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La protection de l'environnement en droit coutumier congolais. Cas de pygmées de la province de l'Equateur en RDC

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par Bienvenu Wapu Samaki
Université catholique du Congo - Gradué en droit 2012
  

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§ 3 : GESTION DU PATRIMOINE FONCIER- FORRESTIER PAR LES PYGMEES BATWA DE L'EQUATEUR

Les membres d'une population donnée délimitent leur écosystème forestier selon diverses composantes tout en reconnaissant et en dénommant les catégories de végétation et de paysage. L'espace chez le  « Batwa » est organisé de façon précise et certains types d'activités sont toujours effectués sur des sites particuliers en fonction des usages. Il ya partout une différence entre la zone habitée (le village),la zone transformée par les activités agricoles(champs et jachères) et la zone « vierge »,les sites sacrés et la forêt proprement dite, où s'intercalent les forêts de terre ferme et les forets marécageuses80(*)

L'attitude générale des populations autochtones face à ce mode d'occupation du patrimoine foncier forestier est pratiquement partout identique. Celle-ci a certains points communs avec la carte mentale conventionnelle commune à l'ensemble des membres et dont le système cognitif permet une gestion à long terme des ressources naturelles81(*)

1. LE PATRIMOINE FONCIER

La notion de patrimoine, telle qu'elle est communément définie, fait référence à l'ensemble des biens et des obligations d'une personne (c'est-à-dire de ses droits et charges appréciables en argent) de l'actif et du passif, envisagé comme formant une universalité de droit, un tout comprenant non seulement ses biens présents mais aussi à venir82(*). Le patrimoine ainsi défini est une émanation de la personnalité et tous ses éléments sont soumis au libre arbitre d'une seule et même volonté.

La convention de l'UNESCO du 23 novembre 1972 concernant la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel utilise le concept de patrimoine mondial de l'humanité, dans le but de rompre avec la définition précédente. En effet pour la convention, il est question de biens naturels et culturels, au sein des Etats. Ce traité permet aux ressources communes d'accéder au rang de patrimoine de l'humanité.

On peut recentrer cette vision globalisante en définissant le patrimoine naturel comme un corps moral appartenant aux générations passées, présentes et futures, qui intéresse un milieu naturel considéré au travers de l'un de ses éléments. Ce serra donc l'espace forestier, l'espace cynégétique, l'espace agraire, les sites sacrés, structurés soit en finage ou en terroir. Ces milieux territorialisés sont inappropriables, mais ils sont inféodés à la gestion d'un groupe qui en est titulaire et qui a le droit d'en exclure d'autre, et constituent par là même un espace communautarisé.

Le foncier-forestier chez les Batwa se caractérise par le fait qu'il se transmet entre générations, au niveau du lignage ou du village, il est soumis à une gestion assurant la reproduction sociale du groupe, en termes de survie et d'identité.83(*)

Dans une interview avec monsieur ESALE NOWA84(*), chef coutumier des pygmées Batwa, il nous a fait savoir qu'il existe 4 types d'espace environnementales à savoir : l'espace agricole, l'espace forestier, les terres marécageuses et les rivières, les sites sacrés.

v De l'espace agricole

Apres abattage de gros arbres, après défrichage et récolte, les Batwa donnent l'occasion à la forêt de se refaire. C'est la jachère (maengo).

v De l'espace forestier

Cet espace se compose de ce qui a été humanisé par l'action de l'homme à travers l'agriculture ou l'implantation du premier campement de la forêt vierge et les galeries forestières. Cette forêt représente un fond commun de ressources pour les différents clans appartenant à la communauté. Personne ne peut en revendiquer le droit exclusif d'exploitation.

Chez les Batwa, ces catégories d'espace sont exploitées en fonction des saisons et de la disponibilité des ressources. Dans cette forêt se pratique la chasse (liita) et les instruments de la chasse sont : le filet (bilei), flèche en poison (loliko) .Pendant la chasse, le gibier femelle, une fois capture était libéré parce que celui-ci devra continuer à procréer. Le gibier de moins d'une année également libéré. En cas d'imprudence pour avoir blessé un de ces gibiers, le chasseur a l'obligation de les soigner avec des plantes médicinales traditionnelles. La chasse est réglementée par le chef coutumier. Cette période allait du mois de janvier jusque mars. A partir du mois d'avril commence la période de la reproduction. Quand le besoin se faisait sentir surtout à l'occasion des grandes fêtes, le chef pouvait autoriser la chasse de grand gibier et cela une fois seulement.

La chasse se faisait également par la creuse d'un grand trou dans lequel on pouvait attraper des grands gibiers, de grandes espèces animales pour offrir aux chefs ou au roi. En cas des violations de ces règlements, le déféquant devrait payer une amende au chef : le mondongo, noix de cola, vin de palme, cuivre.

Dans un aspect purement juridique, Hélène Pagezy rapporte que : «  Dans le droit coutumier Batwa, chaque campement de pêche a son «propriétaire »différent du chef de village d'où il est issu et ou résident la majorité des pêcheurs. C'est par un pacte originel entre l'ancêtre en ligne direct du « propriétaire » du campement et les bilima ou génies-chefs du site. Ce propriétaire du campement a été désigné comme représentant sur terre de cet être supra naturel, véritable propriétaire des lieux.

Le droit de propriété est transmis de génération en génération au fils ainé ou à la fille dans le cas où il n'y a pas d'enfant male. Ce pacte confère au bénéficiaire un droit d'usufruit légitimé par un pouvoir de droit divin, transmit de génération en génération au fils ainé, ses ayant droit, en premier lieu, ses enfants, peuvent exploiter le site en chassant le gibier et en pêchant les poissons, animaux qu'il a crées et qu'il considère comme ses propres enfants85(*).

Au début de chaque saison, le maitre de pêche précède les pêcheurs afin de renouveler le pacte avec le génie chef et connaitre ses intentions. Grace aux rapports particuliers qu'il entretient avec ces êtres du monde invisible, le propriétaire est considéré comme responsable de la chance ou la malchance à la pêche ; ses pouvoirs lui permettent d'infléchir les intentions du génie afin que la saison soit bonne pour tous86(*).

Avant la saison d'ecopage des femmes, le maitre de pêche doit offrir au génie des noix de cola, des fruits de mondongo (zingiberaceae) et le lonyunyungu, sorte de muscade sauvage, du vin alcoolisé (lotoko) et du vin de palme. Toute personne résidente ou non qui y vient dans l'intention de pêcher ou de chasser (ne serait-ce qu'une journée) doit absolument se faire connaitre au propriétaire et solliciter son autorisation afin de mener ses activités de subsistances ; il cour le risque d'être accusé de meurtre avec préméditation dans le cas où un accident de chasse ou de pêche surviendrait durant son séjour. Bref, le propriétaire du campement est le garant de l'ordre.

v La forêt sacrée (lyembo)

Pour notre enquêté André, les Batwa ne fréquente pas la forêt le mardi car durant ce jours les génies circulent dans la forêt. Cette forêt sacrée contient des matières premières et elle est le siège des génies. La forêt sacrée contient des vallées, des grands trous où habitent ces génies selon la croyance de ce peuple. L'accès à cette forêt est conditionné par l'obtention d'une permission du nkumu (chef du village) à la seule condition de lui acheter des vêtements et pour lui et pour sa femme. Les noix de colas et 5 litres de vin de palme.87(*)

* 80 http://civilisation.revuues.org/index1592.htm (page consultée le 14/avril/2013)

* 81Cf. LAVIGNE D. et al. , Sécurisation des droits fonciers délégués en Afrique de l'Ouest, Paris, Gret, 2001, p. 43

* 82 CORNU G., Vocabulaire juridique, paris, QUADRIGE/PUF, 2011, p. 738

* 83 Cf. ELSHOUT P., Les Batwa des Ekonda.Musée Royal de l'Afrique Centrale, Belgique, Tervuren, 1963, p. 32

* 84 ESALE NOWA, est chef coutumier des Batwa résidant à Kinshasa, il effectue chaque année des voyages dans son terroir pour être en communion avec les autres Nkumu des Batwa.Il habite le quartier Pakadjuma dans la Commune de Limete, 1ère rue.

* 85 Cf. PAGEZY H., Aspects Psychoculturels de l'exploitation des ressources naturelles dans la région du lac Tumba(zaïre)In A. Froment, I.de Garine, C.Binam BikoÏ etJ.F.Loung, Bien manger et bien vivre Anthropologie alimentaire et développement en Afrique intertropicale :du biologie au social, Paris, l'Harmattan/OSTOM, 1996, p. 36

* 86Cf. PAGEZY H., Le contexte magico religieux de la pêche au lac Tumba(Zaïre) entre le normal et l'insolite. Communication au colloque international. Les sites sacrées naturels, diversité culturelle et biodiversité, Paris, UNESCO, 1998 p. 4

* 87 Notre entretien à Kinshasa avec Monsieur André BOYIKA, le 20/avril/2013, il est un enquêté du CERDAS à l'UNIKIN.

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