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L'expression de la Liberté dans « sous le jasmin la nuit » de Maà¯ssa Bey

( Télécharger le fichier original )
par Abdelkader Belkhiter
Université de Saà¯da Algérie - Magister 2009
  

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La liberté du langage :

Dans un roman ou un recueil de nouvelle, l'écrivain communique sa vision du monde, l'originalité. L'oeuvre littéraire est un produit de travail sur la forme. Le langage utilisé pour communiquer a aussi une fin. L'écrivain valorise la forme de son roman, en inventant des métaphores, en produisant des alliances de mots, en renouvelant des images. A ce niveau, c'est la forme poétique qui domine. Cette fonction accorde une importance particulière à l'aspect «esthétique du message transmis. Elle utilise des procédés permettant de mettre le langage lui-même en valeur.

Aussi la fonction expressive du langage a aussi une fonction importante dans l'écriture littéraire : le texte littéraire a un pouvoir d'évocation. Cela signifie que le message n'est pas explicitement formel, le sens est présent dans les mots, le rythme, les phrases et la sonorité. Pour elle :

« Le côté poétique est un parti pris. Quand j'ai entrepris ce texte qui est quand même assez ambitieux, je me suis dit que je n'avais pas droit à l'erreur. D'abord au plan historique. Il fallait que tous les faits historiques soient vérifiés. La deuxième chose, c'était sur le plan de l'écriture parce que dire des choses atroces telles qu'elles se sont passées, le napalm, les tortures, c'est horrible! Je ne pouvais pas les décrire comme elles se sont déroulées. Il fallait transcender cela par l'écriture. Vous savez, quand on lit des tragédies grecques où il y a les pires des choses qui se passent, les parricides, les matricides, etc. et pourtant, c'est très beau parce que c'est de la littérature, c'est de la création. Je crois que c'est ça que j'ai gardé en tête durant toute la rédaction de ce texte ».40(*)

Maïssa Bey utilise des mots tranchants pour peindre la souffrance du peuple algérien, car rien ne peut décrire ces supplices, ces souffrances physiques ou morales intolérable qu'un mot juste.

Ecriture libre

L'écriture linéaire chemine sans superflu, de mots-clés en mots-liens. D'un point de départ à un autre. Les récits sont cohérents, une cohérence fondée sur l'isotopie et l'anaphore et dont la fonction s'exerce à l'intérieur du texte. Pour R. Martin : « La cohésion textuel se fonde sur des critères comme ceux d'isotopie, d'anaphore... »41(*).

Les phrases, utilisées par Maïssa Bey, sont souvent courtes (deux voire même une seule proposition), sèches, parfois nominales :

Elles comportent dans leurs compositions énonciatives une modalité constituante différente types d'actes. Quelles soient déclaratives, interrogatives ou exclamatives, elles peuvent exprimer autres choses que leurs typologie : « Quand elle devient énoncé, une phrase déclarative peut être bien autre chose qu'une simple déclaration : elle peut être une plainte, une reproche, une menace ». 42(*) 

Il est à noter que la diversité des thèmes, des genres, des lieux et des espaces romanesques, engendre une diversité au niveau du langage utilisé par l'écrivaine. Elle n'a pas utilisé un seul registre langagier, elle ne cesse de changer le niveau de langue tout le long des récits. Nous remarquerons, de façon générale, que ce changement de registres dépend essentiellement de l'espace qui cadre l'action, et des personnages qui participent à cette dernière.

Par ce passage d'un registre à l'autre, Maïssa bey participe à cette volonté de l'auteur de déstabiliser le lecteur qui arrive difficilement à comprendre certains récits. Il se retrouve obligé de puiser dans tous les niveaux de son bagage langagier afin d'accomplir sa tâche, à savoir la lecture, qui désormais n'est plus un moment de détente.

Afin d'amplifier les effets de violence et de la liberté dans ces récits, Maïssa a choisi de multiplier ses styles d'écriture. Ne se contentant pas d'un seul, elle concilie les extrêmes : une langue hautement soignée et parfois poétique, et une autre mimétique de l'oral, populaire. Elle a tenté dans de ce recueil de nouvelle de rendre compte du parlé à l'écrit, en ouvrant les portes de la littérature à l'oralité et rendre ainsi possible une rencontre entre deux mondes. La langue parlée, usuelle, qui caractérise le mode oral est introduite illicitement dans le texte littéraire qui se doit d'être conforme à certaines règles et convenances langagières qui lui confèrent son trait distinctif, à savoir sa littérarité.

Les deux récits : Si, par une nuit d'été et Nonpourquoiparceque, sont les récits les plus marqués par cette oralité. L'inscription de l'oralité dans le texte se fait par divers moyens qui lui assurent l'effet escompté. Parmi ces procédés, nous noterons la ponctuation qui marque fortement cette écriture.

Différents signes de ponctuation sont mis en place afin d'assurer au texte sa dimension orale. Leur fonction joue un rôle irremplaçable dans le mimétisme de la langue orale et sa transcription à l'écrit. Parmi ces signes de ponctuation, nous remarquerons l'abondance des points d'exclamation et des points d'interrogation « !, ? ». Les répliques des deux personnages dans le récit Nonpourquoiparceque en sont l'illustration parfaite :

Ces répliques s'inscrivent plus dans l'oral que dans l'écrit grâce à l'emploi des signes typographiques, en même temps qu'au manque d'indication quant à la prise de parole de chacun d'entre eux. Procédé qui pousse le lecteur à imaginer qu'il s'agit d'une fille et sa mère inconnues, s'échangeant des paroles sans pouvoir coller de noms sur leurs visages. De fait, une telle scène, qui peut se produire dans n'importe quelle famille arabe, est plus appropriée à l'oral qu'à l'écrit.

« Allons ! De l'audace. Préparer soigneusement l'argumentation. Aller au feu. Les mains moites, le coeur battant. Je me lance :

-Tu connais Maya, tu sais... oui, tu connais sa mère, celle qui habite dans la petite maison à coté de la où on va acheter les...

- Oui, et alors ?

- On a compo de maths après demain.

- ...

- Sa mère voudrait que ...

- Que ... quoi ? » p. 91

Un autre signe de ponctuation, utilisé rarement dans les écrits, il s'agit des points de suspension « ... ». Ce signe particulier indique généralement que le l'énoncé est interrompu :

- Soit involontairement par le locuteur :

« - j'ai envie... j'ai envie de jouer, dit doucement Leila » p. 61

« Je veux ... je veux moi aussi m'en aller » p. 66

- Soit parce qu'un personnage coupe la parole à son interlocuteur :

« Je suis invitée à l'anniversaire de ...

- Non !

- Pourquoi ? Toutes mes ...

- Non !

- Mais ...

Tais-toi ! Va ranger les vaisselles !» p. 91

- Soit pour marquer une hésitation :

« -je pourrai enfin laisser libre cours aux envies innombrables qui m'emplissent en vain de leur tumulte. Et d'abord ... » p. 67

- Soit parce que le personnage ne trouve pas la suite à son énoncé :

« Etant donné que tu es une fille .... » p. 90

Ainsi, l'utilisation des points de suspension par l'auteur, lui évite tout commentaire susceptible de décrire l'action qui accompagne la parole émise. Elle permet également aux lecteurs de suivre facilement et rapidement le dialogue sans qu'il n'y ait d'interruptions susceptibles de gêner leur lecture. En somme, ce signe de ponctuation est capable de traduire des émotions particulières des personnages. Il participe en grande partie au reflet de la langue orale dans l'écrit.

Enfin l'utilisation très fréquente des virgules, des points d'exclamation pour renforcer le ton de la phrase et accélérer son rythme :

« - Oui, là, elle a disparu maintenant, mais c'était vraiment une étoile filante ! Nous l'avons vue ! C'est pour toi, c'est un signe, un message ! Oh oui ! Tu peux demander ce que tu veux, le ciel te l'accordera ! » p.66

« - As-tu fait tes devoirs, rangé ta chambre, ramassé tes affaires qui trainent n'importe où, essuyé la vaisselle... » P. 93.

En lisant ces passages, nous remarquerons que l'auteur le truffe de virgules et de points d'exclamation au point où le lecteur arrive aisément à reproduire l'intonation orale. La ponctuation oblige ainsi le lecteur à lire le texte d'une certaine manière et avec certains rythme et ton, préalablement visés par l'auteur.

Bien que le langage des deux récits précédemment cités fasse partie de l'oral, certains passages à l'intérieur des mêmes textes ne relèvent pourtant pas de l'oral et s'inscrivent au contraire dans le langage soutenu et des fois poétique. Tel est le cas lorsque Leila dans Si, par une nuit d'été... par exemple récite, lors d'une de leurs réunions nocturnes, les paroles magiques qui peuvent ouvrir les portes des ténèbres :

«  O vous,

Esprits de la nuit

Dont les souffles raniment les braises

Qui rougeoient au coeur des ténèbres,

Saurez-vous d'un signe

Eclairer la voie

Et dévoiler ce qui est écrit pour elle ? » p.63

Cet écart entre les langages est créé non seulement entre les différents récits, mais existe à l'intérieur d'un même récit. Le mélange d'écritures littéraire et orale, l'alternance de langages et de registres langagiers, donnent un rythme aux différents récits et visent à produire un effet de liberté.

Afin de mieux percevoir cette écriture de l'oralité et afin de faire ressortir ses mécanismes, nous allons essayer d'approcher le texte de plus près. Les règles du français académique, telle que la syntaxe, la bienséance, ne sont pas respectées.

1. La syntaxe :

Les personnages, qui sont pour la majorité des filles et des femmes, utilisent un langage propre à elles. Maïssa a essayé de rapporter dans son recueil de nouvelles, non seulement la vie qu'elles mènent, mais également leur façon de parler pour donner aux différents récits une illusion de réel.

La construction traditionnelle de la phrase : « pronom personnel + verbe + nom » n'est pas respectée. Le démantèlement de la phrase est un trait spécifique à la langue orale. Remarquons la suppression de certains constituants « verbes » et « compléments » de la phrase dans le passage suivant : «  Tenez, maintenant je vais.... » P.57

«  Moi, je suis, enfin, j'étais... la nuit... Leila, ténèbres et velours... obscurité et silence, enfin, je parle du prénom qu'on m'a donné... là-bas...j'aurais préféré être la lumière, Nour...mais ça aussi ... maintenant j'ai le deuxième L de mon prénom ».Pp 49/50

La rapidité de la langue orale nécessite à côté de cette suppression de certains mots, la suppression de certaines lettres aussi. Dans certains cas, il s'agit d'une élision, définie comme la « suppression, dans l'écriture ou la prononciation de la voyelle finale d'un mot devant un mot commençant par une voyelle ou un h muet  »

* 40 - http://www.lexpressiondz.com/article/3/2008-05-22/52837.html

* 41 - Jean Cervoni. L'énonciation. Paris, PUF, 1987. Page 20

* 42 - Ibid. Page 20

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault