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Le texte promotionnel culturel

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par David LEGOUPIL
Université Paris V René Descartes - Master pro 2 expertise en sémiologie et communication 2007
  

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2. Le TPC ou la persuasion par la connivence culturelle

Dans certains textes des Saisons 2007-08, on trouve des références culturelles qui n'ont pas, contrairement aux cas étudiés dans notre partie sur la modalisation méliorative, pour principale fonction de caractériser le spectacle79(*) mais servent surtout à instituer un certain degré de connivence entre le locuteur et le destinataire. Or, c'est de ce même territoire commun dont a besoin le discours littéraire pour qu'un échange puisse exister.

Ces références qui reposent sur un univers partagé que l'on pourrait appeler le culturel, tentent de mettre sur un pied d'égalité scripteur et lecteur autour d'un point de connaissance. Le « culturel », dans les TPC, peut être spécifique au champ artistique ; il est aussi à entendre, dans un sens plus large, et peut renvoyer à ce que l'on a coutume d'appeler la culture générale.

Il peut s'agir, comme dans la phrase qui suit (par ailleurs peu marquée par des effets littéraires), de supposer connu le succès d'un film tiré d'une oeuvre littéraire qui, elle-même, a marqué l'univers culturel :

«  Ce livre a d'ailleurs donné naissance au film de Polanski avec le succès que l'on sait ». (Martine, Le Pianiste, t. p., p. 9)

C'est en pariant sur la dynamique, connue par le destinataire, d'un succès en chaîne que Martine cherche, indirectement, à promouvoir le concert de musique classique que ces deux précédents avatars ont inspiré. « Vous comme moi savons que Le Pianiste et ses adaptations constituent des oeuvres fortes » semble ainsi écrire la directrice de l'ODC. Et l'on pourrait prolonger le décodage de l'implicite, c'est-à-dire des interstices où se loge le discours littéraire (et parfois le discours publicitaire), en prêtant à sa conscience ces mots : « Je n'ai donc pas besoin de déployer l'habituel éventail du discours promotionnel pour vous enjoindre de vous rendre au concert. »

3. TPC et allusions intertextuelles

La connivence culturelle sur laquelle repose la modalisation persuasive se manifeste parfois à travers des allusions intertextuelles. C'est le cas dans le TPC que j'ai écrit sur le spectacle jeune public La berce oreille:

« Dans neuf mois, HomHom va être papa ! Heureux et bouleversé, son enfance remonte à la surface et charrie avec elle, vaguement, imparfaitement, la chanson douce que lui chantait sa maman... Mais comment s'en souvenir vraiment ? » (David, La berce oreille, j.p., annexe n° 6)

Le clin d'oeil à la célèbre chanson d'Henri Salvador est ici transparent. La citation, tellement connue qu'elle n'a pas besoin des guillemets pour être identifiée comme telle, fait partie d'un patrimoine culturel collectif. Elle s'est imposée à moi comme une référence incontournable, cette petite pièce ayant en effet pour thème le voyage autour du monde d'un homme en quête de la chanson qui a bercé sa petite enfance. La référence m'est même apparue comme une sorte d'inconscient sur lequel aurait été bâti le spectacle (même si la citation n'apparaissait pas dans le dossier de presse mis à ma disposition). J'ai, par l'écriture, réalisé une opération que Dominique Mainguenau désigne, en des termes simples, comme le fait de mettre «des énoncés sur d'autres énoncés». L'objectif est, selon lui, d'«accrocher le lecteur en faisant percevoir deux énoncés en un, tout en mettant en évidence un ethos ludique»80(*). Effectivement, même si le texte est emprunt d'émotion (« heureux », « bouleversé »), de nostalgie voire d'un vocabulaire d'inspiration psychanalytique (« son enfance remonte à la surface et charrie [...] »), la citation de la chanson d'Henri Salvador, sans guillemets, est bien ludique, apparaît comme un jeu de connivence entre le scripteur et son lecteur, un clin d'oeil complice et amusé qui vise à séduire. Implicitement, la référence semble vouloir dire au destinataire : « ces mots ne sont pas les miens, vous le savez, et vous les avez sans peine reconnus puisqu'ils sont aujourd'hui à tous ».

D'autres allusions intertextuelles provenant du discours littéraire, moins connues, moins fédératrices mais toujours formulées avec l'esprit ludique dont parle Mainguenau, sont utilisées par le rédacteur. D'abord parce qu'elles sont des formules toutes faites (préfabriquées mais de qualité), commodes car permettant parfois de surmonter une difficulté de formulation. Convoquées aussi parce qu'elles sonnent bien à l'oreille, ces allusions intertextuelles apportent à celui qui les emprunte (sachant qu'elles toucheront sûrement moins de lecteurs) une sorte de petit plaisir personnel ou partagé avec un petit nombre. L'ethos ludique repose alors non sur le fait de mettre « un énoncé sur un autre énoncé » mais plutôt de dissimuler un énoncé derrière un autre et d'en laisser la décryptage à la sagacité du destinataire. C'est ainsi, par exemple, qu'on retrouve dans la phrase « Quelle bande de joyeux garnements n'a pas rêvé d'avoir rien que pour elle un vieux hangar tout plein de vieilleries ? », extraite de mon TPC sur L'araignée du soir (annexe n° 10), un emprunt plus ou moins discret, au célèbre vers du poème d'Arthur Rimbaud, Le Buffet : « Tout plein, c'est un fouillis de vieilles vieilleries, / De linges odorants [...] ».

* 79 Troisième partie, II, chap. ?, p. ?

* 80 MAINGUENAU Dominique (2005), op. cit.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe