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L'expression de la Liberté dans « sous le jasmin la nuit » de Maà¯ssa Bey

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par Abdelkader Belkhiter
Université de Saà¯da Algérie - Magister 2009
  

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L'écriture comme création :

Chaque écrivain crée des mondes et jouit de cette création. Le verbe est fait pour être entendu. On écrit pour qu'autrui, quelque part, recueille l'essence d'une pensée, pour la rejeter, ou la faire sienne. L'écriture, comme le verbe, est échange et transmission ; et c'est parce qu'elle est échange et transmission qu'elle est libération. Si l'on interrompt son mouvement essentiellement expansif, elle devient aliénation, soliloque infini qui tournera, tôt ou tard, à la folie, en vertu de l'impossible dialogue avec soi-même. L'homme qui fait acte d'écriture sait que sa parole n'est pas vaine ; son verbe est visible, sa parole prend corps.

L'écrivain comme l'écrivaine peuvent être souverains du monde, c'est-à-dire être en mesure de déployer une écriture souveraine. Le verbe reste, pour l'écrivain, organique, démonstrative ; il s'abreuve aux racines de l'être, quand celui de l'homme, libéré de l'obsession d'apparaître, vise à la métaphysique. Il a jusqu'à présent rarement engendré un verbe héroïque, seulement un verbe amoureux. Mais l'écrivaine revendique encore ce corps dont l'homme l'a exilée si longtemps, en même temps qu'il continue à l'y réduire. Voici pourquoi l'écriture féminine demeure majoritairement si dépendante, et pourquoi les personnages qu'elle met en scène restent pris dans le rapport viscéral à l'autre, alors que « l'écriture est la possibilité même du changement » un moyen d'explorer les possibles, de déjouer un destin dont on nous dit qu'il est commandé d'abord par le biologique.

Les femmes portent en elles la blessure, le manque et la béance. L'écriture tente alors de combler ce « manque » imposé, cette plaie infligée, mais ne peut semble-t-il faire l'économie de la sexualité, de l'amour et de l'homme, qui cessent d'être des ingrédients (nécessaires) de l'histoire pour devenir toute l'histoire38(*).

La liberté donnée par l'écriture :

Au cours des vingt-cinq dernières années, un glissement s'est produit dans la théorie et la pratique de la composition des textes, loin du point de vue que ce qui importe le plus en écriture est un produit brillant de perfection qui révèle une maîtrise subtile des règles, des règlements et des modes rhétoriques. Une nouvelle importance a émergé qui engage une conscience du processus d'écrire tout entier et non pas seulement de ses produits. Cela inclut de commencer avec l'angle le plus large possible et de ne resserrer son sujet que plus tard. Cela inclut également d'explorer la liberté et la pureté de l'écriture privée, de la tenue d'un journal, et de « l'écriture libre » telle que l'a développé Peter Elbow et d'autres qui demandent aux écrivains de mettre de côté temporairement les questions de structure, d'organisation et de correction pour laisser la plume courir continuellement pour mettre leurs pensées sur le papier. Cette voie vers la maîtrise de l'écriture est vue davantage par le travail nécessaire pour augmenter son aisance, avec une confiance croissante dans sa capacité à mettre ses pensées et ses sentiments sous une forme écrite, que par la reproduction des différents modèles de la phrase, du paragraphe ou de l'essai.

Pour certains écrivains, comme Maïssa Bey, l'utilisation de « l'écriture libre » pour atteindre l'aisance a été vraiment « libératoire », mais pas pour tous : Elle le dit lors d'une interview :

« Je préfèrerais dire " libératrice ", cela me parle plus. Je le répète souvent, l'écriture est aujourd'hui mon seul espace de liberté, dans la mesure où je suis venue à l'écriture poussée par le désir de redevenir sujet, et pourquoi pas, de remettre en cause, frontalement, toutes les visions d'un monde fait par et pour les hommes essentiellement » 39(*)

Certains trouvent que la liberté  de « l'écriture libre » est une restriction en elle-même et sont incapables de composer avec aisance.

Depuis ses débuts, Maïssa Bey ne s'est jamais accommodé d'un seul archétype pour ses écrits. Avec son style particulier, elle reste imprévisible et ne se plie pas devant les règles de l'art qui risquent d'endiguer son ingéniosité. Son écriture ou plus précisément ses « manières » d'écrire sont perpétuellement remises en question.

Dans ce recueil de nouvelles Sous le jasmin la nuit, Maïssa Bey a choisi de mettre à nu sournoisement une réalité occulte qui recèle une liberté tantôt déclarée et revendiquée, tantôt dissimulée dans un récit éclaté. Elle concilie les exigences d'un public avide de nouveau et un plaisir personnel. La diversité des thèmes abordés et des récits racontés permet à l'auteur de multiplier ses manières d'écrire au profit d'un langage plus expressif et plus significatif. Outre la structure spécifique à chacun des récits, le genre littéraire est aussi plurivalent et variant d'un récit à l'autre afin de procurer à ce recueil un autre aspect de liberté.

Ainsi, à la lecture de ce recueil de nouvelles, en passant d'un récit à l'autre, l'auteur nous fait transiter d'une forme d'écriture à une autre. Le réalisme est au centre de ces récits, il en constitue souvent le fond ou l'arrière plan, même si certains essayent d'échapper à l'emprise du réel pour se situer dans l'irréel et le fantastique. Les moyens les plus simples et les plus évidents qui nous permettent de déchiffrer les récits et de déterminer leur degré de réalisme sont les indicateurs spatio-temporels qui sont cependant assez nombreux dans le texte.

Le degré de véracité est appuyé par la présence d'un certains nombres d'indices spatiaux qui lui confèrent un ancrage dans le social. Les noms de pays, de villes, de quartiers ou de rues existants réellement sont cités à plusieurs reprises. Aussi d'autres indices temporels lui confèrent des repères historiques relativement exacts. Nous aborderons en détail ces différents indices dans une partie ultérieure.

La technique de l'écriture réaliste est de mettre en scène, sur un fond historique précis, des personnages de tous les milieux, de toutes les classes sociales et de toutes les catégories socioprofessionnelles, tel est le cas de tous les récits de ce recueil où le lecteur a affaire à des personnages de milieux distincts (citadins ou ruraux), de tranches d'âges diverses : des vieux et des jeunes, à des classes sociales aussi éloignées les unes que les autres : riches et pauvres, instruits et non-instruits.

Le discours réaliste est un discours persuasif : il cherche à produire l'illusion référentielle. Il est marqué par le sceau de l'évènement immédiat tel que celui du terrorisme accompli dans l'horreur. Le récit se veut conforme à la réalité socioculturelle du lecteur, et varie avec leur variation, il renvoie au contexte extra-linguistique. Telle est la raison pour laquelle Maïssa Bey élargie son champ d'investigations pour essayer de satisfaire la majorité se ses lecteurs.

Son écriture répond à deux exigences : Elle se doit à la fois de donner au lecteur des garanties sur la vérité du savoir asserté et de conférer à ce savoir un statut narratif. D'où le recours, comme le déclare Hamon, au « personnel romanesque » par le biais soit de personnages-prétextes garants de l'information (personnages compétents) comme est le cas de la jeune fille dans «  Nuit et silence » à travers qui le lecteur se permet de vivre, ne serait-ce que pour un court moment, dans une Algérie bouleversée par l'acte terroriste ; elle emporte le lecteur sur les lieux des crimes des terroristes avec les descriptions qu'elle en fait

Ceci dit, il y a d'autres moyens pour exprimer une réalité. Le symbolisme a sans doute plus d'impact sur le lecteur qu'une description sèche du réel. Il s'offre à l'attention de toute personne sans se dissimuler, et tout être humain est potentiellement capable de le percevoir et de comprendre son message malgré qu'il soit par nature ésotérique. Mais son sens fluide et caché permet à tout un chacun de lui attribuer une interprétation différente et son étude n'est jamais achevée. C'est la raison pour laquelle Maïssa Bey a superposé à la réalité décrite un symbolisme plus pittoresque et expressif qui endigue toute tentative d'interprétation exhaustive ou une compréhension totale de son oeuvre, et permet à tout chercheur de mettre en lumière un aspect nouveau. Certes, essayer de déchiffrer tous les symboles serait une aberration outrageuse, néanmoins, nous essayerons de mettre la lumière sur quelques uns des symboles existants dans notre texte, nous chercherons à dévoiler les questions posées et qui sont plus importantes que les réponses en matière de symbolisme.

La liberté est au centre de toute approche, c'est le thème central sur lequel s'articulent tous les autres thèmes. Les symboles sont aussi nombreux, ils se complètent et se renforcent, le sens profond de leur signification n'apparaît que par leur union. Chaque symbole isolément peut avoir plusieurs interprétations, et le sens de son message en est moins précis.

Le mythe est utilisé comme catalyseur afin de dissoudre les conflits de l'existence pour dépeindre la liberté. Nuit, mer, ville, village ou montagne, sont tous présents dans les textes, ils amplifient les différentes formes de silence, de violence ou de liberté que l'on peut retrouver dans ce recueil de nouvelles. Ils cadrent l'espace diégétique et sont les principales clefs de toute tentative d'approche. Les éléments naturels comme le vent, la pluie et l'eau, sont personnifiés. La personnification semble leur donner un certain pouvoir et donc leur accorder un rôle important dans les récits.

Les personnifications, par leur façon d'apparaître dans les différents textes, jouent le rôle de personnage. Cela concerne, dans le récit de « Main de femme à la fenêtre » par exemple, le vent, le la pluie ou le ciel. Le vent, le soleil et la lune semblent plus que vivants, ils sont humanisés :

« ... la lune a décidemment oublié de se retirer ». P.16

« Quelques traînées blanches se dissipent dans le ciel, suivies quelques instants plus tard par des nuages plus compacts qui accourent et s'agrègent dans le ciel pour masquer le soleil. Enfin ! Seraient-ce là les messagers de la pluie ? » P.129

«  Il est tiré de son sommeil par une longue plainte. Il reconnait très vite le mugissement du vent sous la porte-fenêtre de la chambre... » P.129

Le ciel est personnifié et doté d'un pouvoir :

«  Le ciel instamment sollicité, a mis les bouchées doubles. Comme si, dans un accès de générosité exceptionnel, ou pour ne plus entendre les lamentations des hommes, il voulait effacer en un seul jour de longs mois d'aridité et de poussière ». P130

Les mots sont aussi personnifiés :

« Les mots prononcés arrivent jusqu'à elle, elle en recueille quelques-uns pour plus tard, on ne sait jamais, mais une fois qu'ils se sont frayés le chemin jusqu'à sa connaissance, jusqu'au sens, ils restent blottis dans sa gorge et refusent de sortir ». P.153

C'est une écriture de mystère qui refuse de délivrer ses secrets malgré le voile de réalité qui la dissimule. Les symboles sont des procédés de désambiguïsation. C'est un recueil de nouvelles qui vise des couches de lecteurs plus étendues et plus cultivées.

Le réalisme et le symbolisme se côtoient. Dans les récits de «  Nuit et silence », «  Sur une virgule » et «  Main de femme à la fenêtre », « C'est quoi un arabe ? » et « La petite fille de la cité sans nom »,   tous les éléments diégétiques renvoient à une réalité, une ouverture réaliste dans un monde normal, les descriptions minutieuses de lieux, des quartiers, des rues donnent une impression de réalisme excessif, les personnages, malgré l'habillage de réalité dont l'auteur cherche à les couvrir, sont de fiction.

* 38 - http://sisyphe.org/spip.php?article1400

* 39 - http://zaweche.unblog.fr/2008/05/21/maissa-bey-un-auteur-a-lire-absolument-et-le-plus-vite-possible/

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984