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Le traitement des défaillances bancaires des établissements de microfinance

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par Grégoire TCHOMGUI KOUAM
Université de Dschang Cameroun - Master II recherche 0000
  

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PARAGRAPHE 2 : LES MESURES DE LIMITATION DES RISQUES DE DEFAILLANCES

Limiter les risques de défaillances des EMF va nécessairement en droite ligne avec le souci de prévention de ces défaillances. Il est question de prendre des mesures concrètes pour assurer le fonctionnement normal de l'établissement. Parmi les mesures envisagées, certaines sont inspirées de la réglementation prudentielle et d'autres inspirées de la pratique en raison des carences réglementaires constatées. Telle que prescrite par les textes, la constitution des réserves doit être un impératif si on veut prévenir efficacement les risques de défaillances (A). Bien plus, il serait réaliste d'instaurer une plate forme de risques (B) ainsi qu'un mécanisme de micro assurance (D) pour accompagner les microcrédits. Penser aussi à la présentation d'une attestation de solvabilité (C) par le nouveau client de l'EMF ne serait pas une mesure de trop si l'on veut prévenir efficacement les risques de défaillances.

A. La constitution impérative des réserves

La réserve est le « grenier » des EMF. Selon une sagesse populaire bien connue des agriculteurs (principalement ceux qui font de l'agriculture de subsistance), lorsque la récolte est abondante, il faut se garder de dilapider le produit de la récolte et penser à constituer une importante réserve dans le grenier pour parer aux disettes futures. La fable « La cigale et la fourmi »257(*) en est une parfaite illustration. Les EMF dans leur fonctionnement normal doivent penser aux périodes de vaches maigres et constituer selon la catégorie divers fonds. Il s'agit selon le cas du fonds de solidarité (1) ou des fonds de réserve(2).

1. Le fonds de solidarité

Seuls les EMF de type mutualiste ou coopératif sont tenus de constituer le fonds de solidarité. Ce fonds est constitué dès la création de l'établissement et est approvisionné régulièrement. Il est destiné à faire face aux pertes. Autrement dit, le fonds permet de combler les déficits d'exercice qui peuvent provenir du non remboursement des prêts par les membres. La constitution du fonds est donc un moyen efficace pour prévenir les défaillances inhérentes aux membres dans la mesure où en cas de non remboursement du crédit par ces derniers, il sera procédé à un comblement du déficit en puisant dans la réserve et, dès lors, la créance non recouvrable ne figurera plus dans le compte débiteur de l'EMF. L`institution de ce fonds est une illustration du volet social qui domine dans les EMF de première catégorie et qui induit par voie de conséquence la solidarité ou l'entraide entre les membres. Ainsi la défaillance d'un membre n'est pas individualisée et nécessite pour son traitement la mobilisation de tous les autres membres. Même si les textes ne posent aucune condition à cet effet, il nous semble que cette mobilisation est justifiée par la bonne foi du membre défaillant. Quoiqu'il en soit, même si un contentieux pourrait découler de cette situation, il faudrait au préalable en épargner la structure.

Les modalités de constitution du fonds de solidarité sont données par le règlement COBAC du 15 avril 2002 relatif aux conditions de constitution du fonds de solidarité. L'article 2 dudit règlement dispose : « Le fonds de solidarité reçoit au début de chaque exercice et à chaque adhésion les apports en numéraires effectués par les membres de manière équitable ». Parler de la constitution du fonds « au début de chaque exercice et à chaque adhésion » lève toute équivoque quant à la constitution du fonds par les anciens ou les nouveaux membres puisqu'au début de l'exercice, les membres présents dans la structure sont les anciens et, à chaque adhésion, il s'agit des nouveaux membres258(*). Dès lors, il est certain que le fonds doit être constitué tant par les anciens que par les nouveaux membres. La constitution « équitable » suppose que tous les membres doivent participer de façon égalitaire à l'approvisionnement du fonds. Mais qu'adviendrait-il si un membre quitte la structure et décide de la réintégrer quelques années plus tard ? Le fonds étant non remboursable, on peut dire que ce membre ne sera plus appelé à contribuer au fonds. S'il le faisait, il contribuerait doublement et l'égalité dans la contribution sera ainsi rompue.

Le fonds de solidarité doit représenter en permanence 40% du capital constitué après imputation des déficits d'exercice. Il cesse d'être exigé et peut être distribué entre les membres lorsque les réserves obligatoires atteignent 40% du capital259(*). On ne peut s'empêcher de se surprendre d'une telle disposition qui est de nature à connaître d'énormes difficultés dans sa mise en oeuvre : elle tend à faire de la constitution du fonds de solidarité une simple faculté avec la possibilité de partage qu'elle offre, ce qui est dommage compte tenu de son importance dans la prévention des défaillances. Ce partage fragiliserait énormément les structures de microfinance car dans ce cas, le coefficient de liquidité de l'établissement serait hypothéqué. Mais, si on observe de près le mécanisme envisagé, il sera très difficile en pratique d'aboutir au partage. Il est soumis à la condition de l'atteinte par la réserve obligatoire de 40% du capital. De quel capital s'agit-il ? Du capital au moment de la création de l'EMF ou du capital en cours de vie social à un moment où les comptes  de l'établissement sont arrêtés ? Si on considère la première hypothèse, on peut estimer que les dirigeants, par souci de prudence, se garderaient de déclarer cette évolution et procèderaient à des équilibrages conséquents. La deuxième hypothèse est difficile à admettre d'autant plus que dès la création de l'EMF, le capital ainsi que les différents fonds sont entraînés dans un perpétuel dynamisme. Il serait donc impossible que la réserve obligatoire atteigne 40% du capital puisque les deux fonds évoluent simultanément. Il sera donc rare qu'on aboutisse en pratique au partage du fonds de solidarité. Ainsi, la santé financière des EMF se trouve ragaillardie. Les fonds de réserve viennent renforcer cette santé financière des EMF.

2. Les fonds de réserve

Les réserves sont les prélèvements effectués sur les bénéfices réalisés par une société avant qu'ils ne soient distribués aux associés, dans un but de prévoyance et permettant de faire face plus tard à certains risques ou de faciliter l'extension de l'affaire260(*). Cette définition laisse voir une double fonction des réserves à savoir faciliter le développement de l'affaire et prévenir les risques. C'est cette dernière fonction qui nous intéressera.

Dans le contexte des EMF, les réserves sont constituées à partir des excédents de ressources qui peuvent faire l'objet de placement dans les banques commerciales ou être affectés à la souscription des bons du trésor ou de ceux émis par la BEAC261(*). Par cette souscription, l'EMF participe au financement du budget du trésor262(*) ou au financement de l'économie. En fonction des cas, ces réserves prennent des dénominations diverses et peuvent être qualifiées de réserve légale (a) ou de réserve obligatoire (b)

a. Les réserves légales

Ce sont celles qui sont expressément prévues par la loi ou par la réglementation en vigueur. Les EMF des deuxième et troisième catégories sont tenus de constituer une réserve légale. C'est ce qui ressort de la réglementation sur la constitution des réserves263(*). Cette réglementation ne définie pas clairement le régime de constitution des réserves légales. Face à cette carence, le recours au droit commun est inévitable.

L'AUSCGIE impose aux sociétés commerciales constituées sous forme de S.A ou de SARL la constitution d'un fonds de réserve dit réserve légale. En son article 346, on peut lire : « A peine de nullité de toute délibération contraire, il est pratiqué sur les bénéfices de l'exercice diminué, le cas échéant des pertes antérieures, une dotation égale au un dixième au moins affecté à la formation d'un fond de réserve dite  "réserve légale". Cette dotation cesse d'être obligatoire lorsque la réserve atteint le cinquième du montant du capital social ». La réserve légale est donc au moins le 10% des bénéfices. Les termes de cette disposition attestent que cette proportion n'est qu'indicative. Il s'agit là d'un minimum et en fonction de la bonne santé financière de chaque structure, cette proportion pourra être revue à la hausse. La réserve légale est imposée aux EMF des deuxième et troisième catégories en raison de leurs activités qui s'apparentent plus aux activités commerciales. Tel n'est pas le cas pour les réserves obligatoires.

b. Les réserves obligatoires

Elles sont constituées par tous les EMF sans distinction de catégorie. Les EMF de la première catégorie sont tenus de constituer une réserve obligatoire représentant 20% de l'excédent d'exercice à affecter sans limitation de durée et de montant. Cette proportion est de 15% des bénéfices pour les EMF des deuxième et troisième catégories. Le caractère obligatoire de ce fonds laisse croire que le législateur communautaire a voulu mettre un point d'honneur à leur existence. Quoiqu'il en soit, la constitution de ce fonds est une exigence des normes prudentielles dont leur respect par les EMF est obligatoire.

Un constat mérite d'être fait sur l'existence de ces différents fonds. Il est aisé de se rendre compte que chaque EMF, indépendamment de la catégorie à laquelle il appartient, doit impérativement constituer deux fonds de sécurité : le fonds de solidarité et la réserve obligatoire pour les EMF de la première catégorie, la réserve légale et la réserve obligatoire pour les EMF des deuxième et troisième catégories. Si cette consécration témoigne à suffisance de l'ambition du législateur communautaire de mettre les EMF à l'abri des défaillances pouvant provenir des clients, il convient cependant de relever une incohérence contenue dans la règlementation, surtout si on considère le cas des EMF des deuxième et troisième catégories. Parler de réserve légale et de réserve obligatoire dans ce cas est une redondance car la réserve légale est une réserve obligatoire264(*). La solution aurait été pour le législateur de maintenir la réserve légale et de fixer sa proportion à un taux considérable (40 ou 50% du capital social constitué) qui permettrait de combler les pertes et de parer aux éventuelles difficultés.

Au total, ces mesures règlementaires souffrent de quelques carences qu'il convient de combler par la création d'une centrale de risques.

* 257 Cette fable traduit la nécessité de penser aux jours difficiles quand on est en situation de bombance.

* 258 Cette précision n'est pas sans intérêts car dans la pratique, certains EMF ont cru à tort que la constitution du fonds de solidarité ne concernait que les nouveaux membres. Cette interprétation a longtemps prévalu par exemple au SECCUDs (Société Coopérative d'Epargne et de Crédit de l'Université de Dschang). Il eut fallu l'intervention des cadres de CamCULL qui, lors d'une assemblée générale, ont clarifié la réglementation à ce sujet et dissiper les malentendus. Voir pour plus d'informations ABOMO HUMFRED, Reaching the poor with microcredit: the missing link, Presse Universitaire de Dschang, 2005.

* 259 Art. 3 du règlement COBAC EMF 2002/05 relatif aux conditions de constitution du fonds de solidarité.

* 260 GUILLIEN R. et VINCENT J. (sous la direction de), Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13è édition, 2001, p. 486.

* 261 Art 9(3) du règlement précité relatif aux conditions d'exercice et de contrôle de l'activité des EMF dans la CEMAC.

* 262 ANDRIANASOLO E. , op. cit., p. 14.

* 263 Art. 2 du règlement COBAC EMF 2002/05 relatif à la constitution des réserves.

* 264 V. la définition de réserve obligatoire donnée par le Lexique des termes juridiques précité, p. 486.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry