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Le consensus en droit électoral camerounais


par Rodrigue Stéphane Agathon Ondoa
Université de Douala - Master 2 2017
  

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B- Le « déclin » de la séance plénière

Le rôle du Parlement au sein des démocraties représentatives est essentiel, car il constitue un haut lieu de rencontre des différentes sensibilités de la société politique. Sphère par excellence de création du droit électoral, et donc de recherche du consensus, l'institution parlementaire captive désormais toute l'attention. Raison pour laquelle le constituant camerounais de 1996 a par exemple entrepris d'effectuer un réaménagement conséquent de l'institution parlementaire en lui dotant d'une seconde chambre pour densifier les débats autour des textes. Toutefois, même s'il est indéniable que l'institutionnalisation du double examen des textes et accessoirement de la navette parlementaire constitue les points focaux du réaménagement de la procédure législative 246 , l'évolution supposée du « système

242 Employé par BRIQUET (Jean-Louis), op.cit., p.2.

243 BRIQUET (Jean-Louis), op.cit., p.2.

244 Cité par PERROT (Annick), « La doctrine et l'hypothèse du déclin du droit », p.183.

245 SADRY (Benoit), Thèse, op.cit., p.123.

246 KAMO TIEKWE (Idrys Sorel), Mémoire Master 2, op.cit., pp.23-24.

Le consensus en droit électoral camerounais

parlementaire »247 n'a guère apporté une plus-value à la séance plénière, instance du débat parlementaire. C'est pourquoi l'annonce de son déclin 248 n'a pas manqué de susciter des inquiétudes et des interrogations sur l'avenir et la qualité de la production des règles du jeu politique. La particularité de cette dégénérescence est qu'elle affecte inexorablement l'ensemble du travail parlementaire, entrainant la séance plénière à une ruine certaine. De ce point de vue, nous serons naturellement tentés de nous poser les questions de savoir : Qu'elles sont les raisons d'une telle débandade ? Qu'elles sont les implications sur le processus législatif ?

Si les travaux de BENOIT SADRY permettent de mettre en relief le déclin programmé249 du Parlement, ils ont surtout permis de révéler au grand jour la face cachée du débat parlementaire. Mais avant d'examiner cette question, nous proposons de marquer un temps d'arrêt sur les deux interrogations annoncées plus haut.

Relativement aux raisons susceptibles d'expliquer le déclin de la séance plénière, il se dégage des lectures possibles. Les premières, fondées sur un mobile externe repose sur « le phénomène majoritaire »250 et la discipline du parti. Comme l'observe JAN PASCAL251, le phénomène majoritaire qui réalise l'emprise de l'exécutif sur le législatif cantonne le dernier dans un rôle d'exécutant des volontés gouvernementales. Au Cameroun, le législatif a même été réduit

247 Reprenant les termes de KAMO TIEKWE (Idrys Sorel), Mémoire, op.cit., p.20.

248 Lire à ce sujet SADRY (Benoit), Thèse, op.cit., pp.59-70. Egalement XAVIER VANDENDRIESSCHE, « Le Parlement entre déclin et modernité », Pouvoirs, n°99, 2001.

249 Dans ce contexte, on parle de « déclin programmé » en considérant les implications juridiques de certaines règles constitutionnelles qui impactent négativement sur l'institution. BENOIT SADRY en donne quelques-unes : L'énumération limitative des compétences réservées au pouvoir législatif par rapport à l'exécutif (article 34 de la constitution française et article 26 de celle camerounaise), la définition de la politique de la nation laissée à l'initiative du Président de la République (article 20 de la constitution française et article 5(2) de la constitution camerounaise), la portée limitée des propositions loi et amendements (articles 40 et 41 de la constitution française ; article 18(3.a) de la constitution camerounaise), la maîtrise de l'ordre du jour des assemblées par l'exécutif (article 48 de la constitution française), le fait majoritaire et la délégation du pouvoir législatif (articles 38, 47(1) et 74(1) de la constitution française; articles 28 et 36de la constitution camerounaise) qui viennent clore cette déchéance annoncée.

250 Le fait majoritaire constitue une pratique politique qui influence le cours normal de la vie des institutions. Selon ATAGANA ETIENNE, le phénomène majoritaire est la situation dans laquelle la majorité présidentielle coïncide avec la majorité parlementaire. D'un autre côté, ce phénomène peut être la résultante d'une coalition de partis politiques se regroupant pour soutenir le Président. Dans tous les cas cette situation a la particularité de conférer au Président de la République un contrôle absolu sur l'institution parlementaire. ATANGANA (Etienne Joël Louis), Thèse, op.cit., pp.199-200.

Aujourd'hui, il existe de plus en plus des cas où la majorité parlementaire retire sa confiance à un Président devenu encombrant bien qu'étant de la même famille politique. Les exemples récents de la destitution de la Présidente brésilienne par une initiative de ses camarades politiques en 2016, de la présidente Sud-coréenne la même année, et de celle qui pèse désormais sur le Président Sud-africain.

251 Cité par SADRY (Benoit), Thèse, op.cit., pp.61-62.

Le consensus en droit électoral camerounais

selon ATANGANA ÉTIENNE252 « à un instrument servant à convertir les opinions politiques du gouvernement en loi (...)». Les parlementaires qui se retrouvent donc absorbés par les spirales du fait majoritaire sont en réalité prisonnier des logiques des partis qui conditionnent et orientent leurs comportements au sein des Assemblées, c'est la discipline du parti. De cette manière, les débats qui émergent ne sont qu'une « mascarade politique », une simple formalité. Tout simplement que la discipline du parti qui s'impose au parlementaire indique la démarche que celui-ci doit avoir lors des débats.

Il est à annoter cependant que l'explication sommaire du déclin de la séance plénière à partir des éléments externes n'est que la face visible d'un plus grand vice. En observant les interactions entre les parlementaires et les partis politiques, le constat qui se dégage est que la plupart des membres du Parlement sont rendus complice du déclin de ce prestigieux temps fort du travail parlementaire. C'est ce que BENOIT SADRY a eu à mettre en évidence lorsqu'il dénonça avec vigueur la pratique de la partitocratie. Dans ce contexte, les parlementaires qui sont censés défendre les valeurs et les intérêts nationaux, se livre à corps perdu à « un banditisme » législatif pour assurer la sauvegarde de leurs intérêts propres, mais surtout ceux des partis responsable de leur investiture.

Que les causes du déclin de la séance plénière soient d'origine externe ou interne, cela dénature le débat parlementaire dans son essence profonde, affectant au passage la production législative.

Certes « l'Assemblée délibérante-l `enceinte parlementaire-demeure le cadre institutionnel privilégié pour le développement de ce débat contradictoire entre les arguments des groupes/partis majoritaires et des groupes/partis minoritaires »253, mais dans ces conditions on est amené à se demander si elle n'est pas devenue une simple antenne du pouvoir exécutif comme CHRISTINE DESSOUCHES le faisait remarquer à juste titre254 ? Ou alors n'est-elle pas simplement placée dans une situation d'allégeance vis-à-vis de l'exécutif255?

Dans tous les cas, il y a lieu de constater que le Parlement, en renonçant peu à peu à son

252 ATANGANA (Etienne Joël Louis), Thèse, op.cit., p.290.

253 NABLI (Beligh), « L'opposition parlementaire (...) », op.cit., p.128.

254 Cité par KARIM (Dosso), « Les pratiques constitutionnelles dans les Etats d'Afrique noire francophone (...) », op.cit., p.10.

255 CHARLES B. OUOBA, op.cit., p.59.

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pouvoir d'initiative a favorisé le repositionnement stratégique de l'exécutif 256 dans le jeu institutionnel. Cette hégémonie confirmée de l'exécutif dans le constitutionnalisme noire africain a consacré, à bien d'égard, « l'exercice d'un présidentialisme accru »257. On comprend désormais tout l'enjeu de la « dé-présidentialisation » préconisée par le Professeur MAGLOIRE ONDOA258. Aussi déroutant que cela puisse paraître, les lois de la République ont fait du Président le personnage autour duquel tout se fait et se défait. C'est que le « phénomène majoritaire » induit un soutien presque inconditionnel de la majorité parlementaire au Président de la République, faisant de ce dernier non seulement le chef de l'exécutif, mais aussi du législatif259. Il n'est donc pas étonnant de constater le jeu trouble des institutions publiques puisque celles-ci sont directement ou indirectement placées sous son autorité, la séparation des pouvoirs n'étant que formelle 260 . Du coup, les instances de création du droit électoral, embrigadées à tous les stades du processus ne feront que traduire la seule volonté du Président de la République dans le texte qui malheureusement s'imposera à l'ensemble de la société politique.

PARAGRPAHE 2 : LA PARTICIPATION MITIGÉE DE L'ADMINISTRATION DANS LA RÉGULATION ÉLECTORALE

Dans une analyse de circonstance, SERGE PAULIN AKONO EVANG, souligne opportunément que le rôle de l'administration dans le processus électoral entre dans un contexte plus grand qu'il ne paraît, notamment celui de la « dynamique administrative en Afrique noire francophone »261.

Sans toutefois se lancer dans cette grande problématique, nous avons circonscris notre étude à la participation de l'administration dans le processus de formation du droit électoral. Dans la mesure où celle-ci est jugée mitigée, l'administration s'est-elle rendue responsable de tous les maux à cause des relations incestueuse qu'elle entretient avec le pouvoir262. Cet aperçu pour peu

256 SADRY (Benoit), Thèse, op.cit., p.67.

257 AKA LAMARCHE (Aline), op.cit., p.29.

258 ONDOA (Magloire), « La dé-présidentialisation du régime politique Camerounais », in Solon, Revue Africaine de parlementarisme et de démocratie, vol. II, n°1, 2003, PP.1-40.

259 ATANGANA (Etienne Joël Louis), Thèse, op.cit., p.200.

260 ATANGANA (Etienne Joël Louis), Thèse, op.cit., p.200.

261 AKONO EVANG (Serge Paulin), « L'administration et le processus électoral au Cameroun : le désir étatique constant de l'administration », volume III, n°7, août 2013, R.A.P.D, p.71.

262 C'est du moins la lecture opérer par Serge Paulin AKONO EVANG, op.cit., p.73.

Le consensus en droit électoral camerounais

qu'il soit accablant pour une administration en quête de marques ne peut manquer de susciter des interrogations, tant celle-ci trône sous le dogme de la neutralité263, qu'au surplus on pourrait soupçonner que la production du droit électoral ne relève pas originellement de sa mission. Mais de toute évidence l'administration d'une manière ou d'une autre intervient dans le processus électoral et peut être appelé à prendre des actes susceptibles d'avoir une répercussion sur la législation électorale en vigueur. Mais que fait-elle concrètement dans le processus électoral ?

Outre la collaboration et l'appui qu'elle apporte à « Election's Cameroon » 264 , l'Administration265, « bras séculier de l'État », est investie d'un pouvoir réglementaire qui, selon VEDEL et DEVOLVÉ dans leur précis de Droit Administratif lui donne la latitude « de faire des règlements, c'est-à-dire de prendre des décisions exécutoires de caractères générales et impersonnels » pour mener à bien certaines missions liées au bon déroulement d'une élection transparente et démocratique.266 Par le biais de certaines autorités étatiques267, l'Administration intervient à plusieurs sites de la régulation électorale. En plus, elle assure les mesures de polices en cas de menace à l'ordre public268, les actes relatifs aux modalités de financement publics des partis politiques269, des financements des campagnes électorales et référendaires270. Faut-il encore déterminer que les actes administratifs et notamment unilatéraux constituent une source importante du droit, et donc susceptibles de créer des droits et des obligations à l'endroit des particuliers271, ou plus exactement des acteurs politiques voire des citoyens électeurs. Quid de sa participation mitigée ?

Pour mieux comprendre ce rapport mitigé, il importe de recentrer l'assise juridique de la participation de l'administration à l'édification du support normatif des élections (A). Cette

263 Selon SABI (Kassere Afo), « La neutralité s'analyse de l'interdiction faite à tout agent public d'user de sa qualité ou de son autorité en faveur ou aux détriments d'un candidat ou d'un parti », Thèse, op.cit., p.83.

264 En vertu des articles 3 et 4(1) du code électoral de 2012, « Election's Cameroon » est un organe indépendant chargé de l'organisation, de la gestion et de la supervision de l'ensemble du processus électoral et référendaire.

265 Article 43(1) du code électoral.

266 Cité par AKONO EVANG (Serge Paulin), op.cit., p.79.

267 Suivant les articles 12(1) ,24(1) ,44(2) du code électoral de 2012, le Président de la République intervient dans la nomination et la révocation des membres d'ELECAM ; le Ministre des finances désigne un comptable public (article 36) et nome un commissaire aux comptes (article 37) ; le Ministre de l'administration territoriale, le Gouverneur, le Préfet, le Sous-préfet et le Maire désignent respectivement aux termes des articles 31, 32, 33, 34, 35, leurs représentants au sein des différentes commissions électorales.

268 Articles 94 et 95 du code électoral.

269 Articles 279 à 283 du code électoral.

270 Articles 284 à 287 du code électoral.

271 Cour Fédérale de Justice, arrêt Ngongang Njanke Martin, 20 mars 1968. Lire également Georges Vedel, Pierre Delvolvé, Droit Administratif, Tome1, 12è édition, Paris, Presses Universitaires de France, 1992.

Le consensus en droit électoral camerounais

analyse préalable a le mérite de mettre en lumière le lien quasi naturel qui existe entre l'Administration et le politique (B).

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery