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Responsabilité civile et assurance des constructeurs au Maroc. Limites et carences de la législation

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par Mohamed Jamal BENNOUNA
Université de Perpignan Via Domitia  - Master en droit  2012
  

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§ 2 - Les vices cachés en cours de travaux et après réception des travaux

En l'absence d'un code propre à la construction, les problèmes liés aux vices de construction en période de travaux sont réglementés dans un cadre contractuel général du DOC et c'est l'article 89 qui pose les règles générales des vices cachés2.

Quant aux marchés publics, les vices de construction en période de travaux sont réglementés par l'article 41 du CCAGT-T3

La période de maintenance comprise entre la réception provisoire et la réception définitive n'est pas régie par une loi. Elle ne l'est que pour les marchés publics dans le cadre du CCAGT-T qui définit et impose une garantie de parfait achèvement et qui s'étale entre la réception provisoire et la réception définitive4. En d'autres termes, les marchés de travaux privés ne sont régis que par le contrat liant le maitre d'ouvrage aux constructeurs ou dans des cas par les coutumes et pratiques courantes et habituelles du secteur.

§ 3 - Les effets juridiques de la réception des travaux

Telle qu'elle est pratiquée par les professionnels du BTP, la réception est un acte à caractère juridique d'une part et unilatéral d'autre part ; émanant de la seule volonté du maître de l'ouvrage. L'importance et la complexité d'un ouvrage demandent en général des examens et tests techniques étalés sur plusieurs jours et ce en présence et

1 Lambert-Faivre (Y), Risques et assurances des entreprises, Paris, Éditions DALLOZ, 1991, P 709

2 Art 89 «Le propriétaire d'un édifice ou autre construction est responsable du dommage causé par son écroulement ou par sa ruine partielle, lorsque l'un ou l'autre est arrivé par suite de vétusté, par défaut d'entretien, ou par le vice de la construction. .....Lorsqu'un autre que le propriétaire est tenu de pourvoir à l'entretien de l'édifice, soit en vertu d'un contrat, soit en vertu de l'usufruit ou autre droit réel, c'est cette personne qui est responsable.

3 Art 41 « Lorsque le maître d'ouvrage présume qu'il existe un vice de construction dans un ouvrage, il peut, jusqu'à l'expiration du délai de garantie, prescrire par ordre de service motivé les mesures de nature à permettre de déceler ce vice. Ces mesures peuvent comprendre, le cas échéant, la démolition partielle ou totale de l'ouvrage présumé vicieux. »

4 Art 67 « Le délai de garantie est, sauf stipulation contraire du cahier des prescriptions spéciales ou du cahier des prescriptions communes, égal à la durée comprise entre la réception provisoire et la réception définitive. Pendant le délai de garantie, indépendamment des obligations qui peuvent résulter pour lui de l'application de l'article 68 ci-après, l'entrepreneur est tenu à une obligation dite « obligation de parfait achèvement » au titre de laquelle il doit, à ses frais : ... »

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la participation de plusieurs corps de métiers. Mais un seul procès-verbal est cependant dressé et signé par les participants pour marquer une date unique comme point de départ des différentes garanties à la charge de tous les professionnels intervenant dans la réalisation du projet.

La réception est prononcée «contradictoirement », c'est-à-dire que l'entrepreneur doit être présent ou appelé à la réception, mais celle-ci demeure un acte unilatéral, et l'entrepreneur n'a pas à y donner son consentement.

L'acte de réception est un acte des plus importants dans la construction. Il marque en effet deux effets juridiques : le transfert de propriété de l'entreprise vers le maître d'ouvrage et le commencement de garanties restant à la charge de l'entreprise. Les entreprises ont la responsabilité de parfaire la construction et de réparer les vices détectés au moment de la réception provisoire. Le procès verbal de la réception ainsi établi va comporter des réserves que l'entrepreneur qui en est responsable doit lever avant le prononcé de la réception définitive. Même si le contrat liant le maître d'ouvrage aux entreprises spécifie une période ; généralement d'une année; séparant les deux réceptions, il arrive très souvent que le prononcé de la réception définitive prend plus d'une année après l'acte de la réception provisoire. Les raisons de ce retard sont multiples et peuvent dans certains cas exprimer la mauvaise volonté du maître d'ouvrage à vouloir garder l'entreprise sur les lieux et continuer la garde du chantier. Dans le cas de la France, les effets juridiques de l'acte de réception se résument comme suit :

- L'exonération de responsabilité des constructeurs des vices apparents ce qui vaut

acceptation des travaux par le maitre d'ouvrage.

- La réception marque le point de départ de tous les délais de prescription. En effet, l'article 2270 du Code civil a unifié le départ de trois délais; à compter de la réception ;à savoir :

? le délai d'un an de garantie de parfait achèvement servant à parfaire la

construction et lever les réserves émises dans le procès verbal de la réception ; ? le délai minimal de deux ans de garantie de bon fonctionnement des éléments

d'équipement du bâtiment ;

? le délai de dix ans de la responsabilité des constructeurs dont le point de départ n'est plus reporté comme auparavant à la date de la levée des réserves émises dans le procès verbal de la réception. Cette disposition sert à libérer les constructeurs et transférer la propriété au propriétaire de l'ouvrage même si leur

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responsabilité pourrait être retenue en cas d'apparition de pathologie. Le législateur a refusé de maintenir indéfiniment les entreprises sur chantier.

- Le transfert de la propriété s'opère directement après cet acte de réception. D'ailleurs, l'article 1788 du Code civil français exprime clairement ce transfert la perte de la chose à la charge de l'entrepreneur au maître d'ouvrage après l'acte de la réception. «à la réception s'opère donc un transfert des risques de l'entrepreneur au maître de l'ouvrage.1

Pour ces raisons invoquées, il existe plusieurs types de réceptions : la réception peut être amiable, de manière tacite, expresse ou judiciaire2 que nous définirons ci-après :

a - la réception tacite

Cette forme de réception traduit le caractère amiable émanant du maître d'ouvrage envers les constructeurs et ce en acceptant son ouvrage de façon implicite. Il accepte son ouvrage de manière expresse et sans la formalisation de cet acte dans un procès-verbal. Il paie l'intégralité des travaux aux entreprises et prend possession de son ouvrage.

Au Maroc, cette forme de réception est très largement répandue et pratiquée surtout dans les petits et moyens chantiers. C'est le cas ; notamment ; des personnes qui construisent pour leur propre compte.

En France, cette modalité était largement répandue et admise avant l'application de la loi de 1978 dite « Loi SPINETTA ». Cette dernière a condamné cette forme de réception dans l'article 1792-6 du code civil français et ce en exigeant la formalisation de l'acte de réception par un procès verbal. En effet, la réception est d'une particulière importance vu qu'elle marque le point de départ des différents délais légaux3. Le législateur a voulu écarter et enlever toute incertitude sur la date de la réception et la concrétiser de ce fait par un document écrit et signé qui n'est autre que le procès-verbal de réception.

Mais malgré l'existence de cette loi et son exigence de formalisation de l'acte de la réception, plusieurs petits entrepreneurs et artisans ainsi que des maîtres d'ouvrage ignorant la loi, ont perpétué la tradition d'absence de formalisme. La non application

1 - Risque de la chose (art. 1788 c. civ.): Civ. 1re , 4oct. 1988, Argus 1988, p. 2839.

2 Op.cit. Lambert-Faivre (Y), Risques et assurances des entreprises.

3 Ibid

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de l'article 1792-6 se traduirait par l'absence de réception et entraînait tout simplement la non mise en oeuvre de la responsabilité décennale.

Cette situation non confortable a provoqué de vifs plaidoyers de la doctrine1. Enfin de compte, le COPAL 2 a rendu un avis conforme et la Cour de cassation a finalement admis la validité de la réception tacite dans deux arrêts rendus le 23 avril 19863. Cependant, même si la réception est tacite, l'expression de volonté du maître d'ouvrage et des entreprises doit être non équivoque4.

Par ailleurs, un arrêt rendu le 12 juillet 1989 par la troisième Chambre civile est venu réconforter cette position en reconnaissant la réception tacite alors même que les travaux ne sont pas achevés en raison de la disparition pure et simple de l'entreprise5.

Un autre jugement a reconnu que « la prise de possession sans réserve autre que sur le prix vaut réception tacite »6.

Un autre cas peut se présenter qu'est celui de l'acceptation implicite : un coktail organisé par le maître d'ouvrage a été reconnu comme une acceptation de l'ouvrage et de ce fait une réception tacite7 ou encore le refus de réception de l'ouvrage à cause de malfaçons constatées dans l'ouvrage a été reconnu8.

b - La réception amiable

Ce type de réception se concrétise par l'établissement obligatoire d'un procès-verbal signés par les participants à l'acte de réception et qui peut comporter ou non des réserves. Les réserves sont énumérées et précisent les travaux de réparation qui devraient être entrepris par l'entreprise responsable. Dans le cadre des marchés publics

1 Moniteur des T.P. et du Bâtiment., N° spécial n° 87-43 bis du 230ct. 1987; cf. G. LEGUAY, «La réception tacite sous l'empire de la loi du 4 janvier 1978 ou le choix d'un moindre mal », R.D.I. janv. 1988, p. 114.

2 COPAL (Comité pour l'application de la loi du 4 janv. 1978), 10-12, rue du Capitaine Ménard, 75015 Paris. Rapport du COPAL sur « Le problème de la réception implicite ».

3 Validité de la réception tacite: Doctrine: J.-P. KARILA «Plaidoyer pour la réception tacite sous l'empire de la loi du 4 janvier 1978 », Gaz. Pal. 10 août 1986, p. 13; R. MARTIN, « Sur la réception tacite de l'ouvrage », Ass. fr. 1987.160.

Jurisprudence: Agen, 26 févr. 1985, D., 1986.24, note J.-P. Karila; Paris; 20 nov. 1985, D. 1986.567, note J.-P. Karila; Civ. 3e, 23 avr. 1986 (deux arrêts), J.C.P. 1987.II.20812, note D. Tomasin;

4 Réception tacite, volonté non équivoque requise: Civ. 3e, 4oct. 1989, R.C:A. 1990, n° 202 ; Civ. 2e, 3 mai 1990, R.C.A.1990, n° 336; Civ. Fe, 14févr. 1990, Gaz. Pal. 8 mars 1991, p. 25, note J. Roussel (la preuve de la réception incombant à l'assuré n'est pas rapportée).

Civ. 5e, 4 avr. 1991, Argus 1991.1475 « Caractère contradictoire de la réception non établi ».

5 Réception des travaux inachevés : Civ. 3e, 12 juill. 1989, D. 1989.I.R 238, et R.D.I. 1990, p.l05

6 Civ. 3e , 16 juill. 1987, D. 1987.577, R.G.A.T. 1988.351 « la prise de possession sans réserve autre que sur le prix vaut réception tacite »

7 Civ. 3e, 13 juin 1990, R.C.A. 1990, n° 357 (participation à un cocktail de réception donné par l'entrepreneur avant l'entrée dans les lieux des copropriétaires).

8 Civ. 3e, 21 nov. 1990, R.C.A. 1991, n° 63 (refus de réception en raison de graves malfaçons vaut réception tacite).

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maroucains, cet acte concrétise la matérialité de la garantie de parfait achèvement énoncée dans l'article 67 du CCAG-T.

c - La réception judiciaire

Comme nous l'avions signalé précédemment, il arrive souvent que le maître d'ouvrage ; pour diverses raisons qui lui sont propres ; refuse de réceptionner l'ouvrage et l'entreprise se trouve prisonnière dans le chantier. Dans ce cas précis, l'entrepreneur sera obligé d'assigner le maître d'ouvrage devant la justice afin de prononcer la réception judiciaire. La réception judiciaire est prononcée par le juge1 en l'absence de toute réception amiable, expresse ou tacite, du maître de l'ouvrage. La date de la réception sera celle de la décision judiciaire.

Mais il y a lieu de distinguer cette forme deréception de la la réception tacite constatée judiciairement. En fait, une réception ; tacite soit elle ; peut être contestée par l'une des parties contractantes et sera de ce fait constatée judiciairement par le juge à partir d'éléments qui démontrent la volonté du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux tels qu'ils se présentent i.e avec ou sans réserves.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote