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La loi de la force en politique: l'art de gouverner dans Le Prince de Machiavel

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par Alex BATUHOLA MUNKANU
Faculté de Philosophie Saint Pierre Canisius/Kimwenza, RDC - Bachelier en Philosophie 2008
  

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II.1.2. La sagesse du prince dans ses relations avec ses sujets et amis

Nous venons de voir que, selon Machiavel, la dualité absolue entre le bien et le mal n'existe pas dans le domaine politique. En effet, pour Machiavel, le prince sage est celui qui sait alterner l'usage aussi bien des vertus que des vices. Mais, par quels moyens pouvons-nous juger une chose comme bonne si derrière elle se cache le mal ?

Disons d'abord que chez Machiavel, la sagesse est à saisir en lien avec la conservation et l'accroissement du pouvoir du prince. C'est pourquoi la sagesse est à comprendre comme cette habileté, ce savoir militaire, cette aptitude à se faire obéir et craindre, cet usage de la ruse, etc. La sagesse du prince consiste à connaître la nature des inconvénients et à choisir le moindre mal : « l'ordre des choses humaines est tel que jamais on ne peut fuir un inconvénient sinon pour encourir un autre. Toutefois la sagesse du prince consiste à connaître la qualité des inconvénients et choisir le moindre pour bon ».74(*)

C'est ainsi, parlant de sa relation avec ses sujets, Machiavel souligne que le prince doit éviter d'être «  haï et méprisé ». Ce propos se trouve déjà développé dans la Politique d'Aristote : « Il y a deux causes principales pour lesquelles on se révolte contre les tyrannies, la haine et le mépris ».75(*)Machiavel reprend cette affirmation d'Aristote, pour renchérir sa thèse de la conservation du pouvoir par le prince.

Le prince devra en toute chose, affirme notre auteur, rechercher l'estime et l'affection du peuple : « la meilleure citadelle qui soit, c'est de n'être point haï du peuple : car encore que tu tiennes les forts, quand le peuple te porte haine, ils ne te sauveront pas, à raison qu'après que les sujets ont pris les armes, ils n'auront jamais faute d'étrangers à venir à leur aide ».76(*)  On ne peut pas combattre un prince qui a la confiance de son peuple. De même que le prince est dépendant des armes, de même il est dépendant du peuple. C'est pour cette même raison que le prince devra avoir de bons rapports avec son peuple. Le rejet du prince par le peuple entraînerait d'office sa chute parce que le jour où un ennemi se présente, le peuple se rallie à lui pour renverser le pouvoir. En ce sens, nous pouvons donc souligner le fait que le maintien du pouvoir est aussi tributaire de la population.

Par ailleurs, Machiavel affirme que « gouverner c'est mettre vos sujets hors d'état de vous nuire et même d'y penser ; ce qui s'obtient soit en leur ôtant les moyens de le faire, soit en leur donnant un tel bien-être qu'ils ne souhaitent pas un autre sort ».77(*)En ce sens, le prince doit bien discerner le comportement à adopter et le choix de ses proches. C'est pourquoi « le prince doit avoir peur de deux côtés : l'un au-dedans à cause de ses sujets, l'autre dehors à cause des potentats étrangers ».78(*) Pour ce qui concerne les affaires extérieures, Machiavel pense que le prince doit se défendre par « force d'armes et de ses bons amis »79(*). Parce que, selon lui, du moment où les affaires du dehors sont assurées, celles du dedans le seront aussi.80(*)

En rapport avec ses proches, le prince doit bien choisir ses collaborateurs. Parce que le bon choix des collaborateurs témoigne de la sagesse du prince. Et la première erreur que puisse commettre un prince, c'est de faire un mauvais choix de ses ministres. La question que nous nous posons est celle de savoir comment un prince peut-il connaître si son ministre est bon ou mauvais ?

En réponse à cette question, voyons les critères que nous propose Machiavel pour le choix des ministres. Pour notre auteur, quand un ministre pense plus à lui-même qu'au prince, ce dernier doit se dire que ce ministre est mauvais. Le prince ne doit pas lui faire confiance. Mais quand, le ministre pense plus au prince qu'à lui-même, il est un bon ministre. Le prince doit lui faire confiance en lui donnant « honneurs et finances, le faisant son obligé, et lui communiquant honneurs et charges, de telle façon qu'il ne peut demeurer sans lui, et que les grands honneurs et richesses qu'il lui donnera ne lui en fassent point désirer de plus grands, tandis que les hautes charges qu'il exercera lui feront craindre les nouveautés ».81(*)

En outre, les relations entre les hommes sont conflictuelles et par conséquent, le prince doit régler les conflits en employant les moyens les plus efficaces, notamment, la crainte qu'il inspire, le déploiement de sa puissance, etc. Il doit aussi punir publiquement ceux qui contestent son autorité, afin de maintenir l'ordre social. A ce titre, les moyens employés peuvent revêtir une certaine dimension sociale. C'est pour cette raison que le prince doit savoir bien user de la « bête et de l'homme ». L'image de la bête renvoie à la force et l'image de l'homme renvoie à la loi.

En guise de conclusion, nous retenons que Machiavel ne traite nullement de l'usage du pouvoir d'un point de vue moral. Il nous montre simplement comment conquérir, exercer et conserver le pouvoir. Dans cette perspective, la politique doit s'exercer en rapport avec les réalités concrètes de la vie. Machiavel décrit les ruses et les secrets du pouvoir sans pour autant les légitimer. Il a le mérite de nous inciter à nous confronter au problème le plus crucial qui est celui des rapports entre la morale et la politique. Il reste que, parce qu'être raisonnable, nous ne pouvons pas admettre que l'homme soit considéré comme une chose que l'on puisse utiliser à sa guise. C'est pourquoi, il nous semble que l'exercice du pouvoir doit respecter la dignité humaine, c'est-à-dire respecter l'homme à qui l'action politique devrait bénéficier. Voilà ce qui justifie que nous voulions dans le chapitre suivant, nous pencher sur le rapport entre l'éthique et la politique.

* 74 Machiavel, Le Prince, p.157- 8

* 75 Aristote, La Politique, 1312 b

* 76 Machiavel, Le Prince, p.151

* 77 Machiavel, Le Prince, p.133

* 78 Ibid., p.130

* 79Ibid., 130

* 80 Ibid.

* 81 Ibid., p.161

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand