WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Environnement urbain et changements familiaux au Bénin. Cas des migrants Lokpa de Parakou

( Télécharger le fichier original )
par Moussa YACOUBOU
Université d'Abomey-Calavi (Bénin) - Diplôme d'études approfondies, option : gestion de l'environnement 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3.2.2 Mariage

Le mariage pour Balandier in M. Koné et N. Kouamé (2005 : 66-67) est : « un contrat social de durée indéterminée qui lie non seulement deux individus, mais deux groupes. Du côté de l'homme, le mariage assure la continuité de la lignée, l'aide apportée par le travail de la femme et de la possibilité de multiplier les dépendants. Du côté de la femme, le mariage socialise sa fécondité et sa puissance dans le travail. Il lui donne un statut légal en libérant son capital créateur. Le mariage lui-même est une institution avec ses règles et son mode de fonctionnement interne ».

Si, dans le passé, ce sont les parents du mari qui entreprennent les démarches à l'endroit de la famille de la fille pour négocier les préalables de l'union, aujourd'hui, c'est le jeune homme lui même qui fait d'abord le choix de son amie avant de la faire connaître à ses parents un ou deux ans plus tard. L'identification et le choix de la femme dès la naissance de la fille par le père de l'homme, ne constituent plus la démarche de la jeune génération dans le choix de l'épouse. Un chef de ménage constate le changement des démarches matrimoniales en ces termes :

« C'est maintenant que vous vous dites qu'on ne doit pas forcer quelqu'un pour lui donner de mari. Entre temps, c'est ton père qui doit aller voir le papa de la fille. C'est eux qui s'entendent d'abord avant qu'ils n'ordonnent d'aller demander sa main. Quand j'avais ma fiancée si c'est elle qui marche sur le même chemin que moi, en me voyant, elle change de chemin, et moi de même. Vous ne devez pas causer, ni échanger. C'est ton père qui te dit : `'j'ai demandé la main de telle fille pour toi `' et c'est fini ». (Abdoulaye Taïrou, 44 ans, cultivateur, Banikanni, 28.03.2006)

61

ENVIRONNEMENT URBAIN ET CHAGEMENTS FAMILIAUX

La question des prestations matrimoniales (ensemble des biens et services que doit offrir le mari à la famille de sa femme avant le mariage) depuis une vingtaine d'années a été revue par les sages de Ouaké et leurs recommandations sont suivies ici à Parakou, aussi bien par les familles musulmanes que par celles catholiques. Les investissements humains qui continuent de se faire à Ouaké dans les champs des parents de la fille par le fiancé, ses parents et amis, sont ici remplacés par les cadeaux de savon, du sel et d'argent. Le jeune fiancé et ses parents n'envoient pas les produits de leurs récoltes aux parents, mais attendent la période de célébration de mariage pour remettre une somme variant entre 50 et 60.000 F aux beaux parents pour la constitution du trousseau de mariage. Mais de plus en plus, les migrantes nées ou ayant séjourné longtemps à Parakou souhaitent célébrer des mariages plus coûteux.

Pour les fidèles de l'Eglise des Assemblées de Dieu, le mariage se célèbre avec moins de 30.000 F, car, dans ce système, la dot et les différentes dépenses matrimoniales ne comptent pas, l'essentiel est que l'union soit bénie dans " la maison de Dieu ". Mais, cela n'empêche pas que l'homme dépense de l'argent pour son épouse pour l'obtention d'un diplôme professionnel, ou pour le petit commerce.

Dans les familles musulmanes, il existe également des stratégies de contournement qui consistent pour l'homme à cumuler baptême de l'enfant et mariage sans payer les 50 ou 60.000 F. Toutefois, il prend l'engagement de payer ladite somme aux beaux parents (pour sa femme) dès que les circonstances le permettraient. Ce sont donc les mariages préférentiels qui sont pratiqués de façon fréquente aujourd'hui dans la société Lokpa, contrairement aux mariages prescriptibles d'antan. Comme l'ont soutenu Mariatou Koné et N'Guessan Kouamé, « Dans une société africaine où la procréation est un facteur très important d'intégration sociale, le célibat, à partir d'un certain âge,

62

ENVIRONNEMENT URBAIN ET CHAGEMENTS FAMILIAUX

n'est plus toléré. L'être humain complet ne se réalise que dans l'état du mariage » (2005 :71). Ainsi à partir de 25ans, une fille sans fiançailles ni mariage, subit déjà les critiques des parents et amis. Chez les hommes, les critiques commencent à partir de la trentaine. Actuellement, les dépenses matrimoniales en milieu lokpa sont modestes par rapport à la pratique courante des familles autochtones qui dépensent en moyenne 500.000 F. Un jeune marié présente le tableau suivant :

« Nous l'avons fait comme les musulmans le font. Je l'ai dotée avec 10.500 F et la cola de 4.500 F. Pour célébrer le mariage, on dépose 10.000 F pour les alfas. Pour les pagnes, nous avons acheté, quatre pagnes. Ce sont les parents qui ont acheté. Dans la religion musulmane, elle achète de son côté et vous de votre côté, vous achetez sept pagnes, plus deux paires de chaussures, trois tèkentè (voiles) et un bouta (une bouilloire). Le reste, colporte, bols, ce sont elles qui vont acheter. Mais si tu n'as pas acheté les pagnes, tu leur donneras l'argent pour acheter. Si tu as acheté un peu, elle complète à ce colis ce qu'elle a pu réaliser depuis qu'elle était jeune. Les 7 pagnes que j'ai achetés coûte environ 60.000F ». ( SARE Alidou 32 ans, ex coiffeur devenu zémidjan, niveau CM2, marié, père d'un enfant,Banikanni,04.04.2006)

En anthropologie, la dot requalifiée sous le terme de compensation matrimoniale, est définie comme : « l'ensemble des biens que donne la famille d'un homme à la famille de son épouse au moment (ou avant) le mariage. La fonction de cette institution est de sceller le contrat de mariage, de légitimer la future descendance, de dédommager le groupe de la femme pour la perte d'un de ses membres » (M. Koné et N. Kouamé 2005 :85). Aujourd'hui le payement de la dot qui se faisait sous forme d'investissement humain et de dons de produits agricoles est totalement monétarisée. Les biens entrant dans les prestations matrimoniales varient légèrement suivant la puissance économique de l'époux, comme l'illustrent les propos suivants :

63

ENVIRONNEMENT URBAIN ET CHAGEMENTS FAMILIAUX

« Nous avons fait 2 ans de vie en union libre, c'est quand j'ai accouché que mon mari a demandé ma main. Il a amené une calebasse de colas plus 20. 000 F, et 2.015 F à ses grandes soeurs qui ont amené le colis à mon père qui l'a accepté. Pour le mariage, normalement il devait amener 100 000 F à mon père. Mais comme il avait le baptême à faire, il ne l'a pas encore fait. C'est maintenant qu'il se prépare. Il va acheter une valise, 4 Hollandais, 4 Côte d'Ivoire, 3 Ibo-mè, 5 Fancy, 18 voiles, 4 paires de chaussures, des bijoux que j'irai choisir moi-même, et 5 ou 10 foulards. L'homme n'est pas obligé d'acheter les bols ». (MOUSSA Alima, 30 ans, apprentie coiffeuse, mère d'un garçon de quatre semaines, Zongo, 12.04.2007)

Les pratiques matrimoniales ont subi de profonds bouleversements aussi bien dans la forme que dans le contenu. Depuis la décision de l'union, des apports matrimoniaux effectués jusqu'à la consommation du mariage, les différents acteurs engagés dans cette institution, ont adapté leurs stratégies aux réalités de leur temps.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld