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Le parti unique et la question de l'unité nationale au Togo de 1961 à  1990.

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par Balowa KOUMANTIGA
Université de Kara - Maîtrise ès Lettre Sciences Humaines 2013
  

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2.4- L'unité nationale : utopie ou réalité ?

Au cours de nos recherches un observateur averti nous a posé la question à savoir si la politique de l'unité est-elle du ressort de l'Etat ou d'un parti. Vu la légitimité et la pertinence de la question nous avons jugé nécessaire d'y apporter une approche de solution. Ainsi notre avis sur la question est que c'est l'Etat qui mène la politique générale. De ce fait c'est l'Etat qui légitimement mène la politique de l'unité nationale. Mais dans le cas du parti unique il est à noter une confusion des institutions de l'Etat et des organes du parti. Les membres du gouvernement se retrouvent dans les instances nationales du parti. Dès lors, les idéaux du parti deviennent les axes directeurs de la politique du gouvernement. Dans la logique du parti unique, c'est le parti qui incarne le pouvoir politique. Et dans le cas précis ce sont les organes du RPT qui se chargent de la conception de la politique de l'Etat et de sa mise en application102(*). Et en vertu de la prééminence édictée plus tard, le Bureau politique se trouve au-dessus du gouvernement. Donc celui-ci est appelé à se conformer à la volonté du Bureau politique et à exécuter ses décisions. Cette mise au point ainsi faite, abordons la question proprement dite qui concerne cette section.

La politique de l'unité nationale n'a pas été évoquée pour la première fois par le RPT. Bien avant, lui les différents gouvernements qui se sont succédé ont eu également ce souci. Le 27 avril 1960, dans son discours à l'occasion de la proclamation solennelle de l'indépendance du Togo, Sylvanus Olympio alors Premier ministre de la République togolaise disait en substance : «Les vielles querelles tribales, les vielles animosités de familles doivent définitivement disparaître. De l'océan aux frontières du Nord, de l'Akposso au Mono, le Togo doit être un, libre et fier » (Cornevin 1988 : 313)

Ainsi, la politique de l'unité nationale venait d'être lancée officiellement. Le parti allié du CUT, la JUVENTO lors de son 8e congrès inscrivit la question de l'unité nationale à l'ordre du jour des débats et fit plusieurs propositions toutes liées à la formation d'un parti unique. « L'unité doit se réaliser en vue de travailler à bâtir ce pays. » peut-on lire dans le rapport de ce congrès. Ainsi le développement était lié à l'unité ; elle aussi à son tour liée au parti unique. Leur appréhension de la diversité des partis politiques fut la même qu'en 1969. En 1961, il créa le PUT qui se révéla être une dérive vers la dictature.

Trois ans plus tard, estimant que le régime d'Olympio avait profondément divisé les Togolais, Nicolas Grunitzky, deuxième Président du Togo, plaça son mandat sous le signe de la réconciliation nationale avec des discours considérés à bien des égards comme unionistes. En février 1963, il organisa une table ronde regroupant tous les acteurs de la vie politique nationale pour aplanir les divergences afin d'aboutir à la réconciliation et à l'union (Toulabor 1986 : 56). Mais le deuxième coup d'Etat témoigne que l'objectif ne fut pas atteint.

La recherche de l'unité sera l'essence de la création du RPT. Celui-ci montra toute sa volonté à unir comme le font ressortir les pratiques ainsi que les actions que nous avons exposés plus haut et qui visent cet objectif. Mais au finish, peut-on dire que l'unité est un acquis ? Avant toute réponse précisons que la recherche de l'unité nationale est une quête permanente. L'unité ne peut donc pas être un acquis définitif. Ainsi, le parti unique togolais le RPT à oeuvrer pour l'effectivité de cette unité mais la politique de l'unité nationale s'est perdu dans les discours. L'unité est donc restée un voeu. Les évènements de 1990 au Togo sont la preuve de l'échec de la politique de l'unité nationale. Après ces évènements certains partis politiques qui naitront furent identifiés comme la réincarnation des partis dissous en 1967 c'est ainsi que l'UFC sera identifié au CUT donc le cycle recommence.

Il faut dire que l'assassinat de Sylvanus Olympio a toujours hanté la vie politique togolaise. La revendication ouverte de cet assassinat, par le Président Eyadema originaire du nord a fait apparaître cet acte comme le summum et la dégénérescence d'un conflit Nord-Sud. Dès cet instant, comment un parti créé par lui peut-il arriver à réconcilier et à unir tous les peuples malgré toute la bonne foi exprimée ? Les dirigeants venaient ainsi de compromettre les chances de réconciliation et d'unité nationale. De plus, les différents complots de déstabilisation du régime RPT en 1970, 1985 et 1986, ont été attribués au clan Olympio et alliés et en général à l'opposition. Et ceux-ci ont été contraints à l'exil ou faits prisonniers. Les discours n'hésitaient pas à vilipender celui qui est considéré par certains, comme le « père de l'indépendance ». Le changement de la devise nationale et de l'hymne national ainsi que la célébration de la date anniversaire de la mort du Président Sylvanus Olympio dénommée fête de « la libération nationale », ont été considéré comme une volonté de proscrire de la mémoire collective des Togolais le souvenir de cet homme. Ces éléments ont plutôt raidi et radicalisé davantage les positions de ceux qui se réclamaient de l'opposition. Ainsi la « révolution démocratique » sonne comme une occasion de prise de revanche des présumés écartés du pouvoir depuis la mort du leur en 1963. Tout comme le parti unique fut à la mode dans les années 1960, le multipartisme le fut dans les années 1990. Garder le parti unique pouvait être considérer comme un retard sur la « modernité ». A cela il faut ajouter le désir légitime d'élargir le panel des libertés brimées par le parti unique. Tous ces éléments ont contribués au rejet du parti unique et à la revendication du multipartisme comme garant de la démocratie.

Crée en 1969, par le Président le général Gnassingbé Eyadema, le RPT a été véritablement institutionnalisé par la constitution de 1980 qui dans son préambule stipule que :

« le peuple togolais, horrifié par la politique de haine, de division et de règlement de compte des régimes précédents, s'est engagé dans la voie de l'unité nationale et du développement économique sous la direction exclusive du Rassemblement du peuple togolais. Il [le Rassemblement du peuple togolais] guide toutes les institutions de la République et veille au respect des devoirs du citoyen. »

Ceci illustre à suffisance la mission qui fut assignée à ce parti ainsi que la place que celui-ci était appelé à occuper désormais dans le pays : un parti supra institutionnel. Son hymne : « Unité Nationale » ainsi que sa devise : « Union, Paix, Solidarité » au terme de cette même constitution remplacèrent « Terre de nos aïeux » et « Travail-Liberté-Patrie ». Fort de sa mission le parti se dota de structure qui favorise celle-ci pour ainsi apparaître comme l'épine dorsale de la société togolaise.

Coopération entre les élites au sein des institutions pour maîtriser les relents tribalistes et les conflits segmentaires. Ainsi peut se résumer et se comprendre la politique de répartition des responsabilités pratiquée sous le RPT. Cette politique avait l'avantage de neutraliser les tendances centrifuges inhérentes à toute société plurale. On peut donc affirmer que la politique de répartition des responsabilités politiques et administratives était une réponse de circonstance à une époque où les uns et les autres manifestaient leur volonté de se voir impliqué dans la gestion du nouvel Etat indépendant. Elle répondait ainsi au souci de gestion des macroéquilibres géopolitiques nationaux.

* 102 Confère article 3 alinéa 3 des statuts du RPT : « le RPT déterminera les grandes options politiques, économiques et sociales de la nation, et en assurera l'application. »

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand