Section 2 : La problématique des rites
maçonniques dans la reformulation du sacré
Evoquer une fois de plus la reformulation du sacré,
c'est présenter le Gabon sous le sceau d'une pluralité de rites
initiatiques et ésotériques qui se confondraient à la
limite. C'est l'occasion de voir ici que l'importation de rites nouveaux au
Gabon, liée certainement à la globalisation et la mondialisation
des échanges, conduit ipso facto à la reformulation du
sacré. Il s'agit de voir comment le culte des ancêtres peut
survivre ou soit s'adapter et se remodeler à ces nouveaux rites. Or
n'oublions pas que la rencontre entre ce qui est ancien (le culte des
ancêtres) et ce qui est nouveau (rose-croix, franc-maçonnerie,
Fraternité Blanche Universelles, Ekankar, etc.) va bouleverser l'univers
symbolique des gabonais et leurs croyances, leurs modes de pensée. En
effet, dans ce registre de l'importation des rites nouveaux, susceptibles
d'influencer le quotidien des gabonais, il y a lieu ici de dire que « le
pays dirigé depuis trente quatre ans par Omar BONGO est également
présenté comme haut lieu de concentration du fétichisme et
des sectes internationales. Ainsi de la Franc-maçonnerie, de la
Rose-Croix, de la Prima Curia, de la Fraternité Blanche Universelle, des
« sectes pentecôtistes », etc. »173 On sait
qu'au Gabon, la richesse est inégalement répartie pourtant le
pays a « un revenu per capita de 7500 dollars »174 et que
le prix du baril de pétrole ne cesse de croître et dépasse
le cap des 120 dollars US ; ce qui fait du Gabon un émirat.
Par ailleurs, cette forte potentialité
économique ne profite guère à tous, d'où « la
réussite sociale, qui signifie l'accès à la consommation
des marchandises se lit-elle toujours comme l'expression de l'appartenance
à ces « sectes » et fraternités. Une
représentation qui n'est pas complètement imaginaire, dans la
mesure où existent des transactions financières occultes entre
les sectes internationales et les cercles des pouvoirs d'Etats africains
».175 Il y a comme une redéfinition sinon une
173 Joseph TONDA, Le fétichisme politique,
fétichisme de la marchandise, op.cit., p.2.
174 Ibid., p.2.
175 Joseph TONDA, Le fétichisme politique,
fétichisme de la marchandise, ibid., p.2.
reformulation du sacré qui se traduit par la naissance
et la floraison « des cultes syncrétiques récents
»176 mais aussi « à un florilège de
réseaux religieux et semi-religieux internationaux (maçonnerie,
rosicruciens) »177, dont la prédominance est
indéniable. Il est probable que les adeptes de ces nouveaux cultes que
sont la maçonnerie, Rose-croix, Fraternité Blanche Universelle,
Ekankar, etc., seraient à la fois détenteurs sinon les gardiens
du culte des ancêtres ; et qui transformeraient les rituels lignagers
(culte des ancêtres qu'ils se doivent de perpétrer) à leurs
seuls profits.
Dans un autre cas, si à la veille des élections
politiques dans notre pays, nous assistons à des profanations des
tombes, des crimes rituels, etc., quelques questions subviennent ; telles
pourquoi l'Etat, en tant que garant des institutions et de
l'intégrité physique des citoyens ne réagit-il pas ?
Mieux, le gouvernement ne tient-il pas dans la solidarité des rites
d'obédience maçonnique ? Autrement dit, pourquoi les acteurs
politiques ne s'empressent t-ils pas de résoudre cette question ?
Enfin, comment le pouvoir judiciaire se comporte t-il
lorsqu'un acteur politique est supposé impliquer dans les crimes rituels
? Ces quelques interrogations constituent des perspectives de recherches que
nous pouvons intégrer pour nous aider à comprendre l'influence
des rites maçonniques, dans la reformulation du sacré d'une part
et pour l'ensemble de la société gabonaise d'autre part.
176 Florence BERNAULT, Magie, sorcellerie et politique au
Gabon, op.cit., p.3.
177 Ibid., p.3.
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