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Comment les commissions vérité et réconciliation s'efforcent-elles de remplir leurs objectifs?

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par Sophie-Victoire Trouiller
Institut Catholique de Paris - Master 1 Géopolitique et relations internationales 2013
  

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2 : Les recommandations

Les commissions tentent souvent d'expliquer les échecs des institutions de manière à éviter que les violences qu'elles ont permises ne se reproduisent. C'est une des caractéristiques des commissions, la responsabilité institutionnelle des Etats ne pouvant être engagée devant des tribunaux. Les CVR incitent donc le nouveau pouvoir à changer radicalement les institutions mises en place par l'ancien régime. En règle générale, les commissions recommandent d'abord des institutions et des procédures permettant aux citoyens de voter pour choisir leurs dirigeants. Puis elles leur conseillent d'établir des textes de lois permettant de protéger les citoyens et de sanctionner légitimement les auteurs d'infractions. Enfin, les commissions recommandent également une réforme de la justice.

Ces recommandations sont très vagues et il est rare qu'elles soient suivies d'effet. Michal Ben-Josef Hirsch considère que des réformes positives ont été faites au Chili et au Salvador, mais elle précise que les nouveaux dirigeants se faisaient chacun des idées différentes du rôle de la Justice et de l'Armée, ce qui ne facilitait pas l'application des recommandations de la Commission.

Parfois, les conseils des CVR sont d'autant plus difficiles à exécuter que les conflits semblent inhérents aux pays qu'elles tentent de rebâtir. Ainsi, au Guatemala, pour la Commission, le conflit résidait dans les fondements de l'Etat guatémaltèque. Dès ses débuts, ce dernier était jugé « autoritaire, exclusif et raciste (...) dans le seul but de protéger les intérêts de certains secteurs privilégiés minoritaires »90(*). La Commission dénonçait en outre la volonté de maintenir le contrôle social par la terreur, grâce à des persécutions exercées essentiellement sur la population maya, mais également sur les classes pauvres ou les gens exclus de la société.

Cependant, certaines recommandations sont assez concrètes pour être suivies. Ainsi, la plupart des commissions d'Amérique latine ont conseillé aux Etats de ratifier des traités internationaux des Droits de l'Homme et d'étudier ces droits à l'école et à l'université. De fait, à la fin des années 1980, ce conseil est devenu réalité, les pactes internationaux sur les droits civils et politiques et sur les droits économiques et sociaux étant ratifiés par la plupart des pays hispanophones91(*). Les commissions ont également obtenu la promulgation de lois dispensant les fils et frères des disparus du service militaire obligatoire. D'autres lois ont donné aux disparus d'acquérir le statut juridique d' « absents par disparition forcée ».

Au Salvador, la Commission a exigé « le retrait des officiers en service actif, qui ont commis ou couvert de graves violences » et la promulgation de lois interdisant à toutes les personnes impliquées dans de graves faits de violence d'exercer « toute charge ou fonction publique » pour une durée d'au moins dix ans. Bien que concrètes, ces recommandations n'ont été que partiellement appliquées.

De même, en Colombie, la Commission nationale de Réparation et de Réconciliation recommandait notamment le retour des réfugiés, le déminage du territoire colombien (le plus miné au monde) et la démobilisation des paramilitaires, cette dernière recommandation faisant partie des conditions pour obtenir une remise de peine. Mais malgré une campagne massive dans les médias, la Commission a beaucoup de mal à convaincre les réfugiés de revenir dans leur pays, ceux-ci étant peu désireux d'être confrontés à nouveau aux paramilitaires et aux mines qui jonchent le territoire.

Enfin, au Rwanda, la Commission pour l'Unité nationale et la Réconciliation (encore en place aujourd'hui) ayant recommandé la lutte contre les idéologies séparatistes, le président Paul Kagamé indique lors d'un discours en 2001 que les deux armées  « anciens antagonistes »n'en forment plus qu'une : l'armée patriotique rwandaise et que « beaucoup de Rwandais viennent de comprendre qu'il n'y a aucun avantage à attiser des conflits perpétuels ».

La plupart des commissions font figurer dans leurs rapports un chapitre sur les réparations matérielles. L'indemnisation des victimes pour les dégâts matériels (vols, destruction des maisons, pillage des récoltes...) étant très difficile à calculer, les commissions recommandent souvent aux Etats en guise de réparation d'ériger des monuments historiques, comme le circuit baptisé « la route de la paix » (« Ruta de la Paz ») au Salvador. Des monuments comme celui-ci donnent aux victimes comme aux agresseurs l'occasion de débattre, soit entre eux, soit avec des étrangers. C'est donc une occasion d'inviter le storytelling dans la réconciliation nationale.

Laura Olson distingue deux types de réconciliation : la réconciliation nationale et la réconciliation individuelle. Selon elle, des deux objectifs, le plus réaliste est la réconciliation nationale, qui aboutit à long terme à des changements au sein des institutions. Il n'empêche que les membres des commissions accordent souvent beaucoup d'attention aux victimes, sans que logiquement cette attention se reporte ensuite au niveau national, ce qui ne peut pas calmer les tensions. De plus, certaines recommandations ne sont pas comprises par la population.

La réconciliation individuelle est bien plus complexe, une victime pouvant comprendre les sentiments de son bourreau grâce au storytelling, sans lui pardonner.

* 90 FIDH, « le rapport « mémoire du silence » », 1999.

* 91 Monica Pinto, « Le bicentenaire des constitutions en Amérique latine », SPIDH, 2010.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984