II. CADRE CONCEPTUEL
La finance islamique est souvent étrangère aux
acteurs évoluant dans le système classique. Elle trouve sa
particularité sur le fondement de ses principes de base et sur ses types
de produits avec une gestion de risque un peu spécifique par rapport
à la finance conventionnelle. Nous allons définir, à
travers ce sous chapitre, quelques notions utilisées qui
régissent la finance islamique.
1. La finance islamique : Elle est
définie comme un système financier s'organisant autour de
mécanismes, d'institutions et de produits qui doivent respecter
l'ensemble des principes philosophiques édictées par la Loi
islamique ou Charia. Donc la Charia est la justification de
base permettant la distinction entre la finance islamique et la finance
conventionnelle.
2. La Loi religieuse islamique (Charia)
: Pour les musulmans la Loi islamique ou Charia est une Loi
divine révélée qui dicte l'humanité sa conduite de
vie. Elle englobe tout et couvre non seulement la pratique religieuse mais
également de façon dont les musulmans doivent mener leur vie et
conduire leurs affaires. L'autorité de la Charia provient en
premier lieu du Coran et de la Sounna, viennent ensuite
l'al-Ijmah (consensus) et l'al-Qiyass
(raisonnement par analogie).
- La première, le Coran, transcrit la Parole
d'Allah et représente la base juridique du droit musulman. Le coran
signifie littéralement récitation, communication orale
ou message.
- La deuxième, la Sunna, est l'ensemble des
paroles et d'actes du Prophète Mouhammad ainsi que son approbation des
actions ou pratiques d'autrui. Ces dires ont été recueillis par
voie de transmission et sont appelées des ahadiths.
- La troisième, l'al-ijma, traduit le
consensus des théologiens musulmans sur un sujet donné. Tant
qu'elle ne contredit pas les précédentes sources des lois
islamiques, elle est considérée comme légitime.
-La dernière, l'al-Qiyas, signifie le
raisonnement par analogie. Elle est extrait des deux sources principales, le
Coran et la Sounna, des actes déroulés dans le
passé et étant applicables par analogie aux faits
présents.
3. Le fiqh : c'est un terme
décrivant l'ensemble du corpus de la jurisprudence islamique. Il couvre
tous aspects de la vie, de la religion, de l'ordre politique, social et
économique. En plus des questions purement religieuses telles que la
prière, le carême, la zakat ou le pèlerinage, il
s'étant aux lois concernant le code de famille, les successions, le code
pénal, le droit constitutionnel, les relations internationales en temps
de guerre comme en temps de paix. Alors que le Coran et la Sounna sont
immuables, les verdicts du fiqh peuvent changer selon les
circonstances.
Définition de quelques principes financiers
islamiques
1. La Riba : Le terme
« Ribâ », traduit par la plupart des linguistiques
arabophones par « usure » ou « intérêt »,
vient du verbe « raba » qui veut dire « augmenter
». Il signifie en Islam l'accroissement de toute chose par la simple
application du taux d'intérêt.
2. Maysir : signifie jeu
de hasard
3. Gharar : Le terme Gharar
signifie littéralement incertitude ou hasard c'est à dire un
échange dans lequel un ou plusieurs éléments de la nature
du bien n'est pas encore connu. C'est l'équivalence de la
spéculation en finance conventionnelle.
4. La Zakat : La Zakat
constitue le troisième pilier de l'Islam. Littéralement,
elle a plusieurs significations : la croissance (on l'utilise
en langue Arabe pour parler d'un champ de blé qui pousse) ; la
pureté (déduite du verset coranique : « Par
quoi tu les purifies ».30) ; la droiture
(pour parler d'un homme dont la droiture est exemplaire par
référence au verset coranique : « Si ce n'est la
grâce d'Allah sur vous et Sa miséricorde, aucun de vous n'aurait
pu rester droit »31
).
32
Elle est conçue comme une alternative par rapport aux
contraintes de la finance islamique et permettre le développement social
grâce à sa redistribution au prés des
bénéficiaires qui sont au nombre de neuf (9).
Ces derniers sont cités dans le verset suivant :
« Les aumônes ne sont destinées qu'aux pauvres et aux
indigents, à la rétribution des percepteurs, au ralliement des
bonnes volontés, à affranchir
30 Coran, sourate Tawba (Le
Repentir), verset 103.
31 Coran, sourate La Lumière, verset
21.
32 BID, Institut Islamique de Recherche et de
Formation (IIRF), « La Zakat et le Waqf ». Mai 1997.
L'Analyse des produits financiers islamiques et la gestion des
risques : Moucharaka et Mourabaha
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des nuques (esclaves), à libérer des
insolvables, à aider dans la voie de Dieu et à secourir le fils
du chemin : autant d'obligations de par Dieu. Dieu est Omniscient et Sage
».33
Définition de quelques produits financiers
islamiques
1. La Moudaraba : C'est un produit
financier islamique qui associe au sein d'une banque islamique le capital et le
travail afin de partager entre l'établissement bancaire et
l'entrepreneur les risques et les bénéfices de
l'opération.
2. La Moucharaka : c'est un produit
financier islamique qui fait intervenir plusieurs associés dans l'apport
au capital mais aussi à la gestion du projet. Les
bénéfices sont distribués selon les ratios
prédéterminés. Les pertes, en revanche, sont
partagées au prorata de la participation au capital.
3. La Mourabaha : c'est
une vente avec marge bénéficiaire déterminée. Le
paiement se fait dans une période de temps donnée, soit par des
versements échelonnés, soi en une seule fois.
4. Le Salam : c'est une
vente par laquelle le montant est payé en avance par l'acheteur alors
que la livraison de la marchandise se fait dans une date ultérieure. Le
Salam est une exception à la règle générale de la
Charia qui n'autorise pas la vent d'une chose qu'on a pas sous la main.
Pour un rapport plus complet sur les termes islamiques
utilisés dans ce mémoire nous vous renvoyons sur la rubrique
« Glossaire des termes utilisés »(p.69).
Quelques définitions des organismes financiers
islamiques
1. L'Organisme de Comptabilité et d'Audit
pour les Institutions Financières Islamiques (OCAIFI ou
AAOIFI) : Depuis 1990, date de la création de la
Financial Accounting Organisation for Islamic Banks and Financial Institutions
(FAOIBFI) et rebaptisée quelques années après Accounting
and Auditing Organisation for Islamic Financial Institutions (AAOIFI),
l'harmonisation des normes comptables a connu d'énormes
améliorations. Cette organisation développe des normes dans
différents domaines dont la comptabilité, l'audit, la gouvernance
d'entreprise, les codes de conduites ainsi que la conformité avec les
principes de la Charia.
L'AAOIFI est à la comptabilité islamique ce que les
IFRS sont à la comptabilité conventionnelle. Il existe trois
situations distinctes auxquelles fait face l'AAOIFI.
33 Coran, sourate 9, verset 60.
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risques : Moucharaka et Mourabaha
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La première intervient lorsque les IFRS ne satisfont
pas entièrement les exigences des IFI. Dans ce cas, l'AAOIFI émet
des normes qui sont à appliquer aux IFRS existantes. La deuxième
alternative intervient lorsque les pratiques et les transactions
financières lui sont propres. L'AAOIFI érige alors des standards
non couverts par les l'IFRS, c'est le cas des produits Moucharaka et
Moudaraba. En fin lorsque les IFRS sont en parfaites
compatibilités avec les principes de la Gharia, l'AAOIFI adopte
ces IFRS qui sont appliqués par les IFI.
2. Le Conseil des Services Financiers Islamiques
(CSFI ou Islamic Financial Service Board) : C'est une
organisation internationale créé en 2002 et basée a Kuala
Lumpur. Elle émet des standards de réglementation et de
surveillance permettant la stabilité et la solidité du
système financier islamique dans son ensemble.
3. L'Institut Islamique de Recherche et de
Formation (IIRF) : C'est un département au niveau de la
BID. Il est composé de chercheurs et de spécialistes qui ont pour
but d'analyser et d'enseigner les questions et les aspects liés à
la finance islamique comme la gestion des risques, les techniques de
financement islamique, etc.
4. L'IIFS (Institutions offering only Islamic
Financial Service): Il regroupe les institutions
n'offrant que les services financiers islamiques. Cependant les institutions
d'assurances islamiques (les Takafful) n'en font parti.
Les normes standards que le Conseil des Services Financiers
Islamiques (CSFI) rédige, sont destinées à ces
institutions pour une meilleure gestion des risques de crédits.
5. La Banque Islamique de Développement
(BID) : C'est une institution financière
internationale fondée en 1975 et basée à Jeddah
(Arabie Saoudite). Elle compte 56 pays membres. La BID vise au
développement économique et au progrès social dans ses
pays membres et à l'appui des communautés musulmanes dans les
pays non membres en conformité avec la Gharia. Les missions de
la BID sont l'engagement dans la réduction de la pauvreté, la
promotion du développement humain, le développement de la
coopération entre les pays membres, en collaboration avec ses
partenaires de développement. Elle intervient dans les domaines de la
science et de la technologie, de l'économie islamique, de la banque et
de la finance.
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