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Les déterminants de la productivité de l'investissement privé en Haiti: un modèle à  équations simultanées (1981-2010)


par Carlos DODIEU
Université d'Etat d'Haiti (UEH) - Licence ès Sciences Economiques (Bac+4) 2014
  

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CHAPITRE II

LES DÉTERMINANTS EXTRA-ÉCONOMIQUES DE L'INVESTISSEMENT

Kobrin (1976) fut l'un des pionniers à avoir incorporé, dans un modèle à la détermination de l'investissement privé étranger, les variables politiques, sociales, culturelles et administratives. Il a montré dans son étude que le risque sous ces différentes facettes constitue un obstacle majeur à la réalisation d'investissements privés rentables et décourage tout investisseur potentiel. D'autres études plus récentes abondent dans cette même ligne d'idée et ont prouvé les liens intrinsèques entre ces dites variables et l'investissement ; on peut citer les travaux de Mauro (1995), Meldrun34 (2000), etc.

Les travaux empiriques de Tanzi et Davoodi (1994) ont étudié comment la qualité des institutions physiques et humaines influencent l'investissement domestique à travers la corruption, l'instabilité politique et sociale.

Cependant, les travaux de Kaufmann (2000) et ceux de Zoido-Lobatón (2000) ont prouvé que les variables politiques, sociales, administratives sont toutes charriées par le concept de Gouvernance. Pour ces auteurs, la gouvernance se réfère aux traditions et aux institutions à travers desquelles s'exerce l'autorité dans un pays. En ce sens, se trouvent inscrits dans le concept de gouvernance : le respect des institutions par l'État et les citoyens, l'allocation et la gestion des ressources rares de façon à résoudre les problèmes collectifs, La capacité des gouvernants de formuler et d'appliquer de saines politiques et d'adéquates réglementations, les procédures de choix, et de remplacement des gouvernants. Selon le Programme des Nations pour le Développement (PNUD,1997), la transparence, la satisfaction des besoins et des attentes, la primauté du droit, la responsabilité, l'efficacité et l'équité sont les principaux critères d'évaluation de la qualité de la gouvernance. Les résultats d'études d'Asiedu (2003) ont prouvé que la stabilité macroéconomique des institutions efficientes, de la stabilité politique et d'un cadre légal et réglementaire ont un impact positif sur la décision d'investissement. Par contre, la dérogation à ces caractéristiques constitue la mauvaise gouvernance qui s'identifie par les troubles, violences, la hausse de la corruption, les émeutes, le gaspillage des ressources

34Meldrun(2000,cf.Bonny,2005)

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nationales, l'exclusion, etc. Il existe de nombreux travaux sur le lien entre ces dites variables et l'investissement. Déjà, selon la CNUCED, la stabilité politique, sociale et économique, les régimes commercial et fiscal, le cadre légal et réglementaire influent sur la décision des investissements privés. Bon nombre d'experts ont prouvé que la performance économique d'un pays dépend principalement de son cadre politique, institutionnel, et juridique [OCDE, 2001]. En ce sens, ce chapitre est divisé en deux grandes sections : la première expose les théories de l'école institutionnaliste ; la seconde présente quelques résultats de travaux empiriques comme ceux d'asante (2000), de Mauro (1995), le modèle de la Banque et Mondiale, les travaux de Hall & Jones, les travaux de Hiren Sarkar & Aymul Hasan (2001), et les travaux de Ndinga (2002).

SECTION I : Économie institutionnelle35

L'école institutionnaliste a connu ses premières influences avec Max Weber (histoire économique) en Allemagne ou John Hodson (l'impérialisme) en Angleterre, et les fondateurs de cette école sont les américains Thorstein Veblen, Clarens Ayres, Wesley Mitchell, J.M. Clark et J.R. Commons. D'après ces auteurs, le problème économique ne s'articule pas autour de l'allocation de ressources rares, de la production, de la répartition et de la consommation de biens, mais il s'inscrit dans le cadre de l'organisation du système économique, de la structure du pouvoir qui le contrôle, et du système de croyances et de valeurs qui le caractérise. Le progrès économique est fonction non seulement de la technologie, mais aussi des institutions, qui ne sont pas des données immuables, mais qui sont créées... et changées par les hommes. On peut les définir comme « des règles, des normes de comportement, des aspects de l'application des lois » (North, 1990). Ainsi le marché, qui pour les néoclassiques se confond avec l'économie et a pour tâche de répartir les ressources n'est pour les institutionnalistes qu'une institution en intéraction avec toutes les autres : « La position fondamentale des institutionnalistes est que ce n'est pas le marché, mais la structure organisationnelle de l'économie au sens large qui, en fait, répartit les ressources. » (W.J. Samuel, Institutional Economics, New Palgrave). Le néo-institutionnalisme se distingue de la première école institutionnaliste dans la mesure où il ne rejette pas les acquis de la Science Economique traditionnelle, mais cherche plutôt à les élargir : « Le problème de nombreux des premiers institutionnalistes est qu'ils voulaient une Science Economique avec les

35 Cf. THEBEAU Michel (2010). Cycles, crises et théories de la croissance économique, Notes de cours, FDSE, 3ème année, UEH.

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institutions sans les théories ; le problème de nombreux néo-classiques est qu'ils veulent une théorie économique sans institution ; ce que les néo-institutionnalistes essaient de faire, c'est de fournir une Science Economique qui ait à la fois de la théorie et des institutions » (Richard Langlois). Parmi les néo-institutionnalistes, citons Ronald Coase, Douglas North et Oliver Williamson.

La NIE (New Institutional Economics) a trouvé dans le TIERS-MONDE un vaste champ d'investigation. Depuis Gannagé, Institutions et développement, 1966), de nombreux auteurs comme Myrdal, Schultz, Briton ont insisté sur la nécessaire compréhension de l'environnement et des institutions pour la mise en place de politique de développement. Le concept même de développement économique considéré jusque-là comme la croissance accompagnée de changements structurels, a pu être ainsi défini par Nabli et Nugent comme « la croissance économique accompagnée d'un changement efficace des institutions ».

Le concept d'institutions se rapporte à la notion marxiste de superstructure idéologique de la société, sauf qu'ici la relation est inversée. Alors que, pour Marx, le mode de production auquel sont assujettis les hommes déterminent leur conscience et façonne la superstructure idéologique de la société, la Nouvelle Economie Institutionnelle (NEI) prône que les institutions ont des effets économiques. Il en découle logiquement un programme de recherche sur les institutions les plus efficientes en matière de développement économique.

Comprendre le rôle des institutions dans le développement économique nécessite de rapprocher cette notion de celle de « coût de transaction ». En effet, depuis Coase (1937), à côté des coûts de production, il faut prendre en considération les coûts de transaction sur le marché. Bien que ces coûts n'aient pas été retenus par la Science Economique traditionnelle, ils sont très importants dans les économies modernes. En effet, l'analyse néoclassique raisonne avec des coûts de transaction nuls et ignore les institutions qui peuvent être à l'origine de ces coûts. Ils ne constituent donc pas un obstacle à la croissance qui dépend seulement de la population (le travail), du capital et du progrès technique.

Or, selon les néo-institutionnalistes, les coûts de transaction existent bien et constituent la « clé de la performance économique » (North, 1990). Lorsque les coûts de transaction s'accroissent plus vite que ne baissent les coûts de production, le développement est entravé. En

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revanche, les bonnes institutions permettent de réduire les coûts de transaction qui freinent la dynamique des échanges, l'extension des marchés et en dernier ressort la croissance et le développement.

Les coûts de production et les coûts de transaction évoluent en sens inverse à mesure que la société se développe et devient plus complexe. Considérons, pour simplifier, un axe linéaire avec deux extrêmes : une société primitive et une société développée. Dans la première, les relations économiques sont essentiellement des relations personnelles fondées sur la réputation. Les coûts de transaction y sont par conséquent très faibles. Mais, en revanche, la faible spécialisation des personnes et le faible niveau de capital technique génèrent des coûts de production élevés. Dans une société développée, les relations économiques deviennent impersonnelles à mesure que les personnes se spécialisent. Dès lors, les coûts de transaction deviennent croissants (coûts de recherche antérieurs à la transaction, coûts de négociation sur les termes du contrat, coûts d'application des termes du contrat). Dans ce type de société, la division du travail permet la baisse des coûts de production, mais ces gains de productivité sont contrebalancés par des coûts de transaction plus élevés. Le développement économique s'accompagne donc, parallèlement à la baisse des coûts de production, d'un accroissement des coûts de transaction. Toute la problématique du développement réside donc dans la capacité des institutions à faire en sorte que les coûts de transaction, croissants en fonction du développement, ne gomment pas la baisse des coûts de production.

Douglas North (1994, 1997) nous apporte quelques idées préliminaires sur la question de structure institutionnelle. Il souligne que la structure incitative de la société- qui est fondamentale pour le processus de changement- dépend de la structure institutionnelle de cette même société. Les institutions36 représentent « les règles du jeu dans la société, ou (...) les contraintes humainement disposées pour former les intéractions humaines » Il ne s'agit pas seulement de règles formelles (constitutions, lois et règlement) mais aussi de contraintes informelles (normes de comportement, conventions, codes de conduite auto-imposés). C'est de l'ensemble de ces règles, normes et conditions de mise en pratique, que dépend la performance économique.

À cette phase du débat, nous pouvons dire que le potentiel effectif de croissance rapide de la productivité des pays ne se détermine pas uniquement par les différences de niveau de

36 Institution : lois fondamentales régissant la vie politique et socio-économique d'un pays.

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technologie, d'intensité capitalistique et d'efficacité de l'allocation des ressources qui les séparent des pays développés. Ces pays sont aussi limités par leurs caractéristiques institutionnelles qui restreignent leurs possibilités de financer, d'organiser et de faire fonctionner le genre d'entreprise dont ils auraient besoin pour exploiter les technologies situées aux confins de la science et de l'ingineering. Ce sont tous ces éléments qui, ensemble, déterminent le potentiel effectif de croissance de la productivité d'un pays (Abramovitz et David, 1996).

Après le capital physique, le capital humain et le capital éducationnel, certains économistes ajoutent aux déterminants de la croissance un « capital social ». La rentabilité économique du capital social devient tangible lorsque c'est l'intéraction sociale qui produit des effets externes et permet une action collective en faveur d'un bénéfice mutuel en dehors du marché. On peut considérer la confiance, la réciprocité, les réseaux interpersonnels, la coopération et la coordination comme un « capital social civil » qui conditionne les interactions entre les agents économiques et produisent des effets externes.

Par infrastructure sociale, on entend la manière dont se font les affaires, plutôt que le capital humain. Un système dans lequel les individus se comportent de façon malhonnêtes, ou dans lequel la bureaucratie fait de l'obstruction, ou dans lequel les droits de propriété ne sont pas clairement définis et respectés, peut conduire à une allocation très inefficaces des ressources en raison de coût qu'impliquent l'assurance contre la malhonnêteté, le fait de circonscrire la bureaucratie ou le renforcement des droits de propriété. Ces coûts, ainsi que les distorsions au niveau des incitations, peuvent constituer de sérieux obstacles à la croissance (Stern, 1991).

Collier (1998) définit le capital social comme la cohérence sociale et culturelle interne de la société, les normes et les valeurs qui gouvernent les interactions au sein de la population, et les institutions dans le cadre desquelles ces normes et valeurs entrent en jeu.

On peut, de même, définir le « capital social gouvernemental » comme recouvrant les avantages de la loi, de l'ordre, des droits de propriété, de l'éducation, de la santé et d'un bon gouvernement. Dans la mesure où le capital social réduit les coûts de transaction et les coûts de l'information rendant ainsi le capital physique et le capital humain plus productifs, on doit pouvoir le considérer comme un déterminant de la productivité totale des facteurs.

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Cette importance accordée au capital social- autrement dit à la culture, aux institutions et aux structures comportementales- devrait donner à l'explication du processus du changement un aspect pluridisciplinaire. Selon North (1990, 1997), les croyances culturelles constituent un déterminant fondamental de la structure institutionnelle.

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Ne pas

1.1 Le problème de la décision d'investissement par l'entreprise

Quels sont les facteurs à prendre en compte quand une grande entreprise multinationale envisage d'implanter une filiale dans un pays quelconque ? L'analyse coût-bénéfice, qui consiste à calculer les coûts totaux d'un projet et à les comparer aux bénéfices totaux, permet de répondre à cette question. Désignons, en effet, par F le coût fixe37 qu'implique l'ouverture de la filiale et par II la valeur de la somme actualisée des profits38. Une approche formelle du problème de l'investissement conduit à un schéma de décision très simple. Si la valeur nette de la filiale, II, est supérieure à son coût de mise en place, F, il faut opter pour l'ouverture. On a donc :

?

F

Investir

??

F

 

?

 

investir

Nous avons choisi d'illustrer ce problème par la décision d'ouvrir une filiale étrangère. Cependant, ce schéma peut s'appliquer à bien d'autres cas de figure : investissement domestique, transfert de technologie ou choix d'une formation. L'application au transfert technologique est implicitement présente dans notre exemple, car l'ouverture d'une filiale implique très probablement un transfert notable de technologie. Il est d'ailleurs bien connu que l'ouverture de filiales par les entreprises multinationales est une des formes du transfert technologique. Le schéma est aussi valable pour l'accumulation des connaissances. Dans ce cas, la décision porte sur le temps de formation. Prenons l'exemple d'une personne qui doit décider si elle consacre ou non une année de plus à se former. Si F représente le coût d'une année de formation, à la fois en termes de dépenses directes et de coût d'opportunité (salaires auxquels on renonce implicitement

37 Ce coût correspond, par exemple, à l'obtention des licences, domestiques et étrangères, ainsi qu'à la prise de contact avec les fournisseurs et les distributeurs du pays d'accueil.

38 L'activité rapporte un profit chaque année si la filiale est ouverte c'est-à-dire F est dépensé. Dans ce cadre simplifié, Ï représente la valeur de la filiale. Si la maison mère décidait de se séparer de sa filiale, combien un acquéreur potentiel accepterait -il de payer pour en devenir propriétaire ? La réponse est donnée par la valeur de la somme actualisée des profits, ou du moins par la valeur anticipée de cette somme. Voilà pourquoi la valeur de la filiale est égale à Ï.

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en choisissant ne pas travailler pendant un an), le bénéfice Ï correspond à l'augmentation de salaire qui résulte de la formation complémentaire.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire