WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Relations entre OPJ et APJ (Officier de Police judiciaire et Agent de Police Judiciaire ): analyse criminologique de la pratique de l' OPJ debout

( Télécharger le fichier original )
par Albert MUTOMBO NGOY BANZE
Université de Lubumbashi école de criminologie - Diplôme d'études approfondies en criminologie 0000
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

1.2. «  Légitimation policière de la pratique de l'  OPJ debout »

La pratique de l' « OPJ debout » tire sa source de l' « OPJ assermenté » dans sa manière de gérer les « APJ ». Il ressort de l'observation et des entrevues empiriques que l' « APJ » se substitue à l'OPJ lorsqu'il participe au travail judiciaire sans trouver son compte. Le cas des patrouilleurs qui récupèrent le matin la personne impliquée laissée dans un poste de police le plus proche de leur secteur opérationnel en l'acheminant à l'OPJ confiant tout en contournant celui qu ne sait pas conjuguer le verbe manger au pluriel, est une illustration saillante qui présente deux façons de gestion des APJ.

Plus les APJ reçoivent la redistribution, plus ils participent au travail judiciaire et moins ils se livrent à la pratique de l' « OPJ debout » pour le profit personnel. Par ailleurs, cette pratique est un processus qui découle de l'imitation. L'APJ est appelé à opérer le « mukwao ».

De ce fait, il est le premier à entrer en contact avec les deux parties en conflit et il a les sources de premières mains concernant les conflits. Il voit, il attend, il participe aux différentes auditions de l'OPJ assermenté. En assistant, il apprend comment l'OPJ traite les dossiers civils ou pénaux et comment il transforme le dossier « un-quatre » en dossier pénal et vice-versa. Dès qu'il trouve l'occasion, sachant bien qu'il n'est pas bien distribué, il applique ce que l'OPJ fait et il acquiert ainsi l'expérience et s'érige en médiateur pour arranger les différents conflits à l'amiable. Ainsi, il s'érige en « OPJ debout ».

Dans sa pratique, il ne vise pas la procédure, mais le résultat. C'est qui compte pour lui c'est avant tout « treizer ». Et une « treize normale » nécessite un arrangement à l'amiable pour éviter le rebondissement parce qu'il opère en « Kundelpain » c'est-à-dire dans l'ombre. Il fait tout pour éviter les conséquences négatives « le contre coup ».

Selon les entrevues, la pratique est aussi essentielle puisqu'elle contribue à l'harmonie sociétale et que les deux parties y trouvent chacune sa part et sont satisfaites. A ce sujet, nous soutenons la réflexion de LASCOUMES P., pour avoir écrit ce qui suit « ...ce qui n'empêche pas les justifications des activités corrompues (selon nous informelles) d'avoir toujours une grande efficacité malgré leur caractère réducteur et souvent fallacieux ». (1999 : 158)

D'après l'empirie, la pratique de l' « OPJ debout » est une décharge du travail de l' « OPJ assis ». C'est une façon de le décongestionner puisque parfois il est afflué de dossiers. La pratique se veut une avant-garde d'entrée de la réaction sociale formelle ou du contrôle policier.

A ce sujet, la visée est de régler le problème avant qu'il ne soit judiciarisé. C'est dans ce contexte que nous faisons notre la pensée de BRODEUR J.P. lorsqu'il indique à propos de la police et l'instance judiciaire, ce qui suit :

« En réalité, la coupure entre le droit et la police est l'une des lacunes les plus visibles de notre système. Tous les programmes récents de réforme de la police (...) s'arrêtent avant l'étape judiciaire et se définissent souvent contre elle, l'objectif explicite de ces réformes étant de résoudre les problèmes avant qu'ils ne soient judiciarisés. » (2003 : 347)

De ce qui précède, force nous est de retenir dans une optique innovatrice et adaptative que la pratique de l' « OPJ debout » est une nouvelle piste non prescrite de régulation des situations problèmes avant leur juridiciarisation. Elle offre plusieurs atouts selon les empiries :

- Elle tend à la déjudiciarisation. La visée est la recherche de l'harmonie et de la tranquillité publique. Elle repose sur l'arrangement à l'amiable. L' « OPJ debout » joue le rôle de « médiateur » c'est-à-dire facilitateur. La médiation se fait par la négociation. En cas d'échec, le dossier suit son cours normal. C'est pourquoi elle est l'avant-garde du système pénal.

- Elle évite les frais de justice. Si l'administration de la justice policière est déjà coûteuse par les différents frais (pour la plainte, « ya makolo pour le déplacement, les frais d'instruction du dossier, du transfert du dossier... et que dire de frais de justice au niveau du Tribunal ?

Dans le cadre référentiel, en parlant de la gestion des plaintes, nous avons pu relever que certaines plaintes étaient non recevables puisqu'elles n'étaient pas monnayées. C'est dans ce même cadre que Prince KAUMBA LUFUNDA a parlé de la non recevabilité des plaintes (2004 : 147). Et dire qu'au niveau de la police, les dossiers sont souvent clos par les « mulambu » (amendes transactionnelles) très exorbitantes et parfois sans aucun rapport avec la gravité du problème. Que penser si le dossier suivait son cour normal jusqu'au tribunal ?

Concernant les frais comme un obstacle à l'accessibilité de la justice au niveau du Tribunal, nous trouvons opportun de stigmatiser in extenso la pensée d'Alain KOJAN et Didier KABOMBO dans leur recherche sur « la pauvreté face à la descente aux enfers de la justice » en retenant ce qui suit :

« La justice coûte chère : la consignation, les frais d'huissiers, les frais de rédaction des actes de procédure, les frais de rédaction du jugement, s'exclame plus d'un congolais.

« Moi, je ne peux pas me rendre dans cette baraque, renchérit un autre, j'en suis excédé.

«  Ces propos de table ou causerie d'affaire sont alimentés et amplifiés par la pauvreté des personnes qui interviennent dans l'administration de la justice (OPJ, magistrat, greffier et huissier). (2006 : 25-26)

Ainsi, les frais de justice limitent la population à l'accès au tribunal. La pratique de l' « OPJ debout » devient un palliatif salutaire.

- Comme la pratique décongestionne le travail judiciaire de l' « OPJ », il en est également de celui du magistrat et du juge.

- Elle échappe à la lenteur de la procédure. Elle est dite « debout » puisqu'elle est rapide dans le gain du temps. Elle trouve une solution immédiate.

- Elle vise la réparation, l'harmonie plutôt que la peine. Elle est dépénalisante. Elle évite aux impliqués le cachot et la prison.

- Elle mobilise plusieurs ressources ou recettes de régulation. Se servant du cadre juridique, elle clôture le dossier verbal par l'arrangement à l'amiable à l'issue de laquelle les deux parties sont satisfaites.

- Elle repose sur le principe selon lequel, vaut mieux un mauvais arrangement qu'un bon procès.

- Elle permet à la personne impliquée d'échapper aux erreurs judiciaires puisqu'en appliquant la procédure, il est possible que les erreurs judiciaires se glissent et qu'un innocent soit criminalisé. A ce sujet, la police est un filtre de sélection de délinquant. L' « OPJ assermenté » a la grande part de manoeuvre en transformant l'affaire « un-quatre » en affaire pénale.

Quant au niveau du Parquet et du Tribunal, les auteurs précités renchérissent ce qui suit selon les propos de certains magistrats tout en les situant dans le contexte de précarité :

« Je ne suis pas bien rémunéré, comment veux-tu que je rende une bonne justice ? Il est vrai qu'un magistrat mis dans les mauvaises conditions n'est pas à mesure de rendre une bonne justice (pour nous une juste justice) » (2006 : 26).

- Elle échappe à la fiction juridique. Concernant l'équité, le droit pénal apparaît clairement dans le choix de ce qu'il réprime et dans la manière dont il est appliqué, ne place pas tous les citoyens sur le même piédestal d'égalité devant la loi (DAYEZ B., 1999 : 118-199)

La pratique sous-étude ne vise pas la répression, mais la réparation et l'arrangement.

- Elle permet aux impliqués d'échapper au risque de la détention préventive induisant parfois de graves discriminations. Cette détention n'est qu'une forme de régulation qui est susceptible d'incarcérer quelqu'un parce qu'il est pauvre. Souvent, au niveau de la police, il est constaté que la plupart des impliqués se retrouvent au Parquet par manque d'amendes.

A ce propos de discrimination, DAYEZ B. précise ce qui suit :

« L'arrestation d'un magnat financier ou d'un politicien ou de quelqu'un à vue pouvait laisser croire que personne n'est à l'abri d'une mise à l'ombre dans le cadre préventif. Mais ne soyons pas dupés : en matière de délits financiers sur une grande échelle, le motif du mandat d'arrêt est trouvé dans les nécessités de l'instruction. Cela équivaut bien entendu à remettre l'inculpé en liberté et le risque de récidive n'est pas évoqué ». (1999 : 119)

- Le chiffre noir que peut induire la pratique est une fiction puisqu'il est un mal nécessaire pour réguler les situations problèmes entre les parties impliquées. Il est un « mal » parce que les tenants de cette pensée soutiennent qu'il obnubile le chiffre réel dans l'analyse statistique de la criminalité. Pour nous, l'important n'est pas le chiffre réel pour développer et élaborer la politique de lutte contre la criminalité, mais plutôt c'est de savoir bien gérer cette criminalité à partir de l'amplification des faits.

- La police est un service générateur des recettes. La pratique est un obstacle et un manque à gagner pour l'Etat. Ne soyons pas leurrés : la distribution du pouvoir est inégalement répartie. La redistribution n'est pas équitable et juste. Les APJ s'instituent à l'Etat pour se rétribuer. En se transformant en « OPJ debout ». Si les policiers travaillent avec zèle sans solde et se contente de la prime, c'est parce qu'il tire profit dans l'ombre grâce à cette pratique. Sans elles, la machine policière cesse de fonctionner. C'est dans ce contexte que nous avons évoqué dans le chapitre précédent que la nuit est plus importante que le jour, la fondation que le mur, ce que nous réalisons le jour n'est qu'une projection de ce qui se passe la nuit. Ainsi donc, la pratique non prescrite n'est-elle pas un soutien et un complément de celle dite réglementaire qui n'est qu'une construction abstraite et idéale à laquelle l'on demande aux acteurs de s'y conformer. C'est dans la logique de l'adaptation de la pratique réglementaire puisque non contextualisé, et de l'innovation que s'érige et se développe la pratique non prescrite.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille