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La santé communautaire dans la région des savanes, Togo. Une étude de cas sur les commissions santé dans les districts sanitaires de Kpendjal, Tandjouaré et Tône

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par Alexander Doyle
Université libre de Bruxelles - Master en sciences de la population et du développement 2012
  

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IV. DISCUSSION

L' « approche participative » a marqué d'une certaine façon l'ensemble des initiatives prises en matière de développement, en réponse aux PAS élaborés dans les 1980. Toutefois, la dynamique actuelle laisse entrevoir un décalage grandissant entre les discours et les réalisations effectives. Ces dernières, à maints égards institutionnalisées et instrumentalisées par les protagonistes du développement local, ne semblent pas refléter véritablement les discours endogènes. Mais selon Lavigne Delville, des nouvelles configurations s'invitent dans les schémas développementistes actuels, visant à renouveler la notion même de « participation ».

En s'étant appliqué à analyser, suivant une perspective diachronique et synchronique, l'action du « Projet Intégré de santé dans la région des Savanes », nous pûmes nous atteler, dans le sens de Jean-Pierre Chauveau, à « une déconstruction en règle des conceptions naïves de la participation »166. Pour preuve, nous avons relevé les dysfonctionnements étudiés dans le cadre de cette recherche, lesquels nous permirent de faire apparaître de nombreuses contradictions en interne, aboutissant le plus souvent à un renforcement des dynamiques coercitives entre les responsables du projet et les personnes en charge de son application.

La présente étude, vouée à une méthodologie strictement définie, suivant une démarche empirique, nous a amené à souligner, dans le cadre du « Projet Intégré de santé dans la région des Savanes », une dissonance criante entre les objectifs revendiqués et les pratiques appliquées. L'un des résultats de la posture affichée est de ne faire ressortir que bien davantage les faiblesses de la dynamique actuelle en matière sanitaire dans la région des Savanes. Plus loin, nous pûmes mettre en lumière une série de « mécanismes » mis en oeuvre par les CS pour s'adapter à la conjoncture en présence.

De ce fait, tout au long de notre analyse, il s'est agi de répondre à notre question de recherche présentée, ex ante, en ces termes : « Dans quelle mesure, l'insertion des Commissions Santé sur la scène sanitaire locale Ð à travers l'ONG 3ASC Ð permet-elle l'élaboration d'une dynamique « participative » véritablement endogène ? ».

A fortiori, notre analyse s'est astreinte à vérifier les sous-tendus de cette dynamique « participative » revendiquée dans le cadre du projet étudié. Par delà la rencontre avec un dispositif déficient, le projet en question déploie en guise de remède une persuasion aveugle visant à renforcer ses structures initiales, elles-mêmes à l'origine de ses déficiences. Le

166 Lavigne Delville, Ph., op. cit., p. 162.

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concept de « populisme bureaucratique » initié par Chauveau est toujours applicable. En ce sens, ce dispositif bureaucratique développementiste, axé sur la « participation », qui fait vivre le « Projet Intégré de santé dans la région des Savanes » ne semble pas caractérisé par une forme d'indépendance endogène. Il continue à revendiquer ses prérogatives sous des airs bienfaisants. Même si des améliorations tangibles apparaissent sur la scène, celles-là résultent uniquement d'accomplissements dirigés par des acteurs externes. Leur but principal semble être de chercher à justifier, à travers les résultats, les raisons de leur présence et donc à la pérenniser. Bien davantage, les CS tendent à devenir elles-mêmes les « diffuseurs » de cette vision développementiste. Dans ce contexte, alors qu'aucun réel changement de fond n'est tangible, les efforts considérables qui sont déployés pourraient être résumés en trois mots : un éternel recommencement.

Ceci étant, devrions-nous nous arrêter à un constat aussi pessimiste, et exclure toute approche en matière de « participation communautaire » dans la région des Savanes ? Les CS n'ont-elles aucun avenir dans cette constellation ? En s'inscrivant dans une « rhétorique réactionnaire » au sens de Hirschmann, la posture déconstructiviste n'est-elle pas condamnée « à l'inanité, à la perversité ou même aux dangers de l'approche participative quant aux objectifs fondamentaux du développement »167 ?

Si une position de rupture n'est pas souhaitée, une perspective alliant dispositif institutionnel et prises de décisions émises à la base, par des instances locales, pourrait peut-être en définitive, aboutir à davantage de changements de fond ? Concrètement, grâce à une collaboration plus efficiente, axée sur des négociations transformationnelles et aspirant à une construction commune ? Mais, il va sans dire, le risque de céder aux schémas passés est grand et toute nouvelle initiative encourt le sérieux risque de rester vaine. De plus, cette perspective ne devrait pas ignorer les effets indésirables causés par une action structurante, qui elle-même détermine les comportements des protagonistes concernés. « Les rapports entre contexte socio-politique, volonté des commanditaires et des animateurs, et procédures sont au coeur d'une telle analyse, visant à comprendre les modalités, les enjeux et les effets des dispositifs participatifs »168.

Alors que le complexe dispositif mis en place semble, à maints égards, inébranlable, il apparaît qu'une forme d'ouverture, fondée sur la volonté d'« utiliser les procédures, les règles, les dispositifs pour produire des déplacements partiels et ouvrir des espaces de débat

167 Chauveau, J.-P., op. cit., p. 30.

168 Lavigne Delville, Ph., op. cit., p. 182.

au profit de certains acteurs »169, permettrait d'initier des changements notoires. Mais au-delà de cette dimension, sujette à polémique, « l'approche participative est d'abord et avant tout un mode historique de « gouvernementalité » » 170 . C'est pourquoi, au-delà d'une vision « déconstructiviste », il semblerait nécessaire de « déconstruire » la notion même d' « approche participative » vouée à une justification continuelle de son authenticité, permettant ainsi une redéfinition en aval des principes mêmes de son action.

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169 Lavigne Delville, Ph., op. cit., p. 177.

170 Chauveau, J.-P., op. cit., p. 30.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand