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Les états et la construction de l'union africaine: le cas de la Libye et du Sénégal

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par Romaric TIOGO
Université de Dschang - Master II 0000
  

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2- La reconsidération du projet fédéraliste libyen

Le colonel Kadhafi dut recevoir l'UA comme un véritable camouflet à sa personne qui avait tant oeuvré pour que naquît un Etat africain : les « Etats-Unis d'Afrique ». La première mouture du projet fédéraliste qu'il avait soumise à ses pairs avait été profondément modifiée tant sur le plan de la forme que sur le fond. Sur le plan de la forme, le projet était très ambitieux. Il préconisait un seul Etat constitué des 52 pays du continent avec à la clé l'abandon des souverainetés au profit d'un exécutif fédéral. Or, le fait de vouloir embarquer tous les Etats d'un coup engendra de nombreuses divergences entre les partisans du « tout tout de suite », c'est-à-dire ceux qui appuyaient le projet libyen, les partisans « du pas à pas », ceux qui prônaient une union par évolution successive et la prise en compte des visions des autres pays subsahariens et ceux qui ne souhaitaient rien faire du tout. C'est à la suite de cette mésentente que naîtra une UA réaffirmant de manière non voilée une balkanisation de l'Afrique soutenue par les principes de l'égalité souveraine des Etats et du respect de leurs frontières issues de la colonisation130(*). En substance, c'est l'axe Addis-Abeba/Lomé qui venait une fois de plus d'être consacré.

Pourtant, selon Tripoli, les décisions prises à Lomé auraient dû être  immédiatement exécutées. L'OUA devait être directement remplacée par une UA au caractère supranational. Mais, il n'en a rien été. Car, à l'analyse des textes donnant naissance à l'organisation panafricaine, il est clair que les chefs d'Etat ont réaffirmé la toute puissance de l'Etat. D'ailleurs, pour certains d'entre eux, à l'instar du président Algérien Abdelaziz Bouteflika, « l'OUA, sa charte et ses institutions sont des acquis précieux qu'il faut à l'évidence préserver »131(*). Rêve brisé pour la Libye, ses partisans et les populations africaines pour lesquels il fallait sans doute toucher à la souveraineté des Etats. Pour l'ancien secrétaire général de l'OUA Edem Kodjo, l'UA qui vient de sortir des entrailles des dirigeants du continent, « n'est même pas une fédération. C'est une vague confédération »132(*).

Sur le plan du fond, observateurs et analystes sont quelque peu départagés. Certains sont d'avis que l'UA ressemble fort étrangement à l'OUA. C'est ce que pensent EDEM KODJO et Laurent zang. Pour le premier, l'UA est en réalité une « OUA débaptisée »133(*). Son argumentaire repose sur le fait qu'au regard de ses organes, les chefs d'Etat ont juste procédé à une simple substitution. Ainsi, la Conférence de l'Union n'est rien d'autre que l'ancienne conférence des chefs d'Etat et de gouvernement et le Secrétariat de l'OUA est devenu la Commission de l'Union. De même, il constate que le fameux Conseil exécutif consacré par l'Acte constitutif, qui plus est avec des pouvoirs réduits équivaut au Conseil des ministres existant. Dans la même perspective, le second c'est-à-dire Laurent ZANG réalise qu'il s'agit « au pire d'une OUA-bis ». Pour lui, la ressemblance avec l'ancienne organisation est d'autant flagrante qu'autant la Charte de l'OUA que l'Acte constitutif de l'UA comptent chacun 33 articles.

Cependant, tel n'est pas forcément l'avis de DJUIDJE KOUAM pour qui l'UA constitue une véritable mutation à la fois politique, normative et structurelle. Pour elle, il semble de plus en plus incongru d'accréditer la thèse selon laquelle l'UA ne serait qu'une OUA-bis. Cette situation poursuit-elle, ne se limiterait qu'à une simple dénomination ; un jeu sémantique (Organisation de l'Unité/Union) ; une jonglerie de sigles où le « O » disparaît (OUA/UA) . C'est la vision que nous partageons, même s'il faut y mettre un bémol. Car, contrairement à l'ancienne OUA, l'UA a connu une évolution certaine. Elle entend davantage communautariser les politiques des Etats membres sur un plan multiniveaux. Entre autres la politique de défense avec la montée en puissance du dispositif panafricain de sécurité qui a posé sa base logistique à Douala(Cameroun)134(*) ; le développement économique et ses projets subséquents ; la politique monétaire avec la naissance des institutions financières; le parlement panafricain qui est censé être le lieu d'expression par excellence des Etats et des peuples africains.

Il faut tout de même reconnaître que l'effectivité de la mise en oeuvre de toutes ces structures supposées sortir le continent africain de l'ornière, reste empreinte de laxismes politiques non seulement de la part de certains gouvernements africains, mais aussi de certaines contraintes d'ordre externes comme nous le verrons dans le 4ème chapitre de cette étude.

Il est donc clair que l'Acte constitutif de l'UA n'a inscrit nulle part dans ses dispositions la mention « Etats-Unis d'Afrique chers à Monsieur Kadhafi » 135(*). Certainement, qu'en acceptant au pis aller l'UA, la Libye a-t-elle pensé qu'un jour les uns et les autres franchiraient enfin le Rubicon en procédant à de profondes réformes ? Telle est la question que suscite notre observation et aiguise notre curiosité intellectuelle. Sinon, comment comprendre l'opiniâtreté libyenne qui, après cette fin de non recevoir de son projet le plus en vue est tout de même restée dans l'expectative ? C'est l'analyse que nous pouvons faire au regard des politiques supranationales proposées par ce pays à l'Union.

* 130 Voir l'article 4 de l'Acte constitutif de l'UA.

* 131 Interview d'Abdelaziz Bouteflika accordée à OUSMANE Ahmadou, « Foire d'empoigne à Lomé », dans Jeune Afrique, N° 313, op. cit., p. 10.

* 132 Voir OUSMANE (A.), op. cit., p.15.

* 133EDEM KODJO cité par OUSMANE Ahmadou, op. cit., p. 15.

* 134 C'est suite au désengagement de Dakar à abriter cette force africaine en attente que les Etats membres ont porté leur dévolu sur la capitale économique du Cameroun, qualifiée par les stratèges de ``stratégique'' du fait de sa situation « au coeur de l'Afrique ».Car, à partir de ce lieu, des interventions peuvent être lancées dans les quatre points cardinaux du continent.

* 135BOURGI Albert, « L'Union Africaine entre les textes et la réalité », article disponible sur http://www.diplomatie. gouv.fr /IMG/pdf/Bourgi.pdf, p. 338, consulté le 5 mai 2011.

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