament : l'état d'urgence entrave l'administration de la justice 29

4ème tempérament : l'existence de clauses dérogatoires empêche tout recours 29

5ème tempérament : l'épuisement des recours internes n'est pas « logique » 30

6ème tempérament : l'accès à la justice est inéquitable 30

7ème tempérament : les recours internes sont inefficaces ou inaccessibles 31

8ème tempérament : La requête est recevable si les procédures internes sont anormalement prolongées 31

§6. La requête est recevable si elle est transmise à la Cour dans un délai raisonnable 32

§7. La requête est recevable si la prétendue violation n'a pas été réglée 33

1. La requête est recevable si la même affaire n'a pas été réglée par une autre instance internationale 33

3. La requête est recevable même si l'affaire a été soumise devant une autre instance 34

§8. La Cour rejette la requête si elle est manifestement mal fondée 35

Section II : les conditions de recevabilité des requêtes devant les Cour de justices des CER 36

Introduction 36

§1. Recevabilité des requêtes individuelles devant la Cour de Justice de la CEDEAO 37

A. Conditions résultant des traités de la CJEDEAO 37

§2. Les conditions de recevabilité devant le Tribunal de la SADC 44

§3. La recevabilité des requêtes individuelles devant la cour de justice de l'EACJ 47

Conclusion partielle 51

Chapitre deuxième : L'ACCES DES INDIVIDUS A LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L'HOMME ET DES PEUPLES 52

Introduction 52

Section I : Les recours individuels devant la CIJ et les autres systèmes régionaux de droits de l'homme 53

§1. Les allégations des individus devant la CIJ 53

§2. Les recours individuels devant la Cour européenne 54

§3. La cour interaméricaine des droits de l'homme 57

Section II : Les recours individuels devant la cour africaine des droits de l'homme et des peuples 58

Introduction 58

§1. L'accès des individus et ONG à la Cour africaine 60

Section III : La juridiction de la Cour africaine au cas par cas 67

§1. Le forum prorogatum en droit international 68

Section IV. Eventuelle suppression de la Commission africaine 73

Section V. La sensibilisation des Etats africains au dépôt de la déclaration facultative 74

Section VI. Révision du Protocole et par là suppression de son 34.6 75

Section VII. études pratique de quelques affaires soumises directement par les individus à la cour africaine 77

§1. Requêtes ayant fait l'objet d'arrêt ou d'ordonnance de la Cour africaine 78

§2. Requêtes rejetées de plano 81

§3. Requêtes offrant perspective d'examen par la Cour 83

Conclusion partielle 86

Chapitre III : LE GLISSEMENT DES CER AFRICAINES DU CHAMP ECONOMIQUEE VERS LE CHAMP DELA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME 87

Section Ière : Les litiges des droits de l'homme devant les Cours de justice des CER traitant des DH 87

§1. Le mandat en matière des droits de l'homme de la CJCEDEAO 88

§2. La compétence de la CJEAC à connaitre des droits de l'homme............................93

§3. La compétence du TSADC à connaitre des droits de l'homme 95

Section II : La coexistence des « cours africaines » des droits de l'homme 96

§1. La coexistence matérielle des juridictions en droit international..................................97

§2. La coexistence matérielle des cours africaines des droits de l'homme 98

CONCLUSION GENERALE 103

BIBLIOGRAPHIE 104

TABLE DES MATIERES 111

* 1 Karel VASAK cité par Keba Mbaye : Les Droits de l'homme en Afrique, 2ème édition. P.

* 2 Laurence-Herve ETOA, L'avènement de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples : enjeux et défis ?, mémoire de recherche pour l'obtention du diplôme d'université de 3ème cycle en Droit public, université de paris II, Panthéon Assas, 2004-2005, P. 8

* 3 Au sens d'un « obiter dictum » de la CIJ dans l'affaire Barcelona Traction, Light and Power Company Limited, Rec. 1970, arrêt du 05 février 1970 (Belgique C. Espagne)

* 4 MUTOY MUBIALA cité par Ephraïm KAHAMIRE in Les droits de l'homme dans la région des Grands Lacs. Réalités et illusions, (S/Dir MUGANGU Séverin), FIUC, Bruylant academia, UCB- CEGEC, P. 77

* 5 EUSTATHIADES M. C. Th., «  la mise en oeuvre des droits de l'homme sur le plan international » in Annales de la faculté de droit et des sciences politiques et économiques de Strasbourg, La protection internationale des droits de l'homme dans le cadre européen Paris, Dalloz, 1961, P.217.

* 6 L-H. ETOA, Op. Cit.,P. 11

* 7 Le Protocole portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme (ci-après le Protocole) été adopté le 9 juin 1998 à Ouagadougou, avant d'entrer en vigueur le 25 juin 2004. Près de deux ans plus tard, la Conférence de l'Union décidait nommait les juges (V. DOC UA/Conférence de l'Union, Décision sur l'élection des membres de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, Assembly/AU/dec.100 (VI), 29 janvier 2006, P.1

* 8 Voir article 10 (d) du protocole relatif à la Cour de justice de la CEDEAO (signé le 6 juillet 1991) entré en vigueur le 5 novembre1996 tel qu'amendé en 2005, article 15 du Protocole portant création du Tribunal de la SADC et ses Règles de Procédures, le Traité établissant la Communauté de l'Afrique de l'est qui prévoit la mise en place de la Cour et qui dispose dans ses règles de procédures adoptées en 2004 que la cour peut être saisie par toute personne physique ou morale.

* 9 Notons à titre indicatif les prescrits de l'article 6.2 du protocole à la Charte créant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples par renvoi à l'article 56 de la Charte, l'article35 de la Convention européenne des droits et libertés fondamentaux, de l'article 46 de la Convention interaméricaine des droits de l'Homme...

* 10 De celle-ci on peut noter un regain de faveur de ces recours comme le montrent quelques affaires récentes mettant notamment en cause les jugements et condamnations à mort prononcées contre des étrangers par les juridictions des Etats-Unis d'Amérique : dans l'affaire LaGrand ou dans l'affaire Avena et cinquante quatre autres ressortissants mexicains ou encore dans la récente affaire Diallo contre la République démocratique du congo.

* 11 Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. « Guide pratique ». ; 2004, P. 1

* 12 Le nombre de requêtes a atteint 57100 en 2009, une augmentation de plus de 500 % par rapport à 2000. Cf. FIDH, Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, édition de 2010 téléchargé sur www.fidh.org consulté le 15/11/2011

* 13 Voir affaire Michelot Yogogombaye C. République du Sénégal, arrêt rendu le 15 décembre 2009 sur requête N°001/2008

* 14 Dans deux affaires importantes, concernant la détention arbitraire d'un journaliste gambien in re Chief Ebrimah Manneh c/ la République de Gambie et la condition de servilité d'une nigérienne in re Dame Hadijatou Mani Koraou contre la République du Niger.

* 15 Dénuée d'un mandat sur les droits de l'homme aussi clair que celui de la cour de la CEDEAO, la Cour de justice d'Afrique de l'Est a cependant un jugement très progressif des droits de l'homme à son crédit.

* 16 Cf. affaire du Forum des ONG zimbabwéennes des droits de l'homme C. Gouvernement du Zimbabwe.

* 17 Association pour la Prévention de la Torture, « la cour africaine des droits de l'homme et des peuples ». Présentation, analyse et commentaire du Protocole à la Charte africaine créant la Cour, Genève, 1999, P.4

* 18 Le consentement de l'Etat est la condition sine qua non à la compétence de toute juridiction internationale. Cf. opinion individuelle du juge Fatsah OUGUERGOUZ jointe à l'arrêt Yogogombaye C. République du Sénégal, P. 5. Voir aussi Cour permanente de justice internationale dans son Avis consultatif du 23 Juillet 1923, série B, P.27  : « Il est bien établi en droit international qu'aucun Etat ne saurait être obligé de soumettre ses différents avec les autres Etats soit à la médiation soit à l'arbitrage, soit enfin à n'importe quel procédé de solution pacifique, sans son consentement »

* 19 Cf. les articles 39 et 52 du Règlement intérieur final de la cour tel qu'il remplace le Règlement intérieur intérimairede la Cour du 20 juin 2008, suite à l'harmonisation des Règlements intérieurs intérimaires de la Cour et de la Commission effectuée au cours de leurs réunions en Juillet 2009 à Arusha, Octobre 2009 à Dakar et Avril 2010 à Arusha.

* 20 Cf. Affaire du Haut Congrès katangais C. Zaire

* 21 FIDH, Op. Cit. P.44

* 22 Affaire Michelot YOGOGOMBAYE C. République du Sénégal au paragraphe 39 de l'Arrêt rendu le 15 décembre 2009 sur Requête N°001/2008

* 23 Fatsah OUGUERGOUZ, Opinion individuelle jointe à l'arrêt Yogogmbaye C. République du Sénégal, P. 1-2, § 5-12 de l'exposé.

* 24 Article 7 littera i du statut de Rome, aussi l'article de la LOI 024-2002 du 10 de 18 novembre 2002 portant Code pénal militaire

* 25 Paul Tavernier, Récueil juridique des droits de l'homme en Afrique, 1990-2000, human rights law in Africa series, christof Hens and Paul Tavernier (editions), Bruylant, P. 379

* 26 Malawi African association contre Mauritanie, 54/91 ; Amnesty international contre Mauritanie, 61/91 ; Mme Saar Diop, Union Interafricaine des droits de l'homme et RADDHO contre Mauritanie, 98/93 ; Collectif des veuves et ayants droits contre Mauritanie, 164/97 ; Association Mauritanienne des droits de l'homme contre Mauritanie, 210/98, 11 mai 2000, § 79, in Moise CIFENDE KACIKO, « Les conditions de recevabilité des communications individuelles devant la Commission africaine es droits de l'homme et des peuples : portée jurisprudentielle », in Revue de droit International et de Droit comparé, Bruylant, Bruxelles, 2004, p. 276 cité par Providence WALUPAKAH, La cour africaine des droits de l'homme et des peuples : le problème du contrôle juridictionnel des droits de l'homme en Afrique, U.C.B., Mémoire de Licence en Droit public, 2007-2008, P. 59

* 27 Le Règlement intérieur de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a été adopté lors de sa 2e session ordinaire tenue à Dakar (Sénégal) du 8 au 13 février 1988 et a été révisé lors de sa 18è session ordinaire tenue à Praia (Cap-Vert) du 2 au 11 octobre 1995

* 28 La décision du 1er septembre 1958 (non publiée), requête N° 361/58 citée par F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., P. 381

* 29 Article 46 (1) littera b de la Convention interaméricaine et Article 35 de la convention européenne

* 30 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., P. 382

* 31 F. OUGUERGOUZ, « La cour africaine des droits de l'homme et des peuples - gros plans sur le premier organe judiciaire africain à vocation continentale », in annuaire français de droit international LU - 2006 - CNRS Éditions, Paris, P. 227

* 32 Korvah C. Liberia (2000) AHRLR 140 (ACHPR 1988) para 5.

* 33 Patrick WACHASMANN, les droits de l'homme,Pp. 159-160, Voy. Notamment affaire Van Volsem C. Belgique (requête 14641/89)

* 34 Congres du peuple katangais C. Zaire (2000) AHRLR 72 (ACHPR 1995) para 5-7.

* 35 P. TAVERNIER, Op. Cit. Pp. 344-350

* 36 Halidou Ouédraogo : Chef de l'Union inter africaine des droits de l'homme (UIPH) réseau d'ONU des droits de l'homme des pays africains.

* 37 Article 45-2 « Assurer la protection des droits de l'homme et des peuples dans les conditions fixées par la présente Charte ».

Article 45-3 « Interpréter toute disposition de la présente Charte à la demande d'un Etat partie, d'une institution de l'OUA ou d'une organisation africaine reconnue par l'O.U.A. »

Selon l'article 56-2 les communications autres que celles étatiques doivent « nécessairement »« être compatibles avec la Charte de l'OUA ou avec la présente Charte ».

* 38 Voir Civil Liberties Organisation et autres c. Nigeria, 218/98 du 7 mai 2001, § 29, sur un point relatif à la confidentialité des communications entre l'avocat et son client, aux décisions du Comité dans les affaires Burgos et Estrella c. Uruguay.

* 39 In re Civil Liberties Organisation et autres c. Nigeria, concernant le droit à la présomption d'innocence garanti par l'article 7, § 1b) de la Charte a précisé que ce droit devait être entendu comme interdisant de demander à l'accusé de témoigner contre lui-même ou d'exiger de lui une confession sous contrainte, comme le prévoient les articles 6, § 2 et 14, § 3g) du P.I.D.C.P.

* 40 Sitsofé KOWOUVIH, « La cour africaine des droits de l'homme et des peuples : une rectification institutionnelle du concept de « spécificité africaine » en matière de droits de l'homme » in Observatoire des mutations institutionnelles et juridiques (OMIJ) explique à la page 19 que Dans cette affaire où il était question d'un avocat d'une association de défense des droits de l'homme détenu dans une cellule sordide sans accès aux soins médicaux et à l'extérieur, la Commission africaine s'est référée à l'arrêt de la Cour européenne, Irlande c. R.U. de 1978 et à la décision de la Commission européenne

Urrutikoetxea c. France de 1996 pour préciser que l'évaluation du degré minimal de souffrance à atteindre pour constituer un traitement inhumain et dégradant (Art. 5 de la Charte) devait tenir compte d'éléments tels que la durée du traitement, l'âge et l'état de santé de la victime.

* 41 Voir plus loin notre analyse sur les causes qui effarouchent les Etats à signer le Protocole de Ouagadougou et à déposer la déclaration en vertu de l'article 34.6

* 42 Moise CIFENDE KACIKO, Op. Cit., p. 282.

* 43 FIDH, Op. Cit., P. 84

* 44 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit. P. 384

* 45 Communication Sir Dawda K. Jawara c. Gambie, paragraphes 23 à 27, RADH 2000 98 (CADHP 2000)

* 46 FIDH, Op.Cit., P. 84

* 47 Par ex. l'affaire Interhandel (Suisse c. Etats-Unis), arrêt du 21 mars 1959.

* 48 Article 41-1(C).

* 49 Articles 2 et 5-2(b).

* 50 Article 46.

* 51 Communications 25/89, 47/90, 56/91, 100/93 (regroupées); Free Legal Assistance Group, Lawyers'

Committee for Human Rights, Union Interafricaine des Droits de l'Homme, Les Témoins de Jéhovah c/ Zaïre

* 52 Communication Sir Dawda K. Jawara c. Gambie, paragraphe 31, RADH 2000 98 (CADHP 2000)

* 53 Communication Diakité c. Gabon (RADH 2000 87, CADHP 2000), paragraphe 16

* 54 Communication Malawi African Association et Autres c. Mauritanie (RADH 2000 148, CADHP 2000), paragraphe 80

* 55 Communication 18/88, El Hadj Boubacar Diawara c. Bénin: « Etant donné que le plaignant avait porté le cas devant les juridictions béninoises et que la procédure était encore en cours, la Commission a déclaré la communication irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes, conformément à l'article 56(5) de la Charte et à l'article 103(l) du Règlement Intérieur de la Commission ».Voir également Communication 135/94, Kenya Human Rights Commission c. Kenya, RADH 2000 130 (CADHP 1995).

* 56 Voir, dans le système européen, parmi beaucoup d'autres précédents Selmouni c. France [GC], n° 25803/94, CEDH 1999-V, § 74 : « La Cour rappelle que la finalité de l'article 35 est de ménager aux Etats contractants l'occasion de prévenir ou redresser les violations alléguées contre eux avant que ces allégations ne soient soumises aux organes de la Convention (..) Les Etats n'ont donc pas à répondre de leurs actes devant un organisme international avant d'avoir eu la possibilité de redresser la situation dans leur ordre juridique interne » ; Kuda c. Pologne [GC], n° 30210/96, CEDH 2000-XI, § 152 ; Andráik et autres c. Slovaquie (déc.), n° 57984/00 et al., CEDH 2002-IX.

* 57 FIDH, Op. Cit., P.85

* 58 Communication 90/93, Paul S. Haye c. Gambie.

* 59 FIDH, Op. Cit. P. 85

* 60 En plus des décisions citées ci-dessous, voir par exemple Communication 71/92, Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme c/ Zambie.

* 61 FIDH, Op. Cit., P. 87

* 62 Communications 25/89, 47/90, 56/91, 100/93 ; Free Legal Assistance Group, Lawyers' Committee for

Human Rights, Union Interafricaine des Droits de l'Homme, Les Témoins de Jéhovah c/ Zaïre.

* 63 Voir aussi Communications 83/92, 88/93 et 91/93, Jean Y. Degli (au nom de N. Bikagni) c/ Togo, et

Communications 64/92, 68/92, 78/92, Krischna Achuthan pour Aleke Banda et Amnesty International pour

Orton et Vera Chirva c/ Malawi.

* 64 Communications 137/94, 139/94, 154/96 et 161/97, International PEN, Constitutional Rights, Interights au nom de Ken Saro-Wiwa Jr. et Civil Liberties Organisation c/ Nigeria. Voir aussi Communication 87/93,

The Constitutional Rights Project c/ Nigeria, Communication 129/94, Civil Liberties Organisation c/ Nigeria,

Communications 105/93, 128/9, 130/94 et 152/96, Media Rights Agenda and Constitutional Rights Project

c/ Nigeria.

* 65 Communication 103/93, Alhassan Abubakar c/ Ghana.

* 66 Communication 215/98, Rights International c/ Nigeria. Voir aussi Communication 232/99, John

D. Ouko c/ Kenya.

* 67 Communication 135/94, Kenya Human Rights Commission c/ Kenya.

* 68 P. WACHASMANN, Op. Cit. P. 159

* 69 SIDIKI kaba, Op. Cit., P.57

* 70 Papageorgiou c. Grèce (1997).

* 71 Voir Communications 27/89, 46/91 et 99/93 Organisation mondiale contre la torture et l'Association internationale de juristes démocrates, Commission internationale de juristes, Organisation mondiale contre la Torture, Union Interafricaine des Droits de l'Homme c / Rwanda.

* 72 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., P. 387

* 73 Communication 59/91, Emgba Mekongo Louis c/ Cameroon.

* 74 Requête N° 004/2011 : Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples c/ Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste

* 75 Hossam Bahgat, Directeur exécutif du Egyptian Initiative for Personal Rights, FIDH, article-a9525/15avril2011 P.1 cf. http://www.fidh.org/La-Cour-africaine-des-droits-de-l-Homme-et-des/

* 76 Mutoy MUBIALA, Le système régional africain de protection des droits de l'homme, Bruylant, 2005, P. 102

* 77 La Cour de Justice est prévue aux Articles 6 et 15 du Traité Révisé de la CEDEAO. Le protocole relatif à la Cour de justice (signé le 6 juillet 1991) est entré en vigueur le 5 novembre1996. En janvier 2005, un Protocole supplémentaire a été adopté amendant plusieurs dispositions du Protocole de la Cour.

* 78 L'Article 9 du Traité établissant la Communauté de l'Afrique de l'est prévoit la mise en place de la Cour.

Celle-ci est devenue opérationnelle en novembre 2001. Les Règles de Procédures ont été adoptées en 2004.

* 79 Le Tribunal est prévu par l'Article 9(f) du Traité de la SADC. Le Protocole portant création du Tribunal et ses

Règles de Procédures ont été adoptés en 2000 et sont entrés en vigueur en 2001.Le Tribunal est devenu opérationnel en Novembre 2005 et prêt à recevoir des affaires en mars 2007.

* 80 PORTANT AMENDEMENT DU PREAMBLE, DES ARTICLES 1ER, 2, 9, 22 ET 30 DU PROTOCOLE (A/P1/7/91) RELATIF A LA COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNUATE, ANSI QUE DE L'ARTICLE 4

PARAGRAPHE 1 DE LA VERSION ANGLAISE DUDIT PROTOCOLE

* 81 Arrêt N° ECW/CCJ/JUD/06/08 du 27 octobre 2008 suite à une requête déposée le 14 septembre 2007 et par laquelle Hadijatou Mani Koraou saisit la CJCEDEAO sur le fondement des articles 9-4 et 10 d) du protocole additionnel du 19 janvier 2005, portant amendement au protocole du 6 juillet 1991 en vue notamment d'une condamnation de la République du Niger, pour violation des articles 1,2,3,5,6 et 18(3) de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples.

* 82 Protocole additionnel A/SP.01/05 du 19 Janvier 2005 portant amendement du Protocole A/P.1/7/91 du 06 juillet 1991 relatif à la Cour.

* 83 §54 de l'arrêt

* 84 §55 et 56 de l'arrêt

* 85 COHEN-JONATHAN in « La convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales », Economica, Paris 1989, P.143

* 86 http// : ambema.over-blog.com/article-la-cour-de-justice-de-la-CEDEAO-donne-raison-à-nouveau-au-président-hissein-habre-5117772.html communiqué de presse de Maître François SERRES Avocat à la Cour Paris et Maître Mamadou I. KONATE Avocat à la Cour Bamako

* 87 Arrêt Mani HADIDJATOU C. L'Etat du Niger

* 88 CPDH «  Le juge africain est entré dans l'Histoire (Cour de justice de la CEDEAO, 27 octobre 2008, Hadijatou Mani Koraou c/ Niger) »Publié le 10 mai 2009 par Delphine d'ALLIVY KELLY, Pp. 6-7

* 89 www.irda.org/tribunal-sadc/ voir aussi www.sadc.int/tribunal

* 90 EAST AFRICAN COURT OF JUSTICE, STRATEGIC PLAN 2010 - 2015, April 2010, P. 4

* 91 Solomon EBOBRAH, « human rights developpements in african subregional economic comunities during 2010 » in African human rights law journal, volume11 N°1 2011, South Africa, Pp. 218-219

* 92 Arrêt Katabazi §24

* 93 Idem, §30-32

* 94 Ahmed MAHIOU, « Note sur la justice internationale et les droits de l'homme » in Justice internationale et scolaire : points de repère, juillet 2004, Pp. 11-12

* 95 CIJ, arrêt du 30 novembre 2010 in re Ahmdou Sadio Diallo C. RDC.

* 96 Vincenzo STARACE, « les innovations apportées en 2004 au système de garantie instauré par la Convention européenne des droits de l'homme », in La nouvelle procédure devant la Cour européenne des droits de l'homme après le protocole N°14 (S/dir), Bruylant 2007, Pp.1-2

* 97 FIDH, Op. Cit., P. 133, voir aussi protocole n°11 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, texte portant restructuration du mécanisme de contrôle établi par la convention du 11 Mai 1964, article 34 du protocole.

* 98 Ludovic HENNEBEL, La convention américaine des droits de l'homme. Mécanismes de protection et étendue des droits et liberté, Bruylant, 2007, Pp. 122

* 99 Le Professeur Pedro NIKKEN, le système interaméricain des droits de l'homme. RUDH, vol.21, 1990, p.105.

* 100 Sitsofé KOWOUVIH, Op. Cit., P. 14, il cite à ce sujet Antonio Augusto Cançado Trindade, « Le système interaméricain de protection des droits de l'homme : Etat actuel et perspectives d'évolution à l'aube du 21e siècle », A.F.D.I., 2000, pp. 549-577, spécialement pp. 572 et s.

* 101 Voir sur ce point le Discours de Antônio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme; « Le développement du droit international des droits de l'homme à travers l'activité et la jurisprudence des Cours européenne et interaméricaine des droits de l'homme », Strasbourg le 22 janvier 2004. http:// www.echr.coe.int/Fr/Discours/CancadoTrindadediscours.htm cité par Sitsofé, Op. Cit., P. 14

* 102 M. MUBIALA, Op. Cit.,P. 106

* 103 ETOA, Op. Cit, P.

* 104 www.FIDH.org., guide pour comprendre la cour africaine des droits de l'homme et des peuples 2010, P. 76

* 105 ibidem

* 106 Requête N° 004/2011, Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples c/ Grande Jamahiriya Arabe libyenne populaire et socialiste, §. 1-7

* 107 Troisième réunion de la Cour africaine et de la Commission africaine du 31/8/2010 www.africancourtcoalition.org

* 108 MATADI NENGA GAMANDA, Le droit à un procès équitable, éditions Droit et idées nouvelles, Bruylant, P. 139

* 109 FIDH, Op. Cit., P. 74

* 110 Mutoy Mubiala, Contribution à l'étude comparative des mécanismes régionaux africains, américains, et européens de protection des droits de l'homme, revue africaine de droit international et comparé, vol.9, 1997, p.49-50 cité par ETOA, Op. Cit.

* 111 www.Apt.org. (site Consulté le 12 septembre 2011)

* 112 Charte des ratifications : traités de l'UA relatifs aux droits de l'homme, état de ratifications au 31 décembre 2010, http://www.africa-union.org (site consulté le 07 septembre 2011)

* 113 http://www.chr.co.za/treaties (site consulté le 30 septembre 2011)

* 114 F. OUGUERGOUZ dans son opinion individuelle jointe à l'arrêt de la Cour africaine du 15 décembre 2009, §23-39, Pp. 5-8

* 115 Jean SALMON (Ed.), Dictionnaire du droit international, Bruylant/AUF, Bruxelles, 2001, P. 518 cité par F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., P. 7

* 116 V. POULIOT, Op. Cit., P. 35 ; voir notamment : Bohdan Winiarski, « Quelques réflexions sur le soi-disant forum prorogatum en droit international », Mélanges Spiropoulos, 1947.

* 117 www.haguejusticeportal.net/leforumprorogatumdevantlacourinterantionaledejustice/vincentpouliot se reférant à la Cour internationale de Justice, Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), Ordonnance du 13 septembre 1993 (Nouvelles demandes en indication de mesures conservatoires), Opinion individuelle de M. Lauterpacht, juge ad hoc, p. 416, para. 24.

* 118 Pour la jurisprudence de la CPJI sur ce point, voir Concessions Mavrommatis à Jérusalem, Série A, n° 5, Arrêt, 26 mars 1925, p. 27 et Droits de minorités en Haute-Silésie (écoles minoritaires), Série A, n° 15, Arrêt n°12, 26 avril 1928, p. 23.

* 119 Mohammed Bedjaoui, F. OUGUERGOUZ, « Le forum prorogatum devant la Cour internationale de Justice : les ressources d'une institution ou la face cachée du consensualisme », in annuaire africain de droit international, 1998, Volume 5, Pp. 91-114.

* 120 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., §35, P. 16

* 121 V. POULIOT, Op. Cit.,P.35 qui cite Détroit de Corfou, Arrêt sur l'exception préliminaire, 25 mars 1948, C. I. J. Recueil 1947-1948, p. 27.

* 122 Idem, P. 36 citant (colombie C. Pérou) Arrêt du 13 juin 1951 : C. I. J. Recueil 1951, p. 78, disponible sur : http://www.icj-cij.org/docket/files/14/1936.pdf

* 123 Ibidem cite et explique Anglo-Iranian Oil Co. (Royaume-Uni c. Iran), Exception préliminaire, Arrêt, C.I.J. Recueil 1952, p. 114 : « le principe du forum prorogatum devrait être fondé sur quelque acte ou déclaration du Gouvernement de l'Iran impliquant un élément de consentement à l'égard de la compétence de la Cour. Mais ce Gouvernement n'a pas cessé de contester la compétence de la Cour. [...] Aucun- élément de consentement

ne saurait être déduit de l'attitude adoptée par l'Iran. [...] La Cour en vient donc à la conclusion qu'elle n'est

pas compétente pour connaître de l'instance introduite par le Royaume-Uni », disponible sur : http://www.icj-

cij.org/docket/files/16/1996.pdf. Cet arrêt est le premier dans lequel la CIJ utilise le terme même de « forum prorogatum », consacrant ainsi son usage.

* 124 Ibidem

* 125 V. POULIOT, Op. Cit., P.37 citant Cour internationale de Justice, Certaines procédures pénales engagées en France (République du Congo c. France), 2003, voir documents sur : http://www.haguejusticeportal.net/eCache/DEF/6/188.TD1GUg.html

* 126 Ibidem, citant Cour internationale de Justice, Activités armées sur le territoire du Congo (nouvelle requête : 2002) (République démocratique du Congo c. Rwanda), compétence et recevabilité, arrêt, C.I.J. Recueil 2006, p. 18.

* 127Ibidem,citant Lettre du 25 juillet 2006

* 128 M. MUBIALA, Op. Cit., P. 107

* 129 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., §29, P. 6

* 130 F. OUGUERGOUZ, Op. Cit., P. 8, § 36-39

* 131 Idem, P. 770

* 132 Cour européenne des Droits de l'Homme, « Rapport annuel de 2003, conseil de l'Europe : évolution ultérieure de la Convention européenne de 1950 », Greffe de la Cour européenne des Droits de l'Homme, Strasbourg, 2004, P.9

* 133 Discours de Antônio Augusto Cançado Trindade, Président de la Cour interaméricaine des droits de l'homme; « Le développement du droit international des droits de l'homme à travers l'activité et la jurisprudence des Cours européenne et interaméricaine des droits de l'homme », Strasbourg le 22 janvier 2004. http://www.echr.coe.int/Fr/Discours/CancadoTrindadediscours.htm

* 134 Ibidem,citant Antonio Augusto Cançado Trindade, « Le système inter-américain de protection des droits de l'homme : Etat actuel et perspectives d'évolution à l'aube du 21e siècle », A.F.D.I., 2000, pp. 549-577, spécialement pp. 572 et s.) ;

* 135 http://www.africancourtcoalition.org/images/docs/afr-court/application001/fre.pdf

* 136 Le Protocole portant création d'une Cour africaine des droits de l'homme (ci-après le Protocole) été adopté le 9 juin 1998 à Ouagadougou, avant d'entrer en vigueur le 25 juin 2004. Près de deux ans plus tard, la Conférence de l'Union décidait nommait les juges (V. DOC UA/Conférence de l'Union, Décision sur l'élection des membres de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, Assembly/AU/dec.100 (VI), 29 janvier 2006, p.1

* 137 Guy-Fleury NTWARI, « Note sur le premier arrêt de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples ». In Les petits cahiers du Centre Droit International (CDI) N°1. Vol.I-2010, P. 1-3

* 138 Ordonnance de la Cour africaine du 25 mai 2011 prescrivant des mesures provisoires à l'encontre de la Libye cf. www.african-court.org/order-for-provisional-mesures-against-libya

* 139 http://www.africancourtcoalition.org/images/docs/afr-court/application004/fre.pdf

* 140 Pour les informations concernant les ratifications du Protocole cf. www.african-union.org mais les informations sur les déclarations nous viennent des sources peu officielles car lé dépositaire de celles-ci n'en publient pas et la Cour africaine ne dispose pas de liste des pays qui en ont faites. Nous nous sommes référé à des sources non officielles comme www.chr.up.az/treaties ou www.africancourtcoalition.org/actu

* 141 http://www.africancourtcoalition.org/images/docs/afr-court/application005/fre.pdf

* 142 http://www.africancourtcoalition.org/images/docs/afr-court/application006/fre.pdf

* 143 Voir articles 39, 52 et 3 du Protocole

* 144 Cette affaire ayant déjà fait l'objet d'un jugement par la Cour de justice de l'EAC

* 145 Africain court coalition/communiqué de presse du dimanche 5 juin 2011

* 146 http://www.africancourtcoalition.org/images/docs/afr-court/application007/fre.pdf

* 147 Antonion Trindade Cancado, évolution du droit international au droit des gens, Préface, Brasilia 24 mai 2008

* 148 S. KOWOUVIH, Op. Cit., P. 770 citant Augusto Antonio Trindade dans son discours de 2004 à l'audience solennelle d'ouverture de l'année judiciaire.

* 149 S. KOUWOUIH, Op. Cit. P. 699 citant Benoît-Rohmer (F.), « Il faut sauver le recours individuel... », Dalloz, 2003, chron. p. 2584. Voy. Contra : Flauss (J.-F.), « Faut-il transformer la Cour européenne des droits de l'homme en juridiction constitutionnelle? », Dalloz 2003, Chron. p. 1641; Voy. aussi, de Salvia (M.), « L'actuelle Cour européenne des droits de l'homme : un phénix renaissant de ses cendres », Cahiers du CREDHO, N° 7, 2001, pp. 25 et s.

* 150 L. WILDHABER, Op. Cit.cf. http://www.echr.coe.int/Fr/Discours/Wildhaberdiscours.htm

* 151 S. KOUWOUIH, Op. Cit., P. 699

* 152 Sofie BAKER DJOUMESSI KENFACK, « L'application de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples par les juridictions sous-régionales : regards croisés sur les affaires Koraou C. République du Niger et Hissein Habre C. République du Sénégal devant la Cour de justice de la CEDEAO » Institut des relations internationales du Cameroun

* 153 Solomon EBOBRAH, « L'application de la Charte africaine par les organisations africaines sous-régionales : des gains, des peines et le futur », thème exposé en marge de la conférence 30 ans de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples : Retro perspective, Auditorium, Faculté de Droit, Université de Pretoria, 11 juillet 2011, Panel 2, 10h 45 - 11h 20

* 154 F. OUGUERGOUZ, « La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples - Gros plan sur le premier organe judiciaire africain à vocation continentale » In: Annuaire français de droit international, volume 52, 2006. P. 218

* 155 FIDH, Op. Cit., P. 37

* 156 Nous citons à titre indicatif l'affaire Garba C. Bénin (requête inscrite sous ECW/CCJ/APP/03/09; jugement ECW/CCJ/JUD/01/10, jugement rendu 17 Février 2010.), Habré C. Sénégal, (inscrite ECW/CCJ/APP/07/08; jugement ECW/CCJ/APP/02/10, rendu le 14 Mai 2010)., affaire Mani Hadidjatou C. Niger (ECW/CCJ/JUD/06/08 ; jugement rendu le27 Octobre 2008).

* 157 David C. Uchwe(Suit ECW/CCJ/APP/04/09; jugement ECW/CCJ/RUL/03/10, rendu le 11 Juin 2010).

* 158 Affaire SERAP

* 159 §28 à 30

* 160§ 31 à 33

* 161 §34 à 36

* 162 §37 à 39

* 163 §40 à 58 de l'arrêt

* 164 §61 de l'arrêt

* 165 Delphine d'ALLIVY KELLY, « Le juge africain est entré dans l'Histoire (Cour de justice de la CEDEAO, 27 octobre 2008, Hadijatou Mani Koraou c/ Niger) » in CPDH, publié le 10 mai 2009

* 166 Case SADC (T) 01/2010.

* 167 S. EBOBRAH, Op. Cit. P. 249

* 168 www.africancourtcoalition.org (consulté le 7 septembre 2011)

* 169 L. BOURGOUSEN, Op. Cit., P. 30

* 170 Laurence BOURGORGUE-LARSEN, « le fait régional dans la juridictionnalisation du droit international », in : SFDI, La juridictionnalisation du droit international, colloque de Lille, Paris, Pédone, 2003, Pp.31-32

* 171 Idem, P. 34 citant G. Braibant, « Les enjeux pour l'Union », Vers une Charte des droits fondamentaux de l'Union (Table ronde du 18 mai 2000 organisée par les professeurs Cohen-Jonathan, Decaux et Dutheil de la Rochère), Regards sur l'actualité, Paris, La Documentation française, n° spécial 264, août 2000, p.11.

* 172 FIDH, Op. Cit., P. 39

* 173 L. BOURGORGUE-LARSEN, Op. Cit., P. 42

* 174 L. BOURGORGUE-LARSEN, Op. Cit., Pp. 203-264 cité par Mutoy MUBIALA, Op. Cit., P. 102

* 175 176 L. BOURGORGUE-LARSEN, Op. Cit., Pp. 42

* 177 www.african-court.org/clôture-du-colloque-sur-les-cours-africaines-des-droits-de-l'homme-et-des-institutions-similaires-






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