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à‰thique et pratiques communicationnelles de l' à‰glise Catholique pour la pacification de l'espace public au Burkina Faso

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par Anicet J. Laurent QUENUM
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maà®trise en sciences de l 2002
  

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2.3.6. L'argent contre le pardon ?

Par ailleurs, la place de la justice comme source de vérité dans l'ensemble de cette mécanique justice, vérité et réconciliation se justifie par le comportement de ces nombreuses personnes qui, sans marchander le principe du pardon, exigent au préalable et par-dessus tout, une reconnaissance de leur innocence, un rétablissement de leurs droits humains ou une réhabilitation en bonne et due forme pour accorder le pardon. En d'autres termes, avant d'envisager le moindre pardon, elles sont prêtes à faire feu de tout bois pour être lavées de tout soupçon et de pouvoir ainsi montrer patte blanche vis-à-vis de la société.

Il en résulte que, pour ces personnes, la réparation financière n'est pas plus importante que la réparation judiciaire et que la première ne doit pas éteindre l'action de la seconde. En clair, peut-on encore poursuivre ou enclencher des procédures judiciaires contre l'Etat burkinabè après être passé au guichet du Fonds d'indemnisation des personnes victimes de la violence en politique ? Ce débat qui est fondamentalement d'ordre éthique, reste en ce moment très controversé au sein de la société burkinabè Seulement, pour des victimes ou familles de victimes de crimes politiques, il va de soi que l'obstruction de la vérité est une source de frustrations et de souffrances telle que les graines du pardon, encore moins celles de la réconciliation, ne peuvent germer dans des coeurs aussi meurtris. C'est donc en ayant conscience de cette vérité que l'Etat burkinabè fait de son mieux pour assumer son devoir de vérité vis-à-vis des familles des victimes. Cette démarche en trois actes consiste à montrer aux familles, la tombe des victimes, à contribuer financièrement (345 000 FCFA en moyenne) aux funérailles et à effectuer auprès de ces familles, des visites officielles au cours desquelles, une demande de pardon est formulée au nom de l'Etat.

Sous ce même rapport, il est avéré que si la vérité console et soulage, elle est surtout une question d'honneur et de dignité. Mais attention, il ne suffit pas que l'honneur soit sauf pour emboucher le clairon de la réconciliation. Il en faut bien plus : l'aveu de culpabilité, la demande de pardon, l'expression de regret, la promesse de ne plus recommencer et l'engagement d'une réparation. Tels sont, du moins, les ingrédients d'une pacification durable de l'espace public selon l'approche et les pratiques de l'archidiocèse de Bobo-Dioulasso. Oui, il en faut bien plus que la politique du replâtrage qui consiste à bercer dans l'illusion d'un ajournement des échéances vite expirées de justice, de vérité et de pardon. Et là-dessus, les faits donnent plutôt raison au Collège des Sages pour n'avoir pas laissé l'arbre du pardon (dont l'Exécutif s'est fait maître des échéances) cacher la forêt de la justice et de la vérité.

Au plus fort des réflexions autour du schéma de pacification qui s'appliquerait au traitement de la crise politique burkinabè, l'Eglise catholique, à travers ses hauts dignitaires, a tenu à souligner que le pardon et réconciliation n'efface pas l'offense et ne peuvent servir de prétexte à l'étouffement de la justice. Là-dessus, la lettre de Mgr Jean-Marie COMPAORE, archevêque de Ouagadougou, aux chrétiens est sans ambages : « le pardon est le fruit du dialogue entre personnes qui se sont écoutées d'abord, et ont pris connaissance à la fois de l'objet du pardon (aveu des offenses) et des intentions des parties concernées. Le pardon ne saurait être un acte de simple volonté politique ; il doit être préparé et soutenu par une prise de conscience et garanti par une volonté clairement exprimée de réparation et de justice. Sans ces conditions, notre peuple pourrait s'engager dans une procédure qui risque de la conduire à la désacralisation du pardon et à une posture collective ».77(*)

Seulement, au regard des contingences administratives, sociales et politiques du pays, l'action en justice n'aurait pas été le plus court chemin vers la réconciliation. Mieux, au vu de ce qui a été fait, d'aucuns estiment qu'il y a déjà eu justice à travers la sanction morale et publique de 40.000 Burkinabès physiquement témoins de cette JNP, le 30 mars 2001. C'est du moins l'avis du pasteur Freeman KOMPAORE, chef de l'Eglise protestante burkinabè qui introduit la nuance suivante : « la justice pour moi n'équivaut pas forcément à une justice punitive, mais plutôt aussi à une justice restauratrice78(*) qui joue à la fois en faveur de l'offenseur que de l'offensé ».

Ainsi, de fil en aiguille, certains en sont arrivés à se demander si l'on pourrait obtenir davantage de l'espèce humaine. Dans les limites des capacités humaines, est-il impossible d'aller plus loin que le Pardon et la Réconciliation. Pour le reste, estime-t-on, nul ne saura mieux effacer le préjudice subi et rendre pleinement et idéalement justice si ce n'est Dieu.

* 77 Lettre pastorale de l'archevêque de Ouagadougou adressée aux chrétiens à l'occasion du carême chrétien 2001

* 78 La justice dite restauratrice ou réparatrice apparaît comme une solution de rechange au système pénal classique. Elle a été appliquée dans une grande diversité de situations, notamment avec la commission « vérité et réconciliation » en Afrique du Sud

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