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L'expression de la Liberté dans "sous le jasmin la nuit " de Maà¯ssa Bey

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par Abdelkader Belkhiter
Université de Saida Algérie - Magister 2009
  

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Un interdit

Mais l'écrivaine ne conte pas seulement les bouleversantes histoires d'amour des femmes mais aussi leur dur quotidien traversé de souffrance et d'amertume. Ainsi «En tout bien tout honneur » raconte l'histoire d'un couple: leur relation est vouée à l'échec. La famille peut parfois se heurter à de nombreux obstacles. La polygamie est un de ces obstacles à la vie du couple.

Dans la pluparts de ses écrits, et dans un style sobre, confirmé à chaque fois un peu plus, Maïssa Bey aborde, comme on l'a déjà cité, le viol, l'enlèvement, la polygamie, l'autorité masculine, la marginalisation, ...tous ces tabous qui tiennent en otage la femme: « J'ai pensé à une statue, une statue de pierre, et brusquement j'ai compris. C'est ça, me disais-je, je suis pétrifiée » P.35

Cette femme était paralysée, immobilisée, stupéfiée par la décision prise par son mari qui faisait comme si c'est elle qui l'a poussé à se remarier. Elle n'est pas perçue comme une victime, au contraire, elle est responsable de cet acte :

« C'était-il fait conseiller par ses nouveaux maitres, ceux qui connaissent la Loi comme il aimait à le répéter, et qui savaient qu'il fallait rejeter toutes les responsabilités sur moi et mes semblables, comme on se débarrasse d'un morceau d'ordure? Bien sûr, c'est une stratégie imparable, éprouvée» P.38

Mais l'écrivaine dénonce cette conduite qui permet aux hommes de reléguer les femmes pour construire un monde selon leur propre mesure masculine, c'est-à-dire un univers mutilé de la présence de la femme dans leur vie. Ils leur proposent une liberté apparente : « Je t'avais laissé le choix! Et bien mieux encore il avait ajouté : c'est ce que tu voulais». P.37

Maïssa Bey utilise ce qu'on appelle «la transposition » ou « le retard » de l'exposition cité par Raphaël Baroni :

« Cette transposition de l'exposition représente un cas particulier de déformation temporelle dans le déroulement de la fable. [...] Ce retard de l'exposition peut se prolonger jusqu'à la fin de l'exposé: tout au long du récit le lecteur est maintenu dans l'ignorance de certains détails, nécessaires à la compréhension de l'action [...] Cette circonstance ignorée nous est communiquée dans le dénouement. Le dénouement qui inclut des éléments de l'exposition et qui est comme l'éclairage en retour de toutes les péripéties connues depuis l'exposé précédent, s'appelle dénouement régressif. (Tomachevski 1965: 275-276)17(*).

Cette transposition consiste à introduire des ressources de secrets qui mettent l'accent sur les moyens textuels contribuant à tenir en haleine le lecteur et éveille sa curiosité. Le retard d'exposition est clairement exploité dans ce récit. Le lecteur éprouve ainsi une curiosité de connaitre les détails qui suivent cette expression utilisé dans l'incipit par la narratrice : « Il m'a dit, à partir de maintenant tu dois apprendre à vivre avec ça » P.33

Ce détail n'est expliqué qu'à la dixième page de cette nouvelle:

« Il avait un autre chemin à parcourir, un chemin très étroit, celui que traçait pour moi cet homme. Et tant qu'il n'avait pas prononcé la formule magique de répudiation, celle qui a le pouvoir de ravager toute une vie, et bien plus, deux vies dans ce cas précis... » P.42

Ce retard produit le désir de lire et retient le lecteur à sa lecture, tout en lui permettant d'émettre des hypothèses qui pourront être textuellement vérifiées ou infirmées. Maïssa Bey évoque deux thèmes qui ont perturbé la vie d'une famille ordinaire : le divorce et la polygamie : « Avec mon statut de première épouse, déjà mère, je me voyais régner sur toi et sur toutes celles qui pourraient se succéder ici »P.43

L'écrivaine ordonne et restitue à des portraits de femmes, par la pointe de sa plume, la légitimité, la tendresse, mais surtout cette souffrance qui apparaît toujours en filigrane. Cependant, ces aspects, qui ont toujours été maîtrisés, avaient quand même quelques éclats de lumière qui rayonnaient tel l'éternel espoir  que rien finalement n'est jamais perdu malgré la gravité des situations.

La femme algérienne est au coeur d'un conflit interminable, toujours sous la domination de l'homme. Celui-ci, le suprême décideur du sort de sa soeur, de son épouse et de sa mère fait de l'ombre. Il est l'opposant. Celui qui freine la liberté ou la personnalité de la femme dans sa quête d'une authentique personnalisation par le « je».

La plénitude jamais atteinte, Maïssa Bey, comme d'autres romancières suppriment donc symboliquement l'homme:

« Et alors, à cet instant, que fait l'héroïne? Elle tend la main, il a le dos tourné, il ne peut pas voir ce qui se passe derrière lui, elle saisit le couteau. Il est maintenant dans le couloir, elle le suit, pas trop près, en essayant de faire le moins de bruit possible ; l'obscurité du couloir, la folie que peut engendrer le désespoir [...] tout semble la pousser à accomplir le geste fatal...et elle lève la main. (PP 38/39)

* 17 - Baroni, Raphaël, « Tension narrative, curiosité et suspense : les deux niveaux de la séquence narrative », in VOX POETICA, le 6 janvier 2004, p.12.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille