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Savoirs et savoir- faire locaux face aux politiques agraires: diagnostic d'un système agraire dans un village Khamou ou du Nord Laos

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par Pierre- Yves Heurtier
Université Aix-Marseille 1 - Master 2 anthropologie sociale et culturelle 2006
  

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2.2. Le cadre juridique agricole et forestier national 61 :

Sur le terrain, les diverses « appartenances » locales peuvent se juxtaposer mais aussi se succéder, s'imbriquer ou se superposer. La mise en place d'une politique de conservation de la biodiversité, n'est donc pas une simple question d'articulation entre scientifiques et acteurs locaux. C'est surtout la confrontation d'organisations territoriales, de représentations de la nature et de la société radicalement différentes. Les particularités statistiques (équilibre entre les éléments) et qualitatives (présence d'éléments rares, d'endémisme...) qui ont pour les scientifiques la garantie d'une bonne biodiversité, ne sont pas forcément valorisées par les cultures locales. L'anthropologie juridique nous apprend que les conceptions territoriales des communautés rurales, dissociant par exemple la propriété de la terre et l'accès à ses ressources, ne sont guère compatibles avec les délimitations géométriques de l'espace62.

Avec les savoirs-faire naturalistes locaux, la question des droits de propriété intellectuelle (qui correspondent aux droits des paysans à sélectionner et utiliser les semences) et territoriaux sont propulsés sur le devant de la scène car ils correspondent à des ressources biologiques à conserver.

2.2.1. Historique :

En 1975 le nouveau régime politique reconnaît que le problème principal dans le domaine agricole n'est pas une répartition inégalitaire du foncier mais une diffusion insuffisante des techniques modernes retardant l'émergence d'une agriculture moderne intensive.

Le programme de collectivisation appliqué entre 1975 et 1979 visait justement à intensifier l'usage du sol et augmenter la production rizicole en mettant en commun les moyens de productions et en réformant l'organisation du travail. Il fut dans une large mesure un échec.

Dans les années quatre-vingt, une réorientation stratégique se fait, répondant aux pressions des bailleurs de fonds (Banque Mondiale et Fonds Monétaire International) dont ils deviennent dépendant après la disparition des aides provenant du bloc soviétique.

58 GoL 2003 : 55.

59 UNDP 2001 : 74.

60 L. Chazée, 1998 : 186- 189.

61 Source tirée d'O. Evrard, 2004.

62 E. Le Roy, 1999; O. Evrard, 2004.

Les bailleurs conditionnent le versement de leurs aides en partie à la réalisation d'un droit foncier63.

Dans le domaine forestier il s'agit d'établir un recensement et un contrôle strict des surfaces boisées afin de gérer les revenus qu'elles procurent ou pourraient procurer à l'Etat. Il s'agit donc dans le domaine agricole de stopper la déforestation par le développent de l'économie de plantation et d'une agriculture sédentaire, commerciale, jugée plus productive que l'agriculture sur brûlis cyclique. L'objectif est ainsi d'éradiquer l'agriculture d'abattis brûlis en limitant les surfaces disponibles à ses effets et en sécurisant les droits des agriculteurs pour leur permettre d'investir durablement sur leurs terres. Ces deux éléments doivent permettre d'augmenter les recettes fiscales de l'Etat par l'intermédiaire de la collecte de taxes foncières sur toutes les parcelles cultivées.

En 1986, le 4e Congrès du Parti Communiste marque une libéralisation de l'économie. Les dirigeants socialistes acceptent d'introduire la propriété privé et la libre entreprise au Laos. Les réfugiés sont autorisés à revenir dans le pays et l'Etat leur reconnaît le droit de récupérer leurs terres lorsque celles ci ont été mises en valeur pendant leur absence par des membres de leurs familles.

Les rizières nationalisées après 1975, redeviennent propriétés des villages.

Le gouvernement, aidé par des spécialistes des bailleurs de fonds, élaborent une législation forestière nationale déjà débutée dans les années soixante-dix avec cinq grandes catégories de zones forestières (Forêts de production, de conservation, de protection, de régénération et dégradées)64 et mettent en place un programme d'allocation foncière visant à sédentariser et à intensifier les systèmes agraires, let motif de cette période.

L'allocation des terres constitue l'une des six grandes causes nationales relatives au développement rural et à la gestion des ressources naturelles. Les autres causes nationales pour le développement rural sont la création de zones nationales de conservation de la biodiversité, la sédentarisation de l'agriculture, l'éradication de la culture de l'opium, des programmes forestiers communautaires et les déplacements et regroupements de populations dans les zones focales.

L'allocation foncière se donna pour but de faire disparaître complètement l'agriculture sur brûlis d'ici 2010, d'intensifier et de diversifier l'agriculture de montagne, de protéger les forêts des bassins versants, de protéger la biodiversité, de classifier les sols forestiers et agricoles nationaux, de clarifier et sécuriser les droits pour chaque parcelle, d'encourager les investissements permettant l'intensification agricole, d'améliorer les conditions de vie des montagnards par l'adoption de modes de vie sédentaires.

La théorie sous-jacente de la réforme foncière est que l'individualisation des droits permet leur sécurisation par l'investissement sur des terres en cultures sédentaires qui facilitent les crédits en garantissant fiscalement les terres. Cet investissement faciliterait le développement du secteur agricole et contribuerait à la réduction de la pauvreté. Les marchés fonciers faciliteraient une répartition optimum des terres, c'est à dire une affectation approprié des terres

63 Voir la liste exhaustive des réformes structurelles à entreprendre dans un article de Yves Bourdet : « Le processus de transition laotien et ses résultats, 1980-1994 », Les cahiers de la Péninsule, n°3, 1995 : 78-79.

64 La Loi sur la forêt n°96/NA11, datant de 1996.

à ceux qui ont les moyens de mettre chaque différentes terres en valeur. Cette logique repose sur des présupposés critiquables :

- Les systèmes fonciers coutumiers seraient totalement étrangers au système de la propriété privé.

- Les systèmes fonciers traditionnels seraient nécessairement peu sécurisant.

- Ils seraient trop rigides et empêcheraient l'affectation optimum des ressources. Le marché posséderait par contre cette vertu.

- L'accès au crédit permettrait l'enrichissement d'une majorité de personne.

Des expériences antérieures, comme en Thaïlande, ont pourtant montré que la privatisation des terres à entraîné une insécurité foncière pour les petits agriculteurs, favorisé la spéculation foncière et accéléré l'exode rural65.

Pour parvenir aux objectifs fixés, les programmes de l'allocation des terres incluent un zonage des finages basé prioritairement sur le degré de pente des terres considérées, une planification de l'affectation des espaces à tel ou tel type de production, l'introduction de cultures commerciales et de vergers, l'amélioration des réseaux de transports et des connections avec les marchés locaux, la généralisation des systèmes de micro-finance et la délivrance de titres fonciers.

En 1996, un décret du premier ministre sur l'allocation des terres66 insiste sur la nécessité de transformer les terres cultivées de façon itinérante en terres agricoles permanentes ainsi que sur les besoins de former des personnels en charge d'appliquer ces procédures. Le programme National de l'éradication de la Pauvreté (NPEP) identifie 47 districts absolument prioritaires parmi les 72 districts prioritaires localisés essentiellement dans les provinces du Nord sur les 142 que compte le pays. Les services du ministère de l'Agriculture et des Forêts (FIPD, RSEC) ainsi que des organismes techniques plus ou moins autonomes (NAFRI, NAFES) et aidés par différents programmes étrangers (Coopération bilatérale suédoise, IRD, CIRAD, FAO...) sont donc chargés de travailler chaque année dans six districts afin de récolter les données, former les personnels locaux, effectuer les études de suivi, initier une dynamique d'allocation foncière.

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