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L'auteur-interprète à  l'ère du numérique: application et évolution


par Charles PAGE
Université Jean Moulin Lyon III - Master 2 Droit de la Propriété Intellectuelle 2014
  

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Paragraphe II : Un phénomène en pleine expansion

49. Avec l'annonce de l'arrivée en France en Septembre 2014 de la célèbre plateforme de streaming Netflix60, l'on peut s'attendre à une réelle explosion du recours à cette pratique par les utilisateurs. En effet, pour un abonnement mensuel estimé à 10 euros, l'abonné pourra bénéficier d'une bibliothèque proche de l'exhaustivité, mise à jour quotidiennement et bénéficiant même de certaines exclusivités. A ce sujet, Aurélie Filipetti, alors Ministre de la Culture, avait annoncé qu'elle n'était pas « fermée aux nouveaux acteurs du numérique, surtout lorsqu'ils proposent une offre légale de films et de séries, une de (ses) priorités pour lutter contre le piratage », tout en précisant que « Netflix doit se plier aux régulations qi font le succès de nos industries (...). C'est une condition sine qua non pour préserver notre « écosystème unique » (sic) ».

50. Néanmoins, nous avons déjà pu remarquer que, tout comme en matière de téléchargement illégal, le streaming peut faire l'objet d'abus et de contrefaçons. Il apparaît donc nécessaire et urgent d'en règlementer les contours de façon précise. L'on pense immédiatement au contrôle des utilisateurs mais un débat tout autre, semblant préoccuper certains artistes de façon plus sérieuse, fait rage : Si les producteurs et autres cessionnaires de droits semblent voir dans le streaming une nouvelle offre légale prometteuse, une partie des auteurs remettent en cause des abus déjà existants et qui n'iraient qu'en s'accroissant avec l'encadrement de cette pratique.

A] Des producteurs séduits par le procédé

51. La part du numérique ne cesse de progresser. C'est le résultat d'une étude menée par l'IFPI en 201361. Les revenus de la musique s'élèvent alors à 15 milliards d'euros, dont 39% de ventes numériques, soit 5.9 milliards de dollars, soit une augmentation de près de 50% en 5 ans. Sur la même période, le streaming couvrait 9% des revenus numériques en 2008 pour passer à 27% en 2013, parts de marché gagnées avant tout sur les revenus

58 « Téléchargement direct et streaming, des atteintes au droit d'auteur sur internet »

59 « Parlons Hadopi avec maître Eolas », Interview [en ligne] http://journaldupirate.com/parlons-hadopi-avec-maitre-eolas/ (consulté le 02/06/2014)

60 Marie Charlotte, 2014 « Netflix arrive en France en septembre » [en ligne] http://www.madmoizelle.com/netflix-france-227025 (consulté le 02/06/2014)

61 Voir annexe 1

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de sonneries pour téléphones mobiles (-21 points) et accessoirement sur le téléchargement (-3 points). Annonce symbolique : Universal, première major mondiale du disque, a annoncé que son chiffre d'affaire lié aux ventes numériques dépassait celui réalisé par les ventes physiques. En outre, pour la première fois en 2013, les plateformes Spotify et Deezer ont dépassé le milliard de dollars de chiffre d'affaires, avec 51% d'abonnés supplémentaires en 2013 à des services d'écoute musicale en ligne62. Par ailleurs, l'offre en la matière a explosé puisqu'on en compte désormais 450 différentes. En la matière, les pays scandinaves sont les plus à jour puisqu'en prenant l'exemple de la Suède, 2.5 millions d'utilisateurs (soit environ 25% de la population) sont abonnés au service Spotify, dont 81% par le biais d'un abonnement payant. Au contraire, la France semble en retard sur ce modèle puisqu'elle dispose du même nombre d'abonnés pour une population près de six fois plus importante... Ce qui annonce d'importantes marges de progression pour les industriels de la musique. Cette progression n'est d'ailleurs pas limitée aux pays européens puisqu'en Amérique latine, l'écoute via streaming a progressé la même année de 149% au Pérou et de 85% en Colombie et au Venezuela, sans évoquer la Chine, bien en retard avec 82.6 millions de dollars de recettes mais à l'appétit grandissant de ses 618 millions d'internautes potentiellement mélomanes...

52. Placido Domingo, président du syndicat des majors, confirme : « Nous voyons clairement des cieux dégagés devant nous », tout en ajoutant que « la technologie change, mais la musique reste ». Les industriels mettraient-t-ils donc en arrière-plans les problématiques inextricables liées au « piratage » pour se concentrer sur le nouveau phénomène en vogue qu'ils espèrent contrôler le plus rapidement possible et ne pas commettre une seconde fois l'erreur d'attentisme qui leur avait valu d'être dépassé par le téléchargement illégal ?

B] Vers de nouveaux abus de pratique ?

53. A côté de producteurs plus qu'enjoués à l'idée de prendre d'assaut une pratique en pleine expansion, certains auteurs n'hésitent pas à prendre le contre-pied et à se retirer des plateformes pourtant particulièrement appréciées des utilisateurs. L'exemple le plus frappant reste celui de Thom Yorke, leader du groupe emblématique Radiohead qui a décidé de retirer ses créations et projets personnels des plateformes Spotify et Deezer, et de son producteur artistique, Nigel Godrich, pour qui Spotify serait « mauvais pour la musique »63. Selon le leader emblématique, « Ne vous y trompez pas, les nouveaux artistes que vous découvrez sur Spotify ne seront pas payés. Pendant ce temps, les actionnaires vont rapidement s'en mettre plein les poches ». La critique apparaît purement économique, loin des considérations juridiques du droit d'auteur. Mais pourtant, si le droit d'auteur confère un monopole d'exploitation à son titulaire, c'est

62Alain Beuve-Méry, 2014 « Les majors de la musique veulent croire au streaming » [en ligne] http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/03/18/les-majors-de-la-musique-veulent-croire-au-streaming 4384939 3234.html (consulté le 02/06/2014)

63 Philippe Vion-Dury « Pourquoi le chanteur de Radiohead s'en prend à Spotify », le Nouvel Observateur, 17/07/2013

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principalement -exception faite des considérations liées au droit moral- en vue d'une exploitation économique. Dès lors, quel intérêt d'un droit sans réalité économique ? L'écoute d'un titre rapporterait entre 0.003 et 0.005 centimes d'euro à son auteur, et il faudrait donc environ 200.000 lectures uniques pour que celui-ci puisse tirer un SMIC - avant imposition...- de son oeuvre. En réponse, Spotify a rappelé qu'elle versait annuellement 500 millions de dollars aux artistes, sans préciser le détail des retours, sans doute dans une mécanique de partage inégale ne favorisant qu'une frange extrêmement restreinte des auteurs et artistes présents.

54. La situation semble délicate : Des artistes ayant le sentiment d'être sous-rémunérés, des plateformes au sentiment de légitimité, et des utilisateurs qui risqueraient de voir le prix de leur abonnement augmenter si la rémunération était plus élevée. Mais un abonnement plus élevé est-il moins attractif ? Et la corrélation avec une augmentation des pratiques illégales est-elle évidente ? Ces nouvelles formes d'utilisation des oeuvres présentent des questionnements pointus et les intérêts des différents acteurs semblent divergents. Face à une situation sensible, le législateur a mis en place différentes solutions qui, reposant sur des principes légitimes, ne parviennent pas à satisfaire les attentes de chacun.

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