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L'organisation de coopération de Shanghai et la politique d'intégration chinoise au Xinjiang

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par Vincent Burguet
Université Laval - L.L.M. Droit international et transnational 2016
  

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L'Organisation de Coopération de Shanghai et la politique
d'intégration chinoise au Xinjiang

Vincent Burguet1

1 Diplômé d'un Master 2 en Droit international, d'un L.L.M. en Droit international et transnational après un parcours à l'Université de Bordeaux et l'Université Laval. Cette analyse a été présentée lors du travail final du cours « Géopolitique de l'Asie Pacifique » dirigé par Gérard Hervouet au sein du département des Hautes Etudes Internationales de l'Université Laval.

« Il est de coutume de présenter le Xinjiang, vaste province chinoise la plus à l'Ouest du pays, comme une périphérie continentale, marge culturelle du territoire chinois en proie au sous-développement et au séparatisme »2.

Cette vision héritée de l'histoire complexe avec le pouvoir en Chine, est sujette à des évolutions radicales aujourd'hui en termes de développement économique, de migration et d'importance géopolitique du Xinjiang pour Pékin. En effet, « cette région frontalière présente aujourd'hui le paradoxe d'un développement accéléré qui la singularise des autres provinces intérieures de la Chine par son premier rand pour son IDH et son PIB mais également par son attraction qui se caractérise par un solde migratoire positif »3. Cette évolution du Xinjiang est due aux politiques internes chinoises, mais également aux relations extérieures que la Chine n'a eu de cesse d'améliorer avec les pays d'Asie-Centrale. La mise en place du mécanisme des 5 de Shanghai en 1996, puis la création de l'Organisation de Coopération de Shanghai le 15 juin 2001, s'inscrivent dans une volonté politique chinoise de désenclavement économique du Xinjiang, et paradoxalement d'une mainmise toujours plus importante sur la minorité ouïgoure, qui est toujours porteuse de revendications, et d'une aspiration à l'indépendance.

Dans cette mesure nous pouvons nous poser la question : l'OCS est-elle « instrumentalisée » par la Chine pour réprimer les volontés « indépendantistes » du Xinjiang ?

Cette problématique amène une réponse claire : oui, la Chine utilise et a utilisé les instruments régionaux pour stabiliser le Xinjiang sur le plan interne comme externe. Cependant l'intérêt de cette analyse tient à la complexité du sujet : les causes du malaise Chinois avec le Xinjiang remontent historiquement à une menace sur la sécurité continentale de l'Empire du Milieu et expliquent les politiques répressives de Pékin sur ce « nouveau territoire ». L'uniformisation de la Chine sous le modèle Han est cependant vivement rejetée dans ce territoire qui possède un modèle identitaire et culturel distinct, et qui le revendique régulièrement.

Dans ce sens, nous analyserons dans un premier point le contexte géopolitique du Xinjiang et la genèse de l'OCS (1), l'étude de la formation de cette Organisation multidirectionnelle nous permettant de nous centrer dans un deuxième temps sur l'utilisation par la Chine de l'OCS

2 « Le nouveau Xinjiang : intégration et recompositions territoriales d'une périphérie chinoise » Alain Cariou , EchoGéo (en ligne) https://echogeo.revues.org/11244

3 Ibid. L'auteur se fonde également sur Pannell et Schmidt, 2006.

comme outil de stabilité du Xinjiang (2), et enfin de faire apparaître dans un troisième temps la portée de la politique chinoise au Xinjiang (3).

1. Le contexte géopolitique : Le Xinjiang et l'OCS

1.1. Le Xinjiang, une région en marge de la Chine

Cette « nouvelle terre », située à l'extrême ouest de la Chine continentale, proche de l'Asie-Centrale, est la plus vaste région autonome de Chine avec 1 646 800 km2. Le centre de cette région essentiellement montagneuse est traversé d'est en ouest par le massif du Tian shan («Monts célestes»). De nombreuses plaines et vallées fertiles sont dispersées parmi les hauts sommets de ce massif culminant à plus de 5000 mètres. Au sud du Tian shan, on trouve le grand bassin du Tarim, le fleuve principal de la région avec le désert du Taklamakan4. L'ouverture géographique du Xinjiang sur l'Asie-Centrale, en faisant un des points de passage obligés sur la Route de la Soie, explique sa diversité ethnique et son histoire complexe5. Il y a en effet une multitude d'ethnies dans la composition de la population : plus de 20 groupes ethniques différents, avec une majorité partagée entre ouïgours (45 % de la population) et Han (41 % de la population du Xinjiang pour l'instant) sur une population d'environ 19,6 millions d'habitants.

Les ouïgours sont turcophones (de la famille altaïque : proche des kirghiz, kazakh et tatar) avec une forte présence de dialectes selon les localités.

Une autre particularité est la religion : l'islam est la religion dominante, en 1990 61,7% de la population du Xinjiang était musulmane (Ouïgours, kazakhs, Hui).

L'islam s'est développé dès le Xe siècle, mais surtout étendu au XIVe avec les confédérations soufies venues d'Asie centrale. Un mouvement réformateur pan-islamique et pan-turquiste « djadid » s'est diffusé depuis l'Asie Centrale : il s'est traduit par l'ouverture d'écoles, le développement d'un nouveau système d'éducation (qui a joué un rôle clé de rapprochement entre les kirghiz et ouïgours).

4 Voir sur ce point http://www.axl.cefan.ulaval.ca/asie/chine-region-auto-ouigoure-Xinjiang.htm

5 Allès Elisabeth. Usages de la frontière : le cas du Xinjiang (XIXe-XXe siècles). In: Extrême-Orient, Extrême-Occident, 2006, n°28. Desseins de frontières. pp. 127-146.

Du point de vue historique nous pouvons noter une conquête et une domination tardive du « Turkestan oriental ou Chinois » par le pouvoir central Chinois.

La conquête des « territoires de l'ouest » (xiyu), a « toujours fait l'objet de l'attention des pouvoir impériaux »6, l'historiographie chinoise la fait remonter au IIe siècle sous le règne de l'empereur Wudi (dynastie des Han -206 à +220) puis sous la dynastie des Tang (618-907)7 avec la mise en place de colonies militaires.

Cependant la véritable conquête du Xinjiang (littéralement « nouvelle frontière) a eu lieu de 1755 à 1759 par la dynastie des Qing afin de prévenir la montée du pouvoir Zunghar (confédération de tribus mongoles Oirats). Après le massacre des Zunghars8 et le « transfert forcé » de la population turkestanaise, les Qing mirent en place un corps de « paysans-soldats » (tuntian) afin d'établir des colonies : surveiller et mettre en valeur les nouvelles terres. Cette conquête n'a pas pour autant assis la domination chinoise : de nombreux chefs de guerre khirgizs n'acceptaient pas la domination Qing (il est à noter que l'Empire chinois avait mis en place un système de rétribution en taëls d'argent pour maintenir la stabilité dans cette région).

Le Xinjiang bien qu'il ait été rattaché administrativement à l'Empire Chinois en 1884, est marqué au XXe siècle par le jeu des « seigneurs de guerre », ainsi que par la percée de la zone d'influence soviétique sur cette région. De 1933-1934 la création de la République islamique du Turkestan oriental est réprimée par l'URSS, de 1944 à 1949 la République du Turkestan oriental est créée avec l'aval de Moscou.

La « libération pacifique » de Mao bouleversera profondément le Xinjiang (avec une intégration définitive à la Chine, et un refus de sécession, art 9 de la Conférence consultative du peuple chinois) et sa composition ethnique : afflux de colons et de militaires, avec une prédominance de la culture Han (art 50 de la Conférence consultative du peuple chinois) et la mise en place du CPCX (Corps de production et de construction du Xinjiang : Shengchan jianshe bingtuan), un corps de paysans-soldats destinés à assurer la sécurité des frontières de l'Ouest (environ 200 000 hommes). La répression chinoise commença en 1957 suite à la

6 Ibid.

7 Supra note 3

8 Elisabeth Allès, supra, note 4. Ce fut une quasi-extermination des Mongols Oirats. À ce sujet voir Morris Rossabi, China and Inner Asia. From 1368 to the Present Day, 1975, p. 148 ; L. Douman,

« Conquêtes de la Zhungeer et du Turkestan de l'est par l'empire Qing », 1982, p. 244-245 ; James A. Millward, 1998, p. 30.

Campagne des cents fleurs (sensée rectifier la politique du PCC), face aux trop nombreuses revendications au Xinjiang, Pékin « supprima l'alphabet arabe et introduisit l'alphabet piyin »9.

Avec le Grand Bon en Avant (1958-1962), ce fût une période de « l'unité par l'uniformisation en marche» où toute revendication à la différence impliquait nécessairement «un frein à la collectivisation»10. Puis avec la Révolution culturelle maoïste (1966-1976), une forme de génocide culturel à l'encontre de la minorité ouïgoure fut entreprise par le pouvoir central de Pékin (destruction des mosquées, livres, éducation forcée en chinois...).

Le culte du « chauvinisme han »11, et l'immigration massive de Hans, ainsi de 1949 à 1990 la population Han est passée de 6,7% à 37,5% de la population totale du Xinjiang12.

« En dépit d'une propagande officielle qui retient l'enthousiasme et le volontarisme de milliers de chinois venus participer au développement de l'Extrême Ouest chinois, ce dernier constitue cependant une terre de relégation. Pendant la Révolution culturelle (1966-1969), l'afflux annuel de migrants forcés a été en moyenne de 100 000 personnes avec un maximum de 350 000 en 1966. Toutefois, cette population déportée a été autorisée à regagner la Chine de l'Est au début des années 1980. La région compte aussi des « colons spéciaux » dans les « camps de rééducation » (laogai), Han déportés, puis assignés à rester au Xinjiang une fois leur peine purgée »13.

Il faut souligner les nombreux actes de « résistance » de la part de mouvements ouïgours : le mouvement clandestin le plus important d'entre eux fut le PPTO14.

Relative ouverture pendant les années 80, avec l'arrivée au pouvoir de Den Xiaoping : « revitalisation de la culture et de l'identité islamique des ouïgours »15 (créations

9 Ibid.

10 Ibid.

11 Ibid.

12 Supra note 3.

13 Alain Cariou, supra note 1, §14.

14 Rémi Castets, « Le nationalisme ouïghour au Xinjiang : expressions identitaires et

politiques d'un malêtre.», Perspectives chinoises [En ligne], 78 | juilletaoût 2003, mis en ligne le 02 août 2006, consulté le 08 février 2016. URL : http://perspectiveschinoises.revues.org.acces.bibl.ulaval.ca/156 p.6

15 Ibid.

d'associations étudiantes, manifestations à l'Université du Xinjiang16, mouvement des meshrep)17.

Le contexte international de la chute de l'URSS conjugué au relatif apaisement de la part de Pékin, galvanise les aspirations indépendantistes au Xinjiang18 dans les années 90. La peur de la contagion après les évènements de la place Tiananmen va entraîner le PCC dans un tournant répressif. Ainsi que nous traiterons plus loin.

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