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La défense des intérêts américains en Iran par le discours idéaliste, de 1945 à  1954

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par Mickaël, Milad Jokar
Université Caen Basse Normandie - Master 2011
  

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CONCLUSION

Cette recherche montre que la stratégie discursive idéaliste est un outil important de la défense des intérêts américain en Iran, surtout après le choc géopolitique causé par la fin de la seconde guerre mondiale/début de Guerre froide. La crise d`Azerbaïdjan et la crise d`Abadan montrent à quel point la position géostratégique de l`Iran était importante pour l`intérêt national des États-Unis. Les documents des services de renseignement américains (CIG, Conseil National de Sécurité, département d`Etat) montrent que pour les États-Unis, l`Iran doit être un modèle de stabilité, un fournisseur sür de matières premières, un importateur de biens occidentaux, un allié solide, et enfin, un rempart contre le communisme.

Cependant, pour assurer cela, la rhétorique idéaliste présidentielle présente seulement une façade au peuple américain et au Congrès pour qu`ils adherent à sa vision politique. Cette stratégie discursive idéaliste se mène de plusieurs manières. Tout d`abord, elle présente les chocs de manière simplifiée. Ceci permet au président de ne pas expliquer en détail au peuple la complexité de la Guerre froide, de la crise d`Azerbaïdjan, des programmes d`aides économiques et militaires à l`Iran (comme le Mutual Defense Aid) ou encore les enjeux de la crise de la nationalisation de l`AIOC. Le président utilise donc cette façade car la multiplication des idées perturbe la compréhension des « masses » et risque de mettre en danger la réalisation des objectifs stratégiques. Par conséquent, son discours public présente la vision de sa politique étrangère et met en avant les principes de libertés, de démocratie, de paix et d`unité avec une rhétorique idéaliste. Ainsi, la présentation de la défense de l`intérêt national « exprimé » permet à la Maison Blanche de défendre l`intérêt national « réel ».

D`autre part, cette façade créée un pouvoir d`attraction qui encourage les gens à s`identifier plus facilement à l`ethos de son leader. Celui-ci étant le défenseur des valeurs idéalistes à travers le monde, son discours permet d`atteindre les objectifs stratégiques puisqu`il unit le peuple et ses représentants autour des principes communs. En touchant l`auditoire, il incite implicitement celui-ci à adhérer à son programme. De plus, ne pas

adhérer reviendrait tacitement à être contre ces valeurs (chose risquée en période de Maccarthysme).

Ainsi, cette rhétorique présente la situation en Iran sur les bases d`un conflit idéologique en insistant sur la dichotomie entre les valeurs idéalistes des États-Unis qui s`opposent au spectre du communisme. Formuler la politique étrangère dans le MoyenOrient de cette manière offre une dynamique complètement différente. Par ailleurs, cela permet au président américain de s`attirer du soutien et de la sympathie auprès du Congrès et de l`opinion publique puisque les réalités géostratégiques et économiques (qui sont complexes, voir troublantes) sont très peu mentionnées dans le discours public. En revanche, l`accent est porté sur la confrontation idéologique avec l`Union Soviétique (et le parti Tudeh qui représente aussi le communisme) parce qu`il est plus simple d`obtenir du soutien en stimulant les craintes. Pour ce faire, la rhétorique présidentielle créée un rapprochement entre l`Iran, les intérêts américains et le communisme qui est essentialisé dans des phrases courtes mais chargées sémantiquement. Ceci réduit la complexité de la défense des intérêts en Iran à la menace communiste. Une nouvelle fois, le discours idéaliste crée un écart entre l`intérêt national « réel » et l`intérêt national « exprimé ».

Toutefois, la rhétorique idéaliste peut être utilisée à des fins différentes. La crise angloiranienne de l`AIOC démontre ceci. En effet, Truman utilise cette rhétorique pour maintenir sa stratégie globale malgré la crise de la nationalisation. Pour ce faire, son discours public inclut l`Iran dans la stratégie d`endiguement du communisme. Puis, dans un second temps, son discours privé pourvoit le pouvoir attractif (soft power) des ÉtatsUnis vis-à-vis de l`Iran et la Grande-Bretagne en tentant, dans un premier lieu (avec l`aide de son administration), d`encourager Mossadegh à renoncer à la nationalisation par le dialogue. Ensuite, il essaie d`influencer les deux partis à trouver une solution équitable et diplomatique au conflit. Truman se sert donc de cet outil discursif comme un levier diplomatique qui permet d`amener à des négociations amicales (toujours pour défendre les intérêts de son pays). En revanche, cette voie prend du temps et le président démocrate n`a pas pu aller au bout de sa stratégie.

Son successeur s`est servi de la rhétorique idéaliste à une autre fin : justifier le renversement de régime afin de défendre ses intérêts. Dans un premier temps, son discours montre plus de réalisme puisqu`il se centre davantage sur la défense des intérêts américains. Ensuite, il dissimule le coup d`Etat et sa stratégie de pouvoir de coercition (hard power). Enfin, le discours d`Eisenhower devient idéaliste lorsqu`il s`agit de justifier

le départ de Mossadegh en faisant un rapprochement entre ce dernier et la menace communiste.

Cette recherche offre plusieurs instruments qui permettent d`ouvrir des perspectives pouvant faire l`objet d`une recherche de these. Celle-ci permettrait de se pencher sur l`importance du rôle du discours idéaliste comme outil facilitant la mise en place de la politique étrangère américaine lors du choc idéologique de la révolution islamique, du choc géopolitique de la fin de Guerre froide, et celui du 11 Septembre 2001. En effet, ce mémoire pourrait permettre de servir de base pour comprendre la situation actuelle. Il nous démontre que, le discours idéaliste servant de façade pour défendre les intérêts américains, il est important de considérer les réalités géostratégiques plus que la présentation du conflit idéologique afin de s`engager dans une stratégie politique vis-à-vis de l`Iran. Cette stratégie peut être attractive (soft power) ou bien coercitive (hard power).

Les tensions entre l`Iran et les États-Unis sont présentés sur les bases d`un conflit idéologique depuis la révolution de 1979, mais la crise de la nationalisation et le coup d`Etat de 1953 démontrent que présenter le conflit comme tel détourne l`attention de l`opinion publique afin de défendre les intérêts géostratégiques et économiques. A partir de cela, sur du long terme, nous pouvons nous demander s`il est productif de justifier une stratégie coercitive avec l`outil de la rhétorique idéaliste (stratégie qui vise à sanctionner l`Iran depuis plus de 30 ans afin de l`isoler et probablement d`obtenir un changement de régime).

Par ailleurs, la politique coercitive d`Eisenhower a mis en place la dictature du Shah qui a protégé les intérêts américains. Cependant, cette stratégie a fonctionné seulement sur du moyen terme puisque le peuple iranien a renversé Mohammad Reza Pahlavi. Ensuite, le régime a rapidement véhiculé -- par le biais de sa propre rhétorique -- une vision fondamentaliste et idéologique.227 En effet, depuis, sa création, la République islamique a toujours tenté d`exporter cette vision en galvanisant l`opinion publique arabe et sunnite

227 A noter que certains auteurs pensent qu`il peut exister un lien entre le coup d`Etat de 1953, la révolution islamique de 1979 et les attentats du 11 septembre 2001. Stephen Kinzer explique : It is not far-fetched to draw a line from Operation Ajax through the Shah's repressive regime and the Islamic Revolution to the fireballs that engulfed the World Trade Center in New York.? Stephen Kinzer, op. cit., p.203-204. Par ailleurs, Dr Vali Nasr explique : The three [key] events [that account for ascendancy of fundamentalism] are the Iranian Revolution, the Afghan war, and the rise in the price of oil and its implications for the Saudis. These three events had the following impacts. The Iranian Revolution made fundamentalism a viable ideology for opposition -- one that can successfully overthrow a regime.? Interview de Vali Nasr, Conversations with History; Institute of International Studies, UC Berkeley, WEB. 15 juin 2011. http://globetrotter.berkeley.edu/people2/Nasr/nasr-con5.html Vali Nasr est professeur de sciences politiques à l`Université de San Diego.

avec sa rhétorique idéologique. Les États-Unis se sont engagés dans cette même stratégie discursive qui est en opposition directe et ardente avec la République islamique d`Iran -- principalement après le choc géopolitique causé par la fin de la Guerre froide (puis la défaite de Saddam Hussein en 1991). Du point de vue du discours politique, il y a eu un transfert de la menace communiste à la menace fondamentaliste islamiste. Depuis, la rhétorique idéaliste publique des États-Unis a essentialisé l`Iran et simplifié la complexité des conflits de la même manière qu`elle le faisait à l`égard de l`Union Soviétique pendant la Guerre froide. Par conséquent, le choc géopolitique amène une rhétorique qui avilit « l`ennemi » des États-Unis et la rhétorique présidentielle le présente (avec la façade du discours idéaliste) comme étant un opposant idéologique aux valeurs américaines.

Enfin, l`Iran représente toujours aujourd`hui des enjeux géostratégiques et économiques essentielles pour les intérêts de Washington. Affichant clairement son opposition, la République islamique est un support idéologique pour le discours public américain qui présente toujours la défense de ses intérêts avec une rhétorique idéaliste. Par conséquent, après avoir analysé le coup d`Etat de 1953, la rhétorique idéaliste américaine peut-elle défendre ses intérêts sur du long terme avec une approche coercitive ? Est-il possible de trouver des arrangements gagnant-gagnants en divisant les électeurs de chaque camp avec un discours se basant, avec véhémence, sur une opposition de nature idéologique ? La diplomatie ne doit-elle pas considérer davantage les réalités géostratégiques afin de trouver un consensus qui défende les intérêts de chacun ? Enfin, dans cette région instable et convoitée du Moyen-Orient, quelle est la part du rôle de la rhétorique idéaliste de Barack Obama dans la création du mouvement vert en Iran ? Et, de manière plus générale, sur le printemps arabe ? L`expérience du choc géopolitique du début de la Guerre froide, de la nationalisation de l`AIOC, puis du coup d`Etat de 1953 nous montre qu`il est préférable de se servir de la rhétorique idéaliste pour promouvoir une politique visant l`ouverture diplomatique avec l`Iran -- tout en activant les leviers nécessaires pour garantir la stabilité et la sécurité dans le Moyen-Orient. En effet, cette expérience nous montre que se servir de cette stratégie discursive à des fins coercitives risque considérablement de mettre en péril les intérêts de chacun sur du long terme.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote