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La protection de la santé comme limite à  la liberté d'entreprendre

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par Thomas BERTRAND
Université Montesquieu Bordeaux 4 - Master 2 droit de la coopération économique et des affaires internationales 2012
  

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II - Portée juridique de la liberté d'entreprendre : une place importante dans la hiérarchie des normes

Comprendre la portée juridique de la liberté d'entreprendre ne peut se faire en ignorant son quasi alter égo. Il nous faudra pour cela étudier la valeur juridique de ces principes (A) avant de les confronter (B).

A - La valeur juridique des libertés d'entreprendre et du commerce et de l'industrie Valeur juridique de la liberté du commerce et de l'industrie

Principe général du droit. Tout d'abord, notons que la liberté du commerce et de l'industrie connait plusieurs apparitions expresses dans la loi10 et dans des arrêts du Conseil d'Etat11, qui se réfère plus souvent à ce principe qu'à celui de la liberté d'entreprendre (le Conseil Constitutionnel se référant quant à lui à la liberté d'entreprendre). Par ailleurs, la liberté du commerce et de l'industrie a été reconnue comme un principe général du droit12 (règle jurisprudentielle applicables sans texte), ce qui explique notamment que le Conseil d'Etat ne se réfère pas nécessairement au décret d'Allarde quand il évoque cette liberté.

Quelles sont les conséquences de cette qualification de principe général du droit ? La doctrine est partagée sur la valeur juridique des principes généraux du droit et donc sur leur place dans la hiérarchie des normes. Selon M. CHAPUS, ils ont une valeur infra-législative et supra-décrétale. Mais selon M. GENEVOIS, cette approche parait trop réductrice « alors que le droit comparé nous montre qu'il peut y avoir des principes constitutionnels non-écrits. »13 Ainsi l'auteur défend la thèse selon laquelle on peut aussi bien « faire dépendre la valeur juridique

10 Voir par exemple les articles 5 et 48 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

11 Voir par exemple, CE, 4 mars 1910, 29373, publié au recueil Lebon

12 CE Ass., 20 décembre 1935, Éts Vezia (Lebon T. 1212, RD publ. 1936. 119, concl. R. Latournerie) : « Le Conseil d'Etat admet que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie est applicable dans les colonies soumises à une législation autonome et dans lesquelles la loi de 1791 n'avait pas été promulguée » (V. LATOURNERIE, concl. RD publ. 1936. 127. - F. DREYFUS, op. cit., p. 227)) ;

CE Ass., 22 juin 1951, Daudignac (à propos de la décision du maire d'une commune de soumettre à autorisation préalable l'activité de photographie dans les rues) ;

CE Ass., 13 mai 1983, Sté René Moline ;

CE, 13 mai 1994, Présid.de l'assemblée territoriale de la Polynésie française

13 GENEVOIS B., « Principes généraux du droit », Répertoire de contentieux administratif, Dalloz

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d'un principe général du droit du point de savoir s'il est le fruit de l'interprétation d'un texte ou procède d'une reconnaissance par le juge à partir de l'esprit général de la législation. Dans le premier cas, la valeur du principe est fonction du niveau dans la hiérarchie des normes du texte interprété. [...] Lorsqu'un principe ne peut, prima facie14, être rattaché à un texte constitutionnel ou conventionnel [...] il paraît logique de s'en tenir à l'affirmation de sa valeur infra-législative et supra-décrétale. Mais de tels principes sont toujours susceptibles de faire l'objet d'une promotion ultérieure, pour autant qu'ils viendraient à être pris en considération par le juge constitutionnel ou trouveraient un équivalent dans l'interprétation que reçoit le droit conventionnel. »15

Il semblerait ainsi que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie étant issu de la loi des 2-17 mars 1791 ait, en tant que principe général du droit, une valeur législative.

Liberté publique. Ensuite, la liberté du commerce et de l'industrie est une liberté publique placée par l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 sous la sauvegarde du législateur.16

Quelles sont les conséquences de cette qualification ? Cela signifie, en théorie, que le législateur est exclusivement compétent pour réglementer les garanties fondamentales de l'exercice de la liberté du commerce et de l'industrie, à savoir, étendre ou restreindre le domaine dans lequel elle s'exerce. Mais, comme le souligne M. GUIBAL, cela « n'implique évidemment pas une compétence exclusive du législateur pour réglementer directement toutes les formes de son exercice. Elle implique une exclusivité du législateur soit pour réglementer intégralement - si cela est techniquement possible - telle ou telle modalité d'exercice de la liberté, soit - ce qui est beaucoup plus fréquent pour des raisons techniques - pour fixer aux autorités administratives les limites à l'intérieur desquelles ces autorités auront compétence pour encadrer l'exercice de la liberté. »17 Ainsi, à titre d'illustration, on peut noter qu'en l'absence de loi, la subordination par le maire d'une commune de l'exercice d'une activité économique à la délivrance d'une autorisation préalable est contraire à la liberté du commerce

14 Expression latine signifiant « Au premier regard »

15 GENEVOIS B., op. cit. Note 12

16 CE Sect., 18 octobre 1960, Martial de Laboulaye ; CE Ass., 22 juin 1963, Syndicat du personnel soignant de la Guadeloupe, Rec. CE, p. 386 (le gouvernement ne peut porter atteinte au « libre accès à l'exercice par les citoyens de toute activité professionnelle n'ayant fait l'objet d'aucune limitation légale »)

17 GUIBAL M., op. cit., note 5

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et de l'industrie.18 Il existe de nombreuses limitations réglementaires à la liberté du commerce et de l'industrie, mais elles ne sont possibles que par habilitation législative, la loi étant garante de cette liberté.19

Enfin, le Conseil Constitutionnel n'a pas reconnu de valeur constitutionnelle à la liberté du commerce et de l'industrie, ce qui n'est pas le cas de la liberté d'entreprendre.

Valeur juridique de la liberté d'entreprendre

Valeur constitutionnelle. Par une décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982 dite « Nationalisation », le Conseil Constitutionnel a reconnu comme principe à valeur constitutionnelle la liberté d'entreprendre. Le Conseil précisera dans cette même décision que « la liberté qui, aux termes de l'article 4 de la Déclaration, consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, ne saurait elle-même être préservée si des restrictions arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d'entreprendre. »

Le Conseil a toutefois précisé la même année, concernant la liberté de communiquer et la liberté d'entreprendre, que « ces libertés qui ne sont ni générales ni absolues ne peuvent exister que dans le cadre d'une réglementation instituée par la loi (...).20

Ainsi, « il est loisible au législateur d'y apporter [au principe de la liberté d'entreprendre] des limitations exigées par l'intérêt général à la condition que celles-ci n'aient pas pour conséquence d'en dénaturer la portée. »21

De même, le législateur peut apporter à cette liberté des limitations « liées à des exigences constitutionnelles »22 comme par exemple l'objectif constitutionnel du pluralisme23. Ainsi, cette liberté doit être conciliée avec les autres principes à valeur constitutionnelle, notamment

18 CE, 22 juin 1951, Daudignac

19 Outre la jurisprudence Laboulaye précitée ; CE, 22 mars 1991, Association Fédérale des Nouveaux Consommateurs et Société Tousalon

20 CC, 82-141 DC, 27 juillet 1982

21 CC, 89-254 DC, 4 juillet 1989, Loi modifiant la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations

22 CC, 2000-433 DC, 27 juillet 2000

23 CC, 2000-433 DC, 27 juillet 2000

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issus du Préambule de 1946, à condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivit.24

En résumé, le législateur peut apporter des limites à la liberté d'entreprendre si elles sont justifiées par des exigences constitutionnelles ou par l'intérêt général et à la condition de respecter le principe de proportionnalité au regard de l'objectif poursuivi.25 Ainsi on peut dire que la loi ne peut remettre en cause substantiellement la liberté d'entreprendre mais elle peut et doit la mettre en oeuvre.

Outre le contrôle de conformité des lois à la liberté d'entreprendre opéré par le Conseil Constitutionnel, le Conseil d'Etat a pu examiner la conformité d'actes administratifs à la liberté d'entreprendre26 ou à la protection de la santé.27 En effet, « lorsqu'il ne fait pas application de la théorie de l'écran législatif28 (...), le juge administratif opère un contrôle de constitutionnalité direct de l'acte administratif dans deux hypothèses : quand l'acte

24 CC, 2004-509 DC, 13 janvier 2005, Loi de programmation pour la cohésion sociale : « pour poser des règles propres à assurer au mieux, conformément au cinquième alinéa du Préambule de 1946, le droit pour chacun d'obtenir un emploi, il peut apporter à la liberté d'entreprendre des limitations liées à cette exigence constitutionnelle, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi»

25 CC, 2010-55 QPC, 18 octobre 2010 : « Il est loisible au législateur d'apporter à la liberté d'entreprendre, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi. »

26 CE, 9 nov. 2007, req. no 257252 ; CE, 10 juin 2009, req. no 318066

27 CE, 2 juill. 2007, req. no 295685

28 « Le juge administratif français s'est traditionnellement refusé à opérer un contrôle de constitutionnalité des lois, qu'il s'agisse d'un contrôle direct ou dans le cadre de l'examen de la légalité d'un acte administratif. », « Dans le cadre du contrôle de constitutionnalité des actes administratifs, le juge ordinaire distingue deux hypothèses : soit aucune loi ne s'interpose entre la Constitution et l'acte administratif à analyser, soit cet acte administratif est fondé sur une loi qui fait écran entre cet acte et la Constitution. Contrôler la constitutionnalité de cet acte administratif reviendrait alors à contrôler indirectement la constitutionnalité de la loi, car l'acte administratif serait toujours conforme à la loi, même s'il n'est pas conforme à la Constitution. », VERPEAUX M., « Contrôle de constitutionnalité des actes administratifs », Répertoire de contentieux administratif, Dalloz, janvier 2011 (mise à jour : janvier 2012).

En résumé, le juge administratif, refuse d'effectuer un contrôle de constitutionnalité d'un acte administratif qui résulte directement de l'application d'une loi (l'acte est ici vu comme contenant des dispositions d'application de la loi se bornant à la réitérer) car cela reviendrait, selon la théorie de la loi-écran, à contrôler la constitutionnalité d'une loi, examen réservé au Conseil Constitutionnel.

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administratif relève du pouvoir réglementaire autonome (Const., art. 37)29 ou quand l'acte ne constitue pas une stricte application de la loi. »30

Par ailleurs, il faut noter que les actes de gouvernement non détachables de la conduite des relations internationales de la France échappent à tout contrôle juridictionnel et peuvent donc faire échec à la liberté d'entreprendre.31

Liberté fondamentale. Enfin, il faut noter que la liberté d'entreprendre est une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative32 relatif au référé liberté33. Ainsi, les justiciables disposent d'un recours juridictionnel célère pour contester toute atteinte à la liberté fondamentale d'entreprendre.

Nous venons de la voir, la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie n'ont pas la même valeur juridique mais coexistent. Il est temps de confronter ces principes et d'en dégager les similitudes et les différences. De même, nous pouvons légitimement nous demander quel est l'intérêt de leur coexistence.

29 « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. »

30 VERPEAUX M., op. cit. note 27

31 CE, 29 décembre 1997, Sté Héli-Union, req. no138310 : En l'espèce, un décret pris par le gouvernement et faisant appliquer une résolution de l'ONU interdisait aux citoyens la fourniture de tout avion ou tout composant d'avion à la Libye.

32 Article L. 521-2 du Code de justice administrative: "Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (...) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale..."

33 CE, 12 novembre 2001, Commune de Montreuil-Bellay, requête numéro 239840

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B - Les rapports entre la liberté d'entreprendre et la liberté du commerce et de l'industrie

Généralement, la doctrine considère que la liberté du commerce et de l'industrie est un principe englobant la liberté d'entreprendre et la libre concurrence.34 Selon cette conception, la liberté d'entreprendre serait identique à la liberté du commerce et de l'industrie sans son versant concurrentiel.

Ensuite, une partie de la doctrine considère que la liberté d'entreprendre est l'appellation moderne de la liberté du commerce et de l'industrie.35 On peut se demander si cette conception ne relève pas, entre autres, d'une analyse liant la terminologie de ces principes (« commerce », « industrie », « entreprendre ») et le contexte historique, économique et politique dans lequel ils interviennent ou sont intervenus (abolition des corporations, industrialisation, libéralisme, valorisation de l'entreprenariat, etc.). Pour illustrer ces contextualisations, on peut souligner que ces principes sont parfois utilisés à des fins politiques. On peut par exemple évoquer la récente volonté de Mme PARISOT de « demander au gouvernement d'inscrire la "liberté d'entreprendre dans la Constitution" et de mettre "la compétitivité" au centre des débats, lors de l'ouverture de la conférence sociale avec les partenaires sociaux [du] lundi 9 juillet [2012]. »36

Par ailleurs, on peut se demander si ces deux principes n'auraient pas au final comme différence que leur valeur juridique. Affirmer cela ne signifie pas qu'il est inopportun de faire coexister juridiquement ces deux principes et qu'il faudrait ainsi abandonner l'un des deux. En effet, au-delà des problèmes d'intelligibilité du droit que peut poser cette coexistence, elle

34 « V. par exemple, Jean-Yves Chérot, Droit public économique, Economica, 2002, p. 44 ; Hubert-Gérald Hubrecht, Droit public économique, Dalloz, 1997, p. 86 ; Jean-Philippe Colson, Droit public économique, LGDJ, 1995, p. 48 ; Pierre Bon, La liberté d'entreprendre, in Dictionnaire constitutionnel, sous la dir. de Olivier Duhamel et Yves Meny, 1992, p. 582 ; contra Pierre Delvolvé, Droit public de l'économie, Dalloz, 1998, p. 105 et s. » Cité par JACQUINOT N. dans « La liberté d'entreprendre dans le cadre du référé-liberté : un cas à part ? », AJDA 2003 p. 658

35 RUET L., « Du principe de rivalité », Recueil Dalloz, 2002 p. 3086 : « Le décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791, qui pose le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, rebaptisé aujourd'hui liberté d'entreprendre » ; CARCASSONNE G., op. cit. note 2 : « Ce n'est qu'à partir de la Révolution que, véritablement, ce qui s'appellera longtemps la liberté du commerce et de l'industrie (avant que de s'appeler la liberté d'entreprendre), sera proclamé de manière définitive. »

36 Le Monde.fr avec AFP. « Parisot veut inscrire la "liberté d'entreprendre" dans la Constitution ». http://www.lemonde.fr/ (page consultée le 16 mars 2013)

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peut présenter un intérêt contentieux. Nous disions précédemment que le Conseil d'Etat a pu examiner la conformité d'actes administratifs à la liberté d'entreprendre ; pourtant, « l'invocation par les parties et leurs conseillers de normes à valeur constitutionnelle et le recours à celles-ci par le juge administratif restent, malgré tout, exceptionnel »37. En effet, l'invocation de normes à valeur constitutionnelles est un moyen pouvant entrainer l'application par le juge administratif de la théorie de l'écran législatif. Pour éviter cela, deux alternatives s'ouvrent aux justiciables. Premièrement, ils peuvent invoquer les instruments internationaux, dont le contenu est souvent semblable aux normes constitutionnelles (notamment concernant les droits et libertés), pour demander au juge ordinaire d'effectuer un contrôle de conventionalité38 pour contrôler la conformité de la loi nationale avec les traités internationaux et le droit communautaire dérivé.39 Notons que « la mise en cause de la loi peut seulement être invoquée quand celle-ci est la base de l'acte administratif objet du recours. »40 Deuxièmement, et c'est là que se trouve l'intérêt de la coexistence de nos deux principes, les justiciables peuvent invoquer devant le juge administratif la liberté du commerce et de l'industrie issue de la loi des 2 et 17 mars 1791 pour contester un acte administratif et ainsi faire échec à la théorie de la loi-écran. En effet, si un justiciable invoque le principe constitutionnel de la liberté d'entreprendre pour contester un acte administratif qui résulte directement de l'application d'une loi, le juge administratif pourra leur opposer la théorie de la loi-écran dans la mesure où contrôler la constitutionnalité de cet acte reviendrait à contrôler celle de la loi qu'il se borne à réitérer. Cette analyse demeure toutefois très théorique.

Enfin, et c'est la conception que nous retiendrons, le Conseil d'Etat a récemment affirmé que la liberté du commerce et de l'industrie est une composante de la liberté fondamentale d'entreprendre41 (le terme « fondamentale » étant utilisé pour répondre au contexte de l'arrêt rendu qui était relatif au référé liberté de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative).

37 VERPEAUX M., op. cit. note 27

38 Contrôle rendu possible devant le juge judiciaire depuis Cass., ch. mixte, 24 mai 1975, Jacques Vabre et devant le juge administratif depuis CE Ass., 20 oct. 1989, req. no 108243, Nicolo

39 Concernant les règlements, CE 24 sept. 1990, req. no 58657 ; concernant les objectifs d'une directive restés non transposés, une fois expiré son délai de transposition, CE Ass., 28 févr. 1992, SA Rothmans International France et SA Philip Morris France, req. no 56776

40 VERPEAUX M., op. cit. note 27

41 CE, 12 novembre 2001, Commune de Montreuil-Bellay, requête numéro 239840 : « (...) la délibération litigieuse ne saurait être regardée comme portant une atteinte grave à la liberté du commerce et de l'industrie qui est une composante de la liberté fondamentale d'entreprendre »

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A ce titre, le fait que cette affirmation émane du Conseil d'Etat, qui se réfère généralement à la liberté du commerce et de l'industrie (alors que le Conseil Constitutionnel se réfère quant à lui à la liberté d'entreprendre) ne peut que renforcer son autorité. En somme, si on voyait là (notamment) une « guerre terminologique » entre ces deux juridictions, le fait que le Conseil d'Etat vienne donner force supérieure à la liberté d'entreprendre sur la liberté du commerce et de l'industrie a, au minimum, une portée symbolique remarquable.

Au-delà de cette remarque, ce que nous avons expliqué précédemment sur l'utilité d'invoquer la liberté du commerce et de l'industrie devant les juridictions administratives plutôt que la liberté d'entreprendre au regard de la théorie de l'écran législatif peut aussi expliquer le choix par les juridictions (ou les justiciables) d'utiliser l'un ou l'autre de ces deux principes.

Par ailleurs, Mme JACQUINOT nous livre une analyse intéressante et pertinente de cet arrêt : « En effet, le Conseil d'Etat, en choisissant de faire de la liberté du commerce et de l'industrie une composante de la liberté d'entreprendre (...) et non l'inverse, a pris le contre-pied de la position généralement retenue. Il retient donc délibérément une conception de la liberté d'entreprendre qui laisse planer un doute sur ses composantes exactes mais qui ne peut être que très large, sauf à exclure la liberté de concurrence, puisque, traditionnellement, la liberté du commerce et de l'industrie était considérée comme incluant cette dernière. Pour l'instant, étant donné que la liberté du commerce et de l'industrie implique d'accéder librement aux activités économiques et donc aux professions qui en découlent, il est logique, dans cette perspective large, que la liberté d'entreprendre englobe plus généralement le libre exercice de toute activité professionnelle (...), reconnue plus récemment (...), et sans que le Conseil d'Etat ait besoin de faire explicitement mention de ce rattachement. »42

Ce dernier commentaire nous amène à nous interroger sur le contenu de la liberté d'entreprendre et de la liberté du commerce et de l'industrie, composante de cette première.

42 JACQUINOT N., « La liberté d'entreprendre dans le cadre du référé-liberté : un cas à part ? », AJDA 2003, p. 658

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon