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à‰thique et pratiques communicationnelles de l' à‰glise Catholique pour la pacification de l'espace public au Burkina Faso

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par Anicet J. Laurent QUENUM
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maà®trise en sciences de l 2002
  

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2.4. L'après-JNP : Un début de détente politique

Deux types de réactions traversent l'opinion publique burkinabè. Pour les uns, la JNP a eu pour effet une décrispation du climat social, tandis que pour d'autres, les plus intransigeants, proches des mouvements de défense des droits de l'Homme, tout reste à faire tant que les coupables n'auront pas désignés et châtiés conformément aux lois en vigueur. Mais apparemment, et de l'avis du plus grand nombre, la Journée nationale du pardon aura aidé à consolider la détente amorcée avec la signature en novembre 2002, d'un Protocole d'accord de gouvernement entre le pouvoir et l'opposition. Ce protocole d'accord faisant d'ailleurs suite à la formation en pleine crise d'un gouvernement de large ouverture politique aura vécu environ 18 mois.

Toujours est-il que, depuis plus d'un an, la tension politique et la fronde sociale sont à la baisse, quoique la justice n'ait pas convaincu. Monsieur Germain NAMA, directeur de publication de « L'événement79(*) et le directeur de commission arbitrale du Mouvement Burkinabè de Droits de l'Homme et des Peuples (MBDHP) est d'avis que les huit engagements80(*) pris à l'occasion de la JNP par le président du Faso ont eu un effet pacificateur sur le climat politique national. Et cela, explique-t-il, est le fait de plusieurs facteurs conjugués. A commencer par le sentiment très religieux du peuple burkinabè qui a dû se dire que si le « chef » est allé aussi loin dans l'expression du remords et dans sa volonté de réconciliation et de réparation (indemnisations à des victimes qui n'y croyaient plus), c'est qu'il ne recommencera certainement plus !

Toutefois, M. G. NAMA fait observer que c'est aussi par effet de lassitude que le mouvement de contestation s'est quelque peu essoufflé ces derniers temps alors même que la crise, dans sa dimension éthique, demeure entière dans la mesure où « les coupables ne payent pas assez pour leurs crimes ». Néanmoins, M. G. NAMA déclare qu'il lui semble indiqué de marquer une pause tactique dans l'intérêt de la paix collective, quitte à rebondir plus tard. Ce qui, naturellement donne du répit au pouvoir à qui les uns et les autres reconnaissent d'avoir tout de même lâché du lest en faveur de quelques réformes institutionnelles qui tiennent lieu d'acquis politiques ou de retombées directes de la JNP. Il s'agit notamment de :

- La relecture de l'article 37 de la constitution81(*) ;

- L'adoption d'un statut de l'opposition ;

- La mise en place d'une CENI plus indépendante ;

- Financement par l'Etat des partis politiques ;

- La révision du mode de scrutin (en faveur des petits partis) ;

- L'instauration du bulletin unique ;

- L'élargissement de la base politique de l'Assemblée nationale au terme des dernières législatives de 2002 ;

- La restitution de l'appareil judiciaire82(*) ;

- Etc.

Il reste que c'est sur le terrain de la lutte contre l'impunité que les résultats sont jugés mitigés sinon décevants. Ainsi qu'on peut le lire à propos du cas Norbert ZONGO dans une certaine presse, « si le dossier n'avance pas, c'est parce qu'il y a des hommes qui oeuvrent en ce sens, ces hommes ne se trouvent pas hors de la justice, ni hors du pouvoir. Aux questions de justice, ils ont toujours tourné le dos. Ils ont même préféré le pardon qu'ils disent ne pas empêcher l'avancement des dossiers pendants. Et depuis, rien !!! »83(*)

Sans se faire d'illusions, une par de ressentiments subsistent et sont parfois vécus en silence. Ce qui fait dire à certains observateurs de la scène politique burkinabè, qu'il pourrait subsister encore de la braise sous la cendre ? En clair, l'espace public n'est pas durablement pacifié, en raison du sentiment de qu'éprouve encore certains citoyens devant l'ajournement des échéances de justice et de vérité. En cela, l'accalmie observée actuellement sur le front politique prend peu les allures d'une mise à l'épreuve. Le chef de file de l'opposition au parlement burkinabè, Me Hermann YAMEOGO84(*), ne s'en cache pas, estimant que cette accalmie lui semble aujourd'hui menacée par trois facteurs : primo, la volonté actuelle du pouvoir de revenir sur certains acquis politiques85(*) comme pour récupérer de la main droite ce qu'il a concédé de la main gauche ; secundo, la résurgence du mécontentement social résultant de la baisse du pouvoir d'achat et tertio, le malaise né de la politique étrangère du Burkina Faso dans la crise ivoirienne.

Pour Me YAMEOGO, il n'y a donc pas lieu de pavoiser outre mesure. Attitude d'autant plus normale que la paix est un long processus ainsi que le confirme d'ailleurs cette sagesse africaine selon laquelle : « plus un arbre est lent à pousser, moins il faut tarder à le planter »86(*). Et c'est Koffi Anan qui lui donnera raison deux ans plus tard au plus fort de la crise ivoirienne en affirmant : « la paix n'est pas un événement mais un processus ».

Il en découle pour le pouvoir et tous les acteurs de la société, dont l'Eglise catholique, un nouveau défi, celui de transformer l'accalmie actuelle observée sur le front politique burkinabè en une paix durable. Et c'est finalement aussi cela le plus difficile à faire : asseoir les bases d'une véritable culture de la paix au Burkina Faso. Autrement dit, comment faire de la paix une donnée permanente de la société burkinabè ?

Entre autres pistes à explorer, se trouve la parenté à plaisanterie87(*) dont les vertus pacificatrices sont de notoriété publique. Les Burkinabè peuvent continuer à cultiver cette valeur qui a fait ses preuves comme outil de dialogue, de convivialité et de cohabitation pacifique entre les ethnies. Aujourd'hui comme hier, elle pourrait aider à tempérer les rancoeurs politiques, à désarmer certaines colères et hostilités ou tout au moins à dédramatiser les contrariétés et les conflits inhérents à la vie démocratique... C'est en fait là aussi toute une éthique de communication au service de la paix mais dont le mode d'emploi en politique reste à affiner pour en faire, au-delà de la distraction, un véritable régulateur social.

* 79 L'événement est l'un des derniers nés de la presse burkinabè (2002) et est du côté des mouvements de défense des Droits de l'Homme

* 80 Voir suppra p. 88

* 81 Le mandat du président de la république, d'une durée de sept (04) ans renouvelable de façon illimitée est ramené à une durée de cinq ans (05) renouvelable une seule fois.

* 82 Pour pallier à la super puissance de la Cours suprême concentrant à elle seule d'énormes pouvoirs, elle a été éclatée en de nouvelles juridictions que sont notamment le Conseil constitutionnel et la Cour des comptes.

* 83 L'Indépendant, n° 484 du mardi 17 décembre 2002 p.6

* 84 Notre entretien avec Me Hermann YAMEOGO date du 19 avril 2003 à Ouagadougou. Avocat de formation, Hermann YAMEOGO est leader politique, président de l'ADF/RDA, il est le fils du premier président burkinabè Maurice YAMEOGO.

* 85 Me Hermann YAMEOGO fait allusion à deux situations. La première concerne l'introduction du CDP (parti au pouvoir) à l'Assemblée nationale au mois d'avril 2003, d'une proposition de loi pour une révision du mode de scrutin en vigueur, la proportionnelle au plus fort reste, n'a pas fini de faire ses preuves. Qui plus est, il a permis à une foule de petits partis de faire leur entrée au parlement au terme des législative de 2002. La seconde source d'inquiétude de Me H. YAMEOGO est relative à la volonté réelle ou non du pouvoir d'appliquer au chef d'Etat en exercice, la nouvelle version de l'article 37 de la Constitution qui a ramené de sept (07) ans sans limite de renouvellement à cinq (05) ans renouvelable une seule fois, la durée du mandat du président de la République.

* 86 Discours du président burkinabè, Blaise Comparé, à l'occasion de la Journée du Pardon, le 30 mars 2001 à Ouagadougou

* 87 Il s'agit d'un mode de comportement spécifique dans les relations sociales entre certains groupes. Il se traduit par l'échange verbal, par un ton, des paroles, parfois une agressivité que les protagonistes ne se permettraient pas envers d'autres personnes ne partageant pas ce lien particulier.

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