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Interactions et ancrage territorial des industries créatives: le cas de la Belle-de-Mai à  Marseille

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par hélène sEVERIN
Université Aix-Marseille - Master 2 géographie du développement 2015
  

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Chapitre 1 : Le phénomène de « Friche culturelle »

Ce premier chapitre a pour but d'analyser et de comprendre les principes fondamentaux de l'émergence des Friches culturelles. Nous définirons dans un premier temps la Friche culturelle telle que nous la connaissons aujourd'hui à travers les prémices de ce processus. Nous verrons ensuite comment la culture permet la résilience territoriale grâce à l'institutionnalisation et au principe de projet urbain. Enfin, nous tenterons de mettre en lien ce concept avec celui de la créativité territoriale, puisqu'il est de plus en plus présent dans les discours actuels du développement local. Ce lien nous permettra notamment d'aboutir à notre second chapitre de cette partie théorique où nous tenterons d'analyser le modèle du « cluster » où justement, ces industries entrent en cohésion et où elles sont censées se complémenter. Nous nous demanderons alors si la Friche culturelle peut devenir un cluster. Nous appuierons notre concept sur des exemples européens, les plus connus, où nous verrons que la théorie est parfois toute autre que la réalité.

1. Comment la Friche culturelle est-elle rendue possible ?

a) Une difficile définition de ce qu'est une Friche

La géographie culturelle est une approche qui s'est développée depuis les années 1990 seulement à travers les écoles anglo-saxonnes et françaises. Néanmoins, il paraît difficile que ces différentes méthodes s'accordent sur une même voix. Il semble donc délicat de définir des objets propres à la culture. Pour comprendre l'objet Friche culturelle il faudrait donc d'abord comprendre ce qu'on entend par « culture » mais aussi comment émerge l'objet Friche.

Selon Pierre Georges, la culture qualifie « originairement une civilisation, avec sa langue, ses croyances, ses formes d'expression artistique, le mot est désormais employé pour désigner l'ensemble des superstructures de l'économie et de la vie sociale : langage, traditions, activités intellectuelles, littéraires, artistiques et scientifiques, idéologie politique et forme de gouvernement, religion et mythes, structures sociales... » (GEORGE P., VERGER F. 2006). La culture se définit par des liens sociaux qui proviennent de différents héritages et qui permettent de comprendre les sociétés actuelles. Chaque société sur chaque territoire dispose donc d'une culture différente. Selon Paul CLAVAL (1995) «  toutes les sociétés ne disposent pas du même arsenal de connaissances et de techniques, et du même registre d'interprétations et de motivations ». Mais la culture ne se définit pas seulement par des héritages, des savoir-faire ou des langages. C'est aussi devenu un outil de développement économique des grandes villes notamment par les nouveaux espaces culturels qui émergent depuis les années 1990.

C'est dans les différentes analyses de la géographie culturelle que ces nouveaux espaces culturels sont conceptualisés. La première difficulté réside dans la dénonciation du territoire, qui est tantôt défini comme des fabriques artistiques et nouveaux territoires de l'art et tantôt comme des lieux alternatifs et espaces intermédiaires.

Selon Boris GRESILLON, qui tente de restituer les Friches culturelles comme « phénomène » et comme « type de lieu, les premières recherches anglophones de la New cultural Geography s'engagent sur un modèle postmoderniste dans le vaste champ des sciences humaines et sociales. Les précurseurs de ces recherches sont C.MITCHELL, D.COSGROVE, J.DUNCAN, P.JACKSON et J.WATSON. A la différence de cette école anglophone, l'école française de la géographie ne s'engage pas directement dans une approche postmoderniste (excepté P. CLAVAL, J.F STASZAK et C. CHIVALLON). Les débats théoriques qui ont forgé l'école anglophone ont eu beaucoup de mal à arriver jusqu'en France. Plus simplement, la différence entre les deux écoles réside dans la méthodologie d'analyse. Les français ont choisit la multiplication des « objets » culturels donc de terrain d'études variés plutôt qu'une analyse théorique différente de celle de la géographie humaine. Les premières analyses où le rapport entre géographie et culture est mis en évidence furent éditées en 1981 par la revue l'Espace géographique dans un numéro spécial. On y trouve quasiment tous les précurseurs de la géographie culturelle réunis autour de sa définition, mais qui ont d'emblée pour réflexion de ne pas en faire une définition absolue. Aujourd'hui, le débat sur cette géographie est rouvert, et les critiques ont tendance à apparaître plus facilement, que se soit dans la théorie mais aussi dans l'analyse des différents « lieux créatifs » dont une norme à tendance à émerger alors que chaque lieu se construit d'une façon différente.

Bien que l'approche de cette géographie culturelle soit récente, il existe des exemples d'expérimentation de reconversion de Friche en lieu culturel plus anciens qu'il nous semble judicieux de souligner. A l'instar des waterfronts des villes portuaires des Etats-Unis depuis les années 1960, la reconversion des Friches industrielles en France débute dans les années 1980 dans un mouvement de culture « off » présent dans le Nord de l'Europe. Dans les années 1970, on voit déjà apparaître à Amsterdam avec le Melkweg et à Bruxelles avec les Halles des Shaerbeek des espaces de reconversion. En France, c'est en 1983 que l'on commence à voir émerger ces lieux créatifs avec le Confort moderne de Poitiers. Il nous semble aussi important de citer les cas de Barcelone et de Bilbao (dans les années 1980), qui restent les grands modèles de régénération urbaine les plus étudier. Mais aujourd'hui, ces opérations font débat.Elles s'apparentent finalement à des interventions à échelle urbaine et les mettre en comparaison avec des cas comme les Friches culturelles en France paraît être une erreur. Il faut d'ores et déjà émettre une contradiction entre les grandes opérations de régénérations urbaines qui émanent de politiques étatiques de renforcement culturel et d'autres réhabilitations industrielles locales par la culture qui émanent bien souvent d'artistes et de politiques locales. Aussi, d'un coté on insiste sur le fait qu'il faut cultiver sa différence et de l'autre on tente d'inculquer des paradigmes bien définis où le processus à fonctionner. Il semble donc primordial de prendre du recul sur ce discours très modéliste et incitateur.

Dans un même temps, on voit de plus en plus apparaître des lieux off, ou des lieux alternatifs, où la culture, initiée par un groupe d'artistes,n'est pas reconnue par les institutions. Ce sont souvent des lieux à vocation communautaire qui entrent dans l'évolution de la création culturelle et des caractéristiques esthétiques traditionnelles. Elsa VIVANT (2007) tente de définir une géographie de ces lieux alternatifs. Ce sont pour la plupart des théâtres de rue, des squats d'artistes, les danses de rue, etc. C'est donc plus généralement l'art dans la rue, ou l'art de la rue. Les squats d'artistes par exemple, dont font généralement parties les Friches culturelles, participent à un processus de revendications communautaires et de contestation politique. C'est notamment par leur caractère illégal que ces lieux se distinguent des lieux culturels de norme. Les premiers squats français apparaissent dans les années 1980 à Paris et depuis, de nombreux lieux alternatifs sont apparus partout en France. Certains sont restés à cette phase de présence temporaire d'artistes et d'autres sont devenus des territoires de l'art à part entière.

Finalement, les Friches ne recouvrent jamais les mêmes lieux, d'où la difficile définition et modélisation de ces espaces. Certaines étapes au sein des politiques institutionnelles culturelles ont néanmoins permis de mieux cerner ces lieux et leurs enjeux. C'est notamment le cas du rapport LEXTRAIT (rendu public en 2001), qui est bien sûr un cas d'école. À la suite d'une demande du secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle Michel DUFFOUR, l'objectif de ce rapport est la reconnaissance des Friches et des lieux intermédiaires. Ce travail porte sur 30 expériences réparties dans 11 régions. Ce sont des expériences singulières où les normalités et le cadrage de l'État sont refusés et donc où le risque de l'éphémère est fort. Le premier volume présente les monographies et expériences des squats de Grenoble, de la fiche la Belle-de-Mai à Marseille ou encore de la Condition publique de Roubaix. Le second volume présente les fondements de ces expériences et définit la problématique artistique comme un moyen de production. Ce programme va permettre a création de mission sur les Nouveaux territoires de l'art. Cette équipe interministérielle accompagne les projets à travers une expertise et des conseils auprès des services déconcentrés et décentralisés1(*). On voit donc apparaître, avec ce rapport, un réel engouement pour ces nouveaux lieux créatifs après une longue période de développement sans reconnaissance particulière.

Par la suite, de nombreuses études ont été publiées sur ces expériences culturelles et artistiques dans différents pays européens. A titre indicatif nous pouvons citer Boris GRESILLON (2002 : Allemagne, 2002 et 2004 : France), ANDRES (2008 : France), Fabrice RAFFIN (2000 et 2008 : France, 2002 : Suisse), Maria GRAVARI-BARBAS (2004 : France), Elsa VIVANT (2006 et 2009 : France), HARRIS (2006) et PRATT (2009) (Grande-Bretagne), KUNZMANN (2004 : Allemagne), etc.

Les Friches culturelles s'inscrivent donc dans différents mouvements de recherche. Ces mouvements traitent de la résilience territoriale par la ressource culturelle avec des approches de points de vues plus ou moins critiques. Notre analyse tentera de prendre en compte ces différentes approches et de les comparer. Nous allons tout d'abord voir comment la Friche culturelle est rendue possible et comment l'institutionnalisation de ces lieux a pour objectif de lier projet culturel et développement urbain. Enfin, nous tenterons de cerner comment la culture est devenue « créative ».

* 1 « Mission des Nouveaux territoires de l'art-Institut des Villes ». Ressource disponible en ligne : http://www.artfactories.net/-Mission-Nouveaux-Territoires-de-l-.html

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci