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Le traitement des défaillances bancaires des établissements de microfinance

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par Grégoire TCHOMGUI KOUAM
Université de Dschang Cameroun - Master II recherche 0000
  

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B. La limitation des engagements

Durant l'exercice de leurs activités, les EMF sont inéluctablement appelés à prendre des engagements principalement en faveur de leurs clients et aussi en faveur leurs agents. Les engagements ici concernent surtout les crédits et concernent alors les crédits par caisse et les crédits par signature244(*). Plus simplement, il s'agit des crédits que les EMF peuvent octroyer ou le fait pour eux de se porter caution des dettes d'un débiteur contractées dans une autre structure. Si certaines mesures ne sont pas prises, ces engagements peuvent entrainer l'établissement dans les défaillances. Ces mesures sont essentiellement contenues dans la batterie des normes prudentielles édictées par la COBAC. Qu'il s'agisse des dirigeants, des administrateurs, des actionnaires, du personnel ou des clients, la réglementation245(*) prévoit que le crédit à eux octroyé ne doit pas dépasser un certain seuil. Les engagements peuvent être directs lorsqu'ils sont pris directement en leur faveur, ou indirects lorsqu'ils sont pris au profit « des personnes morales ou physiques sur lesquelles un actionnaire ou associé, administrateur ou dirigeant exerce une influence tangible »246(*).

Pour les EMF des deuxième et troisième catégories, l'encours global des engagements nets portés directement ou indirectement sur les actionnaires, administrateurs, dirigeants ou personnel ne peut excéder 20% du montant des fonds patrimoniaux ou fonds propres nets. Ce taux est de 30% pour les EMF de la première catégorie247(*). Le taux légèrement élevé dans ce dernier cas se justifierait par la confiance et le souci d'entraide qui lie les membres. Comment comprendre une telle limitation ?

Certains EMF sont avant tout des sociétés commerciales248(*). Or l'AUDSCGIE interdit aux gérants ou associés de contracter sous quelque forme que ce soit des emprunts auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert en compte courant ou autrement, ainsi que de faire cautionner ou avaliser par elle leurs engagements envers les tiers, leurs conjoints, ascendant ou descendant ainsi qu'à toute personne interposée249(*). Ces conventions interdites en droit commun des sociétés commerciales a pour but d'empêcher les associés ou les dirigeants de détourner l'intérêt social à leur propre compte. Transposée dans le contexte des EMF, il faut d'abord constater que l'interdiction n'est pas absolue comme ailleurs. Ce tempérament est sans doute une preuve de la spécificité du secteur de la microfinance. La limitation des engagements des EMF dans ce contexte oblige les acteurs à respecter les règles déontologiques de la profession bancaire qui exigent que ses acteurs distinguent le patrimoine de l'EMF de leur patrimoine personnel. En réalité, le banquier doit « servir sans se servir ». De plus, cette interdiction, mieux cette limitation est un souci manifeste du législateur et des pouvoirs publics de sécuriser les fonds du déposant et d'encourager l'épargne publique. Le législateur a bien voulu par cette limitation mettre l'EMF ainsi que ses clients à l'abri des désagréments250(*) consécutifs à une prise excessive des engagements. C'est donc dire que le dépassement de cette limite peut entrainer la chute de la structure. C'est sans doute pour cette raison que la COBAC n'hésite pas à démettre de leurs fonctions les dirigeants sociaux qui ne respectent pas cette interdiction. C'est ce qui est arrivé aux dirigeants de First Trust Saving and Loans et de Cofinest251(*). Il était reproché à ces établissements « les trop fortes proportions de crédit concentrés sur les dirigeants desdites structures »252(*). Même la situation de surliquidité d'un EMF ne doit pas pousser à aller au-delà du seuil fixé par la réglementation. Dès lors, la question de l'opportunité d'une telle limitation ressurgie. Si l'objectif est de sécuriser l'épargne des déposants et partant d'assurer la solvabilité de l'établissement, la situation de surliquidité suppose que ces valeurs ne souffrent d'aucune atteinte. Dans le contexte de surliquidité, les EMF pourraient être tentés d'aller au-delà du seuil règlementaire sans courir le moindre risque. Mais la COBAC n'hésite pas de sévir dans ce cas même si en réalité la situation financière de l'établissement est satisfaisante253(*). Les professionnels de la microfinance n'apprécient pas cette rigueur de la COBAC. Mais cette rigueur doit être saluée tout de même car une tolérance dans ce sens risquerait d'encourager la déviance. Mais seulement, il serait souhaitable que le législateur communautaire revisite ce texte pour le rendre perspicace.

Sur un tout autre plan, la limitation des engagements va aussi à l'égard des clients. En effet, traiter avec une clientèle capable de mauvaise foi est un grand risque qui doit nécessairement être maîtrisé. La limitation des engagements est donc un moyen permettant aux EMF de maîtriser les risques qu'ils prennent au profit de la clientèle. S'il n'est donc pas possible d'imaginer un EMF qui ne prend pas de risque, il reste néanmoins constant qu'une prise de risque inconsidérée est de nature à entraîner l'EMF dans les crises. Mais le crédit comme nous l'avons dit, étant la machine productrice, les EMF seraient tentés d'accorder plus de crédit pour atteindre un taux de croissance considérable. L'un des défis des structures de microfinance n'est-il pas la massification des crédits ? L'objectif du secteur de la microfinance est d'offrir des microcrédits à un plus grand nombre et cette ambition est canalisée par les ratios prudentiels. L'EMF qui envisage atteindre le plus grand nombre de clients par son service de crédit doit concilier cette ambition avec sa capacité à répondre à tout moment aux sollicitudes des déposants. Face à un tel dilemme, le choix est souvent difficile à faire. Dans tous les cas, l'offre de crédit au client doit être limitée puisqu'il n'est pas question pour l'EMF de répondre à toutes les demandes de crédit qui lui sont présentées. Il doit nécessairement procéder à une sélection qui peut reposer sur des conditions, notamment l'exigence d'un dépôt minimum254(*), la crédibilité du demandeur de crédit, la fiabilité économique de l'activité à financer ainsi que le type de financement255(*).

Quoiqu'il en soit, les EMF sont appelés à limiter leurs engagements au risque de freiner leur croissance, ou d'octroyer massivement du crédit au risque d'être en désaccord avec la COBAC. Cependant, il faut souligner qu'une massification de crédit n'induit pas forcement la violation des normes prudentielles si les EMF restent dans le champ du microcrédit. Tel n'est pas toujours le cas en pratique. C'est alors le lieu de relever le caractère « très strict » du dispositif prudentiel de la zone CEMAC qui est un facteur limitatif de l'intermédiation financière et qui limite les capacités des EMF à financer l'économie. De l'avis de M. MBOUOMBOUO NDAM Joseph, les normes prudentielles tendent à faire des structures financières « de simples coffres-forts » car traduisant le souci des Etats d'assurer en priorité la disponibilité des dépôts et non l'activité de crédit256(*). Or si les dépôts sont disponibles, c'est bien pour augmenter la capacité des  EMF à financer l'économie et non pour meubler les coffres-forts. A notre sens, l'économie n'est efficacement financée que si elle fonctionne effectivement et c'est ce fonctionnement qui garantit le succès du projet financé. En l'absence de projets fiables à financer en toute quiétude, il serait préférable que l'argent du déposant reste sécurisé. Il est tout de même important que le législateur intervienne pour trouver la juste mesure des intérêts. En attendant, il est nécessaire de prendre des mesures concrètes pour limiter les risques de défaillances.

* 244 Art. 1er al. 2 du règlement COBAC EMF/2002/10 relatif aux engagements des EMF en faveur de leurs actionnaires, administrateurs, dirigeants et personnel.

* 245 Règlement précité.

* 246 Art. 4 du règlement précité.

* 247 Art. 2 du règlement précité.

* 248 Il s'agit par exemple des EMF des deuxième et troisième catégories. Leur commercialité vient du fait qu'ils accomplissent des opérations de crédit au même titre que les banques classiques. Ces opérations se font dans l'intention spéculative et cadre ainsi avec l'un des critères de la commercialité. Pour plus d'informations à ce sujet, v. le cours du professeur ANOUKAHA, Droit de la Commercialité OHADA, Master II Recherche, Université de Dschang , 2008-2009, inédit

* 249 Art. 356 de l'AUDSCGIE.

* 250 V. GODQUIN M., « Crise des institutions de microfinance et attitude de leurs clients », Maison des Sciences Economiques, Université de paris I, Panthéon-Sorbonne. Disponible sur http://www.lamicrofiance.org/section/about/

* 251 Ces deux EMF cités sont implantés au Cameroun.

* 252 BAMBOU F., « Cameroun : vague d'assainissement dans la microfinance », Banque et Assurances, Les Afriques n° 26, 24-30 avril 2008, p. 6. Disponible sur le site http://www.lesafriques.com

* 253 Les cas de Cofinest et de First Trust sus cités sont une parfaite illustration.

* 254 Cette exigence permettra à l'établissement de se donner du temps pour satisfaire la demande du client. Le temps pour ce dernier de satisfaire à la condition permettra à la structure qui avait atteint la limite d'avoir une marge du fait des opérations qu'elle aura accomplie entre temps. Mais pour que cette exigence ne vide pas la mission des EMF de son contenu, il faudrait que soit pris en compte les capacités et les aptitudes du client à satisfaire à cette condition. L'appréciation ici se fera au cas par cas.

* 255 Distinguer entre les financements à cour terme et les financements à log terme.

* 256 MBOUOMBOUO NDAM J. op. cit., p. 110.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams